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08/02/2018 | FRANCE | N°16-28632;16-28633

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 08 février 2018, 16-28632 et suivant


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° 16-28.632 et 16-28.633 ;

Sur les moyens uniques de chaque pourvoi, qui sont similaires :

Vu l'article 4 du code civil, ensemble l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée en sa version alors applicable ;

Attendu, selon les ordonnances attaquées rendues par le premier président d'une cour d'appel, qu'à la suite d'un projet de plan local d'urbanisme portant sur un terrain, Mmes A... et B..., propriétaires respectivement chacune d'une des parcel

les concernées, ont confié à la société Mauduit, Lopasso, Goirand et associés (l'...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Joint les pourvois n° 16-28.632 et 16-28.633 ;

Sur les moyens uniques de chaque pourvoi, qui sont similaires :

Vu l'article 4 du code civil, ensemble l'article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée en sa version alors applicable ;

Attendu, selon les ordonnances attaquées rendues par le premier président d'une cour d'appel, qu'à la suite d'un projet de plan local d'urbanisme portant sur un terrain, Mmes A... et B..., propriétaires respectivement chacune d'une des parcelles concernées, ont confié à la société Mauduit, Lopasso, Goirand et associés (l'avocat) la mission d'en obtenir un meilleur classement ; qu'une convention d'honoraires a été conclue prévoyant un honoraire de résultat calculé pour chacune des parcelles ; qu'à la suite d'un différend sur son paiement, l'avocat a saisi le bâtonnier de son ordre de deux demandes en fixation de celui-ci concernant respectivement Mmes A... et B... ;

Attendu que, pour en débouter l'avocat, les ordonnances énoncent que le paiement de l'honoraire de résultat, fixé par les parties à 5 % HT de la nouvelle valeur de chaque parcelle, suppose que l'honoraire puisse être déterminé et, en l'occurrence, que puisse être établie la valeur actuelle de chaque parcelle bénéficiant des modifications au nouveau plan local d'urbanisme ; que l'avocat se fonde, pour justifier de l'honoraire de résultat, sur un prix du mètre carré de 20 euros, inférieur à celui résultant de quatre décisions de la chambre des expropriations du Var de 2011 et 2012 ayant retenu un prix du mètre carré compris entre 35 et 90 euros ; qu'il ne peut être déduit de ces seules décisions, portant sur des propriétés présentant des caractéristiques ignorées et situées dans des communes différentes de celle des parcelles en cause, la nouvelle valeur de ces dernières ; que l'avocat ne justifiant pas de leur valeur, sa demande en paiement d'un honoraire de résultat ne peut être accueillie ;

Qu'en statuant ainsi, en refusant d'évaluer le montant de l'honoraire de résultat selon le mode de calcul convenu entre les parties, alors qu'il résultait de ses propres constatations que cet honoraire était fondé en son principe, le premier président, qui devait en fixer le montant, a méconnu l'étendue de ses pouvoirs et violé les textes susvisés ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'elles déboutent la société Mauduit Lopasso et associés de sa demande en fixation d'un honoraire complémentaire autre que l'honoraire forfaitaire qui lui a déjà été payé, les ordonnances n° RG : 15/05204 et 15/05203 rendues le 2 novembre 2016, entre les parties, par le premier président de la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdites ordonnances et, pour être fait droit, les renvoie devant le premier président de la cour d'appel de Lyon ;

Condamne Mmes A... et B... aux dépens ;

Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à la société Mauduit, Lopasso, Goirand et associés la somme globale de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des ordonnances partiellement cassées ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit février deux mille dix-huit.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

Moyen produit au pourvoi n° C 16-28.632 par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la société Mauduit, Lopasso, Goirand et associés.

Il est reproché à l'ordonnance infirmative attaquée d'avoir débouté la Selarl Mauduit, Lopasso etamp; associés, aux droits de laquelle se trouve la Selarl d'avocats Mauduit, Lopasso, Goirand et associés, de sa demande en fixation d'un honoraire complémentaire autre que l'honoraire forfaitaire qui lui a déjà été payé par Mme André Z..., épouse A... ;

AUX MOTIFS QUE la convention du 15 septembre 2011 liant les parties prévoyait, outre le paiement d'un honoraire forfaitaire de 2.500 € HT incombant aux trois propriétaires des parcelles en cause à proportion de la superficie de leurs propriétés respectives, le paiement d'un honoraire de résultat évalué à 5% HT de la nouvelle valeur des parcelles en cause, en cas de modification, au regard du projet de plan local d'urbanisme, de la réglementation locale d'urbanisme et des servitudes publiques d'urbanisme (emplacements réservés) les affectant, cet honoraire étant dû par chaque cliente à proportion des surfaces de terrains bénéficiant desdites modifications ; qu'au titre de ses diligences, la Selarl Mauduit, Lopasso et associés a émis deux factures à l'égard de Mme A... l'une du 30 septembre 2011 portant sur un honoraire de 1.425,27 € laquelle a été réglée et l'autre en date du 26 mai 2014 portant sur l'honoraire de résultat litigieux d'un montant de 11.876,80 € calculé sur une base de 20 € le m² ; qu'aux termes des dispositions de l'article 1134 du code civil dans son ancienne version applicable à la date de la convention, les parties sont tenues par les termes de la convention qu'elles ont librement établie ; qu'en revanche, le paiement de l'honoraire de résultat suppose pour pouvoir être appliqué, que celui-ci puisse être déterminé dans son montant par les clauses de la convention et en l'occurrence que puisse être établie la valeur actuelle de la parcelle concernée ; que la Selarl Mauduit, Lopasso et associés se fonde, pour justifier l'honoraire de résultat dont elle sollicite le paiement, sur un prix du mètre carré de 20 €, inférieur à celui résultant de quatre décisions de la chambre des expropriations du Var du tribunal de grande instance de Toulon datant de 2011 et 2012, ayant retenu un prix du mètre carré compris entre 90 et 35 € ; qu'il ne peut être déduit de ces seules décisions portant sur des propriétés présentant des caractéristiques ignorées et situées dans des communes différentes de celle du Beausset, la valeur de la propriété de Mme A... ; que la Selarl Mauduit, Lopasso et associés ne justifiant pas de la valeur actuelle de la parcelle appartenant à Mme A..., sa demande en paiement d'un honoraire de résultat ne peut être accueillie ; que par ailleurs, les parties ayant convenu de la forfaitisation de l'honoraire de diligences, il ne peut être procédé à une nouvelle estimation de ces dernières comme semble le suggérer l'appelante ; que cette dernière sera en conséquence déboutée de l'ensemble de ses demandes en fixation d'un honoraire complémentaire autre que l'honoraire forfaitaire qui lui a déjà été payé ;

ALORS QUE commet un déni de justice la juridiction qui, après avoir reconnu le bien-fondé d'une créance, décide néanmoins de la rejeter au motif que les pièces versées aux débats ou les conclusions des parties ne lui permettent pas de chiffrer avec exactitude le quantum de cette créance ; qu'en constatant que la Selarl d'avocats Mauduit, Lopasso et associés était fondée à solliciter le paiement d'un honoraire de résultat en application de la convention conclue avec sa cliente le 15 septembre 2011, puis en la déboutant de cette demande en paiement au seul motif que cet honoraire devait être fixé à 5% HT de la nouvelle valeur des parcelles en cause et qu'elle ne justifiait pas de la valeur actuelle de la parcelle de sa cliente, cependant qu'il devait nécessairement évaluer le quantum de la créance litigieuse, au besoin en ordonnant une mesure d'expertise, le délégué du premier président s'est soustrait à son obligation de juger et a violé l'article 4 du code civil. Moyen produit au pourvoi n° D 16-28.633 par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la société Mauduit, Lopasso, Goirand et associés.

Il est reproché à l'ordonnance infirmative attaquée d'avoir débouté la Selarl Mauduit, Lopasso etamp; associés, aux droits de laquelle se trouve la Selarl d'avocats Mauduit, Lopasso, Goirand et associés, de sa demande en fixation d'un honoraire complémentaire autre que l'honoraire forfaitaire qui lui a déjà été payé par Mme Jeanine Z..., épouse B... ;

