LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 26 juin 2013), rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 15 novembre 2011, pourvoi n° 10-21.701), que se plaignant du refus de vente opposé par des concessionnaires britanniques et irlandais de la société de droit anglais JCB Service Ltd (la société JCB Service), qui commercialise des engins et équipements de chantiers, la société française Central Parts, non agréée en France pour la distribution de ces produits, a saisi, en février 1996, la Commission des Communautés européennes (la Commission) de pratiques anticoncurrentielles mises en oeuvre par cette société ; que par décision du 21 décembre 2000 (Aff.Comp. F.1/35.918-JCB), la Commission a dit que la société JCB Service et ses filiales avaient enfreint les dispositions de l'article 81 du traité CE, en concluant avec des concessionnaires des accords ou des pratiques concertées dont l'objet était de restreindre la concurrence à l'intérieur du marché commun afin de cloisonner les marchés nationaux et d'assurer une protection absolue sur des territoires exclusifs en dehors desquels les concessionnaires étaient empêchés de réaliser des ventes actives, et qui avaient notamment consisté en des restrictions des ventes passives des concessionnaires établis au Royaume-Uni, en Irlande, en France et en Italie, qui comprenaient les ventes aux revendeurs non agréés, aux utilisateurs finals ou aux concessionnaires établis en dehors des territoires exclusifs, et notamment dans d'autres Etats membres ; qu'en conséquence, la Commission a infligé une sanction pécuniaire à la société JCB Service et lui a enjoint de cesser ces pratiques ; que cette décision a été confirmée sur ce point par un arrêt du Tribunal de première instance des Communautés européennes (le TPICE) du 13 janvier 2004 (T-67/01, JCB Service c/ Commission), le pourvoi contre cet arrêt ayant été rejeté par la Cour de justice des Communautés européennes (la CJCE) le 21 septembre 2006 (C-167/04 P) ; qu'à la suite de l'arrêt rendu par le TPICE, la société Central Parts a assigné les sociétés JCB Service, JCB Sales Ltd, JCB Finance Ltd et JC Bramford Excavators Ltd en paiement de dommages-intérêts ; que la société JCB Finance a été mise hors de cause par un arrêt, devenu irrévocable ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les sociétés JCB Sales et JC Bramford Excavators font grief à l'arrêt de retenir leur responsabilité et d'ordonner avant dire droit une expertise sur l'étendue du préjudice de la société Central Parts alors, selon le moyen :
1°/ que dès lors que les entités qui composent un groupe de sociétés disposent de la personnalité morale, les condamnations prononcées à l'égard de l'une d'elles n'emportent aucune condamnation à l'encontre des sociétés qui n'ont pas été présentes à la procédure ; qu'en l'espèce, seule la société JCB Service a été sanctionnée par la Commission européenne pour violation d'une disposition du droit communautaire de la concurrence (article 81 CE) et elle seule a été partie au recours formé ensuite devant les juridictions de l'Union européenne ; qu'en se fondant sur les motifs ayant conduit à la condamnation par les juges communautaires de la société JCB Service pour retenir la responsabilité des sociétés JCB Sales et JC Bramford Excavators, quand ces dernières avaient été étrangères à la procédure suivie devant les juridictions communautaires, les juges du fond ont méconnu l'effet relatif qui s'attache à l'autorité de la chose jugée par les juridictions de l'Union européenne, ensemble les articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile ;
2°/ que les décisions prises par la Commission européenne dans le cadre des articles 81 ou 82 du traité de l'Union s'imposent aux juridictions nationales ; qu'en condamnant les sociétés JCB Sales et JC Bramford Excavators au terme d'une procédure que la Commission européenne et les juridictions de l'Union avait circonscrite à la seule société JCB Service, les juges du fond ont modifié le périmètre de la procédure d'infraction au droit de la concurrence ; qu'en procédant de la sorte, les juges du fond ont violé l'article 16 du règlement CE n° 1/2003 du 16 décembre 2002, ensemble le principe de primauté du droit de l'Union européenne ;
3°/ que le droit au procès équitable commande qu'une partie qui n'a pas été appelée à une précédente procédure soit recevable à en discuter les présupposés devant ses propres juges ; qu'en décidant en l'espèce que ce qui avait été décidé par les juridictions de l'Union européenne à l'égard de la société JCB Service pouvait être opposé aux sociétés JCB Sales et JC Bramford Excavators, les juges du fond ont violé le droit au procès équitable tel qu'il est consacré par l'article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme, ensemble les articles 1er, 12 et 30 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les juridictions communautaires avaient confirmé la décision de la Commission du 21 décembre 2000 dont le dispositif énonçait, dans son article 1, que la société JCB Service et ses filiales avaient enfreint les dispositions de l'article 81 du traité CE, et retenu que les sociétés JCB Sales et JC Bramford Excavators étaient les sociétés d'exploitation principales visées en tant que filiales de JCB Service par les décisions communautaires, c'est sans méconnaître le droit au procès équitable, le principe de la primauté du droit communautaire et l'effet relatif qui s'attache à l'autorité de la chose jugée par les juridictions communautaires que la cour d'appel a retenu que le fait qu'elles ne soient pas condamnées par les décisions communautaires n'interdit pas à la juridiction nationale d'apprécier, au regard des éléments qui lui sont soumis, notamment des décisions communautaires, les éléments de leur comportement constitutifs d'une faute ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que les sociétés JCB Sales et JC Bramford Excavators font le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :
