La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/05/2016 | FRANCE | N°15-10025

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 11 mai 2016, 15-10025


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué que l'Union locale des syndicats CGT de l'aéroport de Paris (le syndicat) a fait assigner la société Aerobag (la société) devant le tribunal de grande instance de Meaux afin notamment de faire interdire, sous astreinte, à l'employeur de décompter le temps de travail sur des périodes de quatre semaines en l'absence d'accord individuel exprès de chacun des 76 salariés concernés ;
Sur la recevabilité, contestée par la défense, du moyen unique, pris en sa troisième branch

e, laquelle est préalable :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué que l'Union locale des syndicats CGT de l'aéroport de Paris (le syndicat) a fait assigner la société Aerobag (la société) devant le tribunal de grande instance de Meaux afin notamment de faire interdire, sous astreinte, à l'employeur de décompter le temps de travail sur des périodes de quatre semaines en l'absence d'accord individuel exprès de chacun des 76 salariés concernés ;
Sur la recevabilité, contestée par la défense, du moyen unique, pris en sa troisième branche, laquelle est préalable :
Attendu que la société fait grief à l'arrêt de dire que la répartition du temps de travail sur une période de quatre semaines à l'initiative de l'employeur n'a pas été valablement mise en oeuvre, de lui ordonner sous astreinte d'organiser le temps de travail par semaine civile à défaut d'accord individuel des salariés ou d'accord collectif et de la condamner à des dommages-intérêts au profit du syndicat alors, selon, le moyen qu'il appartient au seul salarié qui estime que son contrat individuel de travail aurait fait l'objet d'une modification unilatérale d'en tirer les conséquences et de saisir la juridiction prud'homale d'une action en ce sens ; qu'en interdisant sous astreinte à la société Aerobag d'organiser la durée du travail sur une période de quatre semaines, cependant qu'il n'était pas contesté que cette organisation avait été mise en oeuvre conformément aux dispositions du code du travail et qu'elle n'était saisie d'aucune prétention d'un salarié invoquant son contrat individuel de travail pour s'opposer à la mise en oeuvre de la décision de l'employeur dans le cadre de l'exécution de la relation individuelle de travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 2132-3, D. 3122-7-1 et suivants du code du travail, 1134 et 1165 du code civil, ensemble la liberté contractuelle et la liberté d'entreprendre consacrées par l'article 4 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789.
Mais attendu que la société, ayant conclu devant la cour d'appel, non pas à l'irrecevabilité de l'action du syndicat mais au débouté des demandes de ce syndicat relatives au décompte du temps de travail, n'est pas recevable à soutenir devant la Cour de cassation un moyen qui, invoquant le droit d'agir du seul salarié et la violation de l'article L.2132-3 du code du travail, est incompatible avec cette position devant les juges du fond ;
Mais sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu les articles L.3122-2, D.3122 -7-1 et D.3122-7.2 du code du travail ;
Attendu qu'il résulte de ces textes qu'à défaut d'accord collectif, la durée du travail de l'entreprise peut être organisée sous forme de périodes de travail chacune d'une durée de quatre semaines au plus ;
Attendu que pour accueillir la demande du syndicat, l'arrêt retient par motifs adoptés que l'organisation pluri-hebdomadaire conduit à un décompte des heures supplémentaires moins favorable aux salariés et qu'à défaut d'accord collectif, la mise en place d'une répartition des horaires sur une période supérieure à une semaine constitue une modification du contrat de travail qui requiert l'accord exprès du salarié ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'en l'absence d'accord collectif prévu par l'article L. 3122-2 du code du travail, (issu de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008) l'article D. 3122-7-1 du code du travail donne la possibilité à l'employeur d'organiser la durée du travail sous forme de périodes de travail et d'imposer unilatéralement la répartition du travail sur une période n'excédant pas quatre semaines, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la deuxième branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit que la répartition du temps de travail sur une période de quatre semaines n'a pas été valablement mise en oeuvre, ordonne sous astreinte provisoire de 100 euros par infraction à l'employeur d'organiser le temps de travail des salariés par semaine civile tant qu'il n'aura pas obtenu l'accord des salariés et le condamne à des dommages-intérêts au profit de l'Union locale des syndicats CGT de l'aéroport de Paris, l'arrêt rendu le 13 novembre 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne l'Union locale des syndicats CGT de l'aéroport de Paris aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille seize.

