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03/02/2021 | FRANCE | N°19-10669

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 03 février 2021, 19-10669


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 février 2021

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 132 FP-P+I

Pourvoi n° Q 19-10.669

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 3 FÉVRIER 2021

La société Commissions Import Export (Commisimpex), dont le siège

est [...] ), a formé le pourvoi n° Q 19-10.669 contre l'arrêt rendu le 6 septembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 8), dans le l...

LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

CIV. 1

CF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 3 février 2021

Rejet

Mme BATUT, président

Arrêt n° 132 FP-P+I

Pourvoi n° Q 19-10.669

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, DU 3 FÉVRIER 2021

La société Commissions Import Export (Commisimpex), dont le siège est [...] ), a formé le pourvoi n° Q 19-10.669 contre l'arrêt rendu le 6 septembre 2018 par la cour d'appel de Paris (pôle 4, chambre 8), dans le litige l'opposant :

1°/ à la République du Congo, dont le siège est ministère de la justice, boulevard Denis Sassou-N'Guesso, BP 2497, Brazzaville (République du Congo), agissant poursuites et diligences de son ministre de la justice, des droits humains et de la promotion des peuples autochtones,

2°/ au procureur général près la cour d'appel de Paris, domicilié en son parquet général, [...],

défendeurs à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, un moyen d'annulation et trois moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Acquaviva, conseiller, les observations de la SCP Ortscheidt, avocat de la société Commissions Import Export, de la SCP Gouz-Fitoussi, avocat de la République du Congo, et l'avis de Mme Caron-Déglise, avocat général, après débats en l'audience publique du 9 décembre 2020 où étaient présents Mme Batut, président, M. Acquaviva, conseiller rapporteur, Mme Duval-Arnould, conseiller doyen de chambre, Mme Auroy, conseiller doyen de section, M. Vigneau, Mme Teiller, M. Avel, conseillers, Mme Mouty-Tardieu, M. Vitse, conseillers référendaires, Mme Caron-Déglise, avocat général, et Mme Berthomier, greffier de chambre,

la première chambre civile de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 421-4-1 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 6 septembre 2018), la société Commissions Import Export (Commisimpex), en exécution des deux sentences arbitrales rendues les 3 décembre 2000 et 21 janvier 2013, condamnant la République du Congo à lui payer diverses sommes, a fait pratiquer, le 19 octobre 2016, entre les mains d'une banque, une saisie-attribution de différents comptes ouverts en ses livres au nom de la mission diplomatique de cet Etat à Paris. Celui-ci, opposant son immunité souveraine d'exécution, a contesté la validité de ces mesures, en l'absence de renonciation expresse et spéciale, et en a demandé la mainlevée.

Examen des moyens

Sur le moyen d'annulation et le deuxième moyen de cassation, ci-après annexés

2. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Sur les premier et troisième moyens de cassation, réunis

Enoncé du moyen

3. Par son premier moyen, la société Commisimpex fait grief à l'arrêt d'ordonner la mainlevée de la saisie-attribution en ce qu'elle a porté sur les comptes « Ambassade du Congo OGES », « Ambassade du Congo », « Ambassade du Congo », « Paierie Pres Ambassade du Congo France », « Ambassade du Congo-cellule communication », « Del Congo Brazzaville », alors :

« 1°/ que le juge doit préciser le fondement juridique de sa décision ; qu'en se bornant à affirmer qu'il « est de principe que les comptes bancaires ouverts par une ambassade sont présumés affectés à l'exercice de la mission diplomatique de celle-ci », pour en déduire que la charge de la preuve de ce que les comptes bancaires en cause n'étaient pas affectées à des fins diplomatiques pèse sur la société Commisimpex, sans préciser le fondement juridique de sa décision sur ce point, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 12 du code de procédure civile ;

2°/ qu'en toute hypothèse, il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ; que s'il existe une présomption d'affectation à l'exercice des missions diplomatiques des fonds qui sont déposés sur des comptes bancaires diplomatiques, cette présomption ne vaut que pour les comptes ouverts par l'État étranger pour les besoins de ses missions diplomatiques ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que « l'intitulé des comptes saisis, tels que rapporté ci-dessus, à l'exception des comptes intitulés « Caisse Congolaise d'amortissement » et « Equatorial Congo Airlines-Ecair » permet de présumer leur affectation à l'accomplissement des fonctions des missions diplomatiques de la République du Congo et la société Commisimpex n'apporte pas la preuve contraire, dont la charge lui incombe », alors qu'il appartenait à la République du Congo de prouver que les comptes avaient été ouverts pour l'exercice de ses missions diplomatiques pour que les fonds déposés puissent bénéficier de la présomption d'affectation à l'exercice de ses missions, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation de l'article 1315 du code civil ;

