LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Manufacture française des pneumatiques Michelin du désistement de son pourvoi incident éventuel ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Metz, 8 décembre 2016), rendu sur renvoi après cassation (2e Civ., 7 mai 2015, pourvoi n° 14-14.842), que, salarié de la société Manufacture française des pneumatiques Michelin (l'employeur) depuis le 26 juillet 1971 en qualité de mécanicien-ajusteur, Michel Z... est décédé le [...] ; que le 31 octobre 2008, sa veuve a souscrit une déclaration de maladie professionnelle accompagnée d'un certificat médical initial faisant état d'une pancytopénie ; que cette affection ainsi que le décès ayant été pris en charge par la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges (la caisse) au titre du tableau n° 4 des maladies professionnelles, les consorts Z... ont saisi une juridiction de sécurité sociale en reconnaissance de la faute inexcusable de l'employeur ; que, dans une instance distincte, la décision de la caisse a été déclarée inopposable à l'employeur ;
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt de la débouter de son action récursoire à l'encontre de l'employeur, alors, selon le moyen, que la décision de prise en charge, par la caisse, au titre de la législation professionnelle, d'une maladie est sans incidence sur l'action en reconnaissance de la faute inexcusable ; que dès lors, son inopposabilité prononcée par une décision de justice antérieure ne prive pas la caisse du droit de récupérer sur l'employeur, après reconnaissance de cette faute, les compléments de rente et indemnités versés par elle ; qu'en décidant le contraire, pour débouter la caisse de son action récursoire à l'encontre de l'employeur, la cour d'appel a violé les articles L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
Mais attendu que si la caisse primaire d'assurance maladie est fondée, en application des articles L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale, à récupérer auprès de l'employeur le montant des majorations de rente et indemnités allouées à la victime et à ses ayants droit en raison de la faute inexcusable de ce dernier, son action ne peut s'exercer dans le cas où une décision de justice passée en force de chose jugée a reconnu, dans les rapports entre la caisse et l'employeur, que l'accident ou la maladie n'avait pas de caractère professionnel ;
Et attendu que l'arrêt constate que par un arrêt de la cour d'appel de Nancy du 29 janvier 2014, passé en force de chose jugée, le caractère professionnel de la maladie de Michel Z... n'a pas été reconnu dans les rapports entre la caisse et l'employeur ;
Que de ces constatations, la cour d'appel a exactement déduit que la caisse ne pouvait récupérer sur l'employeur, après reconnaissance de sa faute inexcusable, les majorations de rente et indemnités versées par elle ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges et la condamne à payer à la société Manufacture française des pneumatiques Michelin la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du quinze février deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour la caisse primaire d'assurance maladie des Vosges
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU' il a débouté la Caisse de son action récursoire ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « le caractère professionnel de la maladie de Monsieur Michel Z... n'ayant pas été reconnu dans les rapports caisse employeur ainsi qu'il résulte de l'arrêt de la Cour d'Appel de Nancy du 29 janvier 2014 rendue dans la procédure en inopposabilité des décisions de prise en charge de la maladie et du décès, engagées par la Société MICHELIN, la caisse doit être déboutée de son action récursoire contre l'employeur » ;
AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QUE « La société MICHELIN a formé une demande d'inopposabilité qui fait l'objet du recours instruit par le Tribunal des affaires de sécurité sociale des Vosges sous le numéro 405/2009. Dans le cas où les décisions de prise en charge de la maladie professionnelle et du décès de Monsieur Michel Z... seraient déclarés opposables à la société MICHELIN les sommes versées par la CPAM en réparation des préjudices seraient récupérées auprès de la société l'employeur dans les conditions prévues par l'article L. 452-3 du code de la sécurité sociale » ;
ALORS QUE la décision de prise en charge, par la Caisse, au titre de la législation professionnelle, d'une maladie est sans incidence sur l'action en reconnaissance de la faute inexcusable ; que dès lors, son inopposabilité prononcée par une décision de justice antérieure ne prive pas la Caisse du droit de récupérer sur l'employeur, après reconnaissance de cette faute, les compléments de rente et indemnités versés par elle ; qu'en décidant le contraire, pour débouter la Caisse de son action récursoire à l'encontre de la société MICHELIN, la cour d'appel a violé les articles L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale.