Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société à responsabilité limitée (SARL) d'architecture Alluin et Mauduit, représentée par la SELARL Martin et associés, a demandé au tribunal administratif d'Amiens de condamner l'hôpital local de Saint-Valéry-sur-Somme à lui verser une somme de 544 716,12 euros toutes taxes comprises (TTC), majorée des intérêts moratoires à compter du 10 février 2011, au titre du règlement du solde de son marché, après résiliation de celui-ci.
Par un jugement n° 1101294 du 11 mars 2014, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté les demandes de la société d'architecture Alluin et Mauduit.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 4 avril 2014, la société à responsabilité limitée (SARL) d'architecture Alluin et Mauduit, représentée par la SELARL Martin et associés, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner l'hôpital de Saint-Valéry-sur-Somme à lui verser une somme de 544 716,12 euros toutes taxes comprises (TTC), majorée des intérêts ;
3°) de mettre à la charge de l'hôpital de Saint-Valéry-sur-Somme la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la résiliation est exclusivement fondée sur le dépassement des délais ;
- l'inachèvement des travaux dans les délais prévus est exclusivement imputable à la carence de la société Oger International, chargée d'une mission d'OPC par un marché distinct ;
- l'hôpital s'est fondé sur des dépassements de délai qui ne lui étaient pas imputables, pour résilier le marché à ses frais et risques ;
- la poursuite de l'exécution du marché impliquait la conclusion d'un avenant avec réajustement d'honoraires dès lors que les travaux ne seraient pas achevés dans les délais prévus ;
- elle n'a pas abandonné le chantier en décembre 2010 ;
- le tribunal s'est fondé sur d'autres motifs que ceux figurant dans la lettre de résiliation pour justifier cette mesure ;
- les conclusions de l'expert sont erronées ;
- ses préjudices financiers sont justifiés.
Par un mémoire, enregistré le 29 octobre 2014, la société Oger International, représentée par Me K...B..., conclut à sa mise hors de cause.
Elle soutient que :
- la requête d'appel est tardive ;
- elle ne comporte pas de conclusions dirigées à son encontre.
Par des mémoires, enregistrés les 5 janvier 2015, 11 mars 2015 et 20 avril 2015, le centre hospitalier intercommunal de la Baie de Somme, venant aux droits de l'hôpital local de Saint-Valéry-sur-Somme, représenté par Me M...F..., conclut :
1°) au rejet de la requête ;
2°) à titre subsidiaire, et au titre de l'appel provoqué, à la condamnation in solidum de la société Crédit agricole immobilier entreprise (AEPRIM) et de la société Oger International en vue de le garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre ;
3°) à ce que soit mis à la charge in solidum de la SARL d'architecture Alluin et Mauduit, de la société Crédit agricole immobilier entreprise (AEPRIM) et de la société Oger International, le versement de la somme de 8 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- les moyens de la requérante ne sont pas fondés ;
- la demande d'indemnisation de la société appelante est irrecevable, le décompte du marché de substitution n'ayant pas été établi à ce jour ;
- la défaillance alléguée de la société Oger International engage sa responsabilité ;
- l'AEPRIM, aux droits de laquelle est venue la société Crédit agricole immobilier entreprise, a engagé sa responsabilité en n'alertant pas l'hôpital en sa qualité d'assistant du maître d'ouvrage, sur la couverture d'assurance insuffisante de la société Alluin et Mauduit.
