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23/06/2021 | FRANCE | N°18-24597

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 23 juin 2021, 18-24597


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 juin 2021

Cassation partielle

M. CATHALA, président

Arrêt n° 800 FS-B

Pourvoi n° G 18-24.597

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 23 JUIN 2021

M. [I] [F], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 18-24.597 contre

l'arrêt rendu le 6 septembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 5), dans le litige l'opposant à la société Crédit agricole, so...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 23 juin 2021

Cassation partielle

M. CATHALA, président

Arrêt n° 800 FS-B

Pourvoi n° G 18-24.597

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 23 JUIN 2021

M. [I] [F], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° G 18-24.597 contre l'arrêt rendu le 6 septembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 5), dans le litige l'opposant à la société Crédit agricole, société anonyme, dont le siège est [Adresse 2], défenderesse à la cassation.

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Pietton, conseiller, les observations de la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat de M. [F], de la SCP Célice, Texidor, Périer, avocat de la société Crédit agricole, et l'avis de Mme Laulom, avocat général, après débats en l'audience publique du 11 mai 2021 où étaient présents M. Cathala, président, M. Pietton, conseiller rapporteur, Mme Leprieur, conseiller doyen, Mmes Le Lay, Mariette, MM. Barincou, Seguy, conseillers, Mme Duvallet, M. Le Corre, Mmes Prache, Marguerite, conseillers référendaires, Mme Laulom, avocat général, et Mme Lavigne, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 septembre 2018), M. [F] a été engagé par la société Crédit agricole le 9 mai 1994 et a été mis à disposition d'une filiale, la société Sodica, à compter du 1er janvier 2005, pour y exercer les fonctions de responsable d'affaires fusions-acquisitions.

2. Les sociétés Crédit agricole et Sodica ont estimé que les contrats de travail des salariés mis à disposition de la seconde société étaient transférés en application de l'article L. 1224-1 du code du travail à compter du 1er janvier 2014.

3. Le 15 juillet 2014, le salarié a saisi la juridiction prud'homale d'une demande dirigée à l'encontre de la société Sodica en résiliation judiciaire de son contrat de travail et en paiement d'indemnités liées à la rupture.

4. Le 18 septembre 2014, la société Sodica lui a notifié son licenciement pour cause réelle et sérieuse.

5. Le 19 septembre 2014, M. [F] a demandé à la société Crédit agricole sa réintégration en son sein. Celle-ci lui a opposé un refus par lettre du 7 octobre 2014 en raison d'un transfert de son contrat de travail à la société Sodica.

6. Le salarié a saisi la juridiction prud'homale, notamment pour contester le transfert de son contrat de travail de la société Crédit agricole à la société Sodica et obtenir sa réintégration au sein de la société Crédit agricole.

Examen du moyen

Sur le moyen, pris en sa première branche, ci-après annexé

7. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce grief qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le moyen, pris en sa seconde branche

Enoncé du moyen

8. L'intéressé fait grief à l'arrêt de le débouter de ses demandes formées à l'encontre de la société Crédit agricole, alors « que le transfert des contrats de travail est réalisé à la date du transfert effectif des moyens d'exploitation à la nouvelle entité ; que l'employeur ne peut reporter à sa guise ce transfert à une date ultérieure, ni en différer les effets ; qu'en jugeant que le Crédit agricole avait transféré le contrat de travail de M. [F] à Sodica le 1er janvier 2014 tout en constatant « la modification originelle de la situation juridique de l'employeur », la cour d'appel a violé l'article L. 1224-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu l'article L. 1224-1 du code du travail :

9. Ce texte, interprété à la lumière de la Directive n° 2001/23/CE du 12 mars 2001, s'applique en cas de transfert d'une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise. Constitue une entité économique autonome un ensemble organisé de personnes et d'éléments corporels ou incorporels poursuivant un objectif économique propre. Le transfert d'une telle entité se réalise si des moyens corporels ou incorporels significatifs et nécessaires à l'exploitation de l'entité sont repris, directement ou indirectement, par un nouvel exploitant.

