LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 3 mars 2015), que la société Bécon tabac, locataire de locaux à usage commercial appartenant à la SCI Daitouch, a sollicité le renouvellement de son bail ; que, les parties n'étant pas parvenues à un accord sur le prix du bail renouvelé, le juge des loyers commerciaux a été saisi ; qu'un arrêt du 5 février 2013 a dit que le bail s'était renouvelé à compter du 1er avril 2007, moyennant un loyer déplafonné applicable à compter du 23 juin 2008 ; qu'en cours d'instance, la SCI Daitouch a demandé la révision triennale du loyer ;
Attendu que la société Bécon tabac fait grief à l'arrêt de fixer le prix du loyer révisé à compter du 1er avril 2007 et non à compter du 23 juin 2008, alors, selon, le moyen :
1°/ que la majoration ou la diminution de loyer consécutive à une révision triennale ne peut excéder la variation de l'indice trimestriel du coût de la construction intervenue depuis la dernière fixation amiable ou judiciaire du loyer ; que seul doit être pris en compte l'indice connu à la date où la dernière fixation judiciaire a pris effet ; qu'en considérant en l'espèce que devait être retenu, comme indice diviseur, l'indice du deuxième trimestre 2007 par cela seul que le bail avait été renouvelé au 1er avril 2007, peu important que le loyer de renouvellement n'ait été exigible qu'à compter du 23 juin 2008, et que la dernière fixation judiciaire n'ait ainsi eu lieu qu'à cette date, la cour d'appel a violé l'article L. 145-38 du code de commerce ;
2°/ que la société Bécon tabac faisait valoir qu'en vertu de l'article L. 112-1 du code monétaire et financier est réputée non écrite toute clause d'un contrat à exécution successive, et notamment d'un bail commercial, prévoyant la prise en compte d'une période de variation de l'indice supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision et qu'ainsi, il était impossible, sauf à méconnaître ce principe impératif, de prendre en considération le dernier indice connu à la date du renouvellement du bail si celle-ci était antérieure à la date de dernière fixation judiciaire du loyer et si cela conduisait à prendre en compte une période de variation de l'indice supérieure à la durée séparant chaque révision ; qu'en omettant de répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que la période de variation de l'indice, pour la fixation du loyer du bail renouvelé, ne peut être supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision ; qu'en retenant les indices du deuxième trimestre 2007 et du quatrième trimestre 2010, soit une période de variation supérieure à la période qui s'était écoulée depuis la précédente révision judiciaire fixée le 23 juin 2008, la cour d'appel a violé les articles L. 112-1 du code monétaire et financier et L. 145-38 du code de commerce ;
Mais attendu qu'ayant exactement retenu que le point de départ du délai de trois ans prévu par l'article L. 145-38 du code de commerce se situe à la date de renouvellement du bail et que, si la date d'exigibilité du loyer renouvelé avait été reportée au 23 juin 2008, en raison du retard apporté par le bailleur à proposer un nouveau loyer, cette circonstance était sans incidence sur la date de prise d'effet du nouveau bail fixée au 1er avril 2007, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, sans être tenue de répondre à un moyen inopérant fondé sur l'article L. 112-1 du code monétaire et financier, inapplicable à la révision triennale légale, que l'indice à retenir pour le calcul du loyer révisé était celui du deuxième trimestre 2007 ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Bécon tabac aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Bécon tabac et la condamne à payer à la SCI Daitouch la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du huit septembre deux mille seize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat aux Conseils, pour la société Bécon tabac
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR fixé le loyer révisé à la date du 18 novembre 2010 à la somme de 52 768,32 euros hors taxes et hors charges et d'AVOIR condamné la société Becon Tabac aux dépens de première instance et d'appel et dit que ceux-ci pourront être recouvrés conformément aux dispositions de l'article 699 du code de procédure civile ;