Par des mémoires, enregistrés les 23 janvier 2015 et 8 avril 2015, la société Oger International demande à la cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) de rejeter les conclusions d'appel en garantie du centre hospitalier intercommunal de la Baie de Somme ;
3°) de rejeter les conclusions d'appel en garantie de la société Crédit agricole immobilier entreprise ;
4°) de mettre à la charge de la partie perdante la somme de 4 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête d'appel est tardive ;
- l'appel en garantie formé devant les premiers juges le 2 mars 2002, qui n'avait pas fait l'objet d'un mémoire distinct en méconnaissance de l'article R. 632-1 du code de justice administrative, était irrecevable ;
- l'appel en garantie formulé en cause d'appel constitue une demande nouvelle ;
- la résiliation ayant été prononcée pour abandon de chantier par la société Alluin et Mauduit et non à raison des retards pris par les travaux, sa responsabilité n'est pas engagée ;
- elle n'a commis aucune faute dans sa mission ;
- la demande de règlement du marché est prématurée ;
- elle n'est pas redevable des sommes réclamées à l'hôpital au titre de ce règlement ;
- l'appel en garantie de la société Crédit agricole immobilier entreprise est infondé, les faits reprochés à l'assistant à maitrise d'ouvrage étant intervenus postérieurement à l'achèvement de sa propre mission d'OPC.
Par des mémoires, enregistrés les 16 février 2015 et 22 décembre 2015, la société Crédit agricole immobilier entreprise (CAIE) venant aux droits de la société AEPRIM, représentée par Me C...D..., demande à la cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) de rejeter les conclusions d'appel en garantie du centre hospitalier intercommunal de la Baie de Somme ;
3°) de condamner la société Oger international à la garantir des condamnations prononcées à son encontre ;
4°) de mettre à la charge in solidum des parties perdantes la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la requête d'appel est tardive ;
- elle n'est pas redevable, même indirectement, des sommes dues par l'hôpital à la société Alluin et Mauduit au titre du règlement du marché ;
- le recrutement par l'AEPRIM d'un salarié d'Oger International et le défaut d'information allégué quant à l'insuffisante couverture d'assurance de la société Alluin et Mauduit sont sans lien avec le litige ;
- l'AEPRIM n'a commis aucune faute dans sa mission d'assistance à maîtrise d'ouvrage ;
- il découle des critiques formulées par l'expert quant à l'accomplissement de sa mission que la société Ogier International devrait la garantir des condamnations prononcées à son encontre.
Par un mémoire, enregistré le 17 avril 2015, la SARL d'architecture Alluin et Mauduit, représentée par la SELARL Parini, Tessier, conclut aux mêmes fins que la requête par les mêmes moyens.
Elle soutient, en outre, que son appel n'est pas tardif.
La clôture de l'instruction a été prononcée le 23 décembre 2015.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 85-704 du 12 juillet 1985 ;
- le décret n° 78-1306 du 26 décembre 1978 ;
- le décret n° 93-1268 du 29 décembre 1993 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Christian Bernier, président-assesseur,
- les conclusions de M. Jean-Michel Riou, rapporteur public,
- et les observations de Me A...G..., représentant le centre hospitalier intercommunal de Baie de Somme, de Me L...I...représentant la société Oger International, et de Me E...H..., représentant la société Crédit agricole immobilier entreprise.
1. Considérant que l'hôpital local de Saint-Valéry-sur-Somme a décidé d'engager une opération de restructuration et de construction de bâtiments dédiés aux fonctions administratives et d'accueil, aux unités de vie et d'hospitalisation et à la logistique, qui comportait la création de deux nouveaux bâtiments dédiés à la médecine et à l'hébergement et la restructuration d'un troisième ; que, par un marché du 13 janvier 2005, le groupement composé de la société à responsabilité limitée (SARL) d'architecture Alluin et Mauduit, architecte mandataire, de la société Economie 95, économiste, de la société Barbanel, bureau d'études techniques " fluides ", et de la société Argile, bureau d'études techniques " structures ", aux droits de laquelle vient la société Arcora, a été chargé par l'hôpital local de Saint-Valéry-sur-Somme de la maîtrise d'oeuvre de la restructuration et de la construction de bâtiments dédiés aux fonctions administratives et d'accueil, aux unités de vie et d'hospitalisation et à la logistique, pour un forfait définitif de rémunération fixé à 3 155 960 euros hors taxes (HT) ; que, par un acte d'engagement du 8 septembre 2003, la mission d'assistance à maîtrise d'ouvrage a été confiée à la société AEPRIM aux droits de laquelle est venue la société Crédit agricole immobilier entreprise ; que, par un acte d'engagement du 12 janvier 2006, l'ordonnancement, le pilotage et la coordination (OPC) ont été confiés à la société Oger International ;
