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29/03/2017 | FRANCE | N°16-82192

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 29 mars 2017, 16-82192


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° V 16-82.192 F-D

N° 905

FAR
29 MARS 2017

REJET

M. GUÉRIN président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

REJET du pourvoi formé par M. [L] [B], contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 7e chambre, en date du 8

mars 2016, qui, pour atteintes sexuelles sur mineur de quinze ans, l'a condamné à quatre ans d'emprisonnement, et a pronon...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :

N° V 16-82.192 F-D

N° 905

FAR
29 MARS 2017

REJET

M. GUÉRIN président,

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
________________________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l'arrêt suivant :

REJET du pourvoi formé par M. [L] [B], contre l'arrêt de la cour d'appel de Versailles, 7e chambre, en date du 8 mars 2016, qui, pour atteintes sexuelles sur mineur de quinze ans, l'a condamné à quatre ans d'emprisonnement, et a prononcé sur les intérêts civils ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 15 mars 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Béghin, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme [E] ;

Sur le rapport de M. le conseiller référendaire BÉGHIN, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général GAILLARDOT ;

Vu le mémoire produit ;

Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 6, § 3, e), de la Convention européenne des droits de l'homme, 406, 407, 408, 512, 591 à 593, défaut de motifs et manque de base légale :

"en ce qu'il ressort des mentions de l'arrêt attaqué que M. [B] a comparu en présence de M. [M] [P], interprète en langue tamoul, inscrit sur les listes de la cour d'appel de Versailles et que le prévenu ne parlant pas suffisamment la langue française mais parlant en langue hindoue, un interprète a été nommé, lequel a déclaré se nommer M. [P] [M] ;

"1°) alors que, selon l'article 407 du code de procédure pénale, l'interprète, s'il n'est pas assermenté, prête serment d'apporter son concours à la justice en son honneur et en sa conscience ; que les mentions imprécises de l'arrêt attaqué n'établissent pas que M. [M] [P] a prêté serment ou était assermenté pour être inscrit sur une liste d'expert judiciaire en qualité d'interprète ; que la Cour de cassation n'est pas en mesure de s'assurer du respect des dispositions légales précitées ;

"2°) alors qu'il doit être constaté que l'interprète a prêté son concours chaque fois que cela a été nécessaire ; qu'à défaut d'une telle constatation dans l'arrêt, la procédure est entachée de nullité" ;

Attendu que les mentions de l'arrêt mettent la Cour de cassation en mesure de s'assurer que l'interprète ayant assisté le prévenu devant la cour d'appel était inscrit sur la liste des interprètes de ladite cour et qu'il a prêté son concours chaque fois que cela a été nécessaire ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le deuxième moyen de cassation, pris de la violation des articles 227-25, 227- 29, 227-31 du code pénal, 591 à 593, défaut de motifs et manque de base légale :

"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. [B] coupable d'atteinte sexuelle sur mineur de quinze ans ;

"aux motifs qu'il ressort des pièces de la procédure qu'[E] [Z] effectuait des dénonciations aux termes de déclarations particulièrement précises et circonstanciées mais également constantes ; que ces dénonciations étaient confortées par les vérifications effectuées, les témoignages recueillis mais également par les déclarations du prévenu, ce dernier reconnaissant la matérialité des actes de nature sexuelle réalisés les 14 septembre 2012 et 18 septembre 2012 ; que M. [B] conteste toutefois avoir eu connaissance de l'âge réel d'[E] [Z] lors de ces faits soit douze ans, invoquant que celle-ci lui avait dit être âgée de seize ans ; mais d'une part [E] [Z], de façon constante, a affirmé avoir déclaré à M. [B] avoir treize ans puis douze ans ; que, d'autre part, M. [F] alias "[L]", ami de M. [B], ayant rencontré [E] [Z] peu de temps auparavant, indiquait ne pas avoir donné suite car elle était vraiment trop jeune et était visiblement âgée de bien moins que quinze ans ; que, de plus, les enquêteurs mentionnaient que les photographies d'[E] [Z] en septembre 2012 représentaient une enfant de son âge ; qu'enfin, et surtout, M. [B] admettait à plusieurs reprises qu'[E] [Z] ne pouvait être âgée de seize ans ; qu'il reconnaissait lors de son interrogatoire par le magistrat instructeur, sur présentation des photographies d'[E] [Z], que celle-ci ne pouvait être âgée de seize ans ; qu'il reconnaissait également lors de la confrontation organisée le 26 juin 2013, soit neuf mois après les faits qu'[E] [Z] ne pouvait être considérée comme une jeune fille de seize ans ; que dans ces conditions, la cour observe pour sa part que le prévenu ne peut utilement plaider qu'il n'avait pas conscience de l'âge réel d'[E] [Z] au vu de son aspect physique ; que l'examen du dossier ne met en lumière aucune raison de revenir sur la déclaration de culpabilité portée par les premiers juges laquelle sera confirmée ;

"alors que l'atteinte sexuelle sur mineur de quinze ans est une infraction intentionnelle ; que l'intention coupable ne peut résider que dans la connaissance par le prévenu du fait que celui sur lequel il commet les actes incriminés est âgé de moins de quinze ans ; qu'il s'ensuit que la poursuite est impossible, faute d'élément intentionnel, lorsqu'il est acquis que l'auteur ignorait l'âge réel de la victime ; qu'en l'espèce, si M. [B] a reconnu avoir eu des relations sexuelles avec [E] [Z], il a toujours affirmé qu'il avait été trompé sur son âge, celle-ci lui ayant dit être âgée de seize ans ; qu'en relevant, pour entrer en voie de condamnation, que le prévenu avait admis à plusieurs reprises qu'[E] [Z] ne pouvait être âgée de seize ans, bien qu'il devait être constaté qu'il avait connaissance qu'elle avait moins de quinze ans, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes et principes susvisés" ;