AUX MOTIFS QUE « les parties s'opposent sur la fixation du loyer révisé au 18 novembre 2010. Selon les dispositions de l'article L. 145-38 du code de commerce, la majoration ou la diminution de loyer consécutive à une révision triennale ne peut excéder la variation de l'indice trimestriel du coût de la construction (…) intervenue depuis la dernière fixation amiable ou judiciaire du loyer ; la société Becon Tabac, relevant que l'arrêt de la cour d'appel de Versailles indique que le nouveau prix du bail renouvelé s'applique à compter du 23 juin 2008, fait valoir qu'afin de calculer le montant du loyer révisé au 18 novembre 2010, il faut retenir comme indice de base l'indice du coût de la construction du 2ème trimestre 2008 au jour de la dernière fixation du loyer (23 juin 2008) et le comparer à l'indice au jour de la révision (18 novembre 2010), soit celui du 4ème trimestre 2010 ; la SCI Daitouch réplique que, par jugement définitif du 16 novembre 2009, a été constaté le renouvellement du bail à la date du 1er avril 2007, que la cour d'appel de Versailles a décalé la date d'exigibilité du nouveau loyer au 23 juin 2008, alors que le bail était bien renouvelé au 1er avril 2007, au seul visa de l'article L. 145-11 du code de commerce qui dispose que lorsque e bailleur n'a pas répondu dans les trois mois à la demande de renouvellement du preneur, le nouveau prix n'est dû qu'à compter de la demande qui en sera faite ultérieurement ; elle rappelle qu'elle n'avait pas répondu dans les trois mois à la demande de renouvellement et avait formulé la demande de déplafonnement par acte extrajudiciaire du 23 juin 2008 ; elle soutient ainsi que la révision du loyer doit être calculée sur la base de l'évolution de l'indice du coût de la construction, en retenant l'indice du 2ème trimestre 2007 (1er avril 2007) et l'indice du 4ème trimestre 2010 (18 novembre 2010) ; le délai de trois ans se calcule à compter de la date de renouvellement du bail, soit en l'espèce le 1er avril 2007, le principe du renouvellement étant acquis à cette date ; si la date d'exigibilité du loyer renouvelé a été reportée judiciairement au 23 juin 2008, en raison du retard apporté par le bailleur à demander un nouveau loyer, il n'en demeure pas moins que ce report n'a pas d'incidence sur la date du renouvellement et le calcul du délai de trois ans ; ainsi, la précédente fixation du loyer s'étant opérée au jour du renouvellement, le 1er avril 2007, doit être retenu l'indice du 2ème trimestre 2007 (1435) ; la révision triennale étant intervenue le 18 novembre 2010, il convient de retenir l'indice du 4ème trimestre 2010 (1533) ; de sorte, le montant du loyer révisé s'élève à 49 395/ 1 435 x 1 533 = 52 768,32 euros ; infirmant le jugement déféré, le loyer révisé au 18 novembre 2010 sera fixé à ce montant » ;
1°) ALORS QUE la majoration ou la diminution de loyer consécutive à une révision triennale ne peut excéder la variation de l'indice trimestriel du coût de la construction intervenue depuis la dernière fixation amiable ou judiciaire du loyer ; que seul doit être pris en compte l'indice connu à la date où la dernière fixation judiciaire a pris effet ; qu'en considérant en l'espèce que devait être retenu, comme indice diviseur, l'indice du 2ème trimestre 2007 par cela seul que le bail avait été renouvelé au 1er avril 2007, peu important que le loyer de renouvellement n'ait été exigible qu'à compter du 23 juin 2008, et que la dernière fixation judiciaire n'ait ainsi eu lieu qu'à cette date, la cour d'appel a violé l'article L. 145-38 du code de commerce ;
2°) ALORS QUE la société Bécon Tabac faisait valoir qu'en vertu de l'article L. 112-1 du code monétaire et financier est réputée non écrite toute clause d'un contrat à exécution successive, et notamment d'un bail commercial, prévoyant la prise en compte d'une période de variation de l'indice supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision et qu'ainsi, il était impossible, sauf à méconnaître ce principe impératif, de prendre en considération le dernier indice comme à la date du renouvellement du bail si celle-ci était antérieure à la date de dernière fixation judiciaire du loyer et si cela conduisait à prendre en compte une période de variation de l'indice supérieure à la durée séparant chaque révision (cf. concl. p. 4) ; qu'en omettant de répondre à ce moyen déterminant, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.
3°) ALORS QUE la période de variation de l'indice, pour la fixation du loyer du bail renouvelé, ne peut être supérieure à la durée s'écoulant entre chaque révision ; qu'en retenant les indices du deuxième trimestre 2007 et du quatrième trimestre 2010, soit une période de variation supérieure à la période qui s'était écoulée depuis la précédente révision judiciaire fixée le 23 juin 2008, la cour d'appel a violé les articles L. 112-1 du code monétaire et financier et L. 145-38 du code de commerce.