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28/03/2019 | FRANCE | N°17NT01957

France | France, Cour administrative d'appel de Nantes, 1ère chambre, 28 mars 2019, 17NT01957


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2010.

Par un jugement n° 1509079 du 28 avril 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 juin 2017, M. C...B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugemen

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2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de maintenir le sursis de paiement ;

4°) de mettre à la cha...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Nantes de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2010.

Par un jugement n° 1509079 du 28 avril 2017, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 28 juin 2017, M. C...B..., représenté par MeA..., demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de maintenir le sursis de paiement ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il doit être regardé comme un résident fiscal italien en application des critères fixés par le paragraphe 2 de l'article 4 de la convention fiscale conclue entre la France et l'Italie le 5 octobre 1989 ainsi que de ceux visés aux articles 4 A et 4 B du code général des impôts ;

- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors que l'administration fiscale n'a pas donné suite à sa demande de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires alors que cette possibilité lui était ouverte par la réponse aux observations du contribuable du 20 décembre 2013 ; aucune disposition du code général des impôts ou du livre des procédures fiscales ne prévoit que les différends portant sur l'article 1649 quater 0 B ter du code général des impôts ne relèvent pas de la compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ;

- il devait bénéficier, pour le calcul de son impôt, d'un quotient familial égal à une part et demi dès lors qu'il a deux enfants majeurs ;

- l'administration fiscale n'a pas démontré qu'il avait en sa possession trois lingots d'or et une montre de luxe pour une valeur d'ensemble de 82 500 euros ; il ne peut être tenu compte des éléments relevés dans le cadre de l'instruction pénale qui a été annulée par la chambre de l'instruction.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 décembre 2017, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention entre le Gouvernement de la République Française et le Gouvernement de la République Italienne signée à Venise le 5 octobre 1989 ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Malingue,

- les conclusions de M. Jouno, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de l'examen de la situation fiscale personnelle de M.B..., l'administration fiscale l'a, par proposition de rectification du 20 décembre 2013, assujetti à des cotisations d'impôt sur le revenu et de prélèvements sociaux au titre de l'année 2010 à raison de revenus évalués forfaitairement à une somme de 359 620 euros par valorisation d'éléments du train de vie en application des dispositions de l'article 1649 quater-0 B ter du code général des impôts. Après procédure contradictoire, les impositions supplémentaires résultant de ce contrôle ont été mises en recouvrement le 31 octobre 2014 pour un montant total de 165 374 euros. Après l'admission partielle, par décision du 21 septembre 2015, de sa réclamation préalable, M. B...a sollicité auprès du tribunal administratif de Nantes la décharge des impositions restant à sa charge, soit 69 872 euros au titre de l'impôt sur le revenu et 17 661 euros au titre des prélèvements sociaux. Il relève appel du jugement du 28 avril 2017 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande.

Sur le principe d'imposition en France :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

2. L'article 4 A du code général des impôts prévoit que : " Les personnes qui ont leur domicile fiscal en France sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus. Celles dont le domicile fiscal est situé hors de France sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source française ". L'article 4 B du même code dispose que : " 1. Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en France au sens de l'article 4 A : a. Les personnes qui ont en France leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; (...) ".

3. Il n'est pas contesté que, s'agissant de l'année 2010, hors la période du 31 mars au 23 juillet au cours de laquelle il a été incarcéré en France, M. B...vivait en France avec sa concubine, mère de leurs deux enfants majeurs, dans une maison d'habitation située au Mans dont il est propriétaire. Dans ces conditions, l'intéressé doit être regardé comme ayant eu son foyer et, par suite, son domicile fiscal en France en application du a du 1 de l'article 4 B du code général des impôts.

