LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
- M. Wesley X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NÎMES, en date du 22 octobre 2015, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs, notamment, de vol avec arme en récidive, tentative de vol en récidive, destruction du bien d'autrui par un moyen dangereux pour les personnes en récidive, infraction à la législation sur les stupéfiants en récidive et violences aggravées, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 19 janvier 2016 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, Mme Schneider, conseiller rapporteur, M. Pers, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Randouin ;
Sur le rapport de Mme le conseiller SCHNEIDER, les observations de la société civile professionnelle LYON-CAEN et THIRIEZ, avocat en la Cour, et les conclusions de Mme l'avocat général référendaire CABY ;
Joingnant les pourvois en raison de la connexité ;
Sur la recevabilité du pourvoi formé le 29 octobre 2015 :
Attendu que le demandeur, ayant épuisé, par l'exercice qu'il en a fait le 28 octobre 2015, le droit de se pourvoir contre l'arrêt attaqué, est irrecevable à se pourvoir à nouveau contre la même décision ; que seul est recevable le pourvoi formé le 28 octobre 2015 ;Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'homme, 194, 199, 591 et 593 du code de procédure pénale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance ayant prononcé la prolongation de la garde à vue de M. X... pendant un délai de six mois ;
"1°) alors qu'aux termes de l'article 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'homme, toute personne privée de sa liberté par arrestation ou détention a le droit d'introduire un recours devant un tribunal, afin qu'il statue à bref délai sur la légalité de sa détention et ordonne sa libération si la détention est illégale ; qu'en vertu des articles 194 et 199 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction doit statuer dans les vingt jours suivant l'acte d'appel d'une ordonnance portant sur la détention provisoire, lorsque la personne concernée a demandé à être entendue ; qu'en vertu de l'article 199, alinéa 5, du code de procédure pénale, en matière de détention provisoire, la comparution personnelle de la personne concernée est de droit si celle-ci ou son avocat en fait la demande ; que cette requête doit, à peine d'irrecevabilité, être présentée en même temps que la déclaration d'appel ou que la demande de mise en liberté adressée à la chambre de l'instruction ; que le président de la chambre de l'instruction ne peut refuser d'entendre la personne qu'en matière de demande de mise en liberté ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X... a interjeté appel de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention ayant prolongé sa détention provisoire pour six mois, par l'intermédiaire de son avocat, l'acte d'appel précisant que sa comparution personnelle à l'audience à l'audience était demandée ; que le parquet a fait informer le centre de détention du fait que M. X... serait entendu par visioconférence ; que l'arrêt ne fait pas état de l'audition de l'appelant, ni même d'une quelconque impossibilité de l'entendre ; qu'en statuant en l'absence de l'intéressé, la chambre de l'instruction a méconnu les articles 199 du code de procédure pénale et 5, § 4, de la Convention européenne des droits de l'homme ;
"2°) alors qu'en outre, si, en vertu de l'article 194 du code de procédure pénale, la chambre de l'instruction doit statuer dans un délai de vingt jours, lorsque la personne détenue demande à être entendue, l'appel contre l'ordonnance prononçant une prolongation de garde à vue ne permettant pas au présidant de refuser cette audition, lorsque la décision est rendue sans que la personne ait été entendu, pour contourner les contraintes de l'article 194 du code de procédure pénale, la privation de liberté est privée de tout titre légal à compter de l'expiration du délai de quinze jours suivant l'appel ; qu'il ne résulte d'aucune pièce du dossier qu'il ait été impossible de procéder à l'audition de M. X..., ni même que le président de la chambre de l'instruction ait fait irrégulièrement usage de son pouvoir de refuser de l'entendre, et faute pour la chambre de l'instruction d'invoquer une impossibilité d'entendre la personne qui aurait seulement permis de repousser le délai dans lequel il devait être statué sur l'appel d'une ordonnance de prolongation de la détention, elle aurait dû rendre sa décision dans le délai de quinze jours suivant la déclaration d'appel ; que la détention provisoire n'étant plus fondée sur aucun titre, la mise en liberté de la personne doit être prononcée ;"
Vu l'article 199, alinéa 5, du code de procédure pénale ;
Attendu que, selon ce texte, en matière de détention provisoire, la comparution personnelle de la personne concernée est de droit si celle-ci ou son avocat en fait la demande ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X... a interjeté appel le 2 octobre 2015 de l'ordonnance du juge des libertés et de la détention prolongeant sa détention provisoire en demandant à comparaître personnellement devant la chambre de l'instruction ; que, le 2 octobre 2015, le procureur général a donné avis à M. X... et à son avocat que l'appel serait examiné à l'audience du 21 octobre 2015, en utilisant des moyens de télécommunication audiovisuelle avec la maison d'arrêt de Lyon-Corbas, en application de l'article 706-71 du code de procédure pénale ; que le procès-verbal des opérations techniques de visioconférence établi par le greffier précise que "le greffe du centre pénitentiaire de Lyon-Corbas nous indique ne pas avoir noté de rendez-vous de visio avec la chambre de l'instruction pour cette audience et ne pas pouvoir reporter celui-ci" ; que M. X... n'a pas comparu personnellement par visioconférence ; qu'à l'issue des débats tenus en présence de l'avocat de l'appelant, l'arrêt a été rendu le 22 octobre 2015 ;
Mais attendu qu'en statuant sur la prolongation de la détention provisoire, en l'absence de M. X... qui avait demandé à comparaître personnellement et sans caractériser l'existence d'une circonstance imprévisible et insurmontable ayant rendu impossible la comparution personnelle du mis en examen par visioconférence, la chambre de l'instruction a méconnu le texte susvisé et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu'il y ait lieu d'examiner le second moyen de cassation proposé :
I- Sur le pourvoi formé le 29 octobre 2015 :
Le DÉCLARE IRRECEVABLE ;
II- Sur le pourvoi formé le 28 octobre 2015 :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes, en date du 22 octobre 2015, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Montpellier, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil, laquelle statuera dans les plus brefs délais ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nîmes et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le deux février deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.