Statuant sur le pourvoi formé par :
- Le procureur général près la cour d'appel de Colmar,
contre l'arrêt de ladite cour, chambre correctionnelle, en date du 20 janvier 2016, qui, dans la procédure suivie contre M. Rachid X... du chef de maintien irrégulier sur le territoire français en récidive, a prononcé la nullité des poursuites ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 25 janvier 2017 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Moreau, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller MOREAU, les observations de la société civile professionnelle BARADUC, DUHAMEL et RAMEIX, avocat en la Cour et les conclusions de Mme l'avocat général MORACCHINI ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 78-2 alinéa 8 du code de procédure pénale et L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et de droit d'asile ;
Vu l'article 78-2, alinéa 8, du code de procédure pénale, dans sa rédaction applicable au 31 mai 2014, ensemble l'article L. 611-1, I, alinéa 2, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, dans une zone comprise entre la frontière terrestre de la France avec les Etats parties à la convention signée à Schengen, le 19 juin 1990, et une ligne tracée à 20 km en deçà, ainsi que dans certaines autres zones, pour la prévention et la recherche des infractions liées à la criminalité transfrontière, l'identité de toute personne peut être contrôlée en vue de vérifier le respect des obligations de détention, de port et de présentation des titres et documents prévues par la loi ;
Attendu que, selon le second, à la suite d'un contrôle d'identité, les personnes de nationalité étrangère peuvent être tenues de présenter le pièces et documents sous le couvert desquels elles sont autorisées à circuler ou séjourner en France ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué, du jugement qu'il confirme et des pièces de procédure que M. X..., de nationalité algérienne, a fait l'objet d'un contrôle effectué par les services de la police de l'air et des frontières alors qu'il voyageait dans un train reliant Nice à Strasbourg ; que le contrôle a eu lieu au moment où le train, approchant de Strasbourg, circulait sur une portion de voie distante de moins de 20 km de la frontière franco-allemande ; que M. X... a présenté un passeport algérien périmé ; qu'il était par ailleurs sous le coup d'un arrêté préfectoral portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français ; que, poursuivi du chef de maintien irrégulier sur le territoire français, en récidive, il a excipé de la nullité du contrôle pour violation des dispositions de l'article L. 611-1, I, 3e alinéa du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que le tribunal correctionnel a fait droit à sa demande, prononcé la nullité du contrôle et de tous les actes subséquents ; que le ministère public a interjeté appel de cette décision ;
Attendu que pour confirmer le jugement, l'arrêt énonce que les mentions du procès-verbal établi par la police de l'air et des frontières, insuffisamment explicites sur les circonstances dans lesquelles le contrôle a été effectué, ne permettent pas de s'assurer que les policiers étaient en possession d'éléments objectifs, déduits de circonstances extérieures à la personne même de l'intéressé, de nature à faire apparaître sa qualité d'étranger ;
Mais attendu qu'en statuant ainsi, alors, d'une part, que le contrôle avait été opéré pour la prévention et la recherche des infractions liées à la criminalité transfrontière, pendant une durée n'excédant pas six heures et de manière aléatoire et non systématique et, d'autre part, que le fondement dudit contrôle, par sa nature et sa finalité, était indépendant du recueil d'éléments objectifs extérieurs à la personne de l'étranger, la cour d'appel a méconnu les textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Colmar, chambre correctionnelle, en date du 20 janvier 2016, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Metz à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Colmar et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit février deux mille dix-sept ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.