La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/12/2020 | FRANCE | N°19-20319

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 09 décembre 2020, 19-20319


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 décembre 2020

Cassation partielle

M. CATHALA, président

Arrêt n° 1190 FS-P+B sur le 1er moyen-1re branche

Pourvoi n° D 19-20.319

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 DÉCEMBRE 2020

Mme I... G... , domiciliée [...] , a form

é le pourvoi n° D 19-20.319 contre l'arrêt rendu le 20 mars 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige l'opposant à ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

LG

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 décembre 2020

Cassation partielle

M. CATHALA, président

Arrêt n° 1190 FS-P+B sur le 1er moyen-1re branche

Pourvoi n° D 19-20.319

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 9 DÉCEMBRE 2020

Mme I... G... , domiciliée [...] , a formé le pourvoi n° D 19-20.319 contre l'arrêt rendu le 20 mars 2019 par la cour d'appel de Paris (pôle 6, chambre 6), dans le litige l'opposant à la société Ipsos Observer, société anonyme, dont le siège est [...] , défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Ala, conseiller référendaire, les observations de la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme G... , de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de la société Ipsos Observer, et l'avis de Mme Rémery, avocat général, après débats en l'audience publique du 21 octobre 2020 où étaient présents M. Cathala, président, Mme Ala, conseiller référendaire rapporteur, M. Schamber, conseiller doyen, Mmes Cavrois, Monge, MM. Sornay, Rouchayrole, Flores, Mme Lecaplain-Morel, conseillers, Mmes Thomas-Davost, Techer, conseillers référendaires, Mme Rémery, avocat général, et Mme Jouanneau, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt ;

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Paris, 20 mars 2019), Mme G... a été engagée par la société Ipsos Observer en qualité d'enquêtrice vacataire à compter du 1er octobre 2007 par contrats à durée déterminée d'usage.

2. Le 8 février 2016, elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes en requalification de ses contrats de travail à durée déterminée en contrat de travail à durée indéterminée, en paiement de rappels de salaire, de diverses indemnités et de dommages-intérêts.

3. L'employeur a été avisé de l'existence de cette action le 16 février 2016.

4. Les contrats à durée à déterminée ont été requalifiés en contrat à durée indéterminée par arrêt rendu par la cour d'appel de Paris le 20 mars 2019 qui a dit que la rupture de la relation contractuelle produisait les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse à compter du 24 juillet 2016, date à partir de laquelle il n'a plus été confié d'enquête à la salariée.

Examen des moyens

Sur le second moyen :

Enoncé du moyen

5. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande de nullité du licenciement et des demandes accessoires, alors « qu'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite par le salarié ; qu'en cas de licenciement faisant suite à une action en justice du salarié et non fondé sur un motif réel et sérieux, il appartient à l'employeur d'établir que sa décision est justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner l'exercice, par le salarié, de son droit d'agir en justice ; qu'ayant constaté que la cessation de la relation de travail intervenue le 23 juillet 2016, à la suite de la réception par l'employeur le 16 février 2016 de la convocation devant la juridiction prud'homale, était dépourvue de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel ne pouvait faire peser sur la salariée la charge de la preuve du caractère de mesure de rétorsion du licenciement ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 1121-1 du code du travail et 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. »

Réponse de la Cour

6. En application des articles L. 1245-1, dans sa version antérieure à l'ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017, L. 1243-5 du code du travail et de l'article 6, §1, de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'employeur qui, à l'expiration d'un contrat de travail à durée déterminée ultérieurement requalifié en contrat à durée indéterminée, ne fournit plus de travail et ne paie plus les salaires, est responsable de la rupture qui s'analyse en un licenciement et qui ouvre droit, le cas échéant, à des indemnités de rupture sans que le salarié puisse exiger, en l'absence de disposition le prévoyant et à défaut de violation d'une liberté fondamentale, sa réintégration dans l'entreprise.