AUX MOTIFS QUE la convention du 15 septembre 2011 liant les parties prévoyait, outre le paiement d'un honoraire forfaitaire de 2.500 € HT incombant aux trois propriétaires des parcelles en cause à proportion de la superficie de leurs propriétés respectives, le paiement d'un honoraire de résultat évalué à 5% HT de la nouvelle valeur des parcelles en cause, en cas de modification, au regard du projet de plan local d'urbanisme, de la réglementation locale d'urbanisme et des servitudes publiques d'urbanisme (emplacements réservés) les affectant, cet honoraire étant dû par chaque cliente à proportion des surfaces de terrains bénéficiant desdites modifications ; qu'au titre de ses diligences, la Selarl Mauduit, Lopasso et associés a émis deux factures à l'égard de Mme B... l'une du 30 septembre 2011 portant sur un honoraire de 759,72 € laquelle a été réglée et l'autre en date du 26 mai 2014 portant sur l'honoraire de résultat litigieux d'un montant de 7.396,80 € calculé sur une base de 20 € le m² ; qu'aux termes des dispositions de l'article 1134 du code civil dans son ancienne version applicable à la date de la convention, les parties sont tenues par les termes de la convention qu'elles ont librement établie ; qu'en revanche, le paiement de l'honoraire de résultat suppose pour pouvoir être appliqué, que celui-ci puisse être déterminé dans son montant par les clauses de la convention et en l'occurrence que puisse être établie la valeur actuelle de la parcelle concernée ; que la Selarl Mauduit, Lopasso et associés se fonde, pour justifier l'honoraire de résultat dont elle sollicite le paiement, sur un prix du mètre carré de 20 €, inférieur à celui résultant de quatre décisions de la chambre des expropriations du Var du tribunal de grande instance de Toulon datant de 2011 et 2012, ayant retenu un prix du mètre carré compris entre 90 et 35 € ; qu'il ne peut être déduit de ces seules décisions portant sur des propriétés présentant des caractéristiques ignorées et situées dans des communes différentes de celle du Beausset, la valeur de la propriété de Mme B... ; que la Selarl Mauduit, Lopasso et associés ne justifiant pas de la valeur actuelle de la parcelle appartenant à Mme B..., sa demande en paiement d'un honoraire de résultat ne peut être accueillie ; que par ailleurs, les parties ayant convenu de la forfaitisation de l'honoraire de diligences, il ne peut être procédé à une nouvelle estimation de ces dernières comme semble le suggérer l'appelante ; que cette dernière sera en conséquence déboutée de l'ensemble de ses demandes en fixation d'un honoraire complémentaire autre que l'honoraire forfaitaire qui lui a déjà été payé ;

ALORS QUE commet un déni de justice la juridiction qui, après avoir reconnu le bien-fondé d'une créance, décide néanmoins de la rejeter au motif que les pièces versées aux débats ou les conclusions des parties ne lui permettent pas de chiffrer avec exactitude le quantum de cette créance ; qu'en constatant que la Selarl d'avocats Mauduit, Lopasso et associés était fondée à solliciter le paiement d'un honoraire de résultat en application de la convention conclue avec sa cliente le 15 septembre 2011, puis en la déboutant de cette demande en paiement au seul motif que cet honoraire devait être fixé à 5% HT de la nouvelle valeur des parcelles en cause et qu'elle ne justifiait pas de la valeur actuelle de la parcelle de sa cliente, cependant qu'il devait nécessairement évaluer le quantum de la créance litigieuse, au besoin en ordonnant une mesure d'expertise, le délégué du premier président s'est soustrait à son obligation de juger et a violé l'article 4 du code civil.


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 16-28632;16-28633
Date de la décision : 08/02/2018
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

AVOCAT - Honoraires - Contestation - Convention d'honoraires - Honoraires de résultat - Honoraire fondé en son principe - Effets - Pouvoirs du premier président - Etendue

POUVOIRS DU PREMIER PRESIDENT - Contestation en matière d'honoraires d'avocat - Office du juge - Etendue - Détermination POUVOIRS DES JUGES - Premier président - Avocat - Honoraires - Contestation - Honoraires de résultat - Honoraire fondé en son principe - Effet

Méconnaît l'étendue de ses pouvoirs le premier président d'une cour d'appel qui refuse d'évaluer le montant d'un honoraire de résultat selon le mode de calcul convenu entre les parties, au motif que l'avocat ne justifiait pas de la nouvelle valeur de parcelles en considération de laquelle avait été fixé cet honoraire, alors qu'il résultait de ses constatations que ce dernier était, à la suite d'un meilleur classement obtenu par les parcelles, fondé en son principe


Références :

article 4 du code civil

article 10 de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 modifiée en sa version alors applicable

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 02 novembre 2016

Sur l'excès de pouvoirs du premier président en matière de contestation d'honoraires d'avocat, à rapprocher :2e Civ., 28 mars 2013, pourvoi n° 12-17493, Bull. 2013, II, n° 67 (cassation)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 08 fév. 2018, pourvoi n°16-28632;16-28633, Bull. civ.Bull. 2018, II, n° 24
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2018, II, n° 24

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat(s) : Me Balat

Origine de la décision
Date de l'import : 20/08/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2018:16.28632
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