1°/ que pour prononcer des condamnations à dommages-intérêts, les juges sont tenus d'identifier un acte personnellement imputable à chacune des parties qu'ils reconnaissent responsables ; qu'en présence d'une pluralité de parties, il appartient aux juges de déterminer la participation respective de chacune d'entre elles aux faits qui leur sont reprochés ; qu'en se bornant en l'espèce, pour retenir l'existence de fautes délictuelles à l'encontre des sociétés JCB Sales et JC Bramford Excavators, à relever que celles-ci, comme toutes les filiales du groupe, participent à la politique commerciale de la société JCB Service et contribuent ainsi à la réalisation des infractions relevées par les juridictions communautaires, sans identifier aucun acte précis qui leur fussent personnellement imputables, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2°/ que la responsabilité collective des membres d'un groupe ne peut être retenue que pour autant que les juges constatent l'impossibilité d'identifier, du fait du fonctionnement de ce groupe, les auteurs des manquements à l'origine du dommage ; qu'en retenant la responsabilité personnelle des sociétés JCB Sales et JC Bramford Excavators du seul fait de leur participation à la politique commerciale de la société JCB Service, sans relever aucune circonstance qui justifiait de ne pas rechercher les manquements propres à chacune de ces deux sociétés, les juges du fond ont également privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt relève que les juridictions communautaires ont constaté, d'un côté, que la politique commerciale de la société holding JCB Service consistait à décourager les exportations parallèles en interdisant à ses filiales au Royaume-Uni et en Irlande la vente de leurs produits à l'étranger et en leur demandant de lui adresser toute demande douteuse pour qu'il leur soit dit si elles devaient ou non livrer et, de l'autre, que les sociétés JCB Sales et JC Bramford Excavators, en tant que filiales de JCB Service, notifiaient aux distributeurs les accords de distribution frauduleux sur l'ordre de JCB Service, appliquaient les consignes de sa politique commerciale et contribuaient à la réalisation des infractions de pratiques concertées dont l'objet était de restreindre la concurrence à l'intérieur du marché commun ; qu'ainsi la cour d'appel, qui a identifié les actes personnellement imputables aux sociétés JCB Sales et JC Bramford Excavators, ce qui rend inopérant le grief de la seconde branche, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que les sociétés JCB Service, JCB Sales et JC Bramford Excavators font grief à l'arrêt de retenir leur responsabilité et d'ordonner avant dire droit une expertise sur l'étendue de la société Central Parts alors, selon le moyen :
1°/ qu'il incombe aux juges saisis d'une action en responsabilité à l'encontre des sociétés d'un même groupe, après avoir identifié les manquements susceptibles d'être reprochés à chacune de ces entités, de déterminer les préjudices spécifiques correspondant aux fautes respectives ainsi établies ; qu'en se bornant en l'espèce à relever l'existence d'un préjudice globalement supporté par la société Central Parts sans rechercher, pour chacune des trois sociétés, quelle était la part de ce préjudice qui pouvait être imputée à leurs manquements respectifs, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2°/ que faute d'avoir conservé à l'esprit la distinction entre le plaignant qui peut provoquer le déclenchement d'une action devant l'autorité communautaire sans avoir à se soucier du lien de cause à effet et la qualité de victime, laquelle postule, dans le cadre d'une action en réparation, la preuve d'un lien de cause à effet, les juges du fond ont cru pouvoir retenir qu'un trouble commercial s'inférait nécessairement de ce que la société Central Parts avait été plaignante, quand cette qualité ne dispensait en aucune façon les juges du fond, saisis d'une action en réparation, de s'interroger sur le lien de cause à effet entre le dommage invoqué et les faits imputés à chacune des entités ; que de ce point de vue, l'arrêt doit être censuré pour violation de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu qu'après avoir identifié les fautes respectives des sociétés JCB Service, JCB Sales et JC Bramford Excavators, l'arrêt relève, par motifs propres et adoptés, qu'il n'est pas contesté que la société Central Parts, revendeur non agréé établi en France, s'est vu refuser tout approvisionnement en machines et pièces détachées par les distributeurs agréés anglais et irlandais en produits JCB ; qu'il retient que les pratiques anticoncurrentielles dénoncées par la société Central Parts ont eu pour effet d'empêcher le jeu de la concurrence et ont nécessairement causé un trouble commercial à celle-ci qui, en raison des difficultés qu'elle rencontrait, a dû engager des frais pour se fournir en produits JCB et a souffert d'un manque à gagner ; qu'avant dire droit sur la réparation du préjudice, il ordonne une expertise aux fins de préciser le surcoût occasionné par la mise en place de circuits d'approvisionnement parallèles et par la création de sociétés ad hoc sur le territoire du Royaume-Uni, le surcoût engendré par le besoin en main d'oeuvre pour gérer les difficultés d'approvisionnement de la société Central parts en produits JCB tout en recherchant si ce surcoût a pu ou non être répercuté sur les clients, ainsi que la perte du chiffre d'affaires et de marge sur les produits dont la fourniture a été interdite ; qu'ainsi la cour d'appel, qui a fait ressortir le lien de causalité entre le dommage invoqué et les fautes commises par les sociétés JCB Service, JCB Sales et JC Bramford Excavators ayant concouru à sa réalisation, et qui n'était pas tenue de rechercher, à ce stade de son raisonnement, quelle était la part de ce préjudice pouvant être imputée à leurs manquements respectifs, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le quatrième moyen :
Attendu que les sociétés JCB Service, JCB Sales et JC Bramford Excavators font le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :
1°/ que si l'auteur du dommage ne peut se prévaloir des manquements de la victime lorsque ceux-ci trouvent leur origine dans le comportement du défendeur, ce n'est que pour autant que les juges vérifient que ces manquements trouvent effectivement leur origine dans le comportement de celui dont la responsabilité est recherchée ; que lorsque les fautes reprochées à la victime sont tout à la fois antérieures et extérieures à celles du défendeur, celui-ci est en droit d'obtenir que sa dette de réparation soit réduite à due concurrence ; qu'en l'espèce, les sociétés JCB faisaient état d'actes déloyaux et de comportements illicites de la société Central Parts dont la plupart étaient antérieurs et étrangers aux refus de vente qu'elles ont pu lui opposer ; qu'en repoussant ce moyen pour cette raison que les sociétés JCB ne pouvaient se prévaloir de manquements qui trouvaient leur origine dans leur propre comportement, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
