LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :
Vu l'article 706-11 du code de procédure pénale, ensemble l'article L. 333-1, 2°, du code de la consommation ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été condamné par un tribunal correctionnel à verser une certaine somme à Mme Y... à titre de dommages-intérêts pour un abus de confiance dont il a été déclaré coupable ; que le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions (le FGTI) a versé à cette dernière une provision sur l'indemnité fixée et s'est vu confier par elle un mandat de recouvrement des sommes dues ; que M. X... a sollicité un traitement de sa situation financière auprès d'une commission de surendettement des particuliers, qui a déclaré sa demande recevable et recommandé une procédure de rétablissement personnel sans liquidation judiciaire ; que le FGTI a formé tierce opposition à l'ordonnance du juge d'un tribunal d'instance ayant conféré force exécutoire aux mesures ainsi recommandées en demandant que sa créance soit exclue de toute mesure d'effacement ;
Attendu que pour déclarer recevable la tierce opposition du FGTI mais la rejeter et donner force exécutoire à son égard aux mesures recommandées par la commission de surendettement des particuliers, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu'une qualité purement personnelle au subrogeant ne peut être transmise au subrogé, que l'effet de l'article L. 333-1 du code de la consommation est attaché à la qualité de victime, laquelle est, selon l'article 2 du code de procédure pénale, la personne qui a personnellement souffert de l'infraction, de sorte que le FGTI ne peut pas se prévaloir de cette qualité ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'investi par le législateur d'une mission d'intérêt général de protection des victimes, le FGTI peut se prévaloir, en application de l'article 706-11 du code de procédure pénale, de l'exclusion, prévue pour les réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d'une condamnation pénale, de toute mesure d'effacement le concernant, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi :
CASSE et ANNULE, sauf en ce qu'il a déclaré recevable la tierce opposition formée par le FGTI, l'arrêt rendu le 8 janvier 2015, entre les parties, par la cour d'appel de Toulouse ; remet, en conséquence, sauf sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du douze mai deux mille seize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour le Fonds de garantie des victimes des actes de terrorisme et d'autres infractions.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR écarté la tierce opposition formée par le Fonds de garantie contre l'ordonnance rendue le 28 juin 2013 par la Commission de surendettement des particuliers de l'Ariège dans la procédure ouverte au profit de M. X... et d'AVOIR donné force exécutoire à l'égard du Fonds de garantie aux mesures recommandées ;
AUX MOTIFS QUE l'article L. 333-1 2° du Code de la consommation dispose que, sauf accord du créancier, sont exclues de toute remise, de tout rééchelonnement ou effacement les réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d'une condamnation pénale ; qu'il n'est pas contesté que, par jugement du 15 mai 2012, M. X... a été déclaré coupable d'abus de confiance au préjudice de Mme Isabelle Y... et condamné à lui verser la somme de 8.500 euros en réparation de son préjudice matériel et moral et à la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, que le Fonds de garantie SARVI a versé à la victime en application de l'article L. 422-7 du Code des assurances, une provision égale à 30 % du montant des indemnités qui lui avaient été accordées, soit la somme de 2.700 euros, et qu'en vertu de l'article L. 421-3 du Code des assurances, il est subrogé dans les droits que possède le créancier de l'indemnité contre la personne responsable de l'accident, en vertu de l'article L. 422-7 du même Code, mandataire de la victime ; que si, par l'effet translatif de la subrogation légale dont bénéficie le Fonds de garantie, la créance du subrogeant bénéficie au subrogé qui se voit transféré par l'effet même du mécanisme de la subrogation les droits du subrogeant avec ses caractères propres, la subrogation ne confère pas au Fonds de garantie la qualité de victime, la subrogation n'étant pas une substitution de personne mais la substitution d'une personne dans les droits attachés à la créance dont une autre était titulaire ; qu'il en est de même pour le mandat ; que la Cour de cassation a jugé que la subrogation ne confère pas à l'assureur la qualité de victime pouvant se prévaloir des dispositions de l'article L. 333-1 du Code de la consommation ; que, contrairement à ce que soutient l'appelant, l'assureur qui a indemnisé la victime bénéficie d'une subrogation légale et le Fonds de garantie se trouve dans une situation similaire à celle de l'assureur ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE certes, en vertu de l'article 