3°/ qu'en toute hypothèse, le principe de l'égalité des armes, qui participe du droit au procès équitable tel qu'il est garanti par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, suppose que chaque partie soit astreinte à des obligations processuelles, notamment en termes de preuve, qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire ; qu'en l'espèce, la preuve que des comptes bancaires ne sont pas affectés à l'exercice de la mission diplomatique est impossible à rapporter par le créancier saisissant dès lors que les données pertinentes nécessaires à cette preuve ne peuvent être détenues que par l'établissement bancaire qui tient les comptes, lequel peut opposer le secret bancaire, ou par le débiteur lui-même ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que « l'intitulé des comptes saisis, tels que rapporté ci-dessus, à l'exception des comptes intitulés « Caisse congolaise d'amortissement » et « Equatorial Congo Airlines-Ecair » permet de présumer leur affectation à l'accomplissement des fonctions des missions diplomatiques de la République du Congo et la société Commisimpex n'apporte pas la preuve contraire, dont la charge lui incombe », alors qu'une telle preuve est impossible à rapporter pour la société Commisimpex et que la preuve inverse est extrêmement aisée pour la République du Congo, la cour d'appel a violé l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en tant qu'il garantit le principe de l'égalité des armes. »

4. Par son troisième moyen, la société Commisimpex fait le même grief à l'arrêt, alors :

« 1°/ que la référence à une décision rendue dans un litige différent de celui soumis à une juridiction ne saurait, en toute hypothèse, servir de fondement à la décision de cette dernière ; qu'en statuant comme elle l'a fait, au motif que « contrairement à ce que soutient la société Commisimpex, la jurisprudence (1re Civ., 28 septembre 2011, pourvoi n° 09-72.057, 1re Civ., 28 mars 2013, pourvois n° 10-25.093 et n° 11-10.450), antérieure à l'adoption de la loi Sapin 2, laquelle est inapplicable au présent litige, mais confortée par celle-ci, subordonnait la validité de la renonciation par un État étranger à son immunité d'exécution sur ses biens diplomatiques à la double condition qu'elle soit expresse et spéciale », la cour d'appel a violé l'article 5 du code civil, ensemble l'article 455 du code de procédure civile ;

2°/ que le juge doit préciser le fondement juridique de sa décision ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que « la validité de la renonciation par un État étranger à son immunité d'exécution sur ses biens diplomatiques à la double condition qu'elle soit expresse et spéciale », sans préciser le fondement juridique de sa décision sur ce point, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 12 du code de procédure civile ;

3°/ que l'exigence d'une renonciation spéciale à l'immunité diplomatique d'exécution des comptes bancaires des missions diplomatiques a été posée pour la première fois par la Cour de cassation le 28 septembre 2011, et ne peut s'appliquer à des clauses de renonciation à immunité conclues antérieurement ; qu'en imposant une renonciation spéciale à l'immunité d'exécution de la mission diplomatique de la République du Congo, la République du Congo ayant consenti la clause de renonciation à son immunité en 1993, la cour d'appel a violé l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4°/ que l'exigence d'une renonciation spéciale à l'immunité diplomatique d'exécution des comptes bancaires des missions diplomatiques a été posée pour la première fois par la Cour de cassation par un arrêt rendu le 28 septembre 2011, la solution ayant ensuite été réitérée le 28 mars 2013, avant d'être abandonnée le 13 mai 2015, pour être reprise par une loi du 9 décembre 2016 entrée en vigueur le 11 décembre 2016 et applicable aux voies d'exécution postérieures, puis par arrêt du 10 janvier 2018 ; qu'en imposant une renonciation spéciale à l'immunité d'exécution de la mission diplomatique de la République du Congo, pour juger de la validité de saisies pratiquées le 19 octobre 2016, alors qu'à cette date, l'état du droit positif n'imposait pas une renonciation spéciale, la cour d'appel a violé l'article 6, § 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

5. Selon le droit international coutumier, les missions diplomatiques des Etats étrangers bénéficient, pour le fonctionnement de la représentation de l'Etat accréditaire, d'une immunité d'exécution à laquelle il ne peut être renoncé que de façon expresse et spéciale (1re Civ., 28 septembre 2011, pourvoi n° 09-72.057, Bull. 2011, I, n° 153 ; 1re Civ., 28 mars 2013, pourvois n° 10-25.938, n° 11-10.450 et n° 11-13.323, Bull. 2013, I, n° 62 à 64 ; 1re Civ., 10 janvier 2018, pourvoi n° 16-22.494, Bull. 2018, I, n° 2). Cette immunité s'étend, notamment, aux fonds déposés sur les comptes bancaires des missions diplomatiques, lesquels sont présumés être affectés aux besoins de la mission de souveraineté de l'Etat accréditaire.

6. Cette présomption, justifiée par la nécessité de préserver cette mission à l'exercice de laquelle participent les représentations diplomatiques, cède devant la preuve contraire qui, pouvant être rapportée par tous moyens, n'est pas rendue impossible aux créanciers.

7. Ayant retenu, d'abord, que l'intitulé des comptes bancaires saisis, à l'exception de deux d'entre eux, confortait la présomption d'affectation des fonds les créditant à l'exercice de la mission diplomatique de la représentation du Congo en France, ensuite, que la société Commisimpex n'apportait pas d'éléments de preuve contraire, enfin, qu'il n'était pas discuté que la République du Congo n'avait pas renoncé de façon expresse et spéciale à son immunité d'exécution sur ses biens diplomatiques, la cour d'appel, qui a fait application des règles du droit positif en se plaçant, comme elle le devait, à la date à laquelle elle statuait, sans inverser la charge de la preuve ni méconnaître le principe de l'égalité des armes, en a exactement déduit que la mainlevée de la saisie devait être ordonnée.

8. Elle n'a pas, ainsi, porté atteinte à la sécurité juridique, laquelle ne peut faire obstacle à l'application immédiate d'une solution nouvelle résultant d'une évolution de la jurisprudence, dès lors que la société Commisimpex n'a pas été privée du droit à l'accès au juge.

9. Les moyens ne sont donc pas fondés.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Commisimpex aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, signé par Mme Duval-Arnould, conseiller doyen, conformément aux dispositions des articles 456 et 1021 du code de procédure civile, en remplacement du conseiller rapporteur empêché, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille vingt et un.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen d'annulation produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Commissions Import Export

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir ordonné la mainlevée de la saisie-attribution du 19 octobre 2016 en ce qu'elle a porté sur les comptes suivants « Ambassade du Congo OGES », « Ambassade du Congo », « Ambassade du Congo », « Paierie Pres Ambassade du Congo France », « Ambassade du Congo-cellule communication », « Del Congo Brazzaville » ;

AUX MOTIFS QUE sur la renonciation à l'immunité d'exécution : À l'appui de son appel, la République du Congo soutient encore qu'elle n'a pas expressément et spécialement renoncé à son immunité d'exécution sur les biens rattachés à sa mission diplomatique, que ce soit aux termes de la lettre d'engagement du 3 mars 1993 ou à ceux des dispositions du règlement CCI sur le fondement duquel ont été rendues les sentences arbitrales de 2000 et 2013. La société Commisimpex rappelle que les dispositions de la loi du 9 décembre 2016 qui exigent une renonciation expresse et spéciale des États étrangers à leur immunité d'exécution concernant leurs biens diplomatiques ne sont pas applicables à la présente espèce, qu'il convient d'appliquer les dispositions du droit international coutumier qui n'exige pas de renonciation autre qu'expresse à l'immunité d'exécution. Cependant, contrairement à ce que soutient la société Commisimpex, la jurisprudence (Civ. 1, 28 septembre 2011, pourvoi n° 09-72057, Civ. 1, 28 mars 2013, pourvois n° 10-25093 et n° 11-10450), antérieure à l'adoption de la loi Sapin 2, laquelle est inapplicable au présent litige, mais confortée par celle-ci, subordonnait la validité de la renonciation par un État étranger à son immunité d'exécution sur ses biens diplomatiques à la double condition qu'elle soit expresse et spéciale. La décision de la Cour de cassation du 13 mai 2015, de par sa nature isolée, n'a pu constituer, pour la société Commisimpex, un obstacle à son droit à un procès équitable. Dès lors qu'il n'est pas discuté que la République du Congo n'a pas renoncé de façon expresse et spéciale à son immunité d'exécution sur ses biens diplomatiques et que la saisie litigieuse a porté sur ces biens tels que déterminés plus haut, il convient d'en ordonner la mainlevée ;

ALORS QUE la déclaration d'inconstitutionnalité par le Conseil Constitutionnel d'une disposition législative produit son effet sur les instances en cours ; que par l'effet du prononcé de l'inconstitutionnalité de la portée effective de l'interprétation jurisprudentielle constante conférée par la Cour de cassation à l'article L. 111-1-3 du Code des procédures civiles d'exécution, issu de l'article 59 de la loi n° 2016-1691 du 9 décembre 2016 relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique, la décision attaquée a perdu son fondement juridique ; que l'annulation de l'arrêt est donc encourue. Moyens de cassation produits par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Commissions Import Export

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir ordonné la mainlevée de la saisie-attribution du 19 octobre 2016 en ce qu'elle a porté sur les comptes suivants « Ambassade du Congo OGES », « Ambassade du Congo », « Ambassade du Congo », « Paierie Pres Ambassade du Congo France », « Ambassade du Congo-cellule communication », « Del Congo Brazzaville » ;

AUX MOTIFS que sur la nature des comptes : A l'appui de son appel, la République du Congo soutient que les comptes bancaires visés par la saisie litigieuse sont affectés à l'exercice de la mission diplomatique, que la Société Générale, tiers-saisi, indiquait à l'huissier instrumentaire : «Nous vous communiquons la liste ci-jointe des comptes bancaires avec mention de leur nature et leur solde à la date de la saisie-attribution sous réserve du dénouement des opérations en cours», que cette lettre présentait sous forme de tableau, l'intitulé desdits comptes, à savoir:- « Ambassade du Congo OGES » ;
- « Ambassade du Congo » ; - « Ambassade du Congo » ;
- « Paierie Pres Ambassade du Congo France » ; - « Ambassade du Congo-cellule communication » ; - « Caisse congolaise d'amortissement»; - « Del Congo Brazzaville» ; que la Société Générale prenait encore soin de préciser :
« Nous avons également relevé, sauf erreur ou omission, que les garanties suivantes qui constituent des créances à terme et conditionnelles bénéficiant, à la date de la saisie attribution aux Ministères et services de la République du Congo Brazzaville ci-après, ainsi qu'il en est justifié ci-joint :
- Au Ministère de l'Economie et des Finances: garantie au 11 05 2016 de 84. 354.000 XAF date d'expiration, 12 05 2017
- Au Ministère de l'Economie, des Finances : garantie au 11 05 2016 de 131. 100.000 XAF date d'expiration 12 05 2017.
- Au Ministère Transport et Aviation: garantie au 07 03 2016 de 12.509.458 XAF date d'expiration 01 10 2017
- Au Ministère Transport et Aviation : garantie au 08 03 2916 de 76.282 euros, date d'expiration au 01 10 2017 ». La République du Congo ajoute que la société Commisimpex n'apporte pas la preuve, dont la charge lui incombe, de ce que ces comptes ne sont pas affectés à la mission diplomatique, qu'il appartient à la République française de respecter son obligation de protéger les missions diplomatiques présentes sur son sol conformément tant à la Convention de Vienne de 1961 qu'à la loi française. La société Commisimpex soutient que la République du Congo ne rapporte pas la preuve, dont elle a la charge, de la réalité de l'affectation des comptes bancaires saisis, à titre subsidiaire, qu'elle est bien fondée à solliciter la communication des documents pertinents. Sur la charge de la preuve, elle expose qu'il appartient à l'État étranger de démontrer que les comptes bancaires saisis ont été ouverts pour les besoins de ses missions diplomatiques et au créancier poursuivant, une fois cette démonstration faite, de prouver que les fonds déposés sur lesdits comptes ne sont pas affectés auxdits besoins, que l'intitulé des comptes est déclaratif, facilement modifiable et ne démontre en rien leur affectation et que le tiers saisi a déjà été condamné à lui verser des dommages-intérêts pour avoir refusé de lui verser des sommes valablement saisies entre ses mains au préjudice de la République du Congo. Elle expose qu'elle bénéficie, comme toute partie, d'un droit à la preuve et qu'il appartient à la République du Congo de lui produire les conventions d'ouverture de ces comptes et leurs mouvements sur une durée d'au moins une année. Pour l'intimée, la saisie a, par ailleurs, porté sur des engagements de garantie consentis par la Société Générale, non pas au profit de l'ambassade de la République du Congo en France, mais au profit de deux ministères, le « Ministère de l'économie et des finances » et « Ministère des transports et aviation ». Elle soutient que le droit international coutumier, ensemble les dispositions de la loi Sapin 2 qui ne sont pas applicables au présent litige, n'exige aucune renonciation spéciale à l'immunité d'exécution au-delà des biens affectés au fonctionnement de la mission diplomatique.
Cependant, il est de principe que les comptes bancaires ouverts par une ambassade sont présumés affectés à l'exercice de la mission diplomatique de celle-ci. L'intitulé des comptes saisis, tels que rapporté ci-dessus, à l'exception des comptes intitulés « Caisse Congolaise d'amortissement » et « Equatorial Congo Airlines-Ecair » permet de présumer leur affectation à l'accomplissement des fonctions des missions diplomatiques de la République du Congo et la société Commisimpex n'apporte pas la preuve contraire, dont la charge lui incombe, sans qu'il y ait lieu de faire droit à la demande d'injonction qu'elle sollicite. En ce qui concerne les engagements de garantie, ainsi que le relève utilement l'intimée, dès lors qu'ils ont été souscrits par la Société Générale au profit du « ministère de l'économie et des finances » et du « ministère des transports et aviation », ils ne sont pas, à l'évidence, affectés au fonctionnement de la mission diplomatique ;