Attendu que, pour écarter l'argumentation du prévenu qui soutenait avoir cru qu'[E] [Z] était âgée de seize ans et non de douze ans au moment de la commission des faits, en septembre 2012, la cour d'appel énonce notamment que les photographies de celle-ci, datant de ce même mois, représentaient une jeune fille de son âge et que, selon un ami du prévenu qui l'avait rencontrée peu de temps avant lui, elle avait visiblement bien moins de quinze ans ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, procédant de son appréciation souveraine, desquelles il résulte que le prévenu n'a pu se méprendre sur l'âge de la victime, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Sur le troisième moyen de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 132-18, 132-19, 132-24, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :

"en ce que l'arrêt attaqué a condamné M. [B] à une peine de quatre années d'emprisonnement ferme ;

"aux motifs que sur la peine, la cour estime devoir porter, en considération de la gravité particulière des faits, de la vulnérabilité de la partie civile liée à son âge mais également aux difficultés personnelles dont elle s'était confié à M. [B], ce que le prévenu reconnaît, à quatre ans d'emprisonnement ; que le quantum de la peine prononcée rend impossible la recherche d'une mesure d'aménagement de peine ;

"1°) alors qu'en matière correctionnelle, une peine d'emprisonnement sans sursis ne peut être prononcée qu'en dernier recours si la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendent cette peine nécessaire et si toute autre sanction est manifestement inadéquate ; qu'en prononçant à l'encontre de M. [B] une peine de quatre années d'emprisonnement ferme, sans préciser en quoi la gravité de l'infraction et la personnalité de son auteur rendaient cette peine nécessaire en dernier recours, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;

"2°) alors que, lorsqu'une peine d'emprisonnement sans sursis est prononcée en matière correctionnelle à l'encontre d'un prévenu ne comparaissant pas en récidive légale, cette peine doit, si la personnalité et la situation du condamné le permettent et sauf impossibilité matérielle, faire l'objet d'une des mesures d'aménagement prévues par le code pénal ; que, s'il prononce néanmoins une peine ferme, il doit spécialement motiver sa décision, au regard des faits de l'espèce et de la personnalité de leur auteur ainsi que de sa situation matérielle, familiale et sociale ; qu'en prononçant à l'encontre de M. [B] une peine de quatre années d'emprisonnement ferme, sans justifier sa décision au regard de sa situation matérielle, familiale et sociale, la cour d'appel a privé sa décision de base légale" ;

Attendu que pour condamner le prévenu à quatre ans d'emprisonnement, l'arrêt, après avoir rappelé la situation personnelle de l'intéressé, originaire du Sri-Lanka et en situation irrégulière en France, retient que les faits, commis au préjudice d'une jeune fille qui s'était confiée à lui et qu'il savait fragile, sont d'une particulière gravité ;

Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que les juges ont nécessairement apprécié que toute autre sanction que l'emprisonnement sans sursis était inadéquate, et dès lors qu'ils ne sont tenus de spécialement motiver leur décision au regard de la situation matérielle, familiale et sociale du prévenu que pour refuser d'aménager la peine d'emprisonnement sans sursis qu'ils prononcent, lorsque cette peine est d'une durée qui n'excède pas deux ans, ou un an en cas de récidive, et non pour justifier la nécessité d'une telle peine, la cour d'appel a justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen doit être écarté ;

Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;

REJETTE le pourvoi ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-neuf mars deux mille dix-sept ;

En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-82192
Date de la décision : 29/03/2017
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PEINES - Peines correctionnelles - Peines d'emprisonnement sans sursis prononcées par la juridiction correctionnelle - Conditions - Motivation - Nécessité de la peine et caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction - Caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction - Constatation - Caractère suffisant - Détermination - Portée

PEINES - Prononcé - Emprisonnement sans sursis - Motif - Peine prononcée par la juridiction correctionnelle - Motivation - Nécessité de la peine et caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction - Caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction - Constatation - Caractère suffisant - Détermination - Portée JUGEMENTS ET ARRETS - Motifs - Motivation spéciale - Peine prononcée par la juridiction correctionnelle - Emprisonnement sans sursis - Nécessité de la peine et caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction - Caractère manifestement inadéquat de toute autre sanction - Constatation - Caractère suffisant - Détermination - Portée

Justifie sa décision au regard de l'article 132-19 du code pénal la cour d'appel qui prononce une peine d'emprisonnement ferme en se fondant sur des motifs dont il résulte que les juges ont nécessairement estimé que toute autre sanction était inadéquate


Références :

article 132-19 du code pénal

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 08 mars 2016

Sur la motivation du prononcé d'une peine correctionnelle d'emprisonnement ferme, et plus précisément, sur l'appréciation du critère selon lequel toute autre sanction est manifestement inadéquate, à rapprocher :Crim., 29 novembre 2016, pourvoi n° 15-83108, Bull. crim. 2016, n° ??? (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 29 mar. 2017, pourvoi n°16-82192, Bull. crim.Bull. crim. 2017, n° 105
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle Bull. crim. 2017, n° 105

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat général : M. Gaillardot
Rapporteur ?: M. Béghin
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2023
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2017:16.82192
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