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07/09/2016 | FRANCE | N°16-84031

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 07 septembre 2016, 16-84031


Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Elefter X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 2e section, en date du 2 juin 2016, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de vols aggravés, a prolongé sa détention provisoire après infirmation de l'ordonnance du juge d'instruction l'ayant mis en liberté sous contrôle judiciaire ;

Vu les mémoires ampliatif et personnel produits ;

Sur le moyen unique de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 137, 144, 145-1, 207, 591 et 593 du code de p

rocédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la prolongation de la dé...

Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Elefter X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 2e section, en date du 2 juin 2016, qui, dans l'information suivie contre lui du chef de vols aggravés, a prolongé sa détention provisoire après infirmation de l'ordonnance du juge d'instruction l'ayant mis en liberté sous contrôle judiciaire ;

Vu les mémoires ampliatif et personnel produits ;

Sur le moyen unique de cassation du mémoire ampliatif, pris de la violation des articles 137, 144, 145-1, 207, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a ordonné la prolongation de la détention de M. X... pour une durée de quatre mois à compter du 2 juin 2016 et dit que le mandat de dépôt initial conserverait son plein et entier effet ;
" aux motifs qu'il résulte de la procédure que le magistrat instructeur a, par une ordonnance de soit-communiqué du 2 mai 2016 Cd0019), expressément sollicité les réquisitions du ministère public sur la prolongation de la détention provisoire ; que, le 23 mai 2016, le ministère public a rendu ses réquisitions écrites disant n'y avoir lieu à saisir le juge des libertés et de la détention aux fins de prolongation de la détention au motif que " la DP n'est pas prolongeable (article 145-1 du CPP) " ; que, par l'ordonnance entreprise, en date du 24 mai 2016, le juge d'instruction a ordonné la mise en liberté et le placement sous contrôle judiciaire de M. X..., au motif que sa détention provisoire n'était pas prolongeable en application de l'article 145-1 du code de procédure pénale ; que cette ordonnance s'est ainsi prononcée à l'évidence sur la prolongation de la détention provisoire, qui était dans la cause ; que cette question de la prolongation de la détention provisoire ayant donc été soumise à l'appréciation du premier degré de juridiction, par l'effet dévolutif de l'appel, la chambre de l'instruction est saisie à nouveau dans son entier de cette question de la prolongation de la détention provisoire ; que M. X... est mis en examen pour vol aggravé par deux circonstances, en l'espèce celle de réunion et celle de prise de la qualité d'une personne dépositaire de l'autorité publique ; que dans ces conditions il encourt en application des dispositions de l'article 311-4 du code pénal une peine d'emprisonnement d'une durée maximum de sept ans ; qu'il en résulte qu'en application des dispositions de l'article 145-1 alinéa 1 du code de procédure pénale et puisqu'il encourt une peine d'emprisonnement supérieure à cinq ans, la détention provisoire peut être prolongée ; qu'en conséquence que l'ordonnance du juge d'instruction en ce qu'elle a jugé que la détention provisoire ne pouvait être prolongée, doit être infirmée ; que nonobstant les dénégations du mis en examen, il résulte des éléments ci-dessus relatés des raisons précises de considérer qu'il est directement et personnellement impliqué dans les faits qui lui sont reprochés et pour lesquels il est mis en examen ; que la discussion des indices graves et concordants est étrangère à l'unique objet du contentieux dont est saisie la chambre de l'instruction en l'espèce celui des mesures de sûreté ; qu'il sera néanmoins rappelé qu'il est directement mis en cause par les constatations issues des caméras de vidéo surveillance, les recoupements des bornages téléphoniques, le fait d'avoir été interpellé pour des faits commis en flagrance le 9 octobre 2015 avec les mêmes individus, par les déclarations directes d'un co-mis en examen et par le fait alors même qu'il est dépourvu de toute activité en France, il a adressé à partir de l'hôtel Ibis de Sarcelles le 9 octobre 2015 un virement de 4 000 euros vers la Roumanie ; que les investigations doivent se poursuivre pour identifier le quatrième individu signalé par les victimes et vu dans les enregistrements des caméras ; qu'il importe d'empêcher une concertation frauduleuse avec les coauteurs et complices ; qu'il nie les faits qui lui sont reprochés et que l'information devra établir le rôle exact de chacun des mis en examen et