1°) ALORS QUE le juge doit préciser le fondement juridique de sa décision ; qu'en se bornant à affirmer qu'il « est de principe que les comptes bancaires ouverts par une ambassade sont présumés affectés à l'exercice de la mission diplomatique de celle-ci », pour en déduire que la charge de la preuve de ce que les comptes bancaires en cause n'étaient pas affectées à des fins diplomatiques pèse sur la société Commisimpex, sans préciser le fondement juridique de sa décision sur ce point, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 12 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QU'il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention ; que s'il existe une présomption d'affectation à l'exercice des missions diplomatiques des fonds qui sont déposés sur des comptes bancaires diplomatiques, cette présomption ne vaut que pour les comptes ouverts par l'État étranger pour les besoins de ses missions diplomatiques ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que « l'intitulé des comptes saisis, tels que rapporté ci-dessus, à l'exception des comptes intitulés « Caisse Congolaise d'amortissement » et « Equatorial Congo Airlines-Ecair » permet de présumer leur affectation à l'accomplissement des fonctions des missions diplomatiques de la République du Congo et la société Commisimpex n'apporte pas la preuve contraire, dont la charge lui incombe », alors qu'il appartenait à la République du Congo de prouver que les comptes avaient été ouverts pour l'exercice de ses missions diplomatiques pour que les fonds déposés puissent bénéficier de la présomption d'affectation à l'exercice de ses missions, la cour d'appel a inversé la charge de la preuve, en violation de l'article 1315 du code civil ;

3°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE le principe de l'égalité des armes, qui participe du droit au procès équitable tel qu'il est garanti par l'article 6 de la convention européenne des droits de l'homme, suppose que chaque partie soit astreinte à des obligations processuelles, notamment en termes de preuve, qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire ; qu'en l'espèce, la preuve que des comptes bancaires ne sont pas affectés à l'exercice de la mission diplomatique est impossible à rapporter par le créancier saisissant dès lors que les données pertinentes nécessaires à cette preuve ne peuvent être détenues que par l'établissement bancaire qui tient les comptes, lequel peut opposer le secret bancaire, ou par le débiteur lui-même ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que « l'intitulé des comptes saisis, tels que rapporté ci-dessus, à l'exception des comptes intitulés « Caisse Congolaise d'amortissement » et « Equatorial Congo Airlines-Ecair » permet de présumer leur affectation à l'accomplissement des fonctions des missions diplomatiques de la République du Congo et la société Commisimpex n'apporte pas la preuve contraire, dont la charge lui incombe », alors qu'une telle preuve est impossible à rapporter pour la société Commisimpex et que la preuve inverse est extrêmement aisée pour la République du Congo, la cour d'appel a violé l'article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, en tant qu'il garantit le principe de l'égalité des armes.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté la demande de la société Commisimpex d'enjoindre à la République du Congo de communiquer les conventions d'ouverture de chacun des treize comptes saisis avec leurs avenants éventuels, les documents justifiant de l'identité et de la qualité des personnes autorisées à les mouvementer, les relevés des opérations et mouvements effectués sur les treize comptes saisis sur une période suffisante pour déterminer l'utilisation effective des fonds transitant par ces comptes ;