7. Il en résulte qu'en l'absence de rupture du contrat de travail pour un motif illicite, il appartient au salarié de démontrer que la fin de la relation de travail intervenue par le seul effet du terme stipulé dans le contrat à durée déterminée résulte de la volonté de l'employeur de porter atteinte au droit du salarié d'obtenir en justice la requalification du contrat de travail en contrat à durée indéterminée.

8.La cour d'appel, qui a constaté que l'employeur, après avoir eu connaissance, le 16 février 2016, de la demande en justice dirigée contre lui, avait proposé à la salariée de conclure un contrat de chargé d'enquête intermittent à garantie annuelle et avait continué à lui confier, dans les mêmes conditions, des enquêtes jusqu'au 23 juillet 2016, a, sans inverser la charge de la preuve, fait ressortir que la fin de la relation de travail était intervenue par le seul effet du terme du dernier contrat à durée déterminée et ne procédait pas d'une mesure de rétorsion à l'action en justice.

9. Le moyen n'est donc pas fondé ;

Mais sur le premier moyen , pris en sa première branche

Enoncé du moyen

10. La salariée fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes en requalification des contrats de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, de rappel de salaire pour les périodes interstitielles et en paiement d'indemnités pour les titres-restaurant, alors « que le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée du travail prévue et sa répartition y compris lorsque le contrat est d'une durée inférieure à la semaine ; que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en considérant que les dispositions de l'article L. 3123-14 du code du travail n'étaient pas applicables aux contrats requalifiés en contrat à durée indéterminée car, bien que ne mentionnant pas la durée du travail et sa répartition, ils avaient tous été conclus pour une durée inférieure à la semaine, la cour d'appel a violé par refus d'application l'article L. 3123-14 du code du travail dans sa version applicable en la cause. »

Réponse de la Cour

Recevabilité du moyen

11. L'employeur soutient que le moyen nouveau, comme étant mélangé de fait et de droit, est irrecevable.

12. Le moyen, qui est de pur droit, est recevable.

Bien-fondé du moyen

Vu les articles L. 3121-10, L. 3123-1, L. 3123-14 du code du travail dans leur version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 interprétés à la lumière de la clause 3 de l'accord-cadre sur le travail à temps partiel du 6 juin 1997 mis en oeuvre par la directive 97/81/CE du Conseil du 15 décembre 1997 concernant l'accord-cadre sur le travail à temps partiel :

13. Selon les deux premiers textes, un salarié dont la durée du travail est inférieure à trente-cinq heures par semaine civile ou, si elle est inférieure, à la durée fixée conventionnellement par la branche ou l'entreprise ou à la durée du travail applicable dans l'établissement est un salarié à temps partiel.

14.Le troisième de ces textes prévoit que le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois.

15. Il en résulte, à la lumière de la clause 3 de l'accord-cadre sur le travail à temps partiel du 6 juin 1997 mis en oeuvre par la directive 97/81/CE du Conseil du 15 décembre 1997 concernant l'accord-cadre sur le travail à temps partiel, qu'est travailleur à temps partiel, un salarié dont la durée normale de travail, calculée sur une base hebdomadaire ou en moyenne sur une période d'emploi pouvant aller jusqu'à un an, est inférieure à celle d'un travailleur à temps plein comparable. A cet égard, est considéré comme un travailleur à temps plein comparable, un salarié à temps plein du même établissement ayant le même type de contrat ou de relation de travail, occupant un travail ou un emploi identique ou similaire. Cette comparaison peut prendre en compte d'autres considérations telles que l'ancienneté et les qualifications ou les compétences. En l'absence d'un travailleur à temps plein comparable dans le même établissement, la comparaison s'effectue alors par référence à la convention collective applicable ou, en l'absence de convention collective applicable, conformément à la législation et aux conventions collectives ou aux pratiques nationales.

16. Il en découle que la qualification de travail à temps partiel et le formalisme afférent ne sont pas liés à la durée du contrat de travail, mais s'apprécient au regard de la durée de travail du salarié concerné.

