LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 juin 2014), que la société Sagex, prestataire de services ayant contracté avec plusieurs syndicats de copropriétaires, chacun représenté par la société IFT immobilier, syndic professionnel, a assigné cette dernière afin d'obtenir sa condamnation à l'indemniser, sur le fondement de la responsabilité délictuelle, du préjudice allégué résultant de la résiliation, le même jour, de chacun de ces contrats ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société Sagex fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ qu'un syndicat de copropriété, lorsqu'il est représenté par un syndic professionnel, ne peut bénéficier des dispositions protectrices de l'article L. 136-1 du code de la consommation qui prévoit que lorsque le professionnel prestataire de services n'aura pas informé le consommateur par écrit, au plus tôt trois mois et au plus tard un mois avant le terme de la période autorisant le rejet de la reconduction tacite, ce dernier pourra sans frais mettre un terme au contrat à tout moment de la reconduction, dès lors que ce texte a été édicté dans le seul intérêt du consommateur ou du non-professionnel ; qu'en décidant le contraire, quand le syndic professionnel n'est pas un consommateur, la cour d'appel a violé l'article L. 136-1 du code de la consommation ;
2°/ que l'article L. 136-1 du code de la consommation n'est pas applicable au syndic professionnel qui, sans mandat préalable du syndicat des copropriétaires, résilie sans préavis le contrat renouvelable par tacite reconduction ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que cet article était applicable parce que chaque lettre de résiliation avait été faite au nom et pour le compte d'un syndicat, et que la société IFT Immobilier n'était pas intervenue personnellement mais comme mandataire de chaque syndicat ; qu'en statuant ainsi, sans justifier que ce syndic professionnel avait été dûment mandaté par chaque syndicat pour résilier les contrats conclus avec la société Sagex, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L. 136-1 du code de la consommation ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la société IFT immobilier, syndic professionnel, n'était pas intervenue à titre personnel mais en qualité de mandataire de chacun des syndicats de copropriétaires concernés, c'est à bon droit que la cour d'appel a retenu que ces derniers devaient être considérés comme des non-professionnels pour l'application de l'article L. 136-1 du code de la consommation ;
Et attendu que ne constitue pas une condition d'application de ce texte, le fait pour un syndic professionnel d'être dûment mandaté par le syndicat des copropriétaires pour résilier le contrat conclu avec le prestataire de services ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le second moyen :
Attendu que la société Sagex fait grief à l'arrêt de rejeter ses demandes, alors, selon le moyen :
1°/ que constitue une faute délictuelle le fait pour un syndic de résilier le même jour, de manière brutale et de son propre chef, au nom du syndicat des copropriétaires, trente-sept contrats de prestations de service sur lesquels ses mandants n'avaient émis aucune critique ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
2°/ qu'à supposer même qu'une telle faute soit de nature à engager la responsabilité contractuelle du syndic à l'égard des syndicats des copropriétaires concernés, un tiers est fondé à invoquer cette faute contractuelle sur un fondement délictuel lorsque le manquement lui a causé un préjudice ; qu'en affirmant que la faute alléguée « dans l'exercice de sa mission par le syndic pourrait être invoquée par le syndicat ou les copropriétaires mais non par la société Sagex », la cour d'appel a dès lors violé l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que la société Sagex n'avait pas informé chacun des syndicats de copropriétaires avec lequel elle avait contracté, de la possibilité de ne pas reconduire le contrat, et que la société IFT Immobilier avait agi en qualité de syndic de chacun d'eux, et ayant justement énoncé que ne constituait pas une faute le fait pour un mandataire de se prévaloir pour le compte de son mandant d'une disposition légale pouvant bénéficier à ce dernier, la cour d'appel en a exactement déduit qu'aucune faute personnelle n'était imputable à la société IFT immobilier ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Sagex aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Sagex et la condamne à payer à la société IFT immobilier la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq novembre deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Boulloche, avocat aux Conseils, pour la société Sagex
Le premier moyen de cassation fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Sagex de sa demande tendant à la condamnation de la société Ift Immobilier à lui verser la somme de 7.041,57 ¿ de dommages-intérêts correspondant aux honoraires dus pour l'année 2012 ;
Aux motifs qu'il appert de l'examen des pièces produites que les contrats de maintenance dont s'agit prévoient un renouvellement par tacite reconduction d'année civile en année civile ; Qu'il est constant qu'en l'espèce, la société SAGEX, en sa qualité de professionnel prestataire, n'a pas informé chacun des syndicats de copropriétaires concernés avec lequel elle a contracté, de la possibilité de ne pas reconduire le contrat conclu avec une clause de reconduction tacite, comme prévu par les dispositions de l'article L 136-1 du code de la consommation ; Que la société SAGEX ne peut pas valablement soutenir que sa demande est fondée et que la société IFT IMMOBILIER se devait de respecter le préavis contractuel au motif qu'elle est un syndic professionnel ne pouvant revendiquer l'application à son profit des dispositions de la loi CHATEL codifiée à l'article L 136-1 du Code de la consommation, alors qu'il appert de l'examen des pièces produites que chacun des contrats de maintenance a été conclu au nom et pour le compte de chaque syndicat de copropriétaires, de même que chacune des lettres de résiliation a été faite au nom et pour le compte d'un syndicat, de telle sorte que la société IFT IMMOBILIER n'est pas intervenue à titre personnel mais en sa qualité de mandataire de chacun des syndicats concernés, qui se trouve dans la même situation qu'un consommateur et doit être considéré comme un non-professionnel ;