2°/ que les juges qui sont saisis d'une action en responsabilité sont tenus d'examiner par eux-mêmes les faits qui leur sont soumis pour apprécier l'incidence des manquements de la victime sur la réalisation du dommage et sur la responsabilité de son auteur ; qu'en l'espèce, les sociétés JCB se prévalaient des propres manquements de la société Central Parts, lesquels justifiaient l'exonération, même partielle, de leur responsabilité ; qu'en se bornant à renvoyer sur ce point à l'appréciation du Tribunal de première instance des Communautés européennes dans sa décision du 13 janvier 2004, sans vérifier par eux-mêmes si ces manquements de la victime pouvaient être exonératoires de la responsabilité des sociétés JCB, les juges du fond ont encore privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
3°/ que dans sa décision du 13 janvier 2004, le Tribunal de première instance des Communautés européennes s'est borné à observer que les manquements de la société Central Parts étaient « sans incidence sur la réalité des fautes commises par les sociétés JCB », sans se prononcer sur le caractère exonératoire de ces manquements une fois établies les fautes de la société JCB Service ; qu'en se fondant sur un tel motif, qui était étranger aux arguments des sociétés JCB, les juges du fond ont une nouvelle fois privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu, en premier lieu, qu'en retenant que les sociétés JCB ne pouvaient se prévaloir de manquements qui trouvaient leur origine dans leur propre comportement, la cour d'appel visait le reproche fait par ces sociétés à la société Central Parts d'avoir contourné les refus de vente qui lui étaient opposés et non les condamnations de celle-ci pour concurrence déloyale et malfaçon ;
Et attendu, en second lieu, qu'ayant retenu que les fautes commises par les sociétés JCB Sales et JC Bramford Excavators, pour avoir appliqué les consignes de la politique commerciale de la société JCB Service, avaient incité la société Central Parts à agir comme elle l'a fait, la cour d'appel a pu en déduire que les sociétés JCB étaient mal fondées à invoquer le comportement de celle-ci pour s'exonérer de leur responsabilité délictuelle ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés JCB Service, JCB Sales Ltd, et JC Bramford Excavators Ltd aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette leur demande et les condamne à payer à la société Central Parts la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du six octobre deux mille quinze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
.Moyens produits par la SCP Foussard et Froger, avocat aux Conseils, pour les sociétés JCB Sales LTD, JC Bamford Excavators LTD et JCB Service.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU' il a retenu la responsabilité des sociétés JCB SALES LTD et JC BAMFORD EXCAVATORS LTD et a ordonné avant dire droit une expertise sur l'étendue du préjudice de la société CENTRAL PARTS ;
AUX MOTIFS PROPRES D'ABORD QUE « contrairement à ce que soutiennent les sociétés JCB SERVICE, JCB SALES LTD et JC BAMFORD EXCAVATORS LTD, les juridictions communautaires ont relevé dans des dispositions parfaitement claires, les infractions de restriction de ventes passives par les revendeurs anglais et irlandais aux revendeurs non agréés et ont refusé l'exemption sollicitée de sorte que le réseau de distribution de JCB n'étant pas reconnu comme sélectif, JCB ne pouvait interdire de revendre à des distributeurs non agréés ; qu'en effet, la CJCE a rappelé (points 125 à 139) que le TPICE a estimé que les documents de la cause établissaient : 1) que les distributeurs au Royaume-Uni, en Irlande et en France estimaient que leur accord avec le groupe JCB les obligeait à des pratiques commerciales restrictives et avaient ainsi adopté un comportement correspondant ce qui caractérisait des pratiques restrictives distinctes du contenu des accords notifiés, 2) que pour l'Irlande, dans le contexte de stipulations contractuelles identiques en l'espèce à celles du Royaume-Uni, mais non notifiées, les éléments de fait corroborés par le comportement général de limitation des ventes hors territoire dans le reste du réseau de distribution du grouper JCB permettaient de caractériser également l'existence de l'infraction, 3) que pour la France, l'accord standard de concession datant de 1991 comportait en son article 2 une clause d'exclusivité réciproque qui interdisait notamment au concessionnaire de vendre, de diffuser ou de promouvoir directement ou indirectement les produits et les pièces JCB en dehors du territoire concédé et que cet accord non notifié interdisait les ventes actives et par sa rédaction même comportait aussi une interdiction des ventes passives en dehors du territoire concédé ; qu'enfin, la CJCE a indiqué (point 162 et suivants) que la combinaison de la sélectivité et de l'exclusivité propre au système de distribution du groupe JCB emportait un cumul des restrictions non indispensables sans que ces limitations fussent contrebalancées par des effets bénéfiques notamment pour les consommateurs que le groupe JCB affirmait sans le démontrer aucunement (Commission point 207 s) ; que la Cour a rappelé (point 166) que le TIPCE a relevé que JCB n'avait pas démontré que ces accords pourraient relever du régime d'exemption par catégorie prévu par le règlement CEE 123/85 remplacé par le règlement CEE 1475/95 (les produits concernés ne sont pas visés par ces textes point 164 de l'arrêt du TPICE) pas plus que la société JCB n'avait établi qu'ils pouvaient faire l'objet d'une décision d'exemption individuelle au titre de l'article 81 paragraphe 3 CE (points 165, 166, 167 et 168 de l'arrêt du TPICE ) ; qu'en application de l'article 16 du règlement CE n° 1/2003 du Conseil du 16 décembre 2002, relatif à la mise en oeuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du Traité, le constat des violations s'impose aux juridictions nationales ; qu'ainsi, les contestations de JCB qui prétend que ses refus seraient licites au vu des règlements d'exemption de 1999 et 2010 ne sont pas recevables ; que les infractions à la législation communautaire constituent des fautes civiles selon le droit français ; que quant au rôle de la société JCB SERVICE, le TPICE constatait que dans un courrier du 2 juin 1992, la société JCB SERVICE exposait très clairement (point 106) sa position en ce qui concerne les exportations parallèles qui est de décourager activement la vente de toute nouvelle machine