Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 3 avril 2012 par laquelle le ministre de l'intérieur, de l'outre-mer, des collectivités territoriales et de l'immigration a procédé à sa radiation des cadres de la police nationale pour abandon de poste et de condamner l'Etat à lui verser la somme de 15.000 euros en réparation de ses préjudices matériel et moral.
Par un jugement n° 1209653/5-1 du 21 novembre 2013, le tribunal administratif de Paris
a rejeté ses demandes.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 21 janvier 2014 et 18 mai 2015 M. B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1209653/5- du 21 novembre 2013 du Tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler la décision du 3 avril 2012 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 30.000 euros au titre de ses préjudices moral et matériel ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la mise en demeure qui lui a été adressée le 6 février 2012 est irrégulière dès lors qu'elle lui a été envoyée alors qu'il était en congés ;
- l'arrêté portant radiation des cadres est entaché d'une erreur de droit dès lors que dès
le mois de juillet 2011 il a informé sa hiérarchie de son projet de démission ;
- la décision en litige est entachée de détournement de pouvoir ;
- l'illégalité de la décision contestée ainsi que le comportement de l'administration à son égard lui ont causé des préjudices personnel et matériel.
Par un mémoire en défense, enregistré le 9 avril 2015, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droit et obligations des fonctionnaires ;
- le décret n°85-634 du 16 septembre 1985 relatif au régime particulier de certaines positions de fonctionnaires de l'Etat, à la mise à disposition, à l'intégration et à la cessation définitive de fonctions ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Amat,
- les conclusions de M. Romnicianu, rapporteur public,
1. Considérant que par arrêté du 3 avril 2012 le ministre de l'intérieur a procédé à la radiation des cadres de la police nationale de M. B...pour abandon de poste ; que
M. B...relève appel du jugement du 21 novembre 2013 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes tendant, d'une part, à l'annulation de cette décision, et d'autre part, à la condamnation de l'Etat à l'indemniser des conséquences dommageables de celle-ci ;
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
2. Considérant qu'une mesure de radiation des cadres pour abandon de poste ne peut être régulièrement prononcée que si l'agent concerné a, préalablement à cette décision, été mis en demeure de rejoindre son poste ou de reprendre son service dans un délai approprié qu'il appartient à l'administration de fixer ; qu'une telle mise en demeure doit prendre la forme d'un document écrit, notifié à l'intéressé, l'informant du risque qu'il encourt d'une radiation des cadres sans procédure disciplinaire préalable ; que lorsque l'agent ne s'est ni présenté ni n'a fait connaître à l'administration aucune intention avant l'expiration du délai fixé par la mise en demeure, et en l'absence de toute justification d'ordre matériel ou médical, présentée par l'agent, de nature à expliquer le retard qu'il aurait eu à manifester un lien avec le service, cette administration est en droit d'estimer que le lien avec le service a été rompu du fait de l'intéressé ;
3. Considérant, en premier lieu, que M. B...a fait l'objet d'une mise en demeure par lettre recommandée avec demande d'avis de réception en date du 6 février 2012, notifiée
le 15 février 2012, lui enjoignant de reprendre son service à la direction centrale de la police judiciaire le 20 février 2012 à 9h00 sous peine de radiation des cadres de la police nationale pour abandon de poste sans procédure disciplinaire préalable ; que M. B...soutient que cette mise en demeure était irrégulière dès lors qu'il était en congés ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que la demande de congés complétée par le requérant le 10 janvier 2012 a fait l'objet d'un avis défavorable le 13 janvier 2012 en fin de journée ; que, contrairement à ce que fait valoir
