LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Jean-Paul X...,
- La société EGB,
- La société La Fontaine de l'amour,
contre l'arrêt de la cour d'appel de MONTPELLIER, chambre correctionnelle, en date du 26 mai 2016, qui, dans la procédure suivie contre le premier du chef d'infractions au code de l'urbanisme, a prononcé sur sa requête en matière d'astreinte ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 16 mai 2017 où étaient présents : M. Guérin, président, Mme Guého, conseiller rapporteur, M. Pers, Mmes Dreifuss-Netter, Schneider, Ingall-Montagnier, Farrenq-Nési, MM. Bellenger, Lavielle, conseillers de la chambre, Mme Harel-Dutirou, conseiller référendaire ;
Avocat général : Mme Le Dimna ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire GUÉHO, les observations de la société civile professionnelle NICOLAŸ, DE LANOUVELLE et HANNOTIN, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général LE DIMNA ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit, commun aux demandeurs ;
l-Sur la recevabilité des pourvois des sociétés EGB et La Fontaine de l'amour :
Attendu que la société La Fontaine de l'amour, qui n'a pas été poursuivie et qui n'a pas été condamnée par l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 18 février 2010 ayant ordonné la remise en état des lieux sous astreinte, et la société EGB, qui n'est pas auteur de la requête en annulation du titre de perception émis pour la liquidation de cette astreinte à l'encontre du seul M. X..., n'ont pas été parties à l'instance devant la cour d'appel statuant sur ladite requête et sont dès lors sans qualité pour se pourvoir en cassation ;
D'où il suit que leurs pourvois ne sont pas recevables ;
ll-Sur le pourvoi de M. X... :
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 81 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962, 4 de la loi n° 2000-32 du 12 avril 2000, 591 et 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré non fondée la requête en annulation formée par M. X..., en sa qualité de gérant de la SCI La Fontaine d'amour, et l'a rejetée ;
" aux motifs que, sur le titre de perception : en vertu de l'article L. 480-8, alinéa premier, du code de l'urbanisme, les astreintes prononcées par les juridictions répressives en matière de droit pénal de l'urbanisme sur le fondement des dispositions de l'article L. 480-7 du même code sont liquidées et recouvrées par l'Etat ; que le titre de perception émis par l'Etat aux fins de recouvrement du montant de l'astreinte peut être contesté d'abord par un recours préalable auprès de l'administration comme l'a fait M. X..., puis devant la juridiction qui a ordonné l'astreinte au titre des incidents relatifs à l'exécution des décisions pénales sur le fondement des dispositions de l'article 710 du code de procédure pénale ; qu'en l'espèce, M. X... reproche au titre de perception émis par le préfet de l'Hérault le 17 octobre 2014 de ne pas préciser les bases sur lesquelles il est liquidé ; qu'or, le titre de perception fait expressément référence à l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 18 février 2010 ayant prononcé l'astreinte et précisé le nombre de jour de retard pris en compte dans le calcul de l'astreinte ; que, par ailleurs, et comme le rappelle la direction générale des finances publiques dans sa décision de rejet du recours préalable formé par M. X... ainsi que dans son mémoire en défense, les références des bases de liquidation (l'arrêt de la cour d'appel, le procèsverbal de constatant l'absence de remise en état des lieux et l'état de recouvrement du préfet du 4 septembre 2014) étaient joints au titre de perception délivré le 17 octobre 2014 ; que, dès lors, M. X... ne pouvait ignorer les bases de liquidation du titre de perception ; que, d'autre part, M. X... invoque l'absence de signature sur le titre de perception, or vu l'état de recouvrement émis par le préfet de l'Hérault le 4 septembre 2014 servant de base de liquidation de l'astreinte et joint au titre de perception, il va de soi que ledit titre émanait de la même autorité administrative seule habilitée à recouvrer les astreintes conformément aux dispositions de l'article L. 480-8 précité, à savoir le représentant de l'état qu'est le préfet ;
" 1°) alors que tout jugement doit être motivé ; que tout état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur ; qu'en se bornant au cas présent, pour juger que M. X... ne pouvait ignorer les bases de liquidation du titre de perception, à sans référer aux affirmations de la direction générale des finances publiques selon lesquelles les documents comportant les références des bases de liquidation, en l'occurrence, l'arrêt de la cour d'appel, le procès-verbal constatant l'absence de remise en état des lieux et l'état de recouvrement du préfet du 4 septembre 2014, étaient joints au titre de perception délivré le 17 octobre 2014, sans constater que ces documents étaient effectivement joints à ce titre, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes visés par le moyen ;
" 2°) alors que tout jugement doit être motivé et que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; que tout état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur ; qu'en s'en référant au cas présent à la décision de la direction générale des finances publiques de rejet du recours préalable formé par M. X..., ainsi qu'au mémoire en défense de cette dernière, pour retenir que l'arrêt de la cour d'appel, le procès-verbal constatant l'absence de remise en état des lieux et l'état de recouvrement du préfet du 4 septembre 2014 sur la base desquels était liquidée l'astreinte, étaient joints au titre de perception délivré le 14 octobre 2014 cependant que ni les énonciations de la décision de rejet, ni celles du mémoire en défense ne comportaient un telle affirmation, la cour d'appel qui en a dénaturé les termes a entaché sa décision de contradiction et privé sa décision de base légale au regard des textes visés par le moyen ;
" 3°) alors que tout jugement doit être motivé et que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; qu'un titre de perception doit comporter la signature de son auteur ; qu'en se bornant au cas présent, pour écarter le vice affectant le titre de perception émis le 17 octobre 2014 résultant de l'absence de signature, à relever que ce titre émanait nécessairement du préfet de l'Hérault qui avait émis l'état de recouvrement des astreintes le 4 septembre 2014, la cour d'appel qui a statué par des motifs généraux a privé sa décision de base légale au regard des textes visés par le moyen ;
" 4°) alors que tout jugement doit être motivé ; qu'un titre de perception doit comporter la signature de son auteur ; qu'en jugeant, pour écarter le moyen d'annulation du titre de perception fondé sur l'absence de signature de ce titre, que l'état de recouvrement émis par le préfet de l'Hérault le 4 septembre 2014 servant de base à la liquidation de l'astreinte était joint au titre de perception, cependant que la décision de la direction générale des finances publiques de rejet du recours préalable formé par M. X..., ainsi que le mémoire en défense de cette dernière, dont elle déduisait ce fait, ne comportaient aucune affirmation en ce sens, la cour d'appel a une fois de plus entaché sa décision de contradiction par dénaturation de ces documents et privé sa décision de base légale au regard des textes visés par le moyen " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure que M. Jean-Paul X... et la société EGB dont il était le gérant, ont été poursuivis devant le tribunal correctionnel pour exécution de travaux interdits dans une commune sans plan local d'urbanisme et exécution de travaux non autorisés par un permis de construire, pour avoir, en 2005 et 2006, transformé une usine en immeuble d'une vingtaine d'habitations et de bureaux ; que la cour d'appel a déclaré les prévenus coupables, a condamné M. X... et la société EGB chacun à une amende et a ordonné la remise en état des lieux, sous astreinte solidaire de 50 euros par jour de retard à l'expiration du délai de deux ans fixé ; que le 17 octobre 2014, le préfet de l'Hérault a émis contre M. X... un titre de perception de l'astreinte d'un montant de 6 300 euros pour une période comprise entre le 28 février 2014 et le 3 juillet 2014 ; qu'après le rejet de son recours préalable, M. X... a saisi la cour d'appel d'une demande d'annulation de ce titre de perception ;
Attendu que, pour écarter l'argumentation du demandeur fondée sur l'absence, dans le titre de perception, d'indications suffisantes relatives aux bases de la liquidation et de signature de l'auteur de la décision, l'arrêt attaqué retient notamment que le titre de perception fait expressément référence à l'arrêt de la cour d'appel de Montpellier du 18 février 2010 ayant prononcé l'astreinte et précise le nombre de jours de retard pris en compte dans le calcul de l'astreinte ; que les juges ajoutent qu'au vu de l'état de recouvrement émis par le préfet de l'Hérault le 4 septembre 2014 servant de base de liquidation de l'astreinte, il va de soi que le titre de perception émanait de cette même autorité administrative, seule habilitée à recouvrer les astreintes conformément aux dispositions de l'article L. 480-8 du code de l'urbanisme ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que le titre de perception comportait lui-même les indications sur les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il avait été émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fondait, et dès lors que, en application de l'article 55 de la loi de finances rectificative pour 2010, la signature de l'auteur de la décision devait figurer non pas sur le titre lui-même mais sur un état revêtu de la formule exécutoire, produit en cas de contestation, la cour d'appel a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
l-Sur les pourvois des sociétés EGB et La Fontaine de l'amour :
Les déclare irrecevables ;
ll-Sur le pourvoi de M. X... :
Le REJETTE ;
DIT n'y avoir lieu à application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-sept juin deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.