MOYEN ANNEXE au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, avocat aux Conseils, pour la société Aérobag
III.- Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la répartition du temps de travail sur une période de quatre semaines à l'initiative de l'employeur n'avait pas été valablement mise en oeuvre à compter du 21 février 2011, d'AVOIR ordonné sous astreinte à la société Aerobag, tant qu'elle n'aura pas obtenu l'accord individuel des salariés ou tant qu'elle n'aura pas signé d'accord collectif, d'organiser le temps de travail de ses salariés par semaine civile et d'AVOIR condamné la société Aerobag à verser à l'union locale des syndicats CGT de l'aéroport de Paris la somme de 1.500 € à titre de dommages et intérêt en réparation du préjudice causé à l'intérêt collectif de la profession ;
AUX MOTIFS QUE « les premiers juges ont exactement relevé que : - la société AEROBAG, au sein de laquelle le travail est organisé en continu, les salariés travaillant du lundi au dimanche, a mis en place par décision unilatérale, sans qu'aucun accord collectif n'ait été conclu en ce sens, une organisation de la durée du travail sous forme de périodes de travail d'une durée de quatre semaines, dans les termes des articles L 3122-3 et D 3122-7-1 du code du travail, - cette organisation pluri-hebdomadaire conduit, ainsi qu'il résulte des articles D 3122-7-2 et D 3122-7-3, à un décompte des heures supplémentaires moins favorable au salarié, dont les conséquences concrètes pour les intéressés, au sein de la société AEROBAG, ne sont l'objet d'aucune contestation, - à défaut d'accord collectif ; et ainsi qu'il résulte de l'article L 3122-6 du code du travail, la mise en place d'une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine constitue une modification du contrat de travail qui requiert l'accord exprès du salarié, - les contrats de travail des salariés ne comportent aucune clause acceptant expressément une répartition des horaires sur une période de quatre semaines. C'est donc à bon droit et par des motifs pertinents, qui ne sont pas utilement critiqués par la société AEROBAG au soutien de son appel et que la cour adopte, que les premiers juges en ont déduit que l'organisation du temps de travail sous forme de périodes de travail d'une durée de quatre semaines n'a pas été valablement décidée ni mise en place par l'employeur, et ont ordonné à la société d'organiser le temps de travail de ses salariés conformément aux dispositions de l'article L 3121-10 du code du travail, sur la base de la semaine civile, sous astreinte. Le jugement sera donc confirmé sur ce point, les modalités de l'astreinte étant précisées au dispositif du présent arrêt » ;
ET AUX MOTIFS QUE « sur le décompte du temps de travail sur quatre semaines : La société CARBAG, précédent titulaire du marché et précédent employeur des salariés transférés à la société AEROBAG en 2004, avait signé le 23 mai 2002 avec les représentants des syndicats un accord d'entreprise relatif à l'aménagement et l'organisation du temps de travail, qui prévoyait une organisation cyclique du temps de travail sur six semaines. La société AEROBAG a repris les contrats en 2004 sans les modifier et a continué d'appliquer la convention, à laquelle elle n'était toutefois pas partie. C'est dans ce contexte que tin 2008, l'inspection du travail, considérant qu'Il n'existait pas 'd'accord collectif sur I' aménagement du temps de travail a demandé à:l'entreprise de revenir au dispositif légal, c'est à dire à un décompte du temps de travail à la semaine. La société AEROBAG a appliqué ce dispositif légal à compter du 1er janvier 2009. En 2010, la direction a fait part de sa volonté de dénoncer l'usage datant de 2004 consistant à décompter et à payer en heures supplémentaire (majoration à 25%) les heures réalisées au-delà d'un service programmé sans tenir compte du cadre de référence pour le calcul des heures supplémentaires (semaine ou cycle) usage datant de février 2004), mais n'a pas donné suite. Lors de la réunion du 26 janvier 2011, le comité d'entreprise a été informé par l'employeur de la mise en place d'un décompte du temps de travail sur quatre semaines à compter du 21 février 2011. L'union locale CGT ne pouvait mettre en place ce nouveau dispositif qui modifie les conditions de travail sans avoir recueilli au préalable l'accord des salariés. L'article L 3121-10: du codes du travail fixe la durée légale du travail effectif à 35 heures par -semaine civile. Toutefois, la loi permet à l'intérieur de certaines limites de déroger au cadre légal hebdomadaire au profit d'un aménagement pluri-hebdomadaire de l'horaire de travail. La répartition des horaires de travail sur une période supérieure à la semaine peut résulter, soit d'un accord collectif (dans la limite supérieure d'une année) soit d'une décision unilatérale de l'employeur. Les négociations menées avec les partenaires sociaux n'ont pas permis à la société AEROBAG de parvenir à la signature d'un accord collectif définissant les modalités de répartition de la durée du travail. A défaut d'accord collectif, l'employeur peut mettre en place une organisation pluri-hebdomadaire de la durée du travail dans les conditions des articles L 3122-2 et D 3122-7-1 du code du travail. L'article D 3122.7-1 dispose « En l'absence d'accord collectif; la durée du travail de l'entreprise ou de l'établissement peut être organisée sous forme de périodes de travail, chacune d'une durée de 40 quatre semaines au plus. L'employeur établit le programme indicatif de la Variation de la durée du travail. Ce programme est salmis pour avis, avant sa mise en oeuvre, au