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23/10/2024 | FRANCE | N°12400577

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 23 octobre 2024, 12400577


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :


CIV. 1


VB






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 23 octobre 2024








Cassation partielle






Mme CHAMPALAUNE, président






Arrêt n° 577 FS-B


Pourvoi n° V 22-17.103








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
____

_____________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 23 OCTOBRE 2024


M. [B] [U], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 22-17.103 contre l'arrêt rendu le 14 avril 2022 par la cour d'appel de Pari...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

VB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 octobre 2024

Cassation partielle

Mme CHAMPALAUNE, président

Arrêt n° 577 FS-B

Pourvoi n° V 22-17.103

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 23 OCTOBRE 2024

M. [B] [U], domicilié [Adresse 2], a formé le pourvoi n° V 22-17.103 contre l'arrêt rendu le 14 avril 2022 par la cour d'appel de Paris (pôle 3, chambre 4), dans le litige l'opposant à Mme [F] [Z], épouse [U], domiciliée [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

Mme [Z] a formé un pourvoi incident contre le même arrêt.

Le demandeur au pourvoi principal invoque, à l'appui de son recours, deux moyens de cassation.

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, un moyen unique de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Agostini, conseiller, les observations de la SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, avocat de M. [U], de la SCP Alain Bénabent, avocat de Mme [Z], et l'avis de M. Sassoust, avocat général, après débats en l'audience publique du 10 septembre 2024 où étaient présents Mme Champalaune, président, Mme Agostini, conseiller rapporteur, Mme Auroy, conseiller doyen, Mmes Antoine, Poinseaux, M. Fulchiron, Mmes Dard, Beauvois, conseillers, M. Duval, Mme Azar, M. Buat-Ménard, Mmes Lion, Daniel, Marilly, Vanoni-Thiery, conseillers référendaires, M. Sassoust, avocat général, et Mme Layemar, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 avril 2022), un jugement du 19 novembre 2019 a prononcé le divorce de Mme [Z] et de M. [U], aux torts exclusifs de celui-ci.

2. M. [U] a formé, contre cette décision, un appel limité aux effets du divorce.

3. Mme [Z] a formé un appel incident.

Sur le moyen unique du pourvoi incident

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen, pris en sa première branche, du pourvoi principal

Enoncé du moyen

5. M. [U] fait grief à l'arrêt de prononcer le divorce des époux à ses torts exclusifs, alors « que si l'appelant incident a intérêt à critiquer les chefs d'un jugement portant sur les conséquences du divorce, il est dépourvu de tout intérêt à critiquer le principe du divorce sur lequel il a obtenu gain de cause ; qu'en admettant que Mme [Z] "avait un intérêt à agir dès lors que le prononcé du divorce met fin, ipso facto, aux mesures provisoires ordonnées dans le cadre de l'ordonnance de non-conciliation" pour retenir qu'elle a "intérêt certain à ce que le devoir de secours qui perdure généralement durant toute la durée de la procédure en divorce, perdure pendant la cour d'appel", quand il est constant et non contesté que Mme [Z] a obtenu gain de cause sur le principe du divorce, le jugement de première instance ayant prononcé le divorce pour faute aux torts exclusifs de M. [U], la cour d'appel a violé les articles 31, 122 et 546 du code de procédure civile. »

Réponse de la Cour

Vu les articles 31, 32, 122, 546 et 562 du code de procédure civile :

6. Aux termes de l'article 546 du code de procédure civile, le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt si elle n'y a pas renoncé.

7. Il résulte de la combinaison des articles 31, 32, 122 et 546, alinéa 1er, du code de procédure civile que l'intérêt à interjeter appel a pour mesure la succombance, qui réside dans le fait de ne pas avoir obtenu satisfaction sur un ou plusieurs chefs de demande présentés en première instance.

8. Aux termes de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable au litige, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible.

9. En conséquence, lorsque l'appel tend à la réformation du jugement, la recevabilité de l'appel doit être appréciée en fonction de l'intérêt à interjeter appel pour chacun des chefs de jugement attaqués.

10. Pour écarter la fin de non-recevoir prise de l'irrecevabilité de l'appel incident formé par Mme [Z] pour défaut d'intérêt à agir et, infirmant le jugement de ce chef, prononcer le divorce aux torts exclusifs de M. [U], l'arrêt retient que Mme [Z] a un intérêt certain à ce que le devoir de secours perdure pendant la procédure d'appel, de sorte qu'elle est recevable à faire appel de ce chef.