10. Le transfert d'une entité économique autonome s'opère à la date à laquelle le nouvel exploitant est mis en mesure d'assurer la direction de cette entité.

11 Pour rejeter les demandes du salarié, l'arrêt retient que la filiale Sodica, spécialisée dans les opérations de fusions-acquisitions et d'ingénierie financière et boursière, intervient en support de l'activité des réseaux bancaires et des filiales du groupe Crédit agricole. Il relève qu'il ressort des pièces produites que les contrats de travail des salariés dédiés au lancement d'activité de Sodica n'ont pas été transférés dès la filialisation de l'activité afin de ne pas exposer les salariés à la crainte de voir leur contrat de travail rompu en raison d'une cession de l'activité tant que l'activité de Sodica n'était pas assez pérenne et ne nécessitait plus le recours à l'expertise de collaborateurs d'une autre société. Il ajoute que l'adoption en 2011 de la directive européenne Alternative Investment Funds Managers, transposée en droit français le 22 juillet 2013, a entraîné la nécessité de réorganiser l'activité d'opérations de fusions-acquisitions, d'ingénierie financière et boursière, et que toute cette activité a alors dû être localisée au sein d'une entité juridiquement distincte de celle de la société Crédit agricole pour qu'il soit ensuite distingué les activités de placement et d'investissement. Il relève encore que la séparation des activités des deux entités a conduit au transfert légal des contrats de travail des salariés dédiés à cette activité dont celui de l'intéressé et que l'activité s'est bien poursuivie, grâce au même personnel, dans les mêmes conditions et avec la clientèle de la société Crédit agricole. Il retient enfin que le volet social de la filialisation de l'activité dédiée aux activités de fusions-acquisitions a été mis en oeuvre une fois que cette activité est devenue pérenne, ce qui établit la modification originelle de la situation juridique de l'employeur et permet de retenir que les conditions d'application de l'article L. 1224-1 du code du travail sont réunies et que le contrat de travail a été légalement transféré à la société Sodica à compter du 1er janvier 2014.

12. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser à la date du 1er janvier 2014 le transfert d'une entité économique autonome qui conserve son identité et dont l'activité est poursuivie ou reprise entre la société Crédit agricole et la société Sodica, de nature à entraîner le transfert légal du contrat de travail du salarié mis à disposition depuis le 1er janvier 2005 de la société filiale Sodica, la cour d'appel a violé l'article susvisé.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette la demande de M. [F] en réintégration au sein de la société Crédit agricole, sa demande en paiement d'une indemnité de réintégration correspondant aux salaires échus et de congés payés afférents, ses demandes subsidiaires en paiement d'indemnités compensatrice de préavis, compensatrice de préavis sur congés payés, conventionnelle de licenciement et de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et en réparation du préjudice lié aux conditions vexatoires de celui-ci et en paiement de dommages-intérêts pour harcèlement moral, l'arrêt rendu le 6 septembre 2018, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Crédit agricole aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Crédit agricole et la condamne à payer à M. [F] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille vingt et un.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :

Moyen produit par la SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, avocat aux Conseils, pour M. [F]

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement ayant débouté M. [F] de toutes ses demandes formées à l'encontre du Crédit Agricole.

