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29/03/2022 | FRANCE | N°20LY00543

France | France, Cour administrative d'appel de Lyon, 1ère chambre, 29 mars 2022, 20LY00543


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2017 par lequel le maire de Saint-Sauveur-en-Diois, agissant au nom de l'Etat, ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée le 27 juillet 2017 par cette commune pour la création d'un four banal sur le toit des toilettes publiques.

Par un jugement n° 1726601 du 10 décembre 2019, le tribunal administratif de Lyon auquel la demande a été transmise par une ordonnance du Conseil d'Etat n° 430232

du 6 avril 2019 prise en application de l'article R. 351-8 du code de justice admin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2017 par lequel le maire de Saint-Sauveur-en-Diois, agissant au nom de l'Etat, ne s'est pas opposé à la déclaration préalable déposée le 27 juillet 2017 par cette commune pour la création d'un four banal sur le toit des toilettes publiques.

Par un jugement n° 1726601 du 10 décembre 2019, le tribunal administratif de Lyon auquel la demande a été transmise par une ordonnance du Conseil d'Etat n° 430232 du 6 avril 2019 prise en application de l'article R. 351-8 du code de justice administrative, a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour

Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 10 février 2020 et 7 janvier 2022, ce dernier n'ayant pas été communiqué, M. B..., représenté par Me Bonnefoi, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 10 décembre 2019 ainsi que l'arrêté du 25 septembre 2017 ;

2°) de " tirer les nécessaires conséquences de la situation " et ordonner une astreinte de 300 euros par journée de retard en cas de maintien du four à pain en état de fonctionner avec une cheminée et sans prévention incendie à compter de la notification du présent arrêt ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat et de la commune la somme de 5 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier car les premiers juges ont retenu que le panneau d'affichage ne mentionnait pas la possibilité d'adresser un éventuel recours au conseil de la commune, alors que ce moyen n'était pas développé par la commune en première instance au soutien de l'irrecevabilité de la demande ;

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les obligations de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme lui étaient opposables ; les mentions s'agissant des voies et délais de recours n'étaient pas lisibles depuis la voie publique, la police de caractère étant trop petite et les mentions étant au niveau du sol ; l'affichage a été fait en contrebas de la voie communale près de l'accès aux toilettes publiques alors que la construction prendra place sur le toit de ce bâtiment ;

- le conseil de la commune était mandaté pour recevoir la notification du recours préalable contre l'autorisation en litige comme le mentionne la délibération du conseil municipal de la commune du 17 novembre 2017 ; le recours contentieux introduit devant le tribunal a été régulièrement notifié dans le délai requis par l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme par courrier dématérialisé du 27 novembre 2017 au conseil de la commune en utilisant une plateforme d'échange sécurisée dédiée aux échanges entre avocats, " le Cloud privé des avocats " créé par le conseil national des Barreaux ;

- il a intérêt pour agir contre la non-opposition à déclaration préalable de travaux en litige ;

- la construction projetée relève du champ du permis de construire et non d'une déclaration préalable de travaux ; la projet prévoit la construction d'un four et d'un espace de stockage des aliments cuits, lequel a fait l'objet d'une autre déclaration préalable alors que ces deux constructions forment un tout, dont l'emprise au sol créée est d'environ 11 m², et qui aurait dû être autorisé conjointement ; l'adjonction d'un four au-dessus des toilettes publiques constitue un changement de destination au sens de l'article R. 151-27 du code de l'urbanisme ;

- l'autorisation en litige méconnaît l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme et aurait dû être autorisée avec des prescriptions adaptées ; il est porté atteinte à la salubrité publique dès lors qu'aucune isolation du four par rapport aux toilettes publiques, ni aucune gestion des déchets d'utilisation du four ne sont prévues ; le four débouche sur une voie publique, le passage du Feraiou qui est une voie exiguë, goudronnée mal entretenue et à proximité immédiate d'une habitation ; le risque incendie est réel compte tenu de sa proximité par rapport aux habitations sachant que le four est amené à fonctionner essentiellement durant l'été, qu'aucun extincteur ne sera installé à proximité et que l'accès des véhicules incendie et secours est rendu compliqué par la configuration du passage du Feraiou ; par ailleurs les modalités de fonctionnement du four troublent la tranquillité publique et constituent une violation des articles R. 1337-6 et ou R. 1334-33 du code de la santé publique et de l'article 101 du règlement sanitaire départemental ; elles sont créatrices de nuisances sonores et olfactives et portent atteinte à son droit de propriété, l'accès en voiture à sa maison lui étant interdit en période de fonctionnement du four ;

