LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Patrick X...,
contre l'arrêt de la cour d'appel de NÎMES, chambre correctionnelle, en date du 6 juin 2014, qui, pour mise en danger de la vie d'autrui, refus de se soumettre aux vérifications, rébellion, l'a condamné à six mois d'emprisonnement, un an de suspension du permis de conduire, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 17 novembre 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Monfort, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Guichard ;
Sur le rapport de M. le conseiller MONFORT, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de la société civile professionnelle MEIER-BOURDEAU et LÉCUYER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général LAGAUCHE ;
Vu les mémoires produits, en demande et en défense ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 223-1, 223-18, 223-20, 433-6, 433-7, 433-22 du code pénal, L. 233-2 I, L. 233-2, L. 224-12 du code de la route, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a déclaré M. X... coupable de mise en danger de la vie d'autrui, refus de se soumettre aux vérifications relatives au véhicule ou au conducteur et rébellion, l'a condamné à une peine de six mois d'emprisonnement ferme ainsi qu'à la suspension de son permis de conduire pour une durée d'un an et s'est prononcé sur les intérêts civils ;
"aux motifs propres que le prévenu a reconnu avoir accéléré brutalement alors que Mme Y..., gardien de la paix tenait sa portière ouverte afin de procéder au contrôle des pièces du véhicule ; cette manoeuvre aussi brutale qu'inattendue a mis en danger la vie de cette policière, qui s'avérera extrêmement choquée, après les faits ; il a nié s'être rebellé alors que les déclarations des deux policiers intervenants sont parfaitement concordantes et attestées par le certificat médical produit par Mme Y... ; dès lors, c'est à juste titre que le tribunal a retenu le prévenu dans les liens de la prévention et le jugement déféré sera confirmé sur la culpabilité ;
"aux motifs adoptés qu'il résulte des éléments du dossier que les faits reprochés à M. X... sont établis ; il convient de l'en déclarer coupable et d'entrer en voie de condamnation ;
"1°) alors que selon les dispositions de l'article 223-1 du code pénal, la mise en danger d'autrui nécessite la preuve d'un risque de mort ou de blessures graves encourues par autrui ; qu'il incombe à l'accusation d'établir la réalité de ce risque ; qu'en l'espèce, la cour d'appel s'est bornée à relever que M. X... avait accéléré brutalement alors que Mme Y..., gardien de la paix, tenait sa portière ouverte ; que faute d'établir en quoi cette manoeuvre aurait immédiatement et directement mis en danger la vie de la policière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
"2°) alors qu'en toute hypothèse, en ne précisant pas quelle était en l'espèce l'obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement qui aurait été méconnue par M. X..., la cour d'appel a de nouveau privé sa décision de toute base légale au regard des textes susvisés" ;
Vu l'article 593 du code de procédure pénale ;
Attendu que le juge répressif ne peut prononcer une peine sans avoir relevé tous les éléments constitutifs de l'infraction qu'il réprime ;
Attendu que, pour déclarer M. X... coupable du délit de mise en danger de la vie d'autrui, l'arrêt attaqué retient qu'il a, lors d'un contrôle sur la voie publique, accéléré brutalement alors que Mme Y..., gardien de la paix, tenait sa portière ouverte afin de procéder au contrôle des pièces de son véhicule ;
Mais attendu qu'en se déterminant par ce seul motif, sans caractériser un comportement particulier, s'ajoutant à la rébellion et au refus de se soumettre aux vérifications, ou l'existence de circonstances de fait exposant autrui à un risque immédiat de mort ou de blessures de nature à entraîner une mutilation ou une infirmité permanente, et sans préciser l'obligation particulière de sécurité ou de prudence imposée par la loi ou le règlement qui aurait été violée en l'espèce, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs, et sans qu"il y ait lieu d'examiner l'autre moyen de cassation proposé :
CASSE et ANNULE en toutes ses dispositions l'arrêt susvisé de la cour d'appel de Nîmes en date du 6 juin 2014, et pour qu'il soit à nouveau jugé conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Montpellier, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la cour d'appel de Nîmes et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le douze janvier deux mille seize ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.