à l'étranger par l'intermédiaire d'un distributeur du Royaume-Uni et qu'en cloisonnant ainsi les territoires de ses distributeurs et des marchés nationaux, elle prohibait de façon générale toute vente hors territoire, notamment à l'étranger, qu'il s'agisse d'exportations parallèles en marge de son réseau de distribution ou non, et que ce comportement renforçait les restrictions imposées aux ventes passives ; que, comme l'expose la société CENTRAL PARTS, JCB SERVICE, société holding "impulse la politique commerciale" du groupe (selon la décision de la commission point 89, les filiales lui adressent "toute demande douteuse" pour qu'il leur soit dit si elles doivent ou non livrer, et selon le point 148, ses concessionnaires respectent ses instructions et sa politique) et organise de la fraude ; que selon la commission (point 87) les dirigeants de JCB SERVICE suggéraient à WATLING JCB, société à laquelle CENTRAL PARTS demande d'expliquer pourquoi il lui est refusé toute vente d'"ignorer la demande" ; que la société JCB SERVICE a commis les infractions constatées par les décisions communautaires et que ces infractions constituent une faute délictuelle, selon le droit interne français ; que les sociétés JCB SALES LTD et JC BAMFORD EXCAVATORS LTD sont les sociétés d'exploitation principales visées également par les décisions communautaires en tant que "filiales de JCB SERVICE" ; qu'il est ainsi observé par exemple que la société JC BAMFORD EXCAVATORS LTD est auditionnée au cours de la procédure communautaire (point 49 arrêt TPICE) ; que ces deux sociétés notifient aux distributeurs les accords de distribution frauduleux sur l'ordre de JCB SERVICE (point 6 de l'arrêt du TPICE et point 15 de l'arrêt de la CJCE), appliquent les consignes de la politique commerciale de la société JCB SERVICE et contribuent à la réalisation des infractions relevées ; qu'elles ont ainsi commis une faute délictuelle selon le droit interne français ; que la demande tendant à les mettre hors de cause n'est ainsi pas justifiée et à cet égard, le fait qu'elles ne soient pas condamnées dans les décisions communautaires n'interdit pas à la juridiction nationale d'apprécier au regard des éléments qui lui sont soumis, notamment des décisions communautaires, les éléments de leur comportement constitutifs d'une faute ; que la société CENTRAL PARTS, revendeur non agréé, s'est vu refuser tout approvisionnement en machines et pièces détachées par les distributeurs agréés anglais et irlandais en produits JCB ; qu'à cet égard, le TPICE (point 88) a constaté que dans une lettre adressée le 30 novembre 1992, la société TC HARISSON JCB, distributeur agréé, expliquait à CENTRAL PARTS qu'elle n'a pas le droit d'exporter (reprise du point 91 de la décision de la commission), que le distributeur agréé irlandais éludait les demandes de CENTRAL PARTS (point 92 de la décision de la commission) ; que la commission constatait (point 94 de la décision) que pour l'approvisionnement en pièces détachées, les principales cibles de JCB étaient INTERPARTS et CENTRAL PARTS » (arrêt, p. 8-10) ;
AUX MOTIFS PROPRES ENSUITE QU' « il apparaît que contrairement à ce que soutiennent les sociétés JCB SERVICE, JCB SALES LTD et JC BAMFORD EXCAVATORS LTD, le Tribunal de commerce d'Orléans a parfaitement interprété les décisions communautaires ; que les trois sociétés appelantes ont par les décisions prises par l'une, par l'exécution par les autres de ces décisions commis des fautes qui ont concouru à la réalisation du préjudice subi par CENTRAL PARTS ; que la cour les condamnera in solidum à réparer celui-ci » (arrêt, p. 10, § 3) ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QU' « il convient de bien définir le litige qui lui est soumis ; que la SA CENTRAL PARTS reproche au « Groupe JCB - UK » d'avoir agi, depuis 1987, auprès de ses concessionnaires ou revendeurs agréés afin qu'ils ne réalisent pas de ventes passives à des revendeurs non agréés et localisés hors de leur territoire ; que par ventes passives, il faut entendre des ventes non sollicitées par les concessionnaires ou revendeurs agréés, c'est à dire des ventes sollicitées par l'acheteur ; que la SA CENTRAL PARTS s'estime visée par ces agissements puisque, revendeur non agréé par JCB et localisée en France, elle a sollicité, directement ou indirectement, des concessionnaires ou revendeurs agréés par JCB localisés en Angleterre ou en Irlande, pour des achats de matériels et de pièces détachées, qui lui ont été refusés ; que la distribution sélective, dont se prévaut le « Groupe JCB - UK » pour justifier son attitude, lui a été refusée à la fois par la Commission et le Tribunal communautaire, qui ont rejeté sa « demande d'exemption » qui visait justement à instaurer une distribution sélective ; que cette demande d'exemption avait pourtant été déposée en 1973 ; que, dès lors, le « Groupe JCB - UK » ne peut prétendre à bon droit avoir appliqué un système de distribution sélective, en particulier à l'égard de la SA CENTRAL PARTS ; que, en particulier, la clause 4 du contrat de distribution anglais, que le « Groupe JCB UK » fait valoir pour justifier ses agissements, est spécifiquement étudiée par le Tribunal communautaire dans ses paragraphes 81 et 82 ; que le Tribunal communautaire précise bien que les versions modifiées en 1980 et en 1985 de cette clause, c'est-à-dire celles en vigueur au moment des faits litigieux, ne peuvent pas être considérées comme régulièrement notifiées et, donc, applicables ; que « Groupe JCB - UK » fait une lecture sélective des motivations de l'arrêt du Tribunal communautaire en oubliant que le Tribunal communautaire, dans son dispositif, ne rejette rien de la décision relative à l'infraction relevée par la Commission, applicable en l'espèce, qui doit donc être reprise dans son intégralité, soit : « restrictions des ventes passives des distributeurs établis au Royaume-Uni, en Irlande, en France et en Italie, auprès des revendeurs non agréés, des utilisateurs finaux ou des distributeurs établis en dehors des territoires exclusifs, et notamment dans d'autres États membres » ; qu'il n'est pas contesté que la SA CENTRAL PARTS, revendeur non agréé établi en France, a sollicité des distributeurs agréés par JCB, établis au Royaume-Uni et en Irlande, pour des approvisionnements de produits JCB, donc des ventes passives, et que ces ventes lui ont été refusées ; qu'il est donc patent que la SA CENTRAL PARTS a été victime de l'infraction relevée par le Tribunal communautaire ; que la SA CENTRAL PARTS a réagi aux pratiques du « Groupe JCB - UK » en portant plainte auprès de la Commission ; que, en conséquence, le Tribunal considérera cet élément comme une faute, engageant la responsabilité du « Groupe JCB ¿ UK » à l'égard de la SA CENTRAL PARTS ; que l'argument, tiré par le « Groupe JCB - UK », de l'absence d'interdiction du refus de venté entre professionnels, posée par le droit français, devient ainsi inopérant, car contraire, en l'espèce, aux décisions des instances communautaires » (jugement, p. 8-9) ;