- l'arrêté en litige méconnaît l'article 96 du règlement sanitaire départemental, ainsi que la norme technique NF DTU 24.1 P1 auquel ce règlement fait référence qui concerne les dégagements de cheminées proches des maisons d'habitation ; le four a bien été construit beaucoup trop près de sa maison et la cheminée culmine à moins de 0,40 mètre au-dessous de sa maison, distante de moins de 8 mètres ce qui a pour conséquence que les fumées générées par le fonctionnement du four se répandent dans son habitation ; la commune ne peut se prévaloir d'une dérogation à l'application de cette norme ;

- le conseil municipal de la commune n'a pas délibéré sur l'implantation précise du four dans le passage du Feraiou, de même il n'y a pas eu de concertation sur cette implantation ; par ailleurs, les travaux ont été autorisés en méconnaissance des règles de la commande publique.

Par un mémoire enregistré le 16 décembre 2021, la ministre de la transition écologique conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que le jugement est régulier, que la demande de M. B... est irrecevable dès lors que le recours contentieux de l'intéressé n'a pas été notifié à la commune pétitionnaire et s'en rapporte aux écritures produites par le préfet de la Drôme pour le surplus.

Par un mémoire enregistré le 21 décembre 2021, la commune de Saint-Sauveur-en-Diois, représentée par Me Cozon, conclut à titre principal, à l'annulation du jugement en tant qu'il rejette la demande présentée par la commune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à ce qu'il soit mis à la charge du requérant la somme de 5 419 euros au titre de ces mêmes dispositions et au rejet de la requête, et, à titre subsidiaire, à ce qu'il soit fait usage de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme afin de régulariser, le cas échéant, l'autorisation en litige et en toute hypothèse, à ce que le requérant lui verse la somme de 2 117,44 euros au titre des frais d'instance d'appel.

Elle fait valoir que la demande de M. B... est irrecevable pour les mêmes motifs que ceux développés par la ministre et que les moyens soulevés contre l'autorisation en litige ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction est intervenue le 7 janvier 2022 en application d'une ordonnance prise le 23 décembre 2021 sur le fondement de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Christine Psilakis, première conseillère,

- les conclusions de M. Jean-Simon Laval, rapporteur public,

- les observations de Me Bonnefoi pour M. B... et celles de Me Cozon pour la commune de Saint-Sauveur-en-Diois ;

Et après avoir pris connaissance des notes en délibéré présentées pour M. B..., enregistrées les 9 et 12 mars 2022 ;

Considérant ce qui suit :

1. M. B... relève appel du jugement du 10 décembre 2019 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision de non-opposition à déclaration préalable de travaux portant sur la création d'un four banal sur le toit des toilettes publiques, tacitement délivrée le 27 août 2017 à la commune par le maire de Saint-Sauveur-en-Diois, statuant au nom de l'Etat, dès lors que la commune ne dispose pas d'un document d'urbanisme, ainsi que de l'arrêté du 25 septembre 2017 portant certificat de décision de non-opposition.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En vertu de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au litige : " En cas de déféré du préfet ou de recours contentieux à l'encontre d'un certificat d'urbanisme, d'une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou d'un permis de construire, d'aménager ou de démolir, le préfet ou l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. Cette notification doit également être effectuée dans les mêmes conditions en cas de demande tendant à l'annulation ou à la réformation d'une décision juridictionnelle concernant un certificat d'urbanisme, une décision de non-opposition à une déclaration préalable ou un permis de construire, d'aménager ou de démolir. L'auteur d'un recours administratif est également tenu de le notifier à peine d'irrecevabilité du recours contentieux qu'il pourrait intenter ultérieurement en cas de rejet du recours administratif./ La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours./La notification du recours à l'auteur de la décision et, s'il y a lieu, au titulaire de l'autorisation est réputée accomplie à la date d'envoi de la lettre recommandée avec accusé de réception. Cette date est établie par le certificat de dépôt de la lettre recommandée auprès des services postaux ". L'article R. 424-15 du même code précise que : " Mention de la déclaration préalable (...) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur (...) dès la date à laquelle (...) la décision de non-opposition à la déclaration préalable est acquise et pendant toute la durée du chantier. ". Les articles A. 424-15 à A. 424-18 du même code précisent les caractéristiques de l'affichage sur le terrain. L'article A. 424-15 de ce code prévoit ainsi que : " L'affichage sur le terrain du permis de construire, d'aménager ou de démolir explicite ou tacite ou l'affichage de la déclaration préalable, prévu par l'article R. 424-15, est assuré par les soins du bénéficiaire du permis ou du déclarant sur un panneau rectangulaire dont les dimensions sont supérieures à 80 centimètres. ". Aux termes de son article A. 424-18 : " Le panneau d'affichage doit être installé de telle sorte que les renseignements qu'il contient demeurent lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier. ".