AUX MOTIFS qu'il est de principe que les comptes bancaires ouverts par une ambassade sont présumés affectés à l'exercice de la mission diplomatique de celle-ci. L'intitulé des comptes saisis, tels que rapporté ci-dessus, à l'exception des comptes intitulés « Caisse Congolaise d'amortissement » et « Equatorial Congo Airlines-Ecair » permet de présumer leur affectation à l'accomplissement des fonctions des missions diplomatiques de la République du Congo et la société Commisimpex n'apporte pas la preuve contraire, dont la charge lui incombe, sans qu'il y ait lieu de faire droit à la demande d'injonction qu'elle sollicite ;

1°) ALORS QUE le juge ne peut statuer par voie de simple affirmation ; qu'en rejetant la demande de production de pièces formée par la société Commisimpex au seul motif qu'il n'y a pas « lieu de faire droit à la demande d'injonction qu'elle sollicite », la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;

2°) ALORS, EN TOUTE HYPOTHESE, QUE le respect du droit à la preuve doit conduire le juge à faire droit à une demande de production de pièces détenues par l'autre partie dès lors qu'elles sont nécessaires pour établir le bien-fondé des prétentions formées ; qu'en rejetant la demande de production de pièces formée par la société Commisimpex au seul motif qu'il n'y a pas « lieu de faire droit à la demande d'injonction qu'elle sollicite », la cour d'appel a violé les articles 9, 11 et 146 du code de procédure civile.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir ordonné la mainlevée de la saisie-attribution du 19 octobre 2016 en ce qu'elle a porté sur les comptes suivants « Ambassade du Congo OGES », « Ambassade du Congo », « Ambassade du Congo », « Paierie Pres Ambassade du Congo France », « Ambassade du Congo-cellule communication », « Del Congo Brazzaville » ;

AUX MOTIFS QUE sur la renonciation à l'immunité d'exécution : À l'appui de son appel, la République du Congo soutient encore qu'elle n'a pas expressément et spécialement renoncé à son immunité d'exécution sur les biens rattachés à sa mission diplomatique, que ce soit aux termes de la lettre d'engagement du 3 mars 1993 ou à ceux des dispositions du règlement CCI sur le fondement duquel ont été rendues les sentences arbitrales de 2000 et 2013. La société Commisimpex rappelle que les dispositions de la loi du 9 décembre 2016 qui exigent une renonciation expresse et spéciale des États étrangers à leur immunité d'exécution concernant leurs biens diplomatiques ne sont pas applicables à la présente espèce, qu'il convient d'appliquer les dispositions du droit international coutumier qui n'exige pas de renonciation autre qu'expresse à l'immunité d'exécution. Cependant, contrairement à ce que soutient la société Commisimpex, la jurisprudence (Civ. 1, 28 septembre 2011, pourvoi n° 09-72057, Civ. 1, 28 mars 2013, pourvois n° 10-25093 et n° 11-10450), antérieure à l'adoption de la loi Sapin 2, laquelle est inapplicable au présent litige, mais confortée par celle-ci, subordonnait la validité de la renonciation par un État étranger à son immunité d'exécution sur ses biens diplomatiques à la double condition qu'elle soit expresse et spéciale. La décision de la Cour de cassation du 13 mai 2015, de par sa nature isolée, n'a pu constituer, pour la société Commisimpex, un obstacle à son droit à un procès équitable. Dès lors qu'il n'est pas discuté que la République du Congo n'a pas renoncé de façon expresse et spéciale à son immunité d'exécution sur ses biens diplomatiques et que la saisie litigieuse a porté sur ces biens tels que déterminés plus haut, il convient d'en ordonner la mainlevée ;

1°) ALORS QUE la référence à une décision rendue dans un litige différent de celui soumis à une juridiction ne saurait, en toute hypothèse, servir de fondement à la décision de cette dernière ; qu'en statuant comme elle l'a fait, au motif que « contrairement à ce que soutient la société Commisimpex, la jurisprudence (Civ. 1, 28 septembre 2011, pourvoi n° 09-72057, Civ. 1, 28 mars 2013, pourvois n° 10-25093 et n° 11-10450), antérieure à l'adoption de la loi Sapin 2, laquelle est inapplicable au présent litige, mais confortée par celle-ci, subordonnait la validité de la renonciation par un État étranger à son immunité d'exécution sur ses biens diplomatiques à la double condition qu'elle soit expresse et spéciale », la cour d'appel a violé l'article 5 du code civil, ensemble l'article 455 du Code de procédure civile ;

