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29/01/2025 | FRANCE | N°42500053

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 29 janvier 2025, 42500053


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.


FM






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 29 janvier 2025








Cassation partielle




M. VIGNEAU, président






Arrêt n° 53 F-B


Pourvoi n° Y 23-20.836








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 29 JANVIER 2025


M. [V] [O], domicilié [Adresse 4], a formé le pourvoi n° Y 23-20.836 contre l'arrêt rendu le 6 juillet 2023 par la cour d'appel...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

FM

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 29 janvier 2025

Cassation partielle

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 53 F-B

Pourvoi n° Y 23-20.836

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 29 JANVIER 2025

M. [V] [O], domicilié [Adresse 4], a formé le pourvoi n° Y 23-20.836 contre l'arrêt rendu le 6 juillet 2023 par la cour d'appel de Douai (chambre 2, section 1), dans le litige l'opposant :

1°/ à la société LBR, société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],

2°/ à M. [P] [N], domicilié [Adresse 1],

3°/ à la société Depreux Sébastien, société d'exercice libéral à responsabilité limitée, dont le siège est [Adresse 3], prise en sa qualité de liquidateur de la société La Brasserie,

défendeurs à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Bessaud, conseiller référendaire, les observations de la SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, avocat de M. [O], de la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat de la société LBR et de M. [N], après débats en l'audience publique du 3 décembre 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme Bessaud, conseiller référendaire rapporteur, M. Mollard, conseiller doyen, et Mme Labat, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Douai, 6 juillet 2023), la société La Brasserie, ayant pour gérant M. [N], avait confié à M. [O], expert-comptable, une mission de tenue et de suivi de la comptabilité, révoquée le 31 décembre 2016.

2. Soutenant ne pas avoir été payé des honoraires qui lui étaient dus, M. [O] a assigné la société La Brasserie en paiement.

3. Le 15 juin 2018, cette dernière a cédé son fonds de commerce à la société LBR, créée en vue de la reprise du fonds de commerce et détenue par M. et Mme [N].

4. Le 6 février 2019, la société La Brasserie a été condamnée à payer à M. [O] une certaine somme à titre d'honoraires.

5. Elle a ensuite été mise en liquidation judiciaire et la société Depreux désignée liquidateur.

6. M. [O] a assigné la société LBR, M. [N] et le liquidateur de la société La Brasserie, afin de lui voir déclarer inopposable la cession de fonds de commerce.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

7. M. [O] fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes d'inopposabilité de la cession du fonds de commerce et de condamnation, alors « que l'action paulienne portant sur un acte ayant pour effet de faire échapper un bien aux poursuites des créanciers en le remplaçant par des fonds plus aisés à dissimuler n'est pas conditionnée à la preuve de l'insolvabilité apparente du débiteur ; que M. [O] a fondé son action paulienne sur le moyen selon lequel la cession du fonds de commerce avait substitué à un actif aisément saisissable un autre actif plus facilement dissimulable ; que la cour d'appel, après avoir constaté que la cession de fonds de commerce avait remplacé ledit fond par une somme d'argent, valeur plus aisément dissimulable, a écarté l'action paulienne, motif pris de l'absence de preuve de l'insolvabilité apparente de la société La Brasserie ; qu'en statuant ainsi, elle a violé l'article 1341-2 du code civil. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 1341-2 du code civil :

8. Selon ce texte, le créancier peut agir en son nom personnel pour faire déclarer inopposables à son égard les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits, à charge d'établir, s'il s'agit d'un acte à titre onéreux, que le tiers cocontractant avait connaissance de la fraude.

9. Le créancier dispose de l'action paulienne lorsque la cession, bien que consentie au prix normal, a pour effet de faire échapper un bien à ses poursuites en le remplaçant par des fonds plus aisés à dissimuler. Le préjudice du créancier étant ainsi caractérisé, le succès de l'action paulienne n'est alors pas subordonné à la preuve de l'appauvrissement du débiteur.

10. Pour rejeter l'action paulienne formée par M. [O], l'arrêt retient qu'en cédant le fonds de commerce qui lui appartenait, la société La Brasserie a remplacé un fonds de commerce par une somme d'argent, valeur plus aisément dissimulable, mais que M. [O] ne rapportant pas la preuve de l'insolvabilité, au moins apparente, de la société La Brasserie au moment de la cession de son fonds de commerce, il ne saurait être fait droit à son action paulienne.

11. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui a ajouté à la loi une condition qu'elle ne prévoit pas, a violé le texte susvisé.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de M. [O] en inopposabilité de la cession du fonds de commerce et ses demandes de condamnation en découlant, condamne M. [O] aux dépens de première instance et d'appel et dit n'y avoir lieu à application des dispositions de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 6 juillet 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Douai ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Douai autrement composée ;

Condamne M. [N] et la société LBR aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par M. [N] et la société LBR et les condamne à payer à M. [O] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé en l'audience publique du vingt-neuf janvier deux mille vingt-cinq et signé par M. Mollard, conseiller doyen en ayant délibéré, en remplacement de M. Vigneau, président, empêché, le conseiller référendaire rapporteur et le greffier de chambre conformément aux dispositions des articles 452, 456 et 1021 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 42500053
Date de la décision : 29/01/2025
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Analyses

ACTION PAULIENNE - Conditions - Préjudice - Cas - Remplacement d'un bien par des fonds plus aisés à dissimuler - Appauvrissement du débiteur - Preuve - Nécessité (non)

Il résulte de l'article 1341-2 du code civil que le créancier peut agir en son nom personnel pour faire déclarer inopposables à son égard les actes faits par son débiteur en fraude de ses droits, à charge d'établir, s'il s'agit d'un acte à titre onéreux, que le tiers cocontractant avait connaissance de la fraude. Un créancier dispose de l'action paulienne lorsque la cession, bien que consentie au prix normal, a pour effet de faire échapper un bien à ses poursuites en le remplaçant par des fonds plus aisés à dissimuler, ce qui caractérise le préjudice du créancier, qui n'a pas à rapporter la preuve, en outre, de l'appauvrissement du débiteur


Références :

Texte applicable : article 1341-2 du code civil
Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Douai, 06 juillet 2023

A rapprocher : Com., 1 mars 1994, pourvoi n° 92-15425, Bulletin 1994 IV N° 81


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 29 jan. 2025, pourvoi n°42500053


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau
Avocat(s) : SAS Boulloche, Colin, Stoclet et Associés, SCP Bouzidi et Bouhanna

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2025:42500053
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