AUX MOTIFS PROPRES QUE l'article L. 1224-1 du code du travail dispose que lorsque survient une modification dans la situation juridique de l'employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l'entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le personnel de l'entreprise ; que le transfert légal des contrats de travail prévu par l'article L. 1224-1 est soumis à la double condition de l'existence d'une unité économique autonome et au maintien de l'identité et la poursuite de l'activité de l'entité économique ; qu'en premier lieu, il n'est pas contesté que les sociétés Crédit Agricole et Sodica font partie d'une unité économique et sociale (Ues) dotée d'une représentation du personnel commune et d'un même statut collectif ; que la société Crédit Agricole, organe central veillant au bon fonctionnement du réseau, représentant le groupe au sein des autorités bancaires, coordonnant les stratégies des différents métiers présents dans le groupe, regroupant les fonctions supports et garantissant l'unité financière du groupe en qualité de banque centrale, n'est dotée d'aucune fonction opérationnelle ; que sa filiale Sodica est spécialisée dans les opérations de fusions acquisitions et d'ingénierie financière et boursière de taille moyenne (mid-caps) et petite (small-caps) qui intervient en support de l'activité des réseaux bancaires et des filiales du groupe Crédit Agricole, qu'il ressort de l'argumentation et des pièces produites par les sociétés intimées que les contrats de travail des salariés dédiés au lancement d'activité de Sodica n'ont pas été transférés dès la filialisation de l'activité afin de ne pas exposer les salariés à la crainte de voir leur contrat de travail rompu en raison d'une cession de l'activité tant que l'activité de Sodica n'était pas assez pérenne et ne nécessitait plus le recours à l'expertise de collaborateurs d'une autre société ; que l'adoption en 2011 de la directive européenne dite Aifm (Alternative Investment Funds Managers) qui a pour objectif de réguler les gestionnaires de fonds d'investissement alternatifs et de surveiller et limiter les risques systémiques, transposée en droit français le 22 juillet 2013, a entraîné la nécessité de réorganiser l'activité d'opérations de fusions-acquisitions, d'ingénierie financière et boursière ; que toute cette activité a alors dû être localisée au sein d'une entité juridiquement distincte de celle de la société Crédit Agricole pour qu'il soit ensuite distingué les activités de placement (MetA et Ecm) et d'investissement (Capital investissement) ; que la séparation des activités des deux entités a conduit au transfert légal des contrats de travail des salariés dédiés à cette activité dont celui de [I] [F], étant précisé que les salariés ont conservé l'intégralité de leur contrat de travail et de leur statut collectif, conclus au niveau de l'Ues ; que l'activité s'est bien poursuivie, grâce au même personnel, dans les mêmes conditions et avec la clientèle de la société Crédit Agricole ; que les sociétés intimées produisent en particulier les procès-verbaux de réunions tenues les 20 décembre 2012 et 21 février 2013 avec le comité d'entreprise commun de l'Ues Crédit Agricole, dont il ressort que celui-ci a été informé et consulté sur le projet de transfert des contrats de travail vers la société Sodica dans le cadre des dispositions de l'article L. 1224-1 du code du travail, que sur les 108 salariés en activité sur la structure Sodica, 55 relèvent du statut Crédit Agricole mis à disposition de Sodica et sont concernés par ce transfert, et que "les éléments du contrat de travail que vous aviez à CA S.A. sont transférés à l'identique chez votre nouvel employeur qui devient Sodica S.A." ; il est précisé que l'accord du salarié n'est pas nécessaire compte tenu du mécanisme de transfert automatique mais qu'au regard des demandes exprimées d'avoir des garanties sur les indemnités conventionnelles de licenciement en cas de sortie de l'Ues, il sera soumis à la signature des collaborateurs concernés un avenant destiné à lui assurer cette garantie s'il le souhaite ; que le 21 février 2013, la commission économique a constaté l'engagement de la direction d'offrir au personnel transféré des garanties d'emploi et de statut à l'instar de ce qui a été fait pour "Ca-Cp" avec un maintien de l'emploi et de la totalité des effectifs sans mobilité géographique contrainte, reprise de tous les éléments individuels du contrat de travail et maintien intégral de toutes les caractéristiques de la rémunération, contractualisation des indemnités conventionnelles de licenciement, selon les modalités de calcul prévues dans l'accord collectif Crédit Agricole appliquées en fonction de l'ancienneté acquise par le salarié à la date de sortie éventuelle de l'Ues, maintien de la société dans l'Ues Crédit Agricole et de l'ensemble des dispositions et accords collectifs, en cas de sortie de l'Ues pour survenance d'un événement majeur comme une évolution capitalistique, maintien du système de prévoyance/santé pendant une année, maintien de l'ancienneté, de la rémunération et de la qualification acquise dans l'Ues et engagement de la direction de négocier un nouveau statut de niveau équivalent pour les collaborateurs de Sodica ; que les sociétés intimées font valoir que la démarche de rationalisation des activités s'est par la suite poursuivie et a conduit Sodica dans le cadre de la directive Aifm à autonomiser son activité de gestion des investissements afin d'obtenir l'agrément des marchés financiers, en créant une filiale, Idia Capital Investissement, à laquelle l'ensemble des activités de capital investissement ont été transférées ainsi que les contrats de travail des salariés dédiés à cette activité ; que [I] [F] prétend que les conditions d'application de l'article L. 1224-1 du code du travail n'auraient pas été réunies en l'absence de modification de la situation juridique de l'employeur et que l'argument de la mise en conformité à la directive Aifm alléguée est inopérant au motif que le pôle conseil en fusions acquisitions qu'il dirigeait n'aurait pas été soumis à cette directive ; que cependant, les sociétés intimées explicitent de manière argumentée et cohérente les raisons juridiques pour lesquelles le volet social de la filialisation de l'activité dédiée aux activités de fusions-acquisitions a été mis en oeuvre une fois que cette activité est devenue pérenne, ce qui établit la modification originelle de la situation juridique de l'employeur et permet de retenir que les conditions d'application de l'article L. 1224-1 du code du travail sont réunies ; que par ailleurs, les sociétés intimées justifient que le pôle conseil auquel était rattaché [I] [F] a deux champs d'activité : la gestion des fonds et le conseil aux entreprises et qu'ainsi, alors que l'objet de la directive Aifm est la régulation des gestionnaires de fonds d'investissement, le pôle conseil de Sodica était directement concerné par l'application de la directive ; en effet, il ressort du procès-verbal du comité d'entreprise du 20 décembre 2012 que dans l'activité conseil, outre des expertises dédiées pour des entreprises de taille intermédiaire ou petite, se trouve également "des activités dédiées à des opérations totalement financières puisqu'il s'agit pour nous d'accompagner une entreprise dans des opérations d'introduction en bourse, donc dans la mise sur les marchés du capital d'une entreprise". La cour relève ici que [I] [F] se plaindra lui-même en juin 2014 dans un courriel au directeur général de la société Sodica, [T] [Q] de ce que : "l'activité Ecm déjà sortie de mon périmètre récupère l'activité levée de fonds (non publiques) au détriment de l'activité qui me reste", ce dont il se déduit que le périmètre de ses activités incluait des opérations financières ; qu'il résulte de tout ce qui précède que, nonobstant l'absence de signature par [I] [F] de l'avenant à son contrat de travail relatif au calcul de l'indemnité conventionnelle de licenciement, son contrat de travail a été légalement transféré à la société Sodica à compter du 1er janvier 2014, ce qu'il ne pouvait ignorer du fait de son niveau de responsabilités au sein de la société Sodica et comme il en a été de toutes les façons personnellement informé par lettre conjointe datée du 19 décembre 2013, signée par [K] [D], président de la société Sodica et de [Z] [K], directeur des ressources humaines Groupe ; que par conséquent, l'appelant n'est pas fondé en ses demandes formées à l'encontre de la société Crédit Agricole tant principalement au titre de la réintégration, de l'indemnité de réintégration avec congés payés, que subsidiairement au titre de l'indemnité compensatrice de préavis avec congés payés afférents, indemnité de licenciement conventionnelle, indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et dommages et intérêts pour préjudice lié aux conditions vexatoires.

