LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 mars 2014), que M. et Mme X... ont entrepris la construction d'un pavillon ; que sont intervenus M. Y..., maître d'oeuvre chargé d'une mission complète, l'entreprise JPM rénovation, assurée auprès des MMA et chargée du lot menuiserie extérieures (n° 6) et du lot fermeture (n° 14), la société ACM, sous-traitante de JPM rénovation, la société CEG, assurée auprès de la SMABTP, fournisseur des fenêtres et portes-fenêtres sur commande de ACM, M. Z..., assuré auprès de la société Thélem assurances, chargé de la pose des portes-fenêtres, et la société Sepalumic, fabricant de celles-ci ; que, des désordres et malfaçons étant apparus, M. et Mme X... ont, après expertise, assigné les intervenants à l'acte de construire en indemnisation de leurs préjudices ;
Attendu que M. et Mme X... font grief à l'arrêt de dire qu'il n'y a pas eu réception des lots 6 et 14 et de rejeter leurs demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter tout ou partie de l'ouvrage avec ou sans réserves ; qu'en retenant qu'il ne peut y avoir réception partielle à l'intérieur d'un même lot, la cour d'appel a violé l'article 1792-6 du code civil par refus d'application ;
2°/ que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves ; qu'il incombe aux juges du fond devant qui l'une des parties invoque un acte de réception amiable de l'ouvrage de rechercher si l'acte en cause manifeste l'intention non équivoque du maître de l'ouvrage de recevoir ledit ouvrage, avec ou sans réserves ; qu'en se fondant sur l'importance particulière des désordres constatés par l'expert pour affirmer le caractère non réceptionnable des deux
lots en cause, la cour d'appel a statué par un motif inopérant et a, par suite, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792-6, alinéa 1er, du code civil ;
3°/ que M. et Mme X... faisaient valoir en appel que les réserves formulées lors de la réception du 13 juin 2008 ne faisaient état que de rayures, traces de chocs ou problèmes de fonctionnement mineurs, que la véritable ampleur des désordres liés à des vices cachés n'avait pu être constatée qu'un an après la réception à l'occasion d'intempéries et, ainsi, que les défauts seuls constatés à la date du 13 juin 2008 ne les auraient pas dissuadés de prononcer la réception, certes avec réserves ; que la cour d'appel, s'abstenant de répondre à ces conclusions, s'est fondée sur l'importance particulière des désordres constatés par l'expert pour affirmer le caractère non réceptionnable des deux lots en cause ; qu'elle a ainsi méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que faute d'avoir recherché si, comme le soutenaient M. et Mme X..., les principaux désordres n'étaient apparus que postérieurement à la réception, de sorte qu'ils n'avaient pu exercer aucune influence sur la volonté des parties à l'acte du 13 juin 2008, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792-6, alinéa 1er, du code civil ;
Mais attendu qu'en raison du principe d'unicité de la réception, il ne peut y avoir réception partielle à l'intérieur d'un même lot ; qu'ayant relevé que la pièce, présentée comme procès-verbal de réception et établie par l'entreprise JPM rénovation, qui ne concernait que les travaux de menuiseries et de fermetures et se voulait être un procès-verbal de réception avec réserves des lots 6 et 14, comportait la mention manuscrite "non réceptionné" en face d'un certain nombre d'éléments, la cour d'appel en a exactement déduit une absence de réception de ces lots, de sorte que la responsabilité décennale des constructeurs ne pouvait être mise en oeuvre, et a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. et Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du deux février deux mille dix-sept.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour M. et Mme X...
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit qu'il n'y avait pas eu réception des lots 6 et 14 dont l'exécution avait été confiée par M. et Mme X... à la société JPM RÉNOVATION et d'avoir, en conséquence, débouté M. et Mme X... de leurs demandes d'indemnisation fondées sur la responsabilité de plein droit des constructeurs,
Aux motifs que « Sur le fondement des demandes et l'existence d'une réception :
Mme et M. X... ont formé leurs demandes d'indemnisation pour les désordres allégués sur le seul fondement de la responsabilité de plein droit des constructeurs, ce qui suppose établie l'existence d'une réception ;
Les dispositions de l'article 1792-6 du Code civil qui définissent la réception comme acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepte l'ouvrage avec ou sans réserves, ne sont pas exclusives d'une réception partielle, par lots ou corps d'état, qui n'est pas prohibée par la loi.
En revanche, il ne peut y avoir réception partielle à l'intérieur d'un même lot.
En l'espèce, l'expert a retenu qu'une réception avec de très nombreuses réserves était intervenue le 12 juin 2008 (annexe A 18).
La pièce présentée comme procès-verbal de réception a été établie sous l'enseigne de JPM Rénovation sous la référence n° 00002, ne concerne que les travaux de menuiseries et de fermetures et se veut en réalité être un procès-verbal de réception avec réserves des lots 6 et 14 objet du litige.
Ce document comporte la mention manuscrite "non réceptionné" en face d'un certain nombre d'éléments concernant en particulier :
- page A 18-2 dans le salon un coulissant 2V (hauteur rail au sol = 50 mm)
d'une hauteur de 2 250 mm et une largeur de 1 650 mm,
- page A 18-3 :
. dans le bureau et la salle d'eau un coulissant 1V Galandage largeur baie (hauteur rail au sol 60 mm) d'une hauteur de 2 250 mm et une largeur de 1 000 mm
. dans la salle d'eau un coulissant 1V Galandage largeur baie (hauteur rail au sol 60 mm) d'une hauteur de 2 250 mm et une largeur de 900 mm
. dans la chambre 1, une porte fenêtre (PF) d'une hauteur de 2 250 mm et une largeur de 1 000 mm.