2. Considérant qu'à la suite des très importants retards pris par le chantier, des désaccords se sont manifestés en décembre 2010 entre l'hôpital local de Saint-Valéry-sur-Somme et la SARL d'architecture Alluin et Mauduit ; qu'après mise en demeure, l'hôpital a résilié le marché de maîtrise d'oeuvre aux frais et risques du groupement le 10 février 2011 ; que l'hôpital n'ayant pas donné suite au décompte de liquidation établi par le maître d'oeuvre à la date du 28 février 2011, la SARL d'architecture Alluin et Mauduit relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande tendant à l'établissement des comptes entre les parties ;
Sur l'établissement des comptes entre les parties :
3. Considérant qu'aux termes de l'article 12 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles, dans sa rédaction issue du décret du 26 décembre 1978, applicable au marché en cause : " (...) / 12.9 - Résiliation. En cas de résiliation du marché, quelle qu'en soit la cause, une liquidation des comptes est effectuée ; les sommes restant dues par le titulaire sont immédiatement exigibles " ; qu'aux termes de l'article 37 du même cahier : " Résiliation aux torts du titulaire (...) / 37.5. Sauf stipulation particulière du marché, le décompte de liquidation comprend : / a) Au débit du titulaire : / (...) / Le cas échéant, le supplément des dépenses résultant de la passation d'un marché aux frais et risques du titulaire dans les conditions fixées à l'article 38. / (...) " ; qu'aux termes de l'article 38 du même cahier : " Exécution des prestations aux frais et risques du titulaire : / 38.1 ; En cas de résiliation du marché prononcée en vertu de l'article 37 la personne publique peut, dans un délai de six mois à compter de la décision de résiliation, passer, aux frais et risques du titulaire, un marché pour l'exécution de tout ou partie des prestations non encore réceptionnées ; / (...) / 38.4 L'augmentation de dépenses, par rapport au prix du marché, qui résulterait de l'exécution des prestations aux frais et risques du titulaire est à sa charge ; la diminution de dépenses ne lui profite pas " ;
4. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que le cocontractant de l'administration dont le marché a été résilié à ses frais et risques ne peut obtenir le décompte général de ce marché, en vue du règlement des sommes dues au titre des travaux exécutés, qu'après règlement définitif du nouveau marché passé pour l'achèvement des travaux ; que les conclusions présentées au juge du contrat en vue d'obtenir le règlement des sommes contractuellement dues avant le règlement définitif du nouveau marché sont ainsi irrecevables ; que ces dispositions, applicables lorsque le marché a été régulièrement résilié, ne font cependant pas obstacle à ce que, sous réserve que le contentieux soit lié, le cocontractant dont le marché a été résilié à ses frais et risques saisisse le juge du contrat afin de faire constater l'irrégularité ou le caractère infondé de cette résiliation et demander, de ce fait, le règlement des sommes qui lui sont dues, sans attendre le règlement définitif du nouveau marché après, le cas échéant, que le juge du contrat a obtenu des parties les éléments permettant d'établir le décompte général du marché résilié ;
5. Considérant qu'il résulte des stipulations de l'article 28 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché de maîtrise d'oeuvre en litige que les articles 35 à 40 du cahier des clauses administratives générales s'appliquaient, étant précisé que si le marché était résilié aux torts du maître d'oeuvre, la fraction des prestations déjà accomplies par le maitre d'oeuvre et acceptées par le maître d'ouvrage serait rémunérée avec un abattement de 6 % ;
En ce qui concerne le bien-fondé de la résiliation :