ET AUX MOTIFS ADOPTES DES PREMIERS JUGES que la décision de transfert des contrats de travail au 1er Janvier 2014 a été prise dans le cadre d'une évolution de la réglementation visant à loger dans une structure spécifique les activités du type de celles opérées par Sodica, et particulièrement le capital investissement ; que le Crédit Agricole SA n'exerçant pas en direct ces activités en a souhaité la poursuite dans un cadre autonome chez Sodica ; que la totalité des contrats de travail des salariés mis à disposition de Sodica par Crédit Agricole SA a fait l'objet d'un transfert à Sodica ; que le comité d'entreprise commun à l'unité économique et sociale (UES) Crédit agricole SA, dont fait partie Sodica a été régulièrement informé et consulté en Février 2013 ; que M. [F] a refusé de signer l'avenant à son contrat de travail du 19 Décembre 2013 qui ne visait qu'à préserver ses droits à indemnisation en cas de licenciement au cas où Sodica n'aurait plus fait partie du périmètre de l'UES Crédit Agricole ; que la décision de transfert n'a entraîné aucune modification d'un élément essentiel du contrat de travail de M. [F] ; qu'il en résulte que le contrat de travail a été transféré conformément aux dispositions légales, et que le transfert au 1er Janvier 2014 s'impose à M. [F] malgré son refus de signer l'avenant. Par voie de conséquence, à compter de cette date il n'existe plus de contrat de travail entre M. [F] et le Crédit Agricole qui doit être mis hors de cause, et par là même il ne sera pas fait droit à ses demandes à l'encontre de Crédit Agricole SA.