- page A 18-4 chambre 1 coulissant 2V (hauteur rail au sol 50 mm) d'une hauteur de 2 250 mm et une largeur de 2 300 mm.
Il sera au surplus relevé que cet acte du 12 juin 2008 comporte mentions de multiples indications de rayures et traces de chocs, ce qui est corroboré et complété par le constat d'huissier établi le 24 juin 2008, soit 12 jours plus tard, à la demande de Mme X... qui en reprend l'indication, outre celle de bavures de découpe, de désaffleurements dont certains sont coupants.
Un refus de réception d'un lot ne pouvant être partiel, en raison du principe d'unicité de la réception, il sera retenu, en conséquence du refus exprès des éléments cités, une absence de réception des lots 6 et 14 confiés à l'entreprise JPM, de sorte que la responsabilité des constructeurs ne peut être mise en oeuvre sur le fondement invoqué.
Il sera au surplus retenu qu'au terme de son rapport l'expert a retenu l'importance particulière des désordres confirmant le caractère non réceptionnable des deux lots en cause et en particulier :
- des rayures en très grand nombre sur les menuiseries, situées dans l'alignement des usinages réalisés en aluminium, l'usinage ayant été réalisé par C.E.G. Il a estimé qu'elles n'étaient pas réparables et qu'il était nécessaire de remplacer tous les profits rayés.
- des défauts de conception des menuiseries car les prescriptions de bonne qualité insérées au CCTP du lot n° 6 quant aux caractéristiques d'étanchéité à l'air, à l'eau et au vent n'ont pas été respectées, et ne paraissent pas avoir été transmises ni de JPM à ACM, ni surtout au fournisseur CEG (rapport page 36), l'expert rappelant n'avoir pu se faire remettre les commandes effectuées malgré des demandes à de multiples reprises. L'examen des différents éléments lui a permis de conclure que les portes-fenêtres sont trop souples et se déforment dès qu'il y a du vent, de sorte qu'elles n'assurent plus une bonne étanchéité, que les profilés utilisés par CEG ne permettaient pas de réaliser des menuiseries aussi importantes avec des caractéristiques précisées au CCTP, que JPM n'avait pas spécifié la qualité demandée à CEG , ni vérifié la qualité de conception des menuiseries, que M. Y... maître d'oeuvre n'avait pas lui-même vérifié la bonne adéquation des performances des menuiseries à celles demandées.
- des défauts de réglages de certaines menuiseries.
- un manque d'étanchéité à l'air et à l'eau pour 3 menuiseries testées.
- le danger présenté par l'un des châssis en raison de difficultés de manoeuvre.
En l'absence de réception, et alors que les époux X... n'ont fondé leurs demandes que sur les seuls articles 1792 et suivants du Code civil, il convient d'infirmer le jugement entrepris en ce qu'il a retenu l'existence d'une réception et fait droit à leurs demandes d'indemnisation dans les termes précités.
En l'absence de demande, même subsidiaire, sur le fondement contractuel, il convient dès lors de débouter les époux X... de l'intégralité de leurs demandes » ;
1° Alors que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter tout ou partie de l'ouvrage avec ou sans réserves ; qu'en retenant qu'il ne peut y avoir réception partielle à l'intérieur d'un même lot, la Cour d'appel a violé l'article 1792-6 du Code civil par refus d'application ;
2° Alors que la réception est l'acte par lequel le maître de l'ouvrage déclare accepter l'ouvrage avec ou sans réserves ; qu'il incombe aux juges du fond devant qui l'une des parties invoque un acte de réception amiable de l'ouvrage, de rechercher si l'acte en cause manifeste l'intention non équivoque du maître de l'ouvrage de recevoir ledit ouvrage, avec ou sans réserves ; qu'en se fondant sur l'importance particulière des désordres constatés par l'expert pour affirmer le caractère non réceptionnable des deux lots en cause, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant et a, par suite, privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792-6, al. 1er, du Code civil ;
3° Alors que M. et Mme X... faisaient valoir en appel que les réserves formulées lors de la réception du 13 juin 2008 ne faisaient état que de rayures, traces de chocs ou problèmes de fonctionnement mineurs, que la véritable ampleur des désordres liés à des vices cachés n'avait pu être constatée qu'un an après la réception à l'occasion d'intempéries et, ainsi, que les défauts seuls constatés à la date du 13 juin 2008 ne les auraient pas dissuadés de prononcer la réception, certes avec réserves ; que la Cour d'appel, s'abstenant de répondre à ces conclusions, s'est fondée sur l'importance particulière des désordres constatés par l'expert pour affirmer le caractère non réceptionnable des deux lots en cause ; qu'elle a ainsi méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
4° Et alors et partant, que faute d'avoir recherché si, comme le soutenaient M. et Mme X..., les principaux désordres n'étaient pas apparus que postérieurement à la réception, de sorte qu'ils n'avaient pu exercer aucune influence sur la volonté des parties à l'acte du 13 juin 2008, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792-6, al. 1er, du Code civil.