ALORS QUE, premièrement, dès lors que les entités qui composent un groupe de sociétés disposent de la personnalité morale, les condamnations prononcées à l'égard de l'une d'elles n'emportent aucune condamnation à l'encontre des sociétés qui n'ont pas été présentes à la procédure ; qu'en l'espèce, seule la société JCB SERVICE a été sanctionnée par la Commission européenne pour violation d'une disposition du droit communautaire de la concurrence (article 81 CE) et elle seule a été partie au recours formé ensuite devant les juridictions de l'Union européenne ; qu'en se fondant sur les motifs ayant conduit à la condamnation par les juges communautaires de la société JCB SERVICE pour retenir la responsabilité des sociétés JCB SALES et JC BAMFORD EXCAVATORS, quand ces dernières avaient été étrangères à la procédure suivie devant les juridictions communautaires, les juges du fond ont méconnu l'effet relatif qui s'attache à l'autorité de la chose jugée par les juridictions de l'Union européenne, ensemble les articles 1351 du code civil et 480 du code de procédure civile ;
ALORS QUE, deuxièmement, les décisions prises par la Commission européenne dans le cadre des articles 81 ou 82 du traité de l'Union s'imposent aux juridictions nationales ; qu'en condamnant les sociétés JCB SALES et JC BAMFORD EXCAVATORS au terme d'une procédure que la Commission européenne et les juridictions de l'Union avait circonscrite à la seule société JCB SERVICE, les juges du fond ont modifié le périmètre de la procédure d'infraction au droit de la concurrence ; qu'en procédant de la sorte, les juges du fond ont violé l'article 16 du règlement CE n° 1/2003 du 16 décembre 2002, ensemble le principe de primauté du droit de l'Union européenne ;
ET ALORS QUE, troisièmement, le droit au procès équitable commande qu'une partie qui n'a pas été appelée à une précédente procédure soit recevable à en discuter les présupposés devant ses propres juges ; qu'en décidant en l'espèce que ce qui avait été décidé par les juridictions de l'Union européenne à l'égard de la société JCB SERVICE pouvait être opposé aux sociétés JCB SALES et JC BAMFORD EXCAVATORS (arrêt, p. 9, § 3, in fine), les juges du fond ont violé le droit au procès équitable tel qu'il est consacré par l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble les articles 1er, 12 et 30 du code de procédure civile.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU' il a retenu la responsabilité des sociétés JCB SALES LTD et JC BAMFORD EXCAVATORS LTD et a ordonné avant dire droit une expertise sur l'étendue du préjudice de la société CENTRAL PARTS ;
AUX MOTIFS PROPRES D'ABORD QUE « contrairement à ce que soutiennent les sociétés JCB SERVICE, JCB SALES LTD et JC BAMFORD EXCAVATORS LTD, les juridictions communautaires ont relevé dans des dispositions parfaitement claires, les infractions de restriction de ventes passives par les revendeurs anglais et irlandais aux revendeurs non agréés et ont refusé l'exemption sollicitée de sorte que le réseau de distribution de JCB n'étant pas reconnu comme sélectif, JCB ne pouvait interdire de revendre à des distributeurs non agréés ; qu'en effet, la CJCE a rappelé (points 125 à 139) que le TPICE a estimé que les documents de la cause établissaient : 1) que les distributeurs au Royaume-Uni, en Irlande et en France estimaient que leur accord avec le groupe JCB les obligeait à des pratiques commerciales restrictives et avaient ainsi adopté un comportement correspondant ce qui caractérisait des pratiques restrictives distinctes du contenu des accords notifiés, 2) que pour l'Irlande, dans le contexte de stipulations contractuelles identiques en l'espèce à celles du Royaume-Uni, mais non notifiées, les éléments de fait corroborés par le comportement général de limitation des ventes hors territoire dans le reste du réseau de distribution du grouper JCB permettaient de caractériser également l'existence de l'infraction, 3) que pour la France, l'accord standard de concession datant de 1991 comportait en son article 2 une clause d'exclusivité réciproque qui interdisait notamment au concessionnaire de vendre, de diffuser ou de promouvoir directement ou indirectement les produits et les pièces JCB en dehors du territoire concédé et que cet accord non notifié interdisait les ventes actives et par sa rédaction même comportait aussi une interdiction des ventes passives en dehors du territoire concédé ; qu'enfin, la CJCE a indiqué (point 162 et suivants) que la combinaison de la sélectivité et de l'exclusivité propre au système de distribution du groupe JCB emportait un cumul des restrictions non indispensables sans que ces limitations fussent contrebalancées par des effets bénéfiques notamment pour les consommateurs que le groupe JCB affirmait sans le démontrer aucunement (Commission point 207 s) ; que la Cour a rappelé (point 166) que le TIPCE a relevé que JCB n'avait pas démontré que ces accords pourraient relever du régime d'exemption par catégorie prévu par le règlement CEE 123/85 remplacé par le règlement CEE 1475/95 (les produits concernés ne sont pas visés par ces textes point 164 de l'arrêt du TPICE) pas plus que la société JCB n'avait établi qu'ils pouvaient faire l'objet d'une décision d'exemption individuelle au titre de l'article 81 paragraphe 3 CE (points 165, 166, 167 et 168 de l'arrêt du TPICE ) ; qu'en application de l'article 16 du règlement CE n° 1/2003 du Conseil du 16 décembre 2002, relatif à la mise en oeuvre des règles de concurrence prévues aux articles 81 et 82 du Traité, le constat des violations s'impose aux juridictions nationales ; qu'ainsi, les contestations de JCB qui prétend que ses refus seraient licites au vu des règlements d'exemption de 1999 et 2010 ne sont pas recevables ; que les infractions à la législation communautaire constituent des fautes civiles selon le droit français ; que quant au rôle de la société JCB SERVICE, le TPICE constatait que dans un courrier du 2 juin 1992, la société JCB SERVICE exposait très clairement (point 106) sa