Statuant sur les pourvois formés par :
- Le procureur général près la cour d'appel d'Amiens,- Mme Delphine X...,- M. Olivier Y..., parties civiles,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de ladite cour d'appel, en date du 16 octobre 2015, qui, dans l'information suivie contre personne non dénommée, notamment des chefs d'abandon matériel ou moral de mineurs et homicide involontaire, a confirmé l'ordonnance du juge d'instruction refusant de mettre en examen M. Olivier Z... ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 18 mai 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Dreifuss-Netter, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de Mme le conseiller DREIFUSS-NETTER, les observations de la société civile professionnelle BARADUC, DUHAMEL et RAMEIX, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LEMOINE ;
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 4 février 2016, prescrivant l'examen immédiat des pourvois ;
Joignant les pourvois en raison de leur connexité ;
Sur la recevabilité des pourvois de Mme X... et de M. Y...:
Attendu que les parties civiles sont irrecevables à se pourvoir contre l'arrêt de la chambre de l'instruction refusant la mise en examen demandée par le procureur de la République ;
Sur le pourvoi formé par le procureur général :
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation du procureur général, pris de la violation des articles 121-3, 221-6, 227-17 du code pénal, 80, 80-1 et 591 du code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que le 20 mars 2013, à Saint-Quentin, M. Z... hébergeait, pour le week-end, les trois enfants qu'il avait eus avec sa compagne, dont il était séparé, ainsi que deux autres enfants de celle-ci, ces enfants étant âgés de 2 à 9 ans, que vers 22 heures, alors qu'après avoir consommé de l'alcool pendant la journée et la soirée, il dormait dans sa chambre, au premier étage, à l'avant de la maison, avec les trois garçons, tandis que les deux filles occupaient une chambre sur l'arrière, un violent incendie s'est déclenché dans la maison ; que M. Z... s'étant réveillé et ayant tenté de porter secours aux filles dans l'autre chambre à laquelle il n'a pu accéder en raison de la violence des flammes, a sauté par la fenêtre pour chercher du secours chez des voisins, que les policiers trouvaient, à leur arrivée, les corps des cinq enfants à l'étage, et constataient que M. Z... présentait une alcoolémie de 2, 32g ; qu'une information judiciaire ayant été ouverte par un réquisitoire introductif du 2 mai 2013, des chefs d'homicide involontaire et d'omission de porter secours, un réquisitoire supplétif du 2 février 2015 a sollicité du juge d'instruction la mise en examen de M. Z..., placé sous le statut de témoin assisté, des chefs d'homicide involontaire et d'abandon matériel ou moral de mineurs ; que le juge d'instruction ayant rendu une ordonnance de refus de mise en examen, le procureur de la République a interjeté appel ;
Attendu que, pour refuser de mettre en examen M. Z... du chef d'homicide involontaire et de soustraction à ses obligations légales par ascendant, l'arrêt retient notamment, par motifs propres et adoptés, qu'aucun élément du dossier ne permet d'affirmer qu'il aurait pu se réveiller plus tôt s'il n'avait pas été alcoolisé, que rien ne permet d'affirmer qu'une personne, dans un état normal, endormie dans son premier sommeil dans une chambre dont la porte était fermée aurait réalisé plus tôt qu'un incendie s'était déclaré dans une chambre également fermée, située de l'autre côté du couloir, puis qu'à supposer son temps de réaction et d'intervention anormal, il peut avoir été provoqué par une intoxication oxycarbonée ; que les juges ajoutent, d'une part, que, s'il apparaît évident que la prise en charge d'enfants est totalement incompatible avec un état d'ébriété, il ne peut être retenu l'existence de la part de M. Z... d'une conscience quant à la réalité du danger qu'il faisait courir aux cinq enfants, et que, par suite, s'il existe des indices graves ou concordants qu'il a commis une faute, il n'apparaît pas que ladite faute réponde aux critères posés par l'article 121-3 du code pénal, d'autre part que M. Z... avait un comportement de père affectueux et attentif envers ses trois enfants mineurs lorsqu'il les prenait en charge, y compris le jour précédant le drame ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, la chambre de l'instruction, qui s'est déterminée, pour refuser de mettre en examen M. Z... par des motifs exempts d'erreur de droit, d'insuffisance ou de contradiction, a justifié sa décision ;
Qu'en effet, la loi confie aux seules juridictions d'instruction l'appréciation souveraine tant de l'absence des indices graves ou concordants pouvant justifier une mise en examen que le choix entre le statut de témoin assisté et celui de mis en examen ainsi que, le cas échéant, la détermination du moment de la mise en examen ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
Par ces motifs :
I-Sur le pourvoi de Mme X... et de M. Y...:
Les DÉCLARE IRRECEVABLES ;
II-Sur le pourvoi du procureur général :
Le REJETTE ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le vingt-huit juin deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.