CE ou à défaut aux délégués syndicaux s'ils existent ». L'aménagement pluri-hebdomadaire du travail peine d'instaurer une véritable modulation du temps de travail en le faisant varier d'une semaine sur l'autre à l'intérieur du cycle. La plus grande latitude ainsi accordée à l'employeur pour organiser le temps de travail à l'intérieur du cycle et dans les limites définies par loi a une incidence sur le seuil de déclenchement des heures supplémentaires, qui s'en trouve retardé. Les articles D 3122-7-2 et D 3122-7-3 du code du travail précisent en effet que : « Lorsqu'il est fait application des dispositions de l'article D 3122-7-1, la rémunération mensuelle des salariés des entreprises organisant des périodes de travail sur quatre semaines au plus est indépendante de l'horaire réel. Elle est calculée sur une base de trente - cinq heures hebdomadaires ». « Dans le cadre d'une organisation pluri-hebdomadaire sont considérées comme des heures supplémentaires, celles effectuées : - audelà de 39 heures par semaine, -au-delà de la durée moyenne de 35 heures hebdomadaires, calculée sur la période pluri-hebdomadaire en l'espèce 4 semaines déduction faite le cas échéant des heures supplémentaires comptabilisées au titre du dépassement de la durée hebdomadaire ». La société AEROBAG ne conteste d'ailleurs pas les allégations de l'union locale des syndicats CGT selon lesquelles, l'organisation du travail sur 4 semaines peut faire perdre jusqu'à 150 € par mois de rémunération du fait de la perte d'un certain nombre d'heures supplémentaires, mais soutient qu'il ne peut lui être reproché de mettre en oeuvre un dispositif prévu par la loi. Il n'est pas contesté que l'employeur n'a pas sollicité ou à tout le moins n'a pas obtenu l'accord des salariés sur cette modification de la répartition du temps de travail alors que le passage d'un module hebdomadaire à un cycle pluri- hebdomadaire a une incidence certaine sur leur rémunération en ce qu'il modifie le mode de détermination des heures supplémentaires, rémunération qui est un élément essentiel du contrat de travail. Dans arrêt de principe du 28 septembre 2010 (pourvoi n°08-43161), la Cour de cassation a jugé q ue « l'instauration d'une modulation du temps de travail constitue une modification du contrat de travail qui requiert l'accord exprès du salarié ». C'est vainement que la société AEROBAG soutient qu'elle n'a pas instauré de modulation du temps de travail et que l'organisation du temps de travail n'a pas été modifiée, alors qu'elle a mis en place un régime dérogatoire permettant d'organiser le travail sur 4 semaines au lieu d'une et qu'elle ne justifie aucunement de ce que l'organisation matérielle du travail est restée la même. La société AEROBAG oppose les dispositions du nouvel article L 3122-6 du code du travail. L'article L 3122-6 du code du travail, issu de la loi du 22 mars 2012 dispose que « La mise en place d'une répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année prévue par l'accord collectif ne constitue pas une modification du contrat de travail. En indiquant qu'il n'y a pas de modification du contrat de travail, ce texte dispense l'employeur d'obtenir l'accord du salarié, par opposition à la jurisprudence susvisée. Toutefois, le tribunal relève, d'une part que ces dispositions n'étaient pas en vigueur au 21 février 2011 date de la mise en place du temps de travail sur quatre semaines, d'autre part que cette réglementation est spécifique aux organisations pluri-hebdomadaires résultant d'un accord collectif et n'a pas vocation à s'appliquer aux dérogations mises en place par le seul employeur. Une telle interprétation découle de la rédaction claire de l'article L 3122-6 qui se réfère à « un accord collectif » en toutes lettres, et qui vise les répartitions du travail sur une période « au plus égale à l'année », hypothèse qui par définition ne concerne que les accords collectifs puisque l'employeur ne peut recourir de son propre chef qu'à un module de 4 semaines au maximum. En outre, la volonté du législateur e manifestement été: de réserver un sort privilégié aux accords collectifs sur l'aménagement du temps de travail, en considérant que ceux-ci relayaient suffisamment la protection offerte par le contrat de travail. En effet ces accords collectifs, à la différence de la modulation mise en place par l'employeur, sont nécessairement le fruit d'un dialogue social abouti. C'est d'ailleurs en considération de cette limitation aux accords collectifs que le Conseil Constitutionnel, dans sa décision du 15 mars 2012, a rejeté le recours formulé contre ce texte. Il s'ensuit que l'entreprise devait pour mettre valablement en place cette nouvelle répartition du temps de travail obtenir l'accord préalable de chacun des salariés. La société AEROBAG soutient qu'au terme de leur contrat de travail, les salariés ont par avance accepté une modulation de leur, temps de travail. Elle verse aux débats un exemplaire de contrat de travail conclu avec la société CARBAG, son prédécesseur, et qui n'a pas été modifié, ainsi libellé « durée hebdomadaire de travail et horaire de travail » que M… s'engage à travailler en horaires décalés, du lundi au dimanche, conformément au mode d'organisation et au planning en vigueur au sein de la société CARBAG a cet horaire de travail pourra être modifié en fonction des contraintes d'exploitation de l'entreprise. Il pourra notamment être demandé au salarié d'effectuer des heures supplémentaires, dans les limites des dispositions légales et conventionnelles ». Toutefois, ce type de contrat de travail n'évoque pas une répartition pluri-hebdomadaire du temps