6. Considérant que le cocontractant lié à une personne publique par un contrat administratif est tenu d'en assurer l'exécution, sauf en cas de force majeure, et ne peut notamment pas se prévaloir des manquements ou défaillances de l'administration pour se soustraire à ses propres obligations contractuelles ou prendre l'initiative de résilier unilatéralement le contrat ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article 37 du cahier des clauses administratives générales applicables aux marchés publics de prestations intellectuelles, dans sa rédaction issue du décret du 26 décembre 1978, applicable au marché en cause : " Résiliation aux torts du titulaire 37.1. La personne publique peut résilier le marché aux torts du titulaire, après mise en demeure restée infructueuse, lorsque : / a) L'utilisation des résultats par la personne publique est gravement compromise, parce que le titulaire a pris du retard dans l'exécution du marché ; / b) Le titulaire ne s'est pas acquitté de ses obligations dans les délais contractuels ; / (...) " ;
8. Considérant que la SARL d'architecture Alluin et Mauduit, qui ne met pas en cause la régularité de la résiliation, en conteste uniquement le bien-fondé ; que, par une lettre du 10 février 2010, l'hôpital local de Saint-Valéry-sur Somme a prononcé la résiliation aux torts et risques de la SARL Alluin et Mauduit en se fondant explicitement sur les a) et b) de l'article 37 cité au point 7 ; que ce courrier retenait à titre principal que " La situation de notre opération reste ainsi en l'état et se résume à un non achèvement de la première partie des travaux en cours et à votre désertion formelle et clairement revendiquée par vos soins du site de notre opération " ; que les paragraphes suivants du courrier portaient sur la détermination de la date de non achèvement de l'opération établie par le centre hospitalier au 4 février 2011 ; qu'il résulte des termes mêmes de ce courrier de résiliation que le manquement aux obligations contractuelles qui est reproché au cabinet d'architectes par le maître d'ouvrage ne réside pas, contrairement à ce que la requérante soutient, dans " des retards " mais dans le non achèvement de l'opération dans le délai contractuel et ce, en dépit des prolongations déjà acceptées par le centre hospitalier, ainsi que dans des ouvrages qui n'étaient pas exploitables par le centre hospitalier ; que le motif tiré d'une " désertion formelle et clairement revendiquée " est à relier à ces deux reproches ;
9. Considérant qu'il résulte du marché de maîtrise d'oeuvre et en particulier des stipulations de l'article 27 du cahier des clauses administratives particulières auquel il renvoie, que la mission de la SARL Alluin et Mauduit s'achevait à la fin du délai de garantie de parfait achèvement ; qu'il résulte de l'instruction qu'il était prévu que les travaux, engagés le 4 décembre 2006, devaient durer quarante-deux mois et étaient prolongeables de six mois ; que, toutefois, au 4 décembre 2010, soit au terme de la phase DET (direction et exécution des travaux) initialement programmée, ces travaux accusaient un retard estimé à vingt mois ; que la mission DET a été prolongée par ordre de service jusqu'au 28 février 2011 ; que, dès lors, la SARL Alluin et Mauduit n'est pas fondée à invoquer les retards considérables pris par le chantier, dont il résulte de l'instruction, au demeurant, et notamment du rapport d'expertise de M.J..., qu'ils lui étaient très largement imputables, pour soutenir que sa mission devait prendre fin le 4 décembre 2010 ;
10. Considérant que, par une lettre du 13 décembre 2010, la SARL d'architecture Alluin et Mauduit a signifié à l'hôpital local de Saint-Valéry-sur Somme qu'en l'absence de négociation d'un avenant, d'une décision explicite de poursuivre sa mission DET au-delà du 4 décembre 2010 dans les conditions financières qu'elle posait, et du règlement d'acomptes, elle n'assurerait plus sa mission DET au-delà du rendez-vous de chantier du 19 décembre 2010 ; qu'il ressort également du constat de carence établi le 10 janvier 2011 par l'assistant du maître d'ouvrage que, lors de la réunion de chantier qui s'est tenue le 16 décembre 2010, les représentants de la SARL d'architecture Alluin et Mauduit ont annoncé aux entreprises présentes que la maîtrise d'oeuvre n'assurerait plus le suivi du chantier en l'absence d'un accord amiable avec l'hôpital ; que, de fait, ils n'ont pas participé à la réunion de chantier du 22 