LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L. 932-6 et L. 932-13 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué et les productions, que la société Centre médical de la Vénerie (la société), tenue de faire bénéficier ses salariés d'un régime de prévoyance collectif et obligatoire couvrant notamment le risque d'invalidité, a souscrit un contrat d'assurance de groupe, à effet au 1er janvier 1969, auprès de l'institution de prévoyance Premalliance prévoyance, aux droits de laquelle se trouve l'institution de prévoyance AG2R prévoyance (AG2R), afin de garantir les prestations qui pourraient être dues en cas d'incapacité, invalidité ou décès de ses salariés, puis a signé le 10 août 2009 un avenant se rapportant à ce contrat ; que, contestant le classement en invalidité de catégorie 1 de Mme X..., l'une de ses salariés, par AG2R, la société l'a assignée, par acte du 21 août 2012, afin de voir juger qu'elle est tenue de prendre en charge cette salariée au titre d'une invalidité de catégorie 2 à compter du 1er octobre 2009 ; que la société s'est opposée à la fin de non-recevoir tirée de la prescription soulevée par AG2R en faisant valoir que cette institution de prévoyance avait manqué à son devoir de conseil et d'information dès lors que l'avenant du 10 août 2009, mentionnant qu'il vaut notice d'information, ne précisait pas les délais de prescription ;
Attendu que pour déclarer prescrite l'action de la société après avoir retenu que le point de départ du délai biennal de prescription est constitué par la notification par AG2R, le 30 octobre 2009, du refus de classement de Mme X... en invalidité de catégorie 2, l'arrêt énonce qu'aucune obligation d'information ne pèse sur l'institution de prévoyance au titre de la notice d'information, l'obligation d'information et de conseil reposant sur le souscripteur conformément à l'article L. 932-6 du code de la sécurité sociale, texte qui a pour objectif la protection de l'assuré et non de l'adhérent ;
Qu'en statuant ainsi, alors que les institutions de prévoyance sont tenues de satisfaire à l'obligation d'information qui leur incombe à l'égard des adhérents par l'envoi de la notice d'information prévue par l'article L. 932-6 du code de la sécurité sociale, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres branches du moyen :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 avril 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Bourges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Orléans ;
Condamne l'institution de prévoyance AG2R prévoyance aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer à la société Centre médical de la Vénerie la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Centre médical de la Vénerie
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR confirmé par substitution de motifs le jugement du 27 novembre 2013 du tribunal de grande instance de Nevers en ce qu'il a déclaré irrecevable l'action intentée par la SAS le Centre médical de la Vénerie comme étant prescrite, a débouté la SAS Centre médical de la Vénerie du surplus de ses demandes et l'a condamné à payer à l'institut AG2R Prévoyance la somme de 1500 € au titre de l'article 700 du code de procédure civile et de l'AVOIR condamné aux dépens.
AUX MOTIFS QUE « L'article L932-13 du Code de la sécurité sociale dispose que toutes actions dérivant des opérations mentionnées à la présente section sont prescrites par deux ans à compter de l'événement qui y donne naissance. La prescription est portée à cinq ans en ce qui concerne l'incapacité de travail. En l'espèce, il résulte des pièces produites que Prémalliance-Prévoyance aux droits desquels vient l'AG2R, a notifié son refus de classement en invalidité de catégorie 2 pour Madame X..., par courrier recommandé en date du 26 octobre 2009, notifié le 30 octobre 2009. Au sens du texte susvisé, c'est donc cette dernière date qui constitue l'événement qui a donné naissance à l'action en contestation de ce classement formée par la SAS LE CENTRE MÉDICAL DE LA VÉNERIE, venant aux droits de la salariée. Ainsi, le point de départ du délai biennal n'est pas la notification par la CPAM à Madame X... de son état d'invalidité de 1ère catégorie, comme l'a retenu de manière erronée le premier juge, mais celle du refus de l'intimée ci-dessus rappelée. De plus, aucune obligation d'information ne pèse sur l'institution de prévoyance au titre de la notice d'information, l'obligation d'information et de conseil reposant sur le souscripteur conformément à l'article L932-6 du code de la sécurité sociale, lequel texte a pour objectif la protection de l'assuré et non de l'adhérent. Le moyen tiré de ce texte est donc inopérant. Enfin, l'appelante ne justifie d'aucune cause d'interruption ou de suspension du dit délai au sens des articles 2234 et 2244 et suivants du Code civil. En conséquence, il ne peut qu'être constaté qu'à la date de l'assignation délivrée par l'appelante, soit le 21 août 2012, l'action diligentée par celle-ci était prescrite. Dès lors, la décision déférée sera confirmée mais par substitution de motifs, eu égard à la date retenue comme point de départ du délai de la prescription biennale. Il n'y a pas lieu de faire application des dispositions de l'article 700 du Code de procédure civile. Les dépens seront mis à la charge de la SAS LE CENTRE MÉDICAL DE LA VÉNERIE ».