de travail, qui n'était pas en vigueur mais seulement des horaires décalés, lesquels n'impliquent pas des amplitudes horaires variables d'une semaine sur l'autre à l'intérieur d'un cycle, mais seulement un roulement des jours de travail. En tout état de cause, l'adoption d'une répartition plurihebdomadaire du temps de travail étant susceptible de porter atteinte à la rémunération en modifiant le seuil de déclenchement des heures supplémentaires, affecte à un élément essentiel du contrat de travail et ne peut faire l'objet que d'un accord en connaissance de cause. Il n'est donc justifié d'aucun accord des salariés préalable à la mise en place d'un cycle de travail sur quatre semaines. Il s'ensuit que la répartition du temps de travail sur quatre semaines à compter du 21 février 2011, n'a pas valablement été mise en oeuvre par l'employeur et que l'union locale des syndicats CGT est fondée à solliciter l'application du régime légal hebdomadaire. Il convient en conséquence d'ordonner à la société AEROBAG, tant qu'elle n'aura pas obtenu l'accord individuel des salariés ou tant qu'elle n'aura pas signé d'accord collectif, d'organiser le temps de travail de son personnel sur la base de la semaine civile conformément à l'article L.3121-10 du code du travail, sous astreinte provisoire de 100 € par infraction et par salarié, cette astreinte commençant à courir passé le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision et pendant une durée de six mois. Le tribunal se réserve en tant que de besoin la liquidation de cette astreinte » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'il résulte des articles L. 3122-2 dernier alinéa du code du travail que l'employeur peut, dans le cadre de son pouvoir de direction et d'organisation de l'entreprise, mettre en place une organisation de la répartition de la durée du travail sur plus d'une semaine dans des conditions fixées par décret ; qu'il résulte des articles D. 3122-7-1 et suivants du même code que la durée du travail peut alors être organisée sous forme de périodes de travail, chacune d'une durée de quatre semaines au plus, qui font l'objet d'un planning prévisionnel dont la mise en oeuvre donne lieu à information des représentants du personnel et au cours desquelles les heures supplémentaires sont celles effectuées au-delà de trente-neuf heures par semaine ou au-delà d'une durée moyenne de trente-cinq heures hebdomadaires sur la période de travail ; que, sauf stipulation expresse du contrat individuel de travail fixant les horaires de travail, la mise en place d'une telle organisation collective du travail dans les conditions prévues par les lois et règlement relève du seul pouvoir de direction de l'employeur et n'est donc pas constitutive d'une modification du contrat de travail devant donner lieu à l'accord préalable de chacun des salariés concernés ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé par fausse application les articles L. 1221-1, L. 3122-2, D. 3122-7-1, D. 3122-7-2 et D. 3122-3 du code du travail, ensemble l'article 1134 du code civil ;
ALORS, D'AUTRE PART ET EN TOUTE HYPOTHESE, QUE la mise en oeuvre par l'employeur d'une organisation collective de la répartition de la durée du travail dans les conditions prévues par le code du travail ne saurait emporter modification du contrat de travail lorsque ce dernier stipule expressément que le salarié s'engage à travailler conformément au mode d'organisation en vigueur au sein de l'entreprise ; qu'au cas présent, la société Aerobag faisait valoir que les salariés avaient été embauchés par la société Carbag, au sein de laquelle un accord d'aménagement de la durée du travail par cycle était en vigueur et que les contrats de travail des intéressés stipulaient que « le salarié s'engage à travailler en horaires décalés, du lundi au dimanche, conformément au mode d'organisation et au planning en vigueur au sein de la société Carbag », de sorte que les salariés avaient accepté au moment de la conclusion de leur contrat de travailler selon une organisation de la durée du travail pour une période supérieure à la semaine ; qu'en estimant néanmoins que seule la présence d'une clause « acceptant expressément une répartition des horaires sur une période de quatre semaine » aurait été de nature à permettre à l'employeur de mettre en oeuvre l'organisation de la durée du travail prévue par les articles D. 3122-7-1 et suivants du code du travail, la cour d'appel a violé ce texte, ensemble l'article 1134 du code civil ;
ALORS, ENFIN ET EN TOUTE HYPOTHESE, QU'il appartient au seul salarié qui estime que son contrat individuel de travail aurait fait l'objet d'une modification unilatérale d'en tirer les conséquences et de saisir la juridiction prud'homale d'une action en ce sens ; qu'en interdisant sous astreinte à la société Aerobag d'organiser la durée du travail sur une période de quatre semaines, cependant qu'il n'était pas contesté que cette organisation avait été mise en oeuvre conformément aux dispositions du code du travail et qu'elle n'était saisie d'aucune prétention d'un salarié invoquant son contrat individuel de travail pour s'opposer à la mise en oeuvre de la décision de l'employeur dans le cadre de l'exécution de la relation individuelle de travail, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 2132-3, D. 3122-7-1 et suivants du code du travail, 1134 et 1165 du code civil, ensemble la liberté contractuelle et la liberté d'entreprendre consacrées par l'article 4 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 15-10025
Date de la décision : 11/05/2016
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