décembre 2010 et, à compter de cette date, la maîtrise d'oeuvre a laissé les constructeurs sans directive ni coordination ; que si la SARL d'architecture Alluin et Mauduit, qui ne conteste pas de manière probante les fait relatés dans ce constat, fait valoir qu'elle a continué à envoyer des courriels et à traiter des situations de travaux après le 16 décembre 2010, elle n'établit pas, et d'ailleurs ne soutient pas, avoir poursuivi de manière active le reste de sa mission de maîtrise d'oeuvre ; que l'hôpital l'ayant mise en demeure, le 14 janvier 2011, de reprendre sa mission sous huit jours, la SARL d'architecture Alluin et Mauduit a organisé une réunion de chantier le 20 janvier 2011 au cours de laquelle son représentant s'est essentiellement borné à faire état de la persistance de ses différends avec le maître d'ouvrage, sans qu'il ressorte du compte rendu qu'elle avait activement repris la direction du chantier ; que, par ailleurs, la SARL d'architecture Alluin et Mauduit, par lettre du 24 janvier 2011, tout en démentant avoir définitivement interrompu ses activités, a fait savoir à l'hôpital que " l'exécution des travaux et la mission de maîtrise d'oeuvre ne pourront reprendre dans des conditions normales que lorsque... [il aura été] donné suite à [ses] demandes du 13 décembre [2010] " ; que, dans ces conditions, et alors même que la maîtrise d'oeuvre n'avait pas totalement abandonné le chantier, elle n'en assurait délibérément qu'une direction limitée à des actes de pure forme ; que, dans ces conditions, l'hôpital local de Saint-Valéry-sur-Somme ne s'est pas mépris sur l'attitude de la SARL d'architecture Alluin et Mauduit en considérant qu'elle persistait à subordonner la reprise effective de sa mission de coordination et de direction des entreprises et la poursuite du chantier à la satisfaction des conditions, notamment financières, qu'elle avait posées unilatéralement le 13 décembre 2010 ; que, par suite, la SARL Alluin et Mauduit a méconnu la règle de poursuite de l'exécution du contrat rappelée au point 9 ;
11. Considérant qu'il résulte des dispositions de l'article 9 de la loi du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise d'ouvrage publique et à ses rapports avec la maîtrise d'oeuvre privée et de l'article 30 du décret du 29 décembre 1993 relatif aux missions de maîtrise d'oeuvre confiées par des maîtres d'ouvrage publics à des prestataires de droit privé que le titulaire d'un contrat de maîtrise d'oeuvre est rémunéré par un prix forfaitaire couvrant l'ensemble de ses charges et missions, ainsi que le bénéfice qu'il en escompte, et que seule une modification de programme ou une modification de prestations décidées par le maître de l'ouvrage peut donner lieu à une adaptation et, le cas échéant, à une augmentation de sa rémunération ; que, dès lors, la SARL d'architecture Alluin et Mauduit n'était pas fondée à subordonner l'achèvement de sa mission à la négociation d'un avenant lui assurant une rémunération supplémentaire ; que la SARL d'architecture Alluin et Mauduit, qui, du reste, avait perçu plus de 75 % de ses honoraires à une date à laquelle l'ouvrage pour moitié inachevé était inexploitable, ne pouvait davantage subordonner la poursuite de sa mission au règlement d'un différend sur les acomptes ;
12. Considérant qu'à la date à laquelle l'ouvrage aurait dû être livré, le maître d'ouvrage a constaté que la maîtrise d'oeuvre n'avait pas repris la direction du chantier en dépit de sa mise en demeure et que l'ouvrage était inachevé ; que, cinquante mois après le lancement des travaux, le maître d'ouvrage ne disposait que de deux bâtiments inexploitables ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que l'hôpital de Saint-Valéry-sur Somme, après avoir constaté cette situation et relevé qu'en outre, les architectes s'étaient soustraits à l'offre d'une réunion qu'ils avaient eux-mêmes sollicitée destinée à régler les différends, a pu estimer que le comportement de la maîtrise d'oeuvre présentait le caractère d'une faute de nature à justifier la résiliation du marché aux frais et risques du groupement ; que le cabinet d'architectes ne peut, en tout état de cause, utilement invoquer les carences alléguées de la société Oger International, chargée de la mission OPC, dont la mission avait contractuellement pris fin en mars 2010, pour justifier son attitude et chercher à s'exonérer des fautes qui ont justifié la résiliation du marché à ses frais et risques ; qu'il en résulte que la SARL d'architecture Alluin et Mauduit ne saurait soutenir que la résiliation du marché à ses frais et risques n'était pas fondée ;