position en ce qui concerne les exportations parallèles qui est de décourager activement la vente de toute nouvelle machine à l'étranger par l'intermédiaire d'un distributeur du Royaume-Uni et qu'en cloisonnant ainsi les territoires de ses distributeurs et des marchés nationaux, elle prohibait de façon générale toute vente hors territoire, notamment à l'étranger, qu'il s'agisse d'exportations parallèles en marge de son réseau de distribution ou non, et que ce comportement renforçait les restrictions imposées aux ventes passives ; que, comme l'expose la société CENTRAL PARTS, JCB SERVICE, société holding "impulse la politique commerciale" du groupe (selon la décision de la commission point 89, les filiales lui adressent "toute demande douteuse" pour qu'il leur soit dit si elles doivent ou non livrer, et selon le point 148, ses concessionnaires respectent ses instructions et sa politique) et organise de la fraude ; que selon la commission (point 87) les dirigeants de JCB SERVICE suggéraient à WATLING JCB, société à laquelle CENTRAL PARTS demande d'expliquer pourquoi il lui est refusé toute vente d'"ignorer la demande" ; que la société JCB SERVICE a commis les infractions constatées par les décisions communautaires et que ces infractions constituent une faute délictuelle, selon le droit interne français ; que les sociétés JCB SALES LTD et JC BAMFORD EXCAVATORS LTD sont les sociétés d'exploitation principales visées également par les décisions communautaires en tant que "filiales de JCB SERVICE" ; qu'il est ainsi observé par exemple que la société JC BAMFORD EXCAVATORS LTD est auditionnée au cours de la procédure communautaire (point 49 arrêt TPICE) ; que ces deux sociétés notifient aux distributeurs les accords de distribution frauduleux sur l'ordre de JCB SERVICE (point 6 de l'arrêt du TPICE et point 15 de l'arrêt de la CJCE), appliquent les consignes de la politique commerciale de la société JCB SERVICE et contribuent à la réalisation des infractions relevées ; qu'elles ont ainsi commis une faute délictuelle selon le droit interne français ; que la demande tendant à les mettre hors de cause n'est ainsi pas justifiée et à cet égard, le fait qu'elles ne soient pas condamnées dans les décisions communautaires n'interdit pas à la juridiction nationale d'apprécier au regard des éléments qui lui sont soumis, notamment des décisions communautaires, les éléments de leur comportement constitutifs d'une faute ; que la société CENTRAL PARTS, revendeur non agréé, s'est vu refuser tout approvisionnement en machines et pièces détachées par les distributeurs agréés anglais et irlandais en produits JCB ; qu'à cet égard, le TPICE (point 88) a constaté que dans une lettre adressée le 30 novembre 1992, la société TC HARISSON JCB, distributeur agréé, expliquait à CENTRAL PARTS qu'elle n'a pas le droit d'exporter (reprise du point 91 de la décision de la commission), que le distributeur agréé irlandais éludait les demandes de CENTRAL PARTS (point 92 de la décision de la commission) ; que la commission constatait (point 94 de la décision) que pour l'approvisionnement en pièces détachées, les principales cibles de JCB étaient INTERPARTS et CENTRAL PARTS » (arrêt, p. 8-10) ;
AUX MOTIFS PROPRES ENSUITE QU' « il apparaît que contrairement à ce que soutiennent les sociétés JCB SERVICE, JCB SALES LTD et JC BAMFORD EXCAVATORS LTD, le Tribunal de commerce d'Orléans a parfaitement interprété les décisions communautaires ; que les trois sociétés appelantes ont par les décisions prises par l'une, par l'exécution par les autres de ces décisions commis des fautes qui ont concouru à la réalisation du préjudice subi par CENTRAL PARTS ; que la cour les condamnera in solidum à réparer celui-ci » (arrêt, p. 10, § 3) ;
ET AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QU' « il convient de bien définir le litige qui lui est soumis ; que la SA CENTRAL PARTS reproche au « Groupe JCB - UK » d'avoir agi, depuis 1987, auprès de ses concessionnaires ou revendeurs agréés afin qu'ils ne réalisent pas de ventes passives à des revendeurs non agréés et localisés hors de leur territoire ; que par ventes passives, il faut entendre des ventes non sollicitées par les concessionnaires ou revendeurs agréés, c'est à dire des ventes sollicitées par l'acheteur ; que la SA CENTRAL PARTS s'estime visée par ces agissements puisque, revendeur non agréé par JCB et localisée en France, elle a sollicité, directement ou indirectement, des concessionnaires ou revendeurs agréés par JCB localisés en Angleterre ou en Irlande, pour des achats de matériels et de pièces détachées, qui lui ont été refusés ; que la distribution sélective, dont se prévaut le « Groupe JCB - UK » pour justifier son attitude, lui a été refusée à la fois par la Commission et le Tribunal communautaire, qui ont rejeté sa « demande d'exemption » qui visait justement à instaurer une distribution sélective ; que cette demande d'exemption avait pourtant été déposée en 1973 ; que, dès lors, le « Groupe JCB - UK » ne peut prétendre à bon droit avoir appliqué un système de distribution sélective, en particulier à l'égard de la SA CENTRAL PARTS ; que, en particulier, la clause 4 du contrat de distribution anglais, que le « Groupe JCB UK » fait valoir pour justifier ses agissements, est spécifiquement étudiée par le Tribunal communautaire dans ses paragraphes 81 et 82 ; que le Tribunal communautaire précise bien que les versions modifiées en 1980 et en 1985 de cette clause, c'est-à-dire celles en vigueur au moment des faits litigieux, ne peuvent pas être considérées comme régulièrement notifiées et, donc, applicables ; que « Groupe JCB - UK » fait une lecture sélective des motivations de l'arrêt du Tribunal communautaire en oubliant que le Tribunal communautaire, dans son dispositif, ne rejette rien de la décision relative à l'infraction relevée par la Commission, applicable en l'espèce, qui doit donc être reprise dans son intégralité, soit : « restrictions des ventes passives des distributeurs établis au Royaume-Uni, en Irlande, en France et en Italie, auprès des revendeurs non agréés, des utilisateurs finaux ou des distributeurs établis en dehors des territoires exclusifs, et notamment dans d'autres États membres » ; qu'il n'est pas contesté que la SA CENTRAL PARTS, revendeur non agréé établi en France, a sollicité des distributeurs agréés par JCB, établis au Royaume-Uni et en Irlande, pour des approvisionnements de produits JCB, donc des ventes passives, et que ces ventes lui ont été refusées ; qu'il est donc patent que la SA CENTRAL PARTS a été victime de l'infraction relevée par le Tribunal communautaire ; que la SA CENTRAL PARTS a réagi aux pratiques du « Groupe JCB - UK » en portant plainte auprès de la Commission ; que, en conséquence, le Tribunal considérera cet élément comme une faute, engageant la responsabilité du « Groupe JCB ¿ UK » à l'égard de la SA CENTRAL PARTS ; que l'argument, tiré par le « Groupe JCB - UK », de l'absence d'interdiction du refus de venté entre professionnels, posée par le droit français, devient ainsi inopérant, car contraire, en l'espèce, aux décisions des instances communautaires » (jugement, p. 8-9) ;