ALORS QUE D'UNE PART, les dispositions d'ordre public de l'article L. 1224-1 du Code du travail ne s'appliquent qu'en cas de modification dans la situation juridique de l'employeur ; que pour justifier le transfert à la société Sodica du contrat de travail unissant M. [F] au Crédit Agricole, la Cour a retenu que l'adoption en 2011 de la directive AIFM avait obligé le Crédit Agricole à localiser l'activité de fusions-acquisitions au sein d'une entité juridique distincte, la société Sodica ; qu'en statuant ainsi sans répondre aux conclusions par lesquelles M. [F] faisait valoir (Prod. 8 p. 15 et s.) que le Pôle « Conseil » en fusionsacquisitions qu'il dirigeait n'était pas concerné par la directive AIFM ; qu'au soutien de cette affirmation, il produisait un document intitulé « information/consultation sur le projet d'agrément AMF dans le cadre de la directive AIFM » (Prod. 11) dont il résultait que seules les activités de capital Investissement, auxquelles M. [F] ne prenait aucune part, étaient concernées par la nouvelle règlementation et qu'était inchangé (Prod. 11, p. 11) le rattachement des salariés du pôle MetA correspondant au Pôle Conseil dont M. [F] était chargé ; que pour avoir omis de répondre à ces conclusions déterminantes et d'examiner le document susvisé quant au transfert du contrat de travail de M. [F], la Cour a violé l'article 455 du Code de procédure civile.

ALORS QUE D'AUTRE PART, le transfert des contrats de travail est réalisé à la date du transfert effectif des moyens d'exploitation à la nouvelle entité ; que l'employeur ne peut reporter à sa guise ce transfert à une date ultérieure, ni en différer les effets ; qu'en jugeant que le Crédit Agricole avait transféré le contrat de travail de M. [F] à Sodica le 1er janvier 2014 tout en constatant « la modification originelle de la situation juridique de l'employeur » (arrêt p. 5, avant dernier alinéa), la Cour a violé l'article L. 1224-1 du Code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 18-24597
Date de la décision : 23/06/2021
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Modification dans la situation juridique de l'employeur - Définition - Transfert d'une entité économique autonome conservant son identité - Moment - Détermination - Portée

CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Modification dans la situation juridique de l'employeur - Continuation du contrat de travail - Conditions - Transfert d'une entité économique autonome - Date d'effet du transfert - Cessionnaire mis en mesure d'assurer la direction de l'entité - Détermination - Portée

En application de l'article L. 1224-1 du code du travail, le transfert d'une entité économique autonome s'opère à la date à laquelle le nouvel exploitant est mis en mesure d'assurer la direction de cette entité


Références :

Article L. 1224-1 du code du travail, interprété à la lumière de la directive n° 2001/23/CE du Conseil du 12 mars 2001 concernant le rapprochement des législations des Etats membres relatives au maintien des droits des travailleurs en cas de transfert d'en
treprises, d'établissements ou de parties d'entreprises ou d'établissements.

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 septembre 2018

Sur la date du transfert de l'entité économique qui opère le changement d'employeur, à rapprocher : Soc., 4 février 2009, pourvoi n° 07-42024, Bull. 2009, V, n° 37 (2) (rejet).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 23 jui. 2021, pourvoi n°18-24597, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Cathala
Avocat(s) : SCP Baraduc, Duhamel et Rameix, SCP Célice, Texidor, Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 21/12/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:18.24597
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