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04/04/2024 | FRANCE | N°22BX00726

France | France, Cour administrative d'appel de BORDEAUX, 2ème chambre, 04 avril 2024, 22BX00726


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Sous le n° 1906318, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Gironde a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner l'Etablissement français du sang (EFS) à lui verser la somme de 52 093,46 euros en remboursement de ses débours en lien avec la contamination de M. B... C... par le virus de l'hépatite C. Sous le n° 2000487, la société Axa France Iard, venant aux droits de l'assureur du centre de transfusion sanguine de Bordeaux, a demandé au tribunal d'

annuler le titre exécutoire émis à son encontre par l'Office national d'indemnisatio...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Sous le n° 1906318, la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de la Gironde a demandé au tribunal administratif de Bordeaux de condamner l'Etablissement français du sang (EFS) à lui verser la somme de 52 093,46 euros en remboursement de ses débours en lien avec la contamination de M. B... C... par le virus de l'hépatite C. Sous le n° 2000487, la société Axa France Iard, venant aux droits de l'assureur du centre de transfusion sanguine de Bordeaux, a demandé au tribunal d'annuler le titre exécutoire émis à son encontre par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (ONIAM) pour le recouvrement de la somme de 19 422 euros correspondant à l'indemnisation qu'il avait versée à M. C..., et l'ONIAM a présenté des conclusions reconventionnelles tendant à la condamnation de la société Axa France Iard à lui verser la somme de 19 442 euros.

Par un jugement nos 1906318, 2000487 du 21 décembre 2021, le tribunal a, dans l'affaire n° 2000487, rejeté la demande de la société Axa France Iard et les conclusions reconventionnelles de l'ONIAM " et de la CPAM de la Gironde " comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître, dans l'affaire n° 1906318, condamné l'EFS à verser une somme de 52 093,46 euros à la CPAM de la Gironde, ainsi que 1 098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, et enfin, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, mis à la charge de la société Axa France Iard une somme de 1 500 euros à verser à l'ONIAM et à la charge de l'EFS une somme de 1 000 euros à verser à la CPAM de la Gironde.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 25 février 2022 sous le n° 22BX00726 et un mémoire enregistré le 21 octobre 2022, la société Axa France Iard, représentée par la SELARL Abeille et Associés, demande à la cour :

1°) de réformer ce jugement en ce qu'il a retenu l'origine transfusionnelle de la contamination de M. C... par le virus de l'hépatite C et a mis à sa charge une somme

de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de " dire et juger " que l'origine transfusionnelle de la contamination n'est pas rapportée, que le plafond de garantie de la société Axa est atteint pour l'année 1987,

et qu'aucune somme ne saurait être mise à sa charge ;

3°) de mettre à la charge de tout succombant une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle ne conteste pas que l'exécution du contrat d'assurance de nature privée, conclu avant l'entrée en vigueur du décret du 27 février 1998, relève de la compétence du juge judiciaire, qu'elle a saisi ;

- son intérêt à agir n'est pas contestable dès lors que lorsque l'EFS est condamné à rembourser les débours de la caisse, elle-même y est tenue par ricochet ;

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le plafond de garantie était atteint pour l'année 1987, de sorte qu'aucune demande ne pouvait être formée à l'encontre de l'EFS et de son assureur ;

- une créance ne peut faire l'objet d'un titre exécutoire que si elle est certaine, liquide et exigible, ce qui n'était pas le cas dès lors que l'enquête transfusionnelle ne permet de justifier ni de l'origine de la contamination, ni de l'absence d'antécédents médicaux de la victime, ni de la matérialité de l'administration de produits sanguins ; il n'est pas davantage démontré que la victime aurait été contaminée par des produits provenant du centre de transfusion sanguine de Bordeaux pendant la période de garantie de la société Axa.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 mai 2022, l'ONIAM, représenté par la SELARL Birot, Ravaut et Associés, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la société Axa France Iard une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la société Axa France Iard, qui ne conteste pas la compétence de la juridiction judiciaire pour juger le litige qui l'oppose à l'ONIAM, n'est pas recevable à relever appel du jugement en ce qu'il a retenu l'origine transfusionnelle de la contamination de M. C... dans le cadre du litige opposant l'EFS à la CPAM de la Gironde ;

- au surplus, les moyens invoqués par la société Axa France Iard ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 13 septembre 2023, la CPAM de la Gironde, représentée par l'AARPI CB2P Avocats, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de mettre à la charge de la société Axa France Iard les sommes de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de 13 euros au titre du droit de plaidoirie, ainsi que " les entiers dépens ".