M.B..., ni les mentions portées sur les procès-verbaux des 5 et 13 janvier 2012 lesquels ne comportent que des rappels généraux sur les conséquences de son souhait de démissionner et indiquent, sans aucune précision de dates, qu'il ne peut quitter son activité professionnelle qu'à la date qui sera fixée par l'administration et qu'il doit reprendre son activité à l'issue de ses congés, ne permettent de regarder l'intéressé comme ayant reçu l'accord de sa hiérarchie pour être placé en congés du 16 janvier au 12 février 2012 ; qu'en tout état de cause, ainsi que l'ont relevé à bon droit les premiers juges, si ce fonctionnaire avait cru disposer d'un congé pour cette période il lui appartenait alors de rejoindre son poste le 13 février 2012 ; qu'enfin, M. B...n'est pas fondé à soutenir qu'il n'aurait pas disposé d'un délai suffisant pour reprendre son poste alors qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a effectivement bénéficié d'un délai de cinq jours pour se présenter dans son service à la direction centrale de la police judiciaire ; qu'il s'ensuit que M. B...n'est pas fondé à soutenir que la décision querellée est entachée d'un vice de procédure ;
4. Considérant, en deuxième lieu, que M. B...soutient que l'administration ne pouvait légalement le radier des cadres dès lors qu'il avait manifesté son intention de démissionner, par lettres des 5 septembre et 28 décembre 2011 ;
5. Considérant, d'une part, que si le requérant a présenté par lettre du 5 septembre 2011 une demande de démission, il doit être regardé comme s'en étant rétracté par sa lettre du 20 octobre 2011 aux termes de laquelle il indiquait suspendre sa demande de démission pour solliciter une disponibilité pour convenances personnelles ; qu'en outre et en tout état de cause, le délai de quatre mois prévu par l'article 58 du décret n° 85-986 du 16 septembre 1985 précité imparti à l'administration pour notifier une décision expresse d'acceptation ou de refus de la démission présentée par l'agent présente un caractère impératif ; qu'ainsi l'administration ne s'étant pas prononcée dans ce délai, elle était dessaisie de la première demande de démission de M. B...à la date de la décision contestée sans qu'ait pu naître, à l'intérieur de ce délai, une décision implicite ;
6. Considérant, d'autre part, que si M. B...a de nouveau présenté sa démission par lettre du 28 décembre 2011, le délai de quatre mois imparti à l'administration pour statuer sur cette demande n'était pas expiré à la date d'édiction de la décision querellée ; qu'en outre, il ressort du procès-verbal du 13 janvier 2012 que M. B...avait été averti qu'il ne pourrait quitter l'administration par démission qu'à la date qui serait fixée par sa hiérarchie ; qu'il s'ensuit que la circonstance que M. B...ait manifesté son intention de démissionner ne privait pas l'administration de son droit de le radier des cadres pour abandon de poste aussi longtemps que sa demande de démission n'avait pas été acceptée ; qu'il résulte par ailleurs de ce qui a été dit au point 3 que les congés de M. B...n'avaient pas été acceptés et, en tout état de cause, prenaient fin le 12 février 2012 soit avant le 20 février 2012, date qui lui avait été fixée pour se présenter dans son service ; qu'ainsi M.B..., faute d'avoir déféré à la mise en demeure d'avoir à rejoindre son poste en date du 6 février 2012 doit être regardé comme ayant rompu le lien avec le service sans motif légitime ;
7. Considérant, en dernier lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier, et alors au contraire que l'administration a appelé l'attention du requérant sur les modalités à respecter et sur les conséquences entraînées par la mise en oeuvre de sa volonté de quitter la police nationale, que la décision en litige procède d'un détournement de pouvoir ;
Sur les conclusions aux fins d'indemnisation :
8. Considérant que les conclusions aux fins d'annulation de la décision du 3 avril 2012 étant rejetées, les conclusions indemnitaires de M. B...tendant à être indemnisé des conséquences dommageables résultant de cette décision ne peuvent être qu'également rejetées ;
9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2015, à laquelle siégeaient :
- Mme Terrasse, président de chambre,
- M. Gouès, premier conseiller,
- Mme Amat, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 13 novembre 2015.
Le rapporteur,
N. AMATLe président,
M. TERRASSE
Le greffier,
E. CLEMENTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 14PA00290