1° Alors qu'un syndicat de copropriété, lorsqu'il est représenté par un syndic professionnel, ne peut bénéficier des dispositions protectrices de l'article L.136-1 du code de la consommation qui prévoit que lorsque le professionnel prestataire de services n'aura pas informé le consommateur par écrit, au plus tôt trois mois et au plus tard un mois avant le terme de la période autorisant le rejet de la reconduction tacite, ce dernier pourra sans frais mettre un terme au contrat à tout moment de la reconduction, dès lors que ce texte a été édicté dans le seul intérêt du consommateur ou du non-professionnel ; qu'en décidant le contraire, quand le syndic professionnel n'est pas un consommateur, la cour d'appel a violé l'article L. 136-1 du code de la consommation ;
2° Alors que, subsidiairement, l'article L. 136-1 du code de la consommation n'est pas applicable au syndic professionnel qui, sans mandat préalable du syndicat des copropriétaires, résilie sans préavis le contrat renouvelable par tacite reconduction ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a jugé que cet article était applicable parce que chaque lettre de résiliation avait été faite au nom et pour le compte d'un syndicat, et que la société Ift Immobilier n'était pas intervenue personnellement mais comme mandataire de chaque syndicat ; qu'en statuant ainsi, sans justifier que ce syndic professionnel avait été dûment mandaté par chaque syndicat pour résilier les contrats conclus avec la société Sagex, la cour d'appel a privé son arrêt de base légale au regard de l'article L.136-1 du code de la consommation.
Le second moyen de cassation, subsidiaire, fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté la société Sagex de sa demande tendant à la condamnation de la société Ift Immobilier à lui verser la somme de 7.041,57¿ de dommages-intérêts correspondant aux honoraires dus pour l'année 2012 ;
Aux motifs que la société SAGEX ne peut pas utilement soutenir que, sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, son action à l'encontre de la société IFT IMMOBILIER serait fondée au motif que la résiliation simultanée par le syndic des 37 conventions en violation du préavis contractuel serait constitutive d'une faute, le syndic professionnel ne pouvant se prévaloir des dispositions de la loi CHATEL alors que la loi invoquée étant applicable aux syndicats des copropriétaires, le syndic agissant en sa qualité de mandataire de chaque syndicat peut valablement en faire état, la qualité de bénéficiaire des dispositions de ladite loi devant s'apprécier en la personne des syndicats et non en celle du mandataire, peu important la qualité de professionnel de ce dernier ; que ne constitue pas une faute le fait pour un mandataire de se prévaloir pour le compte de son mandant d'une disposition légale pouvant bénéficier à ce dernier ; Que la société SAGEX ne peut pas utilement soutenir que la société IFT IMMOBILIER aurait commis une faute en résiliant les contrats litigieux sans consultation préalable des 37 syndicats concernés, ni sur la résiliation ni sur le contenu des nouveaux contrats mis en place auprès d'un prestataire concurrent, la société BOUVIER, alors que l'éventuelle faute alléguée de ce chef dans l'exercice de sa mission par le syndic pourrait être invoquée par le syndicat ou les copropriétaires mais non par la société SAGEX, tiers par rapport au syndicat, lequel syndicat est représenté dans ses rapports avec les tiers par le syndic qui agit en qualité de mandataire et non à titre personnel, de telle sorte que ce moyen ne peut prospérer et sera rejeté ; Qu'enfin, l'absence de reproches dans l'exécution de ses prestations contractuelles pourrait le cas échéant être opposée par la société SAGEX à chacun des syndicats, partie au contrat de maintenance, mais non au syndic à titre personnel ; Qu'ainsi, la société SAGEX n'établit pas la réalité de la faute qui serait imputable à la société IFT IMMOBILIER à titre personnel, de nature à lui causer un préjudice, ni du lien direct pouvant exister entre la dite faute et le préjudice dont elle se prévaut (arrêt p. 3 et 4) ;
Et aux motifs éventuellement adoptés que la société SAGEX est défaillante à rapporter la preuve d'une quelconque faute personnelle du syndic, étant précisé que la résiliation des contrats entre dans le champ des compétences qui lui sont attribuées au nom du syndicat des copropriétaires en application des dispositions de l'article 18 de la loi du 10 juillet 1965 ;
1° Alors que constitue une faute délictuelle le fait pour un syndic de résilier le même jour, de manière brutale et de son propre chef, au nom du syndicat des copropriétaires, 37 contrats de prestations de service sur lesquels ses mandants n'avaient émis aucune critique ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1382 du code civil ;
2° Alors qu'à titre subsidiaire, à supposer même qu'une telle faute soit de nature à engager la responsabilité contractuelle du syndic à l'égard des syndicats des copropriétaires concernés, un tiers est fondé à invoquer cette faute contractuelle sur un fondement délictuel lorsque le manquement lui a causé un préjudice ; qu'en affirmant que la faute alléguée « dans l'exercice de sa mission par le syndic pourrait être invoquée par le syndicat ou les copropriétaires mais non par la société SAGEX », la cour d'appel a dès lors violé l'article 1382 du code civil.