En ce qui concerne l'application de la convention fiscale franco-italienne :

4. L'article 4 de la convention signée le 5 octobre 1989 entre la France et l'Italie en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune stipule que : " 1. Au sens de la présente convention, l'expression " résident d'un Etat " désigne toute personne qui, en vertu de la législation de cet Etat, est assujettie à l'impôt dans cet Etat, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. Toutefois, cette expression ne comprend pas les personnes qui ne sont assujetties à l'impôt dans cet Etat que pour les revenus y ayant leur source ou pour la fortune qui y est située. 2. Lorsque, selon les dispositions du paragraphe 1, une personne physique est un résident des deux Etats, sa situation est réglée de la manière suivante : / a. Cette personne est considérée comme un résident de l'Etat où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent ; si elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans les deux Etats, elle est considérée comme un résident de l'Etat avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits (centre des intérêts vitaux) ; / b. Si l'Etat où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminé, ou si elle ne dispose d'un foyer d'habitation permanent dans aucun des Etats, elle est considérée comme un résident de l'Etat où elle séjourne de façon habituelle ; / c. Si cette personne séjourne de façon habituelle dans les deux Etats ou si elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d'eux, elle est considérée comme un résident de l'Etat dont elle possède la nationalité ; /d. Si cette personne possède la nationalité des deux Etats ou si elle ne possède la nationalité d'aucun d'eux, les autorités compétentes des Etats tranchent la question d'un commun accord. (...) ".

5. Si M. B...se prévaut de la qualité de résident fiscal italien, il se borne à produire divers documents administratifs, dont une carte fiscale italienne délivrée en 2016 et une carte d'identité italienne délivrée en 1997, dont aucun ne permet de justifier qu'il ait été assujetti à l'impôt en Italie au titre de l'année 2010 ni qu'il y disposait à cette date d'un domicile ou d'une résidence. Les stipulations de l'article 4 de la convention fiscale franco-italienne ne font donc pas obstacle, en l'espèce, à l'application de la loi fiscale.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

6. L'article L. 59 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable prévoit que : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis soit de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts (...) ". L'article L. 59 A du même livre dans sa rédaction applicable dispose que : " I. - La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient lorsque le désaccord porte : / 1° Sur le montant du résultat industriel et commercial, non commercial, agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition ; / 2° Sur les conditions d'application des régimes d'exonération ou d'allégements fiscaux en faveur des entreprises nouvelles, à l'exception de la qualification des dépenses de recherche mentionnées au II de l'article 244 quater B du code général des impôts ; / 3° Sur l'application du 1° du 1 de l'article 39 et du d de l'article 111 du même code relatifs aux rémunérations non déductibles pour la détermination du résultat des entreprises industrielles ou commerciales, ou du 5 de l'article 39 du même code relatif aux dépenses que ces mêmes entreprises doivent mentionner sur le relevé prévu à l'article 54 quater du même code ; / 4° Sur la valeur vénale des immeubles, des fonds de commerce, des parts d'intérêts, des actions ou des parts de sociétés immobilières servant de base à la taxe sur la valeur ajoutée, en application du 6° et du 1 du 7° de l'article 257 du même code. / II. - Dans les domaines mentionnés au I, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires peut, sans trancher une question de droit, se prononcer sur les faits susceptibles d'être pris en compte pour l'examen de cette question de droit. / Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, la commission peut se prononcer sur le caractère anormal d'un acte de gestion, sur le principe et le montant des amortissements et des provisions ainsi que sur le caractère de charges déductibles des travaux immobiliers. ".

7. Les différends opposant M. B...à l'administration fiscale portaient sur le principe de son imposition en France ainsi que les modalités d'évaluation de sa base d'imposition à l'impôt sur le revenu au regard de l'évaluation forfaitaire déterminée en fonction d'éléments de son train de vie et de son quotient familial. De tels différends n'entrent pas dans la compétence de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires. Par suite, l'administration fiscale a pu, sans entacher d'irrégularité la procédure d'imposition, s'abstenir de faire droit à la demande de saisine de cette commission formulée pour M.B..., alors même que ce dernier avait été informé, par erreur, au cours de la procédure, de ce qu'il aurait la possibilité de demander cette saisine.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne le quotient familial :

8. En vertu de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, le contribuable, dont l'imposition a été établie d'après les bases indiquées dans la déclaration qu'il a souscrite, peut en obtenir la décharge ou la réduction en démontrant son caractère exagéré.