TRAVAIL REGLEMENTATION, DUREE DU TRAVAIL - Répartition et aménagement des horaires de travail - Répartition des horaires sur une période supérieure à la semaine et au plus égale à l'année - Période pluri-hebdomadaire limitée à quatre semaines - Organisation - Possibilité - Conditions - Exclusion - Accord des salariés - Portée

Il résulte des articles L. 3122-2, en sa rédaction issue de la loi n° 2008-789 du 20 août 2008, D. 3122-7-1 et D. 3122-7-2 du code du travail qu'à défaut d'accord collectif, la durée du travail de l'entreprise peut être organisée sous forme de périodes de travail chacune de quatre semaines au plus et l'employeur a la possibilité d'imposer unilatéralement la répartition du travail sur ces périodes. Viole ces textes la cour d'appel qui retient que la mise en place par l'employeur d'une répartition des horaires sur une période supérieure à une semaine constitue une modification du contrat de travail qui requiert l'accord exprès du salarié


Références :

articles L. 3122-2, D. 3122-7-1 et D. 3122-7-2 du code du travail

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 novembre 2014

Sur la possibilité pour l'employeur, en l'absence d'accord collectif, d'organiser la durée du travail sous forme de périodes de travail chacune de quatre semaines au plus, à rapprocher : Soc., 16 décembre 2014, pourvoi n° 13-14558, Bull. 2014, V, n° 294 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 11 mai. 2016, pourvoi n°15-10025, Bull. civ. d'information 2016, n° 850, Soc., n° 1340
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles d'information 2016, n° 850, Soc., n° 1340

Composition du Tribunal
Président : M. Frouin
Avocat général : Mme Robert
Rapporteur ?: Mme Schmeitzky-Lhuillery
Avocat(s) : SCP Célice, Blancpain, Soltner et Texidor, SCP Lyon-Caen et Thiriez

Origine de la décision
Date de l'import : 11/09/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2016:15.10025
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award