706-11 du Code de procédure pénale et de l'article L. 422-7 du Code des assurances, le Fonds est subrogé dans les droits de la victime pour obtenir des personnes responsables du dommage causé par l'infraction le remboursement de l'indemnité ou de la provision versée par lui et que, par principe, la subrogation emporte le transport de la créance et de tous ses accessoires avantageux afin d'en faciliter le paiement ; qu'effectivement, comme l'indique le Fonds dans ses écritures, la Cour d'appel de Paris a jugé le 22 novembre 2011 que le subrogé était investi de la créance et de ses accessoires tenant tant à la nature de la créance qu'à la situation personnelle du créancier initial, sauf, lorsqu'un texte l'exclut expressément ; que cependant, cette jurisprudence est critiquée en doctrine au regard de la jurisprudence de la Cour suprême relative à la notion de victime ; qu'en effet, la subrogation n'est pas une substitution de personnes, mais la substitution d'une personne dans les droits attachés à la créance dont une autre était titulaire ; que l'action subrogatoire reste personnelle au subrogé qui n'agit pas en représentation du subrogeant ; que, par conséquent, une qualité purement personnelle au subrogeant ne peut être transmise au subrogé ; qu'en vertu de l'article L. 333-1 du Code de la consommation, sauf accord du créancier, sont exclues de toute remise, de tout rééchelonnement ou effacement, les réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d'une condamnation pénale ; que l'effet de cette disposition est donc attachée à la qualité de victime dont la définition utile est donnée par l'article 2 du Code de procédure pénale comme la personne qui a personnellement souffert de l'infraction ; qu'il n'existe pas en matière de surendettement de disposition législative comparable à l'article 706-11 in fine du Code de procédure pénale prévoyant que le Fonds est assimilé à la victime en ce qui concerne les obligations pénales de remboursement ; que, dès lors, nonobstant les effets de la subrogation, il ne peut être admis que le Fonds a la qualité personnelle de victime, laquelle n'est pas juridiquement transmissible et que l'exclusion édictée par l'article L. 333-1 ne peut s'appliquer à sa créance ; qu'il y donc lieu, à titre de mesure, de donner force exécutoire aux mesures recommandées en y intégrant la créance du fonds de garantie ;
1° ALORS QUE la dette de l'auteur d'une infraction pénale à l'égard du Fonds de garantie des victimes du terrorisme et d'autres infractions ayant partiellement indemnisé la victime et disposant d'un mandat de celle-ci pour recouvrer les sommes restantes échappe, sauf accord du créancier, à toute mesure de remise, de rééchelonnement ou d'effacement accordée au débiteur dans le cadre d'un dispositif de désendettement ; qu'en retenant que les mesures d'effacement de ses dettes accordées à M. X... s'appliquaient à la créance que le Fonds de garantie détenait à son égard, quand elle constatait que cette créance résultait du règlement, par le Fonds de garantie, d'une partie de la réparation pécuniaire mise à la charge de M. X... au profit de la victime dans le cadre d'une condamnation pénale prononcée à son encontre, de sorte qu'elle devait être exclue de ces mesures, la Cour d'appel a violé l'article L. 333-1 du Code de la consommation ;
2° ALORS QUE le subrogé recueille la créance du subrogeant avec tous ses accessoires ; qu'en retenant que le Fonds de garantie, subrogé dans les droits de la victime, ne pouvait bénéficier de l'exclusion prévue par l'article L. 333-1 du Code de la consommation, dont seule pouvait se prévaloir la victime, et qu'il pouvait se voir imposer l'effacement de la créance que celle-ci lui avait pourtant transmise, avec tous ses accessoires, la Cour d'appel a violé cet article, ensemble les articles 706-11 du Code de procédure pénale et 1251 du Code civil ;
3° ALORS QU'en toute hypothèse, le Fonds de garantie des victimes du terrorisme et d'autres infractions, créé pour améliorer l'exécution, par les auteurs d'infractions pénales, des décisions les condamnant à indemniser la victime, bénéficie, à l'égard de l'auteur de l'infraction, de droits identiques à ceux de la victime elle-même ; qu'en retenant en l'espèce que le Fonds de garantie se trouvait, à l'égard de l'auteur de l'infraction, dans une situation identique à celle de l'assureur subrogé dans les droits de la victime, la Cour d'appel a violé la loi n° 90-589 du 6 juillet 1990.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR écarté la tierce opposition formée par le Fonds de garantie contre l'ordonnance rendue le 28 juin 2013 par la Commission de surendettement des particuliers de l'Ariège dans la procédure ouverte au profit de M. X... et d'AVOIR donné force exécutoire à l'égard du Fonds de garantie aux mesures recommandées ;