Elle fait valoir que :

- dès lors qu'aucune condamnation n'est prononcée à son encontre, la société Axa France Iard n'est pas recevable à interjeter appel du jugement en ce qu'il a statué sur la requête introduite par la caisse à l'encontre de l'EFS ;

- c'est à bon droit que le tribunal a condamné l'EFS à lui rembourser la somme

de 52 093,46 euros.

II. Par une requête enregistrée le 1er mars 2022 sous le n° 22BX00737, l'EFS, représenté par la SELARL Houdart et Associés, demande à la cour :

1°) d'annuler les articles 2 et 3 du jugement du tribunal administratif de Bordeaux

nos 1906318, 2000487 du 21 décembre 2021 ;

2°) de rejeter la demande présentée devant le tribunal par la CPAM de la Gironde ;

3°) de mettre à la charge de la CPAM de la Gironde une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que : il a démontré devant le tribunal, par une lettre de son avoué près la cour d'appel de Bordeaux en date du 4 février 2005 assortie de justificatifs, que la garantie assurantielle d'Axa avait été mise en œuvre pour l'année 1987 à hauteur de 457 347,06 euros, soit une somme supérieure au plafond annuel de 3 000 000 francs ; le contrat d'assurance et ses annexes, produits en appel, permettent de constater que l'article 5 prévoyait une limite de garantie, que l'annexe sur le montant des garanties fixait celle-ci à 3 000 000 de francs par sinistre et par année d'assurance, et que l'avenant ayant pris effet le 2 janvier 1987 précisait en son annexe que le montant des garanties était de 3 000 000 de francs par sinistre au titre de la garantie E ; ainsi, le plafond était bien épuisé, et la demande de la CPAM de la Gironde doit être rejetée.

Par des mémoires enregistrés le 15 juin 2022 et le 2 mai 2023, la société Axa France Iard, représentée par la SELARL Abeille et Associés, demande à la cour :

1°) de réformer le jugement en ce qu'il a retenu l'origine transfusionnelle de la contamination de M. C... par le virus de l'hépatite C et a mis à sa charge une somme

de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

2°) de " dire et juger " que l'origine transfusionnelle de la contamination n'est pas rapportée, que le plafond de garantie de la société Axa est atteint pour l'année 1987, et qu'aucune somme ne saurait être mise à sa charge, ou à titre subsidiaire de limiter sa condamnation éventuelle au remboursement à l'ONIAM d'une somme de 10 801,11 euros ;

3°) de mettre à la charge de tout succombant une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, le plafond de garantie était atteint pour l'année 1987, de sorte qu'aucune demande ne pouvait être formée par la caisse à l'encontre de l'EFS et de son assureur ;

- l'enquête transfusionnelle ne permet de justifier ni de l'origine de la contamination, ni de l'absence d'antécédents médicaux de la victime ; si des numéros de produits ont été identifiés, leur administration effective n'est pas établie en l'absence de pièces médicales contemporaines ;

- l'enquête transfusionnelle n'a abouti que pour deux concentrés de globules rouges (CGR) délivrés le 11 mai 1987, et les donneurs n'ont pas pu être retrouvés pour quatre plasmas frais congelés de mars 1987 et le CGR du 12 mai 1987, de sorte qu'il n'est pas établi

que M. C... aurait été contaminé par les produits fournis par le centre de transfusion sanguine (CTS) de Bordeaux ; le produit n° 781 et le CGR n° 0052788 n'ont pas été délivrés

à M. C..., et le CTS fournisseur des produits 18426, 5942, 34559 et 3518422 qui auraient été transfusés en mars et mai 1987 est inconnu ; en conséquence, une éventuelle condamnation de la société Axa à rembourser l'ONIAM devrait être limitée à la somme de 10 801,11 euros, proportionnelle au nombre de transfusions avec des produits du CTS de Bordeaux ;

- l'absence d'identification de la date de contamination empêche de déterminer le contrat d'assurance sur lequel imputer le sinistre.