ALORS QUE, premièrement, pour prononcer des condamnations à dommages-intérêts, les juges sont tenus d'identifier un acte personnellement imputable à chacune des parties qu'ils reconnaissent responsables ; qu'en présence d'une pluralité de parties, il appartient aux juges de déterminer la participation respective de chacune d'entre elles aux faits qui leur sont reprochés ; qu'en se bornant en l'espèce, pour retenir l'existence de fautes délictuelles à l'encontre des sociétés JCB SALES et JC BAMFORD EXCAVATORS, à relever que celles-ci, comme toutes les filiales du groupe, participent à la politique commerciale de la société JCB SERVICE et contribuent ainsi à la réalisation des infractions relevées par les juridictions communautaires (arrêt, p. 9, § 3), sans identifier aucun acte précis qui leur fussent personnellement imputables, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
ET ALORS QUE, deuxièmement, et en tout cas, la responsabilité collective des membres d'un groupe ne peut être retenue que pour autant que les juges constatent l'impossibilité d'identifier, du fait du fonctionnement de ce groupe, les auteurs des manquements à l'origine du dommage ; qu'en retenant la responsabilité personnelle des sociétés JCB SALES et JC BAMFORD EXCAVATORS du seul fait de leur participation à la politique commerciale de la société JCB SERVICE, sans relever aucune circonstance qui justifiait de ne pas rechercher les manquements propres à chacune de ces deux sociétés, les juges du fond ont également privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU' il a retenu la responsabilité des sociétés JCB SERVICE, JCB SALES LTD et JC BAMFORD EXCAVATORS LTD et a ordonné avant dire droit une expertise sur l'étendue du préjudice de la société CENTRAL PARTS ;
AUX MOTIFS PROPRES D'ABORD QUE « les appelantes ne peuvent reprocher à la société CENTRAL PARTS d'avoir contourné les refus que lui opposaient les distributeurs, alors que ce comportement a trouvé son origine directe dans les infractions relevées contre ces sociétés ; que le TPICE relève que le comportement répréhensible de CENTRAL PARTS pour lequel cette société a été condamnée est sans incidence sur la réalité des infractions retenues contre JCB SERVICE (point 95) ; que de même, il apparaît que les fautes commises par les sociétés JCB SERVICE, JCB SALES LTD et JC BAMFORD EXCAVATORS LTD ont incité la société CENTRAL PARTS à agir comme elle l'a fait, de sorte que les sociétés JCB sont mal fondées à les invoquer ; que ces fautes sont sans incidence sur l'application de l'article 1382 du Code civil aux faits de l'espèce » (arrêt, p. 10, § 2) ;
AUX MOTIFS PROPRES ENSUITE QUE « les pratiques anticoncurrentielles dénoncées par CENTRAL PARTS et reconnues par les décisions communautaires et qui ont eu pour effet d'empêcher le jeu de la concurrence ont nécessairement causé un trouble commercial à celle-ci ; que CENTRAL PARTS a pu devoir engager des frais pour se fournir en produits JCB en raison des difficultés qu'elle rencontrait et souffrir d'un manque à gagner » (arrêt, p. 12, § 2) ;
AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE « les décisions de tribunaux français dont se prévaut le « Groupe JCB - UK » ont été prononcées antérieurement à la décision de la Commission et à l'arrêt du Tribunal Communautaire ; que, compte tenu de la hiérarchie du droit national par rapport au droit communautaire, ces décisions ne peuvent être retenues par le Tribunal que dans la mesure où elles ne sont pas en contradiction avec les décisions communautaires ; que cette considération en réduit significativement la portée ; que la distinction entre les pratiques condamnées par le Tribunal communautaire et le refus de livrer la SA CENTRAL PARTS en raison de ses pratiques déloyales sanctionnées à deux reprises par un Tribunal français devient inopérante, dans la mesure où les refus de vente sont antérieurs aux deux jugements français ; que la qualification d'acheteur de mauvaise foi, pour justifier les refus de vente à la SA CENTRAL PARTS, doit être reconsidérée à la lumière de l'arrêt du Tribunal communautaire ; que le Tribunal appliquera, à ce sujet, l'adage « nul ne peut invoquer sa propre turpitude », puisque, en effet, les pratiques de la SA CENTRAL PARTS, qualifiées par le « Groupe JCB - UX » de déloyales, n'étaient que la conséquence des refus de vente du « Groupe JCB - UK », jugés fautifs parle Tribunal communautaire » (jugement, p. 9-10) ;
ALORS QUE, premièrement, il incombe aux juges saisis d'une action en responsabilité à l'encontre des sociétés d'un même groupe, après avoir identifié les manquements susceptibles d'être reprochés à chacune de ces entités, de déterminer les préjudices spécifiques correspondant aux fautes respectives ainsi établies ; qu'en se bornant en l'espèce à relever l'existence d'un préjudice globalement supporté par la société CENTRAL PARTS sans rechercher, pour chacune des trois sociétés, quelle était la part de ce préjudice qui pouvait être imputée à leurs manquements respectifs, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
ET ALORS QUE, deuxièmement, faute d'avoir conservé à l'esprit la distinction entre le plaignant qui peut provoquer le déclenchement d'une action devant l'autorité communautaire sans avoir à se soucier du lien de cause à effet et la qualité de victime, laquelle postule, dans le cadre d'une action en réparation, la preuve d'un lien de cause à effet, les juges du fond ont cru pouvoir retenir qu'un trouble commercial s'inférait nécessairement de ce que la Société CENTRAL PARTS avait été plaignante, quand cette qualité ne dispensait en aucune façon les juges du fond, saisis d'une action en réparation, de s'interroger sur le lien de cause à effet entre le dommage invoqué et les faits imputés à chacune des entités ; que de ce point de vue, l'arrêt doit être censuré pour violation de l'article 1382 du code civil.
QUATRIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a retenu la responsabilité des sociétés JCB SERVICE, JCB SALES LTD et JC BAMFORD EXCAVATORS LTD et a ordonné avant dire droit une expertise sur l'étendue du préjudice de la société CENTRAL PARTS ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE « les appelantes ne peuvent reprocher à la société CENTRAL PARTS d'avoir contourné les refus que lui opposaient les distributeurs, alors que ce comportement a trouvé son origine directe dans les infractions relevées contre ces sociétés ; que le TPICE relève que le comportement répréhensible de CENTRAL PARTS pour lequel cette société a été condamnée est sans incidence sur la réalité des infractions retenues contre JCB SERVICE (point 95) ; que de même, il apparaît que les fautes commises par les sociétés JCB SERVICE, JCB SALES LTD et JC BAMFORD EXCAVATORS LTD ont incité la société CENTRAL PARTS à agir comme elle l'a fait, de sorte que les sociétés JCB sont mal fondées à les invoquer ; que ces fautes sont sans incidence sur l'application de l'article 1382 du Code civil aux faits de l'espèce » (arrêt, p. 10, § 2) ;
AUX MOTIFS ÉVENTUELLEMENT ADOPTÉS QUE « les décisions de tribunaux français dont se prévaut le « Groupe JCB - UK » ont été prononcées antérieurement à la décision de la Commission et à l'arrêt du Tribunal communautaire ; que, compte tenu de la hiérarchie du droit national par rapport au droit communautaire, ces décisions ne peuvent être retenues par le Tribunal que dans la mesure où elles ne sont pas en contradiction avec les décisions communautaires ; que cette considération en réduit significativement la portée ; que la distinction entre les pratiques condamnées par le Tribunal communautaire et le refus de livrer la SA CENTRAL PARTS en raison de ses pratiques déloyales sanctionnées à deux reprises par un Tribunal français devient inopérante, dans la mesure où les refus de vente sont antérieurs aux deux jugements français ; que la qualification d'acheteur de mauvaise foi, pour justifier les refus de vente à la SA CENTRAL PARTS, doit être reconsidérée à la lumière de l'arrêt du Tribunal communautaire ; que le Tribunal appliquera, à ce sujet, l'adage « nul ne peut invoquer sa propre turpitude », puisque, en effet, les pratiques de la SA CENTRAL PARTS, qualifiées par le « Groupe JCB - UX » de déloyales, n'étaient que la conséquence des refus de vente du « Groupe JCB - UK », jugés fautifs parle Tribunal communautaire » (jugement, p. 9-10) ;
ALORS QUE, premièrement, si l'auteur du dommage ne peut se prévaloir des manquements de la victime lorsque ceux-ci trouvent leur origine dans le comportement du défendeur, ce n'est que pour autant que les juges vérifient que ces manquements trouvent effectivement leur origine dans le comportement de celui dont la responsabilité est recherchée ; que lorsque les fautes reprochées à la victime sont tout à la fois antérieures et extérieures à celles du défendeur, celui-ci est en droit d'obtenir que sa dette de réparation soit réduite à due concurrence ; qu'en l'espèce, les sociétés JCB faisaient état d'actes déloyaux et de comportements illicites de la société CENTRAL PARTS dont la plupart étaient antérieurs et étrangers aux refus de vente qu'elles ont pu lui opposer (conclusions du 22 novembre 2012, pp. 22-24) ; qu'en repoussant ce moyen pour cette raison que les sociétés JCB ne pouvaient se prévaloir de manquements qui trouvaient leur origine dans leur propre comportement, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
ALORS QUE, deuxièmement, les juges qui sont saisis d'une action en responsabilité sont tenus d'examiner par eux-mêmes les faits qui leur sont soumis pour apprécier l'incidence des manquements de la victime sur la réalisation du dommage et sur la responsabilité de son auteur ; qu'en l'espèce, les sociétés JCB se prévalaient des propres manquements de la société CENTRAL PARTS, lesquels justifiaient l'exonération, même partielle, de leur responsabilité ; qu'en se bornant à renvoyer sur ce point à l'appréciation du Tribunal de première instance des Communautés européennes dans sa décision du 13 janvier 2004 (arrêt, p. 10, § 2), sans vérifier par eux-mêmes si ces manquements de la victime pouvaient être exonératoires de la responsabilité des sociétés JCB, les juges du fond ont encore privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil ;
ET ALORS QUE, troisièmement, et en tout cas, dans sa décision du 13 janvier 2004, le Tribunal de première instance des Communautés européennes s'est borné à observer que les manquements de la société CENTRAL PARTS étaient « sans incidence sur la réalité des fautes commises par les sociétés JCB », sans se prononcer sur le caractère exonératoire de ces manquements une fois établies les fautes de la société JCB SERVICE ; qu'en se fondant sur un tel motif, qui était étranger aux arguments des sociétés JCB, les juges du fond ont une nouvelle fois privé leur décision de base légale au regard de l'article 1382 du code civil.