En ce qui concerne le caractère prématuré de la demande de règlement du solde du marché :
13. Considérant qu'il est constant qu'à la date du présent arrêt, aucun décompte général du marché de substitution passé avec la société ATAUB n'a été établi ; que la résiliation aux torts du titulaire étant fondée ainsi qu'il a été dit au point 12, les conclusions de la SARL d'architecture Alluin et Mauduit tendant au règlement du solde du marché sont, dès lors, irrecevables en vertu des principes énoncés au point 4 du présent arrêt ;
14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que, sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par les sociétés Oger International et Crédit agricole immobilier entreprise tirée de la tardiveté de la requête d'appel, la SARL d'architecture Alluin et Mauduit n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif d'Amiens a rejeté sa demande ;
Sur les conclusions d'appel provoqué :
15. Considérant que les demandes de la société requérante ayant été rejetées et la situation du centre hospitalier désormais dénommé centre hospitalier intercommunal de la Baie de Somme et celle de la société Crédit agricole immobilier entreprise (CAIE) venant aux droits de la société AEPRIM n'étant pas aggravées, leurs conclusions d'appel provoqué dirigées contre la société Oger international doivent être rejetées ;
Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et sur les dépens de l'instance :
16. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier intercommunal de la Baie de Somme, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la SARL d'architecture Alluin et Mauduit demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; que, pour la même raison, elles font également obstacle à ce que soient mises à la charge de la société Oger International et de la société Crédit agricole immobilier entreprise les sommes que le centre hospitalier intercommunal de la Baie de Somme sollicite sur le même fondement ;
17. Considérant qu'il y a lieu, sur le fondement de ces dispositions et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la société d'architecture Alluin et Mauduit une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par le centre hospitalier intercommunal de la Baie de Somme et non compris dans les dépens ;
18. Considérant qu'il y a également lieu, sur le fondement de ces dispositions et dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier intercommunal de la Baie de Somme une somme de 1 000 euros à verser à la société Oger International et une somme de 1 000 euros à verser à la société Crédit agricole immobilier entreprise ;
19. Considérant que ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées par la société Crédit agricole immobilier entreprise sur leur fondement à l'encontre de la société Oger international ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de la société d'architecture Alluin et Mauduit est rejeté.
Article 2 : La SARL d'architecture Alluin et Mauduit versera au centre hospitalier intercommunal de la Baie de Somme la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le centre hospitalier intercommunal de la Baie de Somme versera la somme de 1 000 euros à la société Oger International et la somme de 1 000 euros à la société Crédit agricole immobilier entreprise sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée d'architecture Alluin et Mauduit, au centre hospitalier intercommunal de la Baie de Somme, à la société Crédit agricole immobilier entreprise et à la société Oger International.
Copie en sera transmise au directeur de l'agence régionale de santé de Picardie.
Délibéré après l'audience publique du10 mars 2016 à laquelle siégeaient :
- M. Olivier Yeznikian, président de chambre,
- M. Christian Bernier, président-assesseur,
- M. Hadi Habchi, premier conseiller.
Lu en audience publique le 24 mars 2016.
Le président-rapporteur,
Signé : C. BERNIERLe premier vice-président de la cour,
Président de chambre,
Signé : O. YEZNIKIAN
Le greffier,
Signé : S. DUPUIS
La République mande et ordonne au ministre des affaires sociales et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme
Le greffier en chef,
Par délégation,
Le greffier,
Sylviane Dupuis
N°14DA00595 2