Par un mémoire enregistré le 7 mars 2023, l'ONIAM, représenté par la SELARL Birot, Ravaut et Associés, s'en remet à la sagesse de la cour en ce qui concerne l'appel de l'EFS et demande à la cour de mettre à la charge de la société Axa France Iard une somme de 2 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la société Axa France Iard n'a pas intérêt à agir.

Par un mémoire enregistré le 13 septembre 2023, la CPAM de la Gironde, représentée par l'AARPI CB2P Avocats, conclut au rejet de la requête et demande à la cour de porter

à 1 162 euros le montant de l'indemnité forfaitaire de gestion et de mettre à la charge de l'EFS, au titre de l'instance d'appel, les sommes de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de 13 euros au titre du droit de plaidoirie, ainsi que " les entiers dépens ".

Elle fait valoir que :

- le contrat d'assurance produit en appel et l'attestation de l'assureur, qui manque d'objectivité, ne suffisent pas à établir que le plafond de garantie aurait été atteint pour

l'année 1987 ;

- c'est à bon droit que le tribunal a retenu la responsabilité de l'EFS en se fondant sur l'enquête transfusionnelle ;

- l'imputabilité de ses débours de 52 093,46 euros est établie par l'attestation de son médecin conseil.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des assurances :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 ;

- le décret n° 95-161 du 15 février 1995 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- les conclusions de Mme Isoard, rapporteure publique,

- et les observations de Me Bouyx, substituant Me de Boussac di Pace, représentant la CPAM de la Gironde et de Me Fouré représentant l'EFS.

Une note en délibéré a été enregistrée dans les dossiers n° 22BX00726 et 22BX00737 pour l'EFS le 12 mars 2024.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., qui avait reçu des transfusions de produits sanguins lors de deux hospitalisations en mars et mai 1987, a été ultérieurement diagnostiqué porteur du virus de l'hépatite C et a présenté une cirrhose. Il a sollicité l'indemnisation de ses préjudices auprès de l'ONIAM, lequel, après la réalisation d'une enquête transfusionnelle ayant mis en évidence la délivrance de produits sanguins par le centre de transfusion sanguine de Bordeaux, a estimé qu'un faisceau d'indices suffisamment précis et concordants permettait de faire présumer l'origine transfusionnelle de la contamination. L'ONIAM a versé une somme totale

de 19 442 euros à M. C... en exécution de deux protocoles transactionnels des 20 février

et 7 octobre 2015, et en a demandé le remboursement à la société Axa France Iard venant aux droits de la société Union des assurances de Paris (UAP), assureur du centre de transfusion sanguine de Bordeaux. En l'absence de réponse, il a émis un titre exécutoire de 19 442 euros, dont la société Axa France Iard a demandé l'annulation devant le tribunal administratif de Bordeaux sous le n° 2000487, et l'ONIAM a alors présenté des conclusions reconventionnelles tendant à la condamnation de la société Axa France Iard à lui verser la somme de 19 442 euros. Par ailleurs, après avoir présenté à l'Etablissement français du sang (EFS) une réclamation préalable restée sans réponse, la CPAM de la Gironde a demandé au tribunal administratif de Bordeaux, sous le n° 1906318, de condamner cet établissement à lui verser la somme

de 52 093,46 euros au titre des débours qu'elle avait exposés au bénéfice de M. C....

2. Par un jugement nos 1906318, 2000487 du 21 décembre 2021 dont la société Axa France Iard et l'EFS relèvent appel, le tribunal a, dans l'affaire n° 2000487, rejeté la demande de la société Axa France Iard et les conclusions reconventionnelles de l'ONIAM " et de la CPAM de la Gironde " comme portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître (article 1er), et dans l'affaire n° 1906318, condamné l'EFS à verser une somme

de 52 093,46 euros à la CPAM de la Gironde, ainsi que 1 098 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion (article 2). Enfin, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il a mis à la charge de la société Axa France Iard une somme de 1 500 euros à verser à l'ONIAM, et à la charge de l'EFS une somme de 1 000 euros à verser à la CPAM de la Gironde (article 3).