17.Pour débouter la salariée de sa demande de requalification des contrats de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, l'arrêt retient qu'il ressort de l'article L. 3123-14 que les dispositions qui portent sur la durée et la répartition du travail et qui se réfèrent à des durées hebdomadaires ou mensuelles ne s'appliquent pas aux contrats de travail signés par la salariée car ils sont tous d'une durée inférieure à une semaine.

18. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

PAR CES MOTIFS, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déboute Mme G... de ses demandes de requalification des contrats de travail en contrat de travail à temps complet, de rappel de salaire pour les périodes interstitielles et d'indemnité au titre des tickets restaurant, l'arrêt rendu le 20 mars 2019, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Paris autrement composée ;

Condamne la société Ipsos Observer aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la société Ipsos Oberver et la condamne à payer à Mme G... la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du neuf décembre deux mille vingt.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyens produits par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour Mme G...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR rejeté les demandes de requalification des contrats de travail à temps partiel en contrat de travail à temps plein, de rappel de salaires pour les périodes interstitielles et d'indemnités au titre des tickets restaurant.

AUX MOTIFS propres QU'il en ressort comme le soutient la société IPSOS Observer que les dispositions qui portent sur la durée et la répartition du travail et qui se réfèrent à des durées hebdomadaires ou mensuelles ne s'appliquent pas aux contrats de travail signés par Mme G... car ils sont tous d'une durée inférieure à une semaine ; que par ailleurs, les contrats signés par Mme G... , qui portent sur la période allant de décembre 2011 à juillet 2016, sont conformes, quand à la durée et à la répartition du travail, aux dispositions de l'annexe « Enquêteurs » de la convention collective Syntec ; qu'en conséquence, Mme G... ne peut soutenir que ses contrats de travail à durée déterminée sont irréguliers et qu'ils sont présumés conclus pour un temps complet ; que le jugement sera confirmé sur ce point ; que sur le paiement des périodes interstitielles, Mme G... réclame le paiement d'un rappel de salaire, sur la base de 151,67 heures par mois, en estimant qu'elle s'est tenue en permanence à la disposition de son employeur comme dans le cadre d'un contrat de travail à temps complet, y compris pendant les périodes entre deux contrats, dites interstitielles ; que le salarié, engagé par plusieurs contrats de travail à durée déterminée successifs et dont le contrat de travail est requalifié en contrat de travail à durée indéterminée, ne peut prétendre à un rappel de salaire au titre des périodes non travaillées séparant chaque contrat que s'il prouve qu'il s'est tenu à la disposition de l'employeur pendant ces périodes pour effectuer un travail ; qu'il ressort des attestations de travail destinées à Pôle emploi et des bulletins de salaire de Mme G... qu'entre le 1er février 2011 et le 23 juillet 2016 elle a travaillé régulièrement chaque mois, pendant un nombre de jours variable qui pouvait aller jusqu'à plus de 20 jours par mois ; qu'elle expose qu'elle devait appeler tous les jours entre 15 h 30 et 16 h 30 pour savoir si du travail lui serait confié le lendemain ; que ce fait ressort du « livret administratif enquêteurs » remis aux enquêteurs vacataires qui impose aux enquêteurs, qui ne sont pas affectés à une étude, d'appeler le planning tous les jours, à des horaires précis, et s'ils sont « en blanc » pour plusieurs jours d'appeler le dernier jour ouvrable du « blanc » ; que les jours de travail vont du lundi au samedi, jusqu'à 21 heures, et le dimanche et les jours fériés en cas d'études spécifiques ; que la durée des