LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu les articles 960 et 961 du code de procédure civile ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Le Vase de Sèvres (la société) a relevé appel du jugement du juge des loyers commerciaux d'un tribunal de grande instance qui avait fixé le loyer dû en vertu d'un bail consenti par Mme X...;
Attendu que, pour dire n'y avoir lieu à se déclarer irrégulièrement saisie des écritures de la société Le Vase de Sèvres, la cour d'appel retient que Mme X...ne prouve pas que l'irrégularité constituée par le défaut d'indication, dans le mémoire de la société Le vase de Sèvres, de son siège réel, lui cause un grief ;
Qu'en statuant ainsi, après avoir relevé que le mémoire de l'appelante indiquait que son siège social était situé ..., 17000 La Rochelle, et retenu qu'il était établi par l'affirmation de Mme X..., non démentie par la société, que celle-ci avait quitté définitivement ce local le 12 juin 2012, ce dont il se déduisait que le siège social indiqué dans son mémoire n'était pas son siège réel, alors que l'irrecevabilité des conclusions d'appel d'une société qui mentionnent un siège social fictif n'est pas subordonnée à la justification d'un grief causé par cette irrégularité, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 février 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne la société Le Vase de Sèvres aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer 3 000 euros à Mme X...;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre septembre deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
.Moyen produit par Me Rémy-Corlay, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit n'y avoir lieu de prononcer la nullité du mémoire notifié le 23/ 12/ 2013 par la SARL LE VASE DE SEVRES après mesure d'instruction et en conséquence d'AVOIR infirmé le jugement du Juge des loyers commerciaux du Tribunal de grande instance de LA ROCHELLE en date du 5/ 10/ 2010 en ce qu'il a : homologué le rapport de consultation de Monsieur Y...et fixé le nouveau loyer à la somme de 23. 040 € HT par an, soit 1. 920 € HT par mois à compter du 25/ 02/ 2009 et statuant à nouveau, dit et jugé que le loyer du bail renouvelé doit être fixé à la valeur locative du local précédemment donné à bail, appréciée à la date du 1/ 07/ 2005, et d'AVOIR fixé le loyer du bail renouvelé du local commercial sis ... à La Rochelle (17), applicable à compter du 25102/ 2009, à la somme de 15. 600 € (quinze mille six cents euros) par an, hors taxe, hors charges, hors taxe foncière récupérable ;
AUX MOTIFS QUE « 3- L'article R. 145-24 du Code de Commerce, relatif au loyer du bail commercial, invoqué par Marie-Hélène X..., dispose : Les mémoires indiquent l'adresse de l'immeuble donné à bail ainsi que (...) pour les personnes morales, leurs dénomination et siège social, ainsi que le titre et les nom et prénoms de leur représentant légal. 3. 1- Il résulte de l'article R. 145-31 alinéa 1er du même code, également invoqué par Marie-Hélène X..., et applicable en cause d'appel en vertu de l'article R. 145-33 du même code, que, dès le dépôt du rapport d'expertise ou de consultation, l'affaire est reprise et les mémoires faits après la mesure d'instruction doivent être échangés ; que le mémoire de l'appelante notifié le 23/ 12/ 2013 est établi au nom de " la société LE VASE DE SEVRES, société à responsabilité limitée au capital de 122. 264, 11 euros, immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de LA ROCHELLE sous le numéro 407 880 236, dont le siège social est situé ..., 17000 LA ROCHELLE, agissant poursuites et diligences en la personne de son gérant. Monsieur Philippe Z..., domicilié ...
...11560 FLEURY D'AUDE " ; qu'il est établi par l'affirmation de Marie-Hélène X..., non démentie par la SARL le VASE de SEVRES, que cette dernière a quitté définitivement, le 12/ 06/ 2012, le local sis ... à la Rochelle dans lequel elle exploitait un commerce de détail (vente de cadeaux, linge de maison, articles de vaisselle et d'arts de la table) ; qu'il s'en déduit que le siège social indiqué par la SARL le VASE de SEVRES dans son mémoire notifié le 23/ 12/ 2013, dix-huit mois après qu'elle a quitté les lieux, n'est pas son siège réel ; qu'il est inopérant, à cet égard, que la SARL le VASE de SEVRES produise un extrait Kbis du registre du commerce et des sociétés la concernant, édité le 5/