Sur la jonction :

3. Les requêtes n° 22BX00726 de la société Axa France Iard et n° 22BX00737 de l'EFS sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur l'appel de l'EFS :

En ce qui concerne l'origine transfusionnelle de la contamination :

4. Aux termes de l'article 102 de la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé : " En cas de contestation relative à l'imputabilité d'une contamination par le virus de l'hépatite C antérieure à la date d'entrée en vigueur de la présente loi, le demandeur apporte des éléments qui permettent de présumer que cette contamination a pour origine une transfusion de produits sanguins labiles ou une injection de médicaments dérivés du sang. Au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que cette transfusion ou cette injection n'est pas à l'origine de la contamination. Le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles. Le doute profite au demandeur. / (...). "

5. Il résulte de l'instruction que M. C..., qui ne présentait pas de facteur de risque majeur de contamination autre que transfusionnel, a reçu des transfusions de cinq unités de plasma frais congelé et trois culots de concentrés globulaires au centre hospitalier régional de Bordeaux en mars 1987, puis de quatre culots de concentrés globulaires à la polyclinique du Médoc en mai 1987. L'enquête transfusionnelle n'a permis de retrouver aucun des donneurs des produits numérotés, dont plusieurs émanaient du centre de transfusion sanguine de Bordeaux, de sorte que l'innocuité des produits délivrés n'est pas établie. Dans ces circonstances, l'origine transfusionnelle de la contamination par le virus de l'hépatite C doit être présumée.

En ce qui concerne la couverture assurantielle du centre de transfusion sanguine de Bordeaux :

6. Aux termes de l'article L. 1221-14 du code de la santé publique : " Les victimes de préjudices résultant de la contamination par le virus de l'hépatite B ou C (...) causée par une transfusion de produits sanguins ou une injection de médicaments dérivés du sang réalisée sur les territoires auxquels s'applique le présent chapitre sont indemnisées au titre de la solidarité nationale par l'office mentionné à l'article L. 1142-22 (...). / (...) Lorsque l'office a indemnisé une victime ou lorsque les tiers payeurs ont pris en charge des prestations mentionnées aux 1 à 3 de l'article 29 de la loi n° 85-677 du 5 juillet 1985 tendant à l'amélioration de la situation des victimes d'accidents de la circulation et à l'accélération des procédures d'indemnisation, ils peuvent directement demander à être garantis des sommes qu'ils ont versées ou des prestations prises en charge par les assureurs des structures reprises par l'Etablissement français du sang (...), que le dommage subi par la victime soit ou non imputable à une faute. / L'office et les tiers payeurs, subrogés dans les droits de la victime, bénéficient dans le cadre de l'action mentionnée au septième alinéa du présent article de la présomption d'imputabilité dans les conditions prévues à l'article 102 de la loi n° 2002-303 du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Les assureurs à l'égard desquels il est démontré que la structure qu'ils assurent a fourni au moins un produit sanguin labile ou médicament dérivé du sang, administré à la victime, et dont l'innocuité n'est pas démontrée, sont solidairement tenus de garantir l'office et les tiers payeurs pour l'ensemble des sommes versées et des prestations prises en charge. / L'office et les tiers payeurs ne peuvent exercer d'action subrogatoire contre l'Etablissement français du sang, venu aux droits et obligations des structures mentionnées à l'avant-dernier alinéa, si l'établissement de transfusion sanguine n'est pas assuré, si sa couverture d'assurance est épuisée ou encore dans le cas où le délai de validité de sa couverture est expiré. "

7. Il résulte de l'enquête transfusionnelle réalisée par l'EFS que M. C... a reçu, en mars et mai 1987, quatre unités de plasma frais congelé et un culot globulaire fournis par le centre de transfusion sanguine de Bordeaux, dont l'innocuité n'a pas été démontrée, les donneurs n'ayant pas été localisés. L'EFS produit pour la première fois en appel le contrat d'assurance du centre de transfusion sanguine de Bordeaux auprès de la société UAP aux droits de laquelle vient la société Axa France Iard, lequel comportait une garantie E applicable aux conséquences pécuniaires de la responsabilité civile pouvant incomber au centre à raison des dommages corporels, matériels et immatériels causés par le sang et ses dérivés faisant l'objet d'une livraison, lorsque ces dommages ont pour fait générateur notamment un vice propre, et qu'ils surviennent après la livraison. La limite de cette garantie était seulement fixée à 3 000 000 de francs par sinistre et par année d'assurance, ce qui ne faisait pas obstacle à ce que le cumul

des garanties mises en œuvre pour plusieurs sinistres de montants unitaires inférieurs

à 3 000 000 francs puisse excéder cette somme. En se prévalant de ce que trois sinistres relatifs à l'année 1987 avaient conduit au paiement par l'assureur du centre de transfusion sanguine de Bordeaux d'une somme cumulée de 457 347,06 euros correspondant à 3 000 000 francs, l'EFS, auquel il appartient, s'il s'y croit fondé, de se retourner contre son assureur devant la juridiction judiciaire, ne démontre pas que le montant de la couverture d'assurance aurait été épuisé. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal l'a condamné à rembourser les débours de la CPAM de la Gironde, dont il ne conteste pas le montant.