9. M. B...a souscrit une déclaration de revenus au titre de l'année 2010 en tant que célibataire. Alors que la proposition de rectification du 20 décembre 2013 n'emportait aucune rectification quant au quotient familial, il soutient désormais qu'il devait bénéficier d'un quotient familial égal à une part et demi dès lors qu'il a deux enfants majeurs. Toutefois, en se bornant à produire son livret de famille, qui confirme uniquement l'état de majorité de ses deux enfants, il ne justifie pas, alors que la charge de la preuve lui incombe, d'une situation familiale impliquant une majoration de son quotient familial.

En ce qui concerne la prise en compte, dans le cadre de l'évaluation forfaitaire du revenu global, de trois lingots d'or et d'une montre de luxe :

10. L'article 1649 quater-0 B ter du code général des impôts dans sa rédaction applicable prévoit que : " 1. Lorsque l'administration fiscale est informée, dans le cadre de la lutte contre les activités lucratives non déclarées portant atteinte à l'ordre public et à la sécurité publique et dans les conditions prévues aux articles L. 82 C, L. 101 ou L. 135 L du livre des procédures fiscales, qu'un contribuable dispose d'éléments mentionnés ci-après, elle peut, en cas de disproportion marquée entre son train de vie et ses revenus, porter la base d'imposition à l'impôt sur le revenu à une somme forfaitaire déterminée en appliquant à ce ou ces éléments de train de vie le barème ci-après, compte tenu, le cas échéant, de la majoration prévue au 2. (...) ".

11. L'administration fiscale a été informée par communication d'un procès-verbal de communication du 17 mai 2011 de l'officier de police judiciaire de la brigade de recherche du Mans que M. B...disposait d'éléments de train de vie mentionnés à l'article 1649 quater 0 B du code général des impôts. Pour procéder à l'évaluation forfaitaire du revenu de M. B...au titre de l'année 2010, l'administration fiscale a pris en compte les éléments figurant dans la cote D3022 de la procédure pénale qui mentionnait qu'au cours de l'interrogatoire du 4 mai 2010 effectué par le vice président chargé de l'instruction du tribunal de grande instance du Mans, M.B... indiquait, notamment, avoir reçu, à titre de commission pour sa participation à l'opération " De Vita ", trois lingots d'or le 24 février 2010 et être propriétaire des bijoux saisis et de deux montres. Ce faisant, l'administration apporte la preuve de l'existence matérielle de ces éléments de train de vie. Si M. B...soutient qu'il ne peut être tenu compte de ces éléments relevés dans le cadre de l'instruction pénale dès lors que celle-ci a été annulée par la chambre de l'instruction, ses affirmations ne sont étayées par aucun élément justifiant de l'annulation de la procédure.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nantes a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, sa requête, y compris ses conclusions relatives aux frais liés au litige, doit être rejetée.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B...et au ministre de l'action et des comptes publics.

Délibéré après l'audience du 7 mars 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Geffray, président,

- Mme Malingue, premier conseiller,

- Mme Chollet, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 mars 2019.

Le rapporteur,

F. MalingueLe président,

J.E. Geffray

Le greffier,

C. Croiger

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°17NT01957

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Nantes
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17NT01957
Date de la décision : 28/03/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. GEFFRAY
Rapporteur ?: Mme Fanny MALINGUE
Rapporteur public ?: M. JOUNO
Avocat(s) : CABINET LANDON

Origine de la décision
Date de l'import : 03/04/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.nantes;arret;2019-03-28;17nt01957 ?
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