2°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE le juge doit préciser le fondement juridique de sa décision ; qu'en statuant comme elle l'a fait, motif pris que « la validité de la renonciation par un État étranger à son immunité d'exécution sur ses biens diplomatiques à la double condition qu'elle soit expresse et spéciale », sans préciser le fondement juridique de sa décision sur ce point, la cour d'appel, qui n'a pas mis la Cour de cassation en mesure d'exercer son contrôle, n'a pas satisfait aux exigences de l'article 12 du code de procédure civile ;

3°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE l'exigence d'une renonciation spéciale à l'immunité diplomatique d'exécution des comptes bancaires des missions diplomatiques a été posée pour la première fois par la Cour de cassation le 28 septembre 2011, et ne peut s'appliquer à des clauses de renonciation à immunité conclues antérieurement ; qu'en imposant une renonciation spéciale à l'immunité d'exécution de la mission diplomatique de la République du Congo, la République du Congo ayant consenti la clause de renonciation à son immunité en 1993, la cour d'appel a violé l'article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

4°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QUE l'exigence d'une renonciation spéciale à l'immunité diplomatique d'exécution des comptes bancaires des missions diplomatiques a été posée pour la première fois par la Cour de cassation par un arrêt rendu le 28 septembre 2011, la solution ayant ensuite été réitérée le 28 mars 2013, avant d'être abandonnée le 13 mai 2015, pour être reprise par une loi du 9 décembre 2016 entrée en vigueur le 11 décembre 2016 et applicable aux voies d'exécution postérieures, puis par arrêt du 10 janvier 2018 ; qu'en imposant une renonciation spéciale à l'immunité d'exécution de la mission diplomatique de la République du Congo, pour juger de la validité de saisies pratiquées le 19 octobre 2016, alors qu'à cette date, l'état du droit positif n'imposait pas une renonciation spéciale, la cour d'appel a violé l'article 6 §1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, ensemble l'article 1er du premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 19-10669
Date de la décision : 03/02/2021
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Civile

Analyses

ETAT - Etat étranger - Immunité d'exécution - Immunité diplomatique d'exécution - Condition - Fonds affectés aux besoins de la mission de souveraineté de l'Etat accréditaire - Preuve - Présomption simple

PROCEDURES CIVILES D'EXECUTION - Domaine d'application - Exclusion - Personnes bénéficiant d'une immunité d'exécution - Missions diplomatiques d'Etats étrangers - Condition - Fonds affectés aux besoins de la mission de souveraineté de l'Etat accréditaire - Preuve - Présomption simple

Selon le droit international coutumier, les missions diplomatiques des Etats étrangers bénéficient, pour le fonctionnement de la représentation de l'Etat accréditaire, d'une immunité d'exécution à laquelle il ne peut être renoncé que de façon expresse et spéciale. Cette immunité s'étend, notamment, aux fonds déposés sur les comptes bancaires des missions diplomatiques, lesquels sont présumés être affectés aux besoins de la mission de souveraineté de l'Etat accréditaire. Cette présomption, justifiée par la nécessité de préserver cette mission à l'exercice de laquelle participent les représentations diplomatiques, cède devant la preuve contraire qui, pouvant être rapportée par tous moyens, n'est pas rendue impossible aux créanciers. Une cour d'appel, qui applique immédiatement à un litige une solution nouvelle résultant d'une évolution de la jurisprudence ne porte pas atteinte à la sécurité juridique, dès lors que le créancier n'a pas été privé du droit à l'accès au juge


Références :

Articles 19 à 25 de la Convention de Vienne sur les relations diplomatiques du 18 avril 1961

articles L. 111-1-2 et L. 111-1-3 du code des procédures civiles d'exécution.

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 06 septembre 2018

A rapprocher : 1re Civ., 10 janvier 2018, pourvoi n° 16-22494, Bull. 2018, I, n° 2 (annulation sans renvoi), et les arrêts cités.


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 03 fév. 2021, pourvoi n°19-10669, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : Mme Batut
Avocat(s) : SCP Ortscheidt, SCP Gouz-Fitoussi

Origine de la décision
Date de l'import : 09/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2021:19.10669
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