études est variable, d'une journée à plusieurs semaines et il est imposé au salarié d'être disponible au moins 4 jours consécutifs et d'accorder au moins deux samedis par mois ; que s'agissant des jours où l'enquêteur doit travailler pour réaliser les études qui lui sont confiées, c'est le chef d'équipe qui distribue le planning pour le lendemain et le cas échéant les jours suivants si l'enquête dure plusieurs jours ; qu'il n'est confié qu'une étude à la fois par enquêteur ; que le livret précise que si l'enquêteur n'appelle pas aux horaires indiqués, il sera remplacé sur l'étude à laquelle il avait été affecté et ne sera plus prioritaire pour le planning ; mais que Mme G... pouvait poser des jours d'indisponibilité 8 jours à l'avance et choisissait les jours où elle voulait travailler ; qu'en effet, le règlement de la société IPSOS Observer prévoit que l'enquêteur peut poser des jours d'indisponibilité permanente, dès le pré-recrutement, et des indisponibilités ponctuelles, qui sont acceptées systématiquement si elles sont posées au moins 8 jours à l'avance ; que dans des attestations le directeur de terrain de la société Ipsos Observer et la responsable du site de production de Plérin confirment que les enquêteurs peuvent librement, sans avoir à justifier d'un motif, poser des indisponibilités ponctuelles et permanentes sur une partie de la journée ou sur toute la journée et pour la période de leur choix ; que la société IPSOS Observer produit un relevé informatique des indisponibilités permanentes et ponctuelles de Mme G... entre le 6 octobre 2007 et le 31 juillet 2016 ainsi que plusieurs demandes d'indisponibilité ponctuelle posées en 2015 et en 2016 ; que Mme G... ne conteste pas avoir été indisponible en permanence : le lundi et le jeudi de 9 h à 11 h à compter du 23 janvier 2008 jusqu'au 4 septembre 2011, le samedi de 14 h à 21 h à compter du 2 février 2008 jusqu'au 30 octobre 2009, le vendredi de 9 h à 10 h à compter du 10 septembre 2012 au 9 janvier 2014, du lundi au jeudi de 9 h à 10 h à compter du 10 septembre 2012 jusqu'à la fin de son contrat de travail, le vendredi de 9 h à 10 h à compter du 11 janvier 2014 jusqu'à la fin de son contrat de travail ; qu'elle ne conteste pas non plus avoir fait régulièrement des demandes ponctuelles d'indisponibilité pour tout ou partie de la journée et a usé de cette possibilité chaque mois pendant un ou plusieurs jours ; qu'elle n'était pas nécessairement disponible pendant 4 jours consécutifs par semaine comme le prévoit le livret administratif de l'enquêteur et elle a pu poser des semaines complètes d'indisponibilité chaque mois d'août ainsi qu'en janvier 2013 ; que Mme G... , pendant toute la période concernée, a ainsi organisé son temps de travail comme elle l'entendait et ne s'est pas tenue à la disposition permanente de son employeur ; qu'il n'est donc pas établi qu'elle était à la disposition permanente de son employeur en dehors des jours où elle a travaillé et le jugement sera confirmé pour avoir rejeté sa demande de rappel de salaire au titre des périodes interstitielles ; [
] que sur la demande au titre du complément pour tickets restaurant, le livret administratif prévoit que le salarié bénéficie d'un ticket restaurant pris en charge à hauteur de 50 % par l'employeur, à partir de 6 heures de travail par jour de présence ; qu'il ressort des bulletins de payes de Mme G... qu'elle a perçu régulièrement des indemnités au titre des tickets restaurant ; que cette indemnité n'est due que si le salarié est présent dans l'entreprise sur une journée de travail d'au moins 6 heures et Mme G... ne démontre pas que ces conditions sont remplies, d'autant que sa demande dépend de sa demande en paiement d'un salaire pour un temps plein de travail et pour les périodes interstitielles, qui est rejetée, et qu'elle n'était pas effectivement présente dans l'entreprise pendant les périodes concernées par sa demande de rappel de salaire ; que le jugement, qui a rejeté sa demande, sera confirmé.