Sur l'appel de la société Axa France Iard :

8. Les appels formés contre les jugements des tribunaux administratifs ne peuvent tendre qu'à l'annulation ou à la réformation du dispositif du jugement attaqué, quels que soient les motifs retenus par les premiers juges, et ne peuvent être interjetés que par les parties à l'instance.

9. La société Axa France Iard, qui ne conteste pas le dispositif du jugement en ce qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation du titre exécutoire émis à son encontre par l'ONIAM comme présentées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître, n'est pas recevable à contester les motifs retenus par les premiers juges dans l'instance qu'ils ont jointe, à laquelle elle n'était pas partie, pour condamner l'EFS à rembourser les débours exposés par la CPAM de la Gironde au bénéfice de M. C.... Par suite, ses conclusions d'appel sont seulement recevables en ce qu'elles portent sur la somme qu'elle a été condamnée à verser à l'ONIAM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

10. Dans les circonstances de l'espèce, il y n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de la société Axa France Iard tendant à l'annulation de l'article 3 du jugement en tant qu'il a mis à sa charge une somme de 1 500 euros à verser à l'ONIAM au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur les frais exposés par les parties à l'occasion du litige :

11. La CPAM de la Gironde s'est vue allouer l'indemnité forfaitaire de gestion en première instance pour le montant maximal alors applicable de 1 098 euros. Dès lors qu'elle n'obtient en appel aucun supplément d'indemnité, elle n'est pas fondée à en solliciter la revalorisation. Ses conclusions relatives aux dépens sont sans objet et ne peuvent qu'être également rejetées.

12. L'EFS et la société Axa France Iard, qui sont des parties perdantes, ne sont pas fondés à demander l'allocation d'une somme au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

13. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'EFS une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la CPAM de la Gironde, et à la charge de la société Axa France Iard une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par l'ONIAM.

14. Aux termes de l'article 2 du décret du 15 février 1995 relatif aux droits de plaidoirie et à la contribution équivalente, devenu l'article R. 723-26-2 du code de la sécurité sociale : " Le droit de plaidoirie est dû à l'avocat pour chaque plaidoirie faite aux audiences dont la liste est fixée par arrêté du garde des sceaux, ministre de la justice. / A défaut

de plaidoirie, est considéré comme ayant plaidé l'avocat représentant la partie à

l'audience (...). " La CPAM de la Gironde, qui a été représentée à l'audience, est fondée à demander l'allocation d'une somme de 13 euros au titre du droit de plaidoirie.

DÉCIDE :

Article 1er : Les appels de l'EFS et de la société Axa France Iard sont rejetés.

Article 2 : L'EFS versera à la CPAM de la Gironde les sommes de 1 000 euros au titre

de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de 13 euros au titre du droit de plaidoirie.

Article 3 : La société Axa France Iard versera à l'ONIAM une somme de 1 500 euros au titre

de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à l'Etablissement français du sang, à la société Axa France Iard, à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à la caisse primaire d'assurance maladie

de la Gironde. Une copie en sera adressée à M. B... C....

Délibéré après l'audience du 12 mars 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Catherine Girault, présidente,

Mme Anne Meyer, présidente-assesseure,

M. Olivier Cotte, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 avril 2024.

La rapporteure,

Anne A...

La présidente,

Catherine GiraultLa greffière,

Virginie Guillout

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui la concerne, et à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 22BX00726, 22BX00737


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de BORDEAUX
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22BX00726
Date de la décision : 04/04/2024

Composition du Tribunal
Président : Mme GIRAULT
Rapporteur ?: Mme Anne MEYER
Rapporteur public ?: Mme ISOARD
Avocat(s) : ABEILLE ET ASSOCIES CABINET D'AVOCATS;SELARL HOUDART ET ASSOCIES;ABEILLE ET ASSOCIES CABINET D'AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 07/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-04;22bx00726 ?
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