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la décision implicite née le 27 août 2017 par laquelle le maire de Saint-Sauveur-en-Diois, statuant au nom de l'Etat a autorisé les travaux de construction d'un four communal, a fait l'objet d'un affichage en façade de la construction où devaient s'effectuer les travaux, laquelle donne sur la voie publique, à proximité de l'accès aux toilettes publiques du village. Ce panneau, dont les dimensions sont conformes aux exigences de l'article A 424-15 du code de l'urbanisme précité comportait, conformément aux dispositions précitées de l'article A 424-18 du même code, les mentions des voies et délais de recours dans une police de caractère, certes, plus petite que celle concernant les informations sur le projet, mais néanmoins lisible et à hauteur satisfaisante pour permettre aux tiers d'en prendre connaissance. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de notification de son recours contentieux au pétitionnaire, découlant de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme précité ne lui était pas opposable, alors d'ailleurs qu'il a rempli ces formalités pour l'exercice de son recours gracieux, lequel a conservé les délais de recours contentieux devant le tribunal.

4. En second lieu, les dispositions de l'article R. 600-1 précitées font obligation de notifier tout recours au bénéficiaire de l'autorisation en litige. Pour être régulière, cette notification doit être effectuée à l'adresse mentionnée dans la demande d'autorisation ou à tout autre adresse à laquelle le pétitionnaire a explicitement manifesté sa volonté d'élire domicile.

5. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a, dans le délai de quinze jours suivant le dépôt de son recours au greffe du tribunal administratif, notifié cette demande au préfet de la Drôme. Si le requérant a, par l'intermédiaire de son conseil et dans ce même délai, envoyé au conseil de la commune une copie de ce recours, il ne peut toutefois pas être regardé comme ayant satisfait à l'obligation précitée, dès lors, ainsi que l'a relevé le tribunal sans avoir ajouté à la fin de non-recevoir soulevée par la commune ni entaché son jugement d'irrégularité sur ce point, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'avocat de la commune aurait été mentionné dans la déclaration préalable ou dans l'arrêté portant certificat de non-opposition comme représentant le pétitionnaire, nonobstant la circonstance que le conseil de la commune a obtenu un mandat par délibération du conseil municipal du 16 novembre 2017 " pour la défense des intérêts de la commune dans le litige opposant cette dernière à M. B... " ou que le requérant ait été informé par courrier du 22 novembre 2017 que le même avocat était mandaté pour le litige relatif à la saisine de la Commission d'accès aux documents administratifs. Dans ces conditions, M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal a fait droit à la fin de non-recevoir soulevée par la commune et tirée du défaut de notification du recours contentieux de première instance à la commune bénéficiaire de l'autorisation.

6. Il résulte de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être par voie de conséquence rejetées.

Sur l'appel incident et les conclusions tendant au paiement des frais d'instance d'appel de la commune :

7. D'une part, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté les conclusions présentées devant le tribunal par la commune de Saint-Sauveur-en-Diois et tendant au remboursement des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. D'autre part, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à sa demande présentée en appel au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : L'appel incident présenté par la commune de Saint-Sauveur-en-Diois ainsi que ses conclusions d'appel présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de la transition écologique et à la commune de Saint-Sauveur-en-Diois.

Délibéré après l'audience du 8 mars 2022 à laquelle siégeaient :

Mme Danièle Déal, présidente de chambre,

M. Thierry Besse, président-assesseur,

Mme Christine Psilakis, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 mars 2022.

La rapporteure,

Christine PsilakisLa présidente,

Danièle Déal

La greffière,

Fabienne Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales et à la ministre de la transition écologique, en ce qui les concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

2

N° 20LY00543


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Lyon
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20LY00543
Date de la décision : 29/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03 Urbanisme et aménagement du territoire. - Permis de construire.


Composition du Tribunal
Président : Mme DEAL
Rapporteur ?: Mme Christine PSILAKIS
Rapporteur public ?: M. LAVAL
Avocat(s) : BONNEFOI Christine

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.lyon;arret;2022-03-29;20ly00543 ?
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