AUX MOTIFS adoptés QU'il y a lieu cependant de relever que la présomption de temps complet est une présomption simple qui peut être renversée par la preuve que le salarié n'était pas occupé à temps plein, ni placé dans l'impossibilité de savoir à quel rythme il allait travailler ; que les contrats de travail à durée déterminée d'usage signés entre les parties comportent le nombre d'heures de travail effectuées par la demanderesse ; que la demanderesse n'a jamais contesté le nombre d'heures qui lui ont été rémunérées ; que l'examen des pièces versées aux débats fait apparaitre que la demanderesse informait régulièrement son employeur de ses indisponibilités ; qu'ainsi, elle avait la faculté de disposer de son temps et de choisir les périodes et les heures pendant lesquelles elle souhaitait ou non travailler ; qu'elle disposait en outre de la faculté d'exercer pour un autre employeur ; que le Responsable du site de production confirme dans son attestation : « les enquêteurs peuvent ainsi, à leur gré, se déclarer indisponibles sur une ou plusieurs matinées, une ou plusieurs soirées, une ou plusieurs journées pleines consécutives ou non, sans avoir à justifier de leur choix ou des raisons de leur indisponibilité » ; que la rémunération est la contrepartie du travail effectué, la demanderesse ne démontrant pas avoir travaillé à temps plein pour la société IPSOS OBSERVER ; qu'elle n'a d'ailleurs formé aucune demande en ce sens depuis son embauche et ne précise pas en quoi la rémunération qu'elle a perçue ne serait pas conforme à la réalité de son activité ; qu'elle ne saurait valablement soutenir dans ces conditions, avoir été constamment à la disposition de la société IPSOS OBSERVER ; que sa demande de requalification de ses contrats à durée déterminée à temps partiel en contrat à temps plein et sa demande de rappel de salaire y afférente seront par conséquent rejetées ; [
] que sur la demande de complément d'indemnité de repas, la demanderesse sollicite le paiement de tickets restaurant durant les périodes d'inter contrats ; que la demanderesse succombant dans son argumentation visant à démontrer qu'elle se tenait constamment à la disposition de son employeur et travaillait en conséquence à temps plein, sera déboutée de sa demande de complément d'indemnité de repas pour les périodes de non travail.

1° ALORS QUE le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée du travail prévue et sa répartition y compris lorsque le contrat est d'une durée inférieure à la semaine ; que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en considérant que les dispositions de l'article L. 3123-14 du code du travail n'étaient pas applicables aux contrats requalifiés en contrat à durée indéterminée car, bien que ne mentionnant pas la durée du travail et sa répartition, ils avaient tous été conclus pour une durée inférieure à la semaine, la cour d'appel a violé par refus d'application l'article L. 3123-14 du code du travail dans sa version applicable en la cause.

2° ALORS QUE le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée du travail prévue et sa répartition entre les jours de la semaine ou les semaines du mois ; que l'absence d'écrit mentionnant la durée du travail et sa répartition fait présumer que l'emploi est à temps complet et il incombe à l'employeur qui conteste cette présomption de rapporter la preuve, d'une part, de la durée exacte convenue, d'autre part que le salarié n'était pas placé dans l'impossibilité de prévoir à quel rythme il devait travailler et qu'il n'avait pas à se tenir constamment à la disposition de l'employeur ; qu'en rejetant la demande de requalification du contrat de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet au motif que le contrat ne pouvait être présumé à temps complet, les contrats signés étant tous d'une durée inférieure à la semaine et conformes aux dispositions de l'annexe « Enquêteurs » de la convention collective Syntec, quand elle venait pourtant de requalifier l'ensemble de la relation de travail en contrat à durée indéterminée, la cour d'appel a de nouveau violé par refus d'application l'article L. 3123-14 du code du travail dans sa version applicable en la cause, ainsi que par fausse application l'annexe « Enquêteurs » de la convention collective nationale des bureaux d'études techniques, des cabinets d'ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 15 décembre 1987.