11. En statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que le divorce avait été prononcé conformément aux prétentions de première instance de l'épouse, de sorte que son intérêt à former appel de ce chef ne pouvait s'entendre de l'intérêt à ce que, en vertu de l'effet suspensif de l'appel, le divorce n'acquière force de chose jugée qu'à la date à laquelle les conséquences du divorce acquièrent elles-mêmes force de chose jugée, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

12. En application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif de l'arrêt qui, infirmant le jugement de ce chef, prononce le divorce de Mme [Z] et M. [U] aux torts exclusifs de celui-ci, entraîne la cassation du chef du dispositif relatif à la prestation compensatoire qui s'y rattache par un lien de dépendance nécessaire, dès lors que celle-ci doit être appréciée à la date à laquelle le prononcé du divorce acquiert force de chose jugée.

13. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile , il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

14. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

15. Aux termes de l'article 546 du code de procédure civile, le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt si elle n'y a pas renoncé.

16. L'intérêt à interjeter appel a pour mesure la succombance, qui réside dans le fait de ne pas avoir obtenu satisfaction sur un ou plusieurs chefs de demande présentés en première instance.

17. Le jugement du 10 novembre 2019 ayant prononcé le divorce de M. [U] et de Mme [Z] aux torts exclusifs de l'époux, conformément aux prétentions de l'épouse, l'intérêt de celle-ci à former appel, qui s'apprécie à la date de l'appel, ne peut s'entendre de son intérêt à voir reporter la date à laquelle ce chef du jugement acquiert force de chose jugée pour permettre la prolongation des effets des mesures ordonnées au titre du devoir de secours.

18. Il y a donc lieu de déclarer irrecevable l'appel incident formé par Mme [Z] dans ses premières conclusions du 30 juillet 2020 en ce qu'il est formé contre le chef du jugement prononçant le divorce aux torts exclusifs de M. [U].

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce que, infirmant le jugement de ces chefs, il prononce pour faute, aux torts exclusif de l'époux, le divorce de Mme [Z] et de M. [U], et ordonne sa publication conformément aux dispositions de l'article 1082 du code de procédure civile, fixe le montant de la prestation compensatoire due par M. [U] à Mme [Z] à la somme de 250 000 euros payable en une seule fois, l'arrêt rendu le 14 avril 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi des chefs relatifs au prononcé du divorce de Mme [Z] et de M. [U] aux torts exclusifs de M. [U] ;

DÉCLARE irrecevable l'appel de Mme [Z] des chefs relatifs au prononcé du divorce ;

Remet, sur la seule question de la prestation compensatoire sollicitée par Mme [Z], l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;

Condamne Mme [Z] aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois octobre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12400577
Date de la décision : 23/10/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Analyses

DIVORCE, SEPARATION DE CORPS - Appel - Intérêt - Existence - Appréciation - Prétentions accueillies en première instance - Défaut - Portée

APPEL CIVIL - Intérêt - Existence - Portée - Appréciation - Chefs du jugement attaqués APPEL CIVIL - Recevabilité - Conditions - Détermination

Aux termes de l'article 546 du code de procédure civile, le droit d'appel appartient à toute partie qui y a intérêt si elle n'y a pas renoncé. Il résulte de la combinaison des articles 31, 32, 122 et 546, alinéa 1, du code de procédure civile que l'intérêt à interjeter appel a pour mesure la succombance, qui réside dans le fait de ne pas avoir obtenu satisfaction sur un ou plusieurs chefs de demande présentés en première instance. Aux termes de l'article 562 du code de procédure civile, dans sa rédaction applicable au litige, l'appel défère à la cour la connaissance des chefs de jugement qu'il critique expressément et de ceux qui en dépendent, la dévolution ne s'opérant pour le tout que lorsque l'appel tend à l'annulation du jugement ou si l'objet du litige est indivisible. En conséquence, lorsque l'appel tend à la réformation du jugement, la recevabilité de l'appel doit être appréciée en fonction de l'intérêt à interjeter appel pour chacun des chefs de jugement attaqués. Dès lors, l'intérêt d'un époux à former appel du chef d'un jugement prononçant le divorce ne peut s'entendre de l'intérêt à ce que, en vertu de l'effet suspensif de l'appel, le divorce n'acquière force de chose jugée qu'à la date à laquelle les conséquences du divorce acquièrent elles-mêmes force de chose jugée


Références :

Articles 31, 32, 122, 546, alinéa 1, et 562 du code de procédure civile.
Publié au bulletin

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 14 avril 2022

2e Civ., 4 mars 2021, pourvoi n° 19-21579, Bull., (cassation partielle sans renvoi) ;

Avis de la Cour de cassation, 20 avril 2022, n° 22-70.001, Bull.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 23 oct. 2024, pourvoi n°12400577


Composition du Tribunal
Président : Mme Champalaune
Avocat(s) : SARL Meier-Bourdeau, Lécuyer et associés, SCP Bénabent

Origine de la décision
Date de l'import : 19/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:12400577
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