1) ALORS QUE l'institution de prévoyance a l'obligation d'établir et de remettre à l'adhérent au contrat de prévoyance une notice d'information, qui précise notamment les délais de prescription applicables au contrat ; que le manquement de l'institution de prévoyance à cette obligation empêche, en cas de litige dérivant du contrat, le délai de prescription de courir à l'égard de l'adhérent ; qu'en l'espèce, la société Centre médical de la Vénerie et l'institut AG2R Prévoyance avaient conclu le 10 août 2009 un avenant au contrat de prévoyance, qui valait notice d'information, mais qui ne précisait pas les délais de prescription ; qu'en jugeant néanmoins qu'aucune obligation d'information ne pesait sur l'institution de prévoyance au titre de la notice d'information prévue à l'article L.932-6 du code de la sécurité sociale, pour en déduire que le moyen de la société Centre médical de la Vénerie tiré de ce texte était inopérant et que son action était prescrite, la cour d'appel a violé les articles L.932-6 et L.932-13 du code de la sécurité sociale.
2) ALORS QUE l'institution de prévoyance a, comme tout co-contractant professionnel une obligation d'information générale, indépendamment d'une prescription légale spéciale ; qu'en exonérant l'institut AG2R de toute obligation d'information de ses adhérents quant aux prescriptions des actions dérivant du contrat, la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code Civil.
3) ALORS QUE la prescription ne court pas contre celui qui est dans l'impossibilité d'agir par suite d'un empêchement quelconque résultant soit de la loi, soit de la convention ou de la force majeure ; qu'en l'espèce, la société Centre médical de la Vénerie et l'institut AG2R Prévoyance avaient conclu le 10 août 2009 un avenant au contrat de prévoyance, qui valait notice d'information mais qui ne précisait pas les délais de prescription ; que la société Centre médical de la Vénerie faisait valoir que le manquement de l'institut AG2R Prévoyance à son obligation d'établir une notice d'information conforme excluait qu'il lui oppose la prescription de son action ; qu'en retenant néanmoins que la société Centre médical de la Vénerie ne justifiait d'aucune cause d'interruption ou de suspension du délai de prescription et que son action était prescrite, sans rechercher si l'institut AG2R Prévoyance, en omettant de préciser les délais de prescription dans sa notice d'information, n'avait pas empêché la société Centre médical de la Vénerie d'agir, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L.932-6 et L.932-13 du code de la sécurité sociale et 2234 du code civil.
4) ALORS QUE le défaut de réponse à conclusions constitue un défaut de motifs ; qu'en l'espèce, pour soutenir que son action n'était pas prescrite, la société Centre médical de la Vénerie faisait valoir que l'institution de prévoyance avait reconnu le droit de la salariée à la mise en oeuvre de la garantie invalidité, et avait uniquement contesté sa portée, puisqu'elle n'avait jamais cessé de faire bénéficier Mme X... des prestations d'une invalidité de 1ère catégorie et avait même réglé les prestations correspondant à une invalidité de 2ème catégorie en octobre 2009 (conclusions de l'exposante, page 5) ; qu'en omettant de répondre à ce moyen péremptoire pris de l'interruption de la prescription par suite de la reconnaissance du droit litigieux par le débiteur, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.