3° ALORS QUE celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; que réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l'extinction de son obligation ; qu'en cas de requalification de contrats à durée déterminée en contrat à durée indéterminée, a fortiori lorsqu'il s'agit de contrats conclus à temps partiel sans mention de la durée du travail prévue et de sa répartition, il appartient à l'employeur, qui se prétend libérer de son obligation de verser le salaire pour les périodes entre les contrats requalifiés, de justifier de l'indisponibilité du salarié pendant ces périodes pour travailler ; qu'en retenant néanmoins que la salariée devait prouver qu'elle s'était tenue à la disposition de l'employeur pendant les périodes séparant les contrats quand elle était réputée en contrat à durée indéterminée depuis la première embauche, la cour d'appel a violé les articles L. 1245-1 du code du travail ainsi que 1134 et 1315 du code civil dans leur version applicable en la cause.

4° ALORS en toute hypothèse QUE la cour d'appel a constaté, par motifs propres, que la salariée devait quotidiennement téléphoner pour savoir si du travail lui était confié le lendemain sous peine de ne plus être prioritaire sur le planning en absence d'appel de sa part, donc sans liberté de refuser les horaires de travail ; que pour néanmoins retenir que la salariée ne s'était pas tenue à la disposition constante de l'employeur, la cour d'appel a relevé, par motifs propres et adoptés, que la salariée avait pu faire valoir quelques indisponibilités et qu'elle disposait de la faculté d'exercer pour un autre employeur ; qu'en statuant par de tels motifs, qui n'étaient pas de nature à exclure la disponibilité permanente de la salariée à l'égard de l'employeur, y compris pendant les périodes séparant les différents contrats requalifiés en contrat à durée indéterminée, quand il ressortait de ses autres constatations que la salariée ne connaissait pas son rythme de travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1245-1 du code du travail et 1315 du code civil dans leur rédaction alors en vigueur.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR débouté la salariée de sa demande de nullité de son licenciement et de ses demandes accessoires.

AUX MOTIFS QUE la société IPSOS Observer ne conteste pas ne plus avoir sollicité Mme G... à compter du 24 juillet 2016 ; que la rupture des relations des parties, liées par un contrat de travail à durée indéterminée après requalification, est un licenciement ; que Mme G... a saisi le conseil de prud'hommes de Paris de son action le 12 février 2016 et la société IPSOS Observer en a été informée le 16 février 2016 à la réception de sa convocation devant le bureau de conciliation ; qu'à compter de cette date la société IPSOS Observer a continué à confier des études à Mme G... , qui a travaillé dans les mêmes conditions qu'auparavant jusqu'au 23 juillet 2016 ; que Mme G... ne conteste pas que la société IPSOS Observer lui a proposé régulièrement la signature de contrats de chargé d'enquêtes intermittent à garantie annuelle (CEIGA) et pour la dernière fois le 1er juillet 2016, le salaire annuel minimum garanti étant de 80 % des gains perçus pendant l'année de référence ; que compte-tenu de ces éléments, il n'est pas établi que la société IPSOS Observer ne souhaitait plus confier d'étude à Mme G... après que celle-ci ait saisi le conseil de prud'hommes et qu'elle a porté atteinte à son droit d'agir en justice ; que la demande de nullité du licenciement et les demandes accessoires de réintégration et de paiement d'un rappel de salaire jusqu'au 4 décembre 2018, nouvelles en appel, seront donc rejetées.

ALORS QU'est nul comme portant atteinte à une liberté fondamentale le licenciement intervenu en raison d'une action en justice introduite par le salarié ; qu'en cas de licenciement faisant suite à une action en justice du salarié et non fondé sur un motif réel et sérieux, il appartient à l'employeur d'établir que sa décision est justifiée par des éléments étrangers à toute volonté de sanctionner l'exercice, par le salarié, de son droit d'agir en justice ; qu'ayant constaté que la cessation de la relation de travail intervenue le 23 juillet 2016, à la suite de la réception par l'employeur le 16 février 2016 de la convocation devant la juridiction prud'homale, était dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel ne pouvait faire peser sur la salariée la charge de la preuve du caractère de mesure de rétorsion du licenciement ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les articles L. 1121-1 du code du travail et 6 § 1 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 19-20319
Date de la décision : 09/12/2020
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Travail à temps partiel - Qualification - Modalités - Durée de travail du salarié - Appréciation - Détermination - Portée

TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Travail à temps partiel - Salarié à temps partiel - Définition - Salarié dont la durée normale de travail est inférieure à celle d'un travailleur à temps plein comparable - Eléments de comparaison - Détermination - Portée TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Travail à temps partiel - Formalités légales - Contrat écrit - Mentions obligatoires - Domaine d'application - Contrat conclu pour une durée inférieure à une semaine - Conditions - Durée de travail du salarié - Appréciation - Détermination - Portée

Selon les articles L. 3121-10 et L. 3123-1 du code du travail, dans leur version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, un salarié dont la durée du travail est inférieure à trente-cinq heures par semaine civile ou, si elle est inférieure, à la durée fixée conventionnellement par la branche ou l'entreprise ou à la durée du travail applicable dans l'établissement, est un salarié à temps partiel. L'article L.3123-14 du code du travail dans sa version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016 prévoit que le contrat écrit du salarié à temps partiel doit mentionner la durée hebdomadaire ou, le cas échéant, mensuelle prévue et la répartition de la durée du travail entre les jours de la semaine ou les semaines du mois. Il en résulte, à la lumière de la clause 3 de l'accord-cadre sur le travail à temps partiel du 6 juin 1997 mis en oeuvre par la directive 97/81/CE du Conseil du 15 décembre 1997 concernant l'accord-cadre sur le travail à temps partiel, qu'est travailleur à temps partiel, un salarié dont la durée normale de travail, calculée sur une base hebdomadaire ou en moyenne sur une période d'emploi pouvant aller jusqu'à un an, est inférieure à celle d'un travailleur à temps plein comparable. A cet égard, est considéré comme un travailleur à temps plein comparable, un salarié à temps plein du même établissement ayant le même type de contrat ou de relation de travail, occupant un travail ou un emploi identique ou similaire. Cette comparaison peut prendre en compte d'autres considérations telles que l'ancienneté et les qualifications ou les compétences. En l'absence d'un travailleur à temps plein comparable dans le même établissement, la comparaison s'effectue alors par référence à la convention collective applicable ou, en l'absence de convention collective applicable, conformément à la législation et aux conventions collectives ou aux pratiques nationales. Il en découle que la qualification de travail à temps partiel et le formalisme afférent ne sont pas liés à la durée du contrat de travail, mais s'apprécient au regard de la durée de travail du salarié concerné. Doit être cassé l'arrêt qui, pour débouter le salarié de sa demande de requalification des contrats de travail à temps partiel en contrat de travail à temps complet, retient que les dispositions de l'article L.3123-14 du code du travail qui portent sur la durée et la répartition du travail et qui se réfèrent à des durées hebdomadaires ou mensuelles ne s'appliquent pas aux contrats de travail d'une durée inférieure à une semaine


Références :

Articles L. 3121-10, L. 3123-1 et L. 3123-14 du code du travail, dans leur version antérieure à la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016

clause 3 de l'accord-cadre sur le travail à temps partiel conclu le 6 juin 1997 par l'UNICE, le CEEP et la CES

directiv
e 97/81/CE du Conseil du 15 décembre 1997 concernant l'accord-cadre sur le travail à temps partiel.

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 20 mars 2019

Sur le principe que la qualification de travail à temps partiel et le formalisme afférents ne sont pas liés à la durée du contrat de travail, mais s'apprécient au regard de la durée de travail du salarié concerné, à rapprocher : Soc., 9 décembre 2020, pourvoi n° 19-16138, Bull. 2020, (cassation partielle).


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 09 déc. 2020, pourvoi n°19-20319, Bull. civ.
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles

Composition du Tribunal
Président : M. Cathala
Avocat(s) : SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 05/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2020:19.20319
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award