AUX MOTIFS QUE l'article L. 333-1 2° du Code de la consommation dispose que, sauf accord du créancier, sont exclues de toute remise, de tout rééchelonnement ou effacement les réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d'une condamnation pénale ; qu'il n'est pas contesté que, par jugement du 15 mai 2012, M. X... a été déclaré coupable d'abus de confiance au préjudice de Mme Isabelle Y... et condamné à lui verser la somme de 8.500 euros en réparation de son préjudice matériel et moral et à la somme de 500 euros sur le fondement de l'article 475-1 du Code de procédure pénale, que le Fonds de garantie SARVI a versé à la victime en application de l'article L. 422-7 du Code des assurances, une provision égale à 30 % du montant des indemnités qui lui avaient été accordées, soit la somme de 2.700 euros, et qu'en vertu de l'article L. 421-3 du Code des assurances, il est subrogé dans les droits que possède le créancier de l'indemnité contre la personne responsable de l'accident, en vertu de l'article L. 422-7 du même Code, mandataire de la victime ; que si, par l'effet translatif de la subrogation légale dont bénéficie le Fonds de garantie, la créance du subrogeant bénéficie au subrogé qui se voit transféré par l'effet même du mécanisme de la subrogation les droits du subrogeant avec ses caractères propres, la subrogation ne confère pas au Fonds de garantie la qualité de victime, la subrogation n'étant pas une substitution de personne mais la substitution d'une personne dans les droits attachés à la créance dont une autre était titulaire ; qu'il en est de même pour le mandat ; que la Cour de cassation a jugé que la subrogation ne confère pas à l'assureur la qualité de victime pouvant se prévaloir des dispositions de l'article L. 333-1 du Code de la consommation ; que, contrairement à ce que soutient l'appelant, l'assureur qui a indemnisé la victime bénéficie d'une subrogation légale et le Fonds de garantie se trouve dans une situation similaire à celle de l'assureur ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE certes, en vertu de l'article 706-11 du Code de procédure pénale et de l'article L. 422-7 du Code des assurances, le Fonds est subrogé dans les droits de la victime pour obtenir des personnes responsables du dommage causé par l'infraction le remboursement de l'indemnité ou de la provision versée par lui et que, par principe, la subrogation emporte le transport de la créance et de tous ses accessoires avantageux afin d'en faciliter le paiement ; qu'effectivement, comme l'indique le Fonds dans ses écritures, la Cour d'appel de Paris a jugé le 22 novembre 2011 que le subrogé était investi de la créance et de ses accessoires tenant tant à la nature de la créance qu'à la situation personnelle du créancier initial, sauf, lorsqu'un texte l'exclut expressément ; que cependant, cette jurisprudence est critiquée en doctrine au regard de la jurisprudence de la Cour suprême relative à la notion de victime ; qu'en effet, la subrogation n'est pas une substitution de personnes, mais la substitution d'une personne dans les droits attachés à la créance dont une autre était titulaire ; que l'action subrogatoire reste personnelle au subrogé qui n'agit pas en représentation du subrogeant ; que, par conséquent, une qualité purement personnelle au subrogeant ne peut être transmise au subrogé ; qu'en vertu de l'article L. 333-1 du Code de la consommation, sauf accord du créancier, sont exclues de toute remise, de tout rééchelonnement ou effacement, les réparations pécuniaires allouées aux victimes dans le cadre d'une condamnation pénale ; que l'effet de cette disposition est donc attachée à la qualité de victime dont la définition utile est donnée par l'article 2 du Code de procédure pénale comme la personne qui a personnellement souffert de l'infraction ; qu'il n'existe pas en matière de surendettement de disposition législative comparable à l'article 706-11 in fine du Code de procédure pénale prévoyant que le Fonds est assimilé à la victime en ce qui concerne les obligations pénales de remboursement ; que, dès lors, nonobstant les effets de la subrogation, il ne peut être admis que le Fonds a la qualité personnelle de victime, laquelle n'est pas juridiquement transmissible et que l'exclusion édictée par l'article L. 333-1 ne peut s'appliquer à sa créance ; qu'il y donc lieu, à titre de mesure, de donner force exécutoire aux mesures recommandées en y intégrant la créance du fonds de garantie ;
ALORS QU'investi d'un mandant de recouvrement de sa créance par la victime, le Fonds de garantie agit au nom et pour le compte de celle-ci, de sorte que la créance dont il réclame paiement à l'auteur de l'infraction est celle de la victime ; qu'en retenant néanmoins que le Fonds de garantie, mandaté par la victime pour recouvrer les sommes dues par l'auteur de l'infraction, ne pouvait se prévaloir de l'article L. 333-1 du Code de la consommation et qu'il pouvait se voir opposer l'effacement de sa créance, la Cour d'appel a violé cet article, ensemble les articles L. 422-7 alinéa 3 du Code des assurances et 1984 du Code civil.