l'organisation des équipes auteurs de ces vols, qui entretiennent des liens étroits, voire de le confronter avec les autres mis en examen qui n'ont pas encore été entendus au fond ; qu'à ce stade de la procédure, il est indispensable de garantir son maintien à la disposition de la justice ; que le mis en examen ne bénéficie d'aucune ressource légale et vivait à l'hôtel prétendant n'être en France que depuis quelques semaines ; qu'il ne bénéficie d'aucune garantie de représentation sur le territoire national, et fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en date du 14 janvier 2016 ; que les faits ont été commis selon un mode opératoire bien rôdé, par appât du gain, les faits s'étant avérés lucratifs, comme en témoigne le mandat cash de 4000 euros envoyé par l'intéressé à sa famille ; qu'il a été condamné le 13 octobre 2015 à une peine de six mois d'emprisonnement pour des faits commis le lendemain du dernier fait de la présente procédure et il est donc impliqué dans une réitération de faits ; qu'il est indispensable de prévenir le renouvellement des infractions ; que la proposition de retourner vivre à son domicile à Bucarest en Roumanie ne peut dès lors constituer une garantie réelle de représentation ; que la proposition d'emploi produite émanant de la société S. C NEST Creative produit SRL basée à Bucarest, est dépourvue de la moindre valeur probante, la version en langue roumaine n'étant assortie d'aucun document d'identité permettant de vérifier l'existence juridique du signataire, ni d'aucun document permettant de vérifier la réalité de l'existence d'une telle entreprise ; que pour les motifs précis et circonstanciés ci-dessus rappelés la détention provisoire demeure nécessaire à ce stade de la procédure et est l'unique moyen de parvenir aux objectifs précités, les obligations du contrôle judiciaire ou de l'assignation à résidence avec surveillance électronique étant en l'espèce insuffisantes au regard des objectifs de l'article 137 du code de procédure pénale ; que conscient en conséquence que l'ordonnance déférée doit être infirmée ; qu'il y a lieu d'ordonner la prolongation de la détention provisoire, le mandat de dépôt initial conservant son plein et entier effet ;
" 1°) alors que, lorsqu'une chambre d'accusation infirme une ordonnance de mise en liberté sous contrôle judiciaire rendue par le juge d'instruction, sa décision ne rend son plein effet au titre de détention initial que dans les limites de celui-ci au regard des articles 145 et suivants du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction ne pouvant en particulier éluder les dispositions des articles 145-1 et 145-2 du code de procédure pénale sur les modalités de la prolongation des effets du titre de détention initial ; que la prolongation d'un mandat de dépôt correctionnel au-delà de quatre mois suppose la saisine par le juge d'instruction d'un juge des libertés et de la détention qu'au cas d'espèce, la chambre de l'instruction ne pouvait infirmer l'ordonnance du juge des libertés et de la détention disant que le mandat de dépôt correctionnel décerné à l'encontre de M. X..., le 3 février 2016, était insusceptible de prolongation au-delà de quatre mois et prolonger elle-même ce titre de détention, sans que le juge d'instruction n'ait saisi le juge des libertés et de la détention pour qu'il se prononce sur cette prolongation ;
" 2°) alors qu'en matière de détention provisoire, l'exigence de double degré de juridiction implique que la chambre de l'instruction ne puisse statuer en vertu de l'effet dévolutif de l'appel que lorsque le premier juge a lui-même statué au fond, au regard des critères des articles 137 et 144 du code de procédure pénale, sur la question de la détention ; qu'au cas d'espèce, la chambre de l'instruction était saisie d'une ordonnance d'un juge d'instruction retenant que le mandat de dépôt ne pouvait, compte tenu de la nature de l'infraction reprochée au mis en examen, être prolongé au-delà de quatre mois ; qu'en affirmant, pour infirmer cette ordonnance et prolonger la détention en vertu du pouvoir dévolutif de l'appel, que « la prolongation de la détention provisoire avait été soumise à l'appréciation du premier degré de juridiction », sans constater que le premier juge s'était prononcé, au regard des critères des articles 137 et 144 du code de procédure pénale, sur l'opportunité de la prolongation du mandat de dépôt de M. X..., la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes visés au moyen " ;
Sur le moyen unique de cassation du mémoire personnel, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 2 du Protocole additionnel n° 7 à ladite Convention, 14-5 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, des articles préliminaire, 137 à 148-2, 207, 591 et 593 du code de procédure pénale " ;
Les moyens étant réunis ;

Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, mis en examen du chef de vols commis en réunion et en prenant indûment la qualité de personne dépositaire de l'autorité publique, M. X... a été placé en détention provisoire le 3 février 2016 ; que, par ordonnance en date du 24 mai 2016, le juge d'instruction, après avoir retenu qu'en application de l'article 145-1 du code de procédure pénale, la détention provisoire de l'intéressé ne pouvait être prolongée au delà de quatre mois, a ordonné sa mise en liberté sous contrôle judiciaire à compter du 2 juin 2016 à minuit ; que, le procureur de la République ayant interjeté appel de cette décision, la personne mise en examen a fait valoir, notamment, que, faute de saisine préalable du juge des libertés et de la détention, la chambre de l'instruction était incompétente pour ordonner elle-même la prolongation de sa détention provisoire ;

Attendu que, pour écarter cette argumentation, infirmer l'ordonnance déférée et prolonger la détention provisoire de M. X... pour une nouvelle durée de quatre mois, l'arrêt prononce par les motifs reproduits au moyen proposé par le mémoire ampliatif et énonce, notamment, d'une part, que, la question de la prolongation de la détention provisoire ayant été soumise à l'appréciation de la juridiction du premier degré, la chambre de l'instruction en est régulièrement saisie, d'autre part, que le juge d'instruction a fait une application erronée de l'article 145-1 précité en jugeant que la détention provisoire de M. X..., qui, poursuivi pour des vols aggravés par deux circonstances, encourt une peine supérieure à cinq ans d'emprisonnement, n'était pas susceptible de prolongation ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et dès lors que la prolongation de la détention a été successivement examinée par deux juridictions de degré différent, la chambre de l'instruction, à qui il appartenait de corriger l'erreur de droit commise par le premier juge et sur laquelle reposait la décision de ce magistrat, et de statuer au fond après avoir constaté que la détention était susceptible de prolongation, a, sans méconnaître le principe du double degré de juridiction ni l'effet dévolutif de l'appel, justifié sa décision ;
D'où il suit que les moyens ne sauraient être accueillis ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré, dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Laurent, conseiller rapporteur, M. Castel, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 16-84031
Date de la décision : 07/09/2016
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION - Pouvoirs - Détention provisoire - Ordonnance de mise en liberté du juge d'instruction - Appel du ministère public - Prolongation de la détention provisoire par la chambre de l'instruction - Méconnaissance du double degré de juridiction (non) - Méconnaissance de l'effet dévolutif de l'appel (non)

Lorsque le juge d'instruction a considéré, à tort, que la détention provisoire de la personne mise en examen n'était pas susceptible de prolongation, et qu'il a ordonné sa mise en liberté sous contrôle judiciaire, sans saisir le juge des libertés et de la détention, la chambre de l'instruction, statuant sur l'appel du procureur de la République, peut ordonner cette prolongation, sans méconnaître le principe du double degré de juridiction ni l'effet dévolutif de l'appel


Références :

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 02 juin 2016

Sur la possibilité pour la chambre de l'instruction de prolonger la détention provisoire en cas d'appel du ministère public de l'ordonnance de mise en liberté du juge d'instruction, à rapprocher :Crim., 28 juin 2011, pourvoi n° 11-82272, Bull. crim. 2011, n° 152 (rejet)Sur l'impossibilité pour la chambre de l'instruction de prolonger la détention provisoire lorsque la question n'a pas été tranchée par un juge de premier degré, à rapprocher :Crim., 12 juillet 2016, pourvoi n° 16-82700, Bull. crim. 2016, n° ??? (cassation sans renvoi) ;Crim., 27 juillet 2016, pourvoi n° 16-83026, Bull. crim. 2016, n° ??? (cassation sans renvoi)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 07 sep. 2016, pourvoi n°16-84031, Bull. crim.
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat général : M. Gauthier
Rapporteur ?: M. Laurent
Avocat(s) : SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer

Origine de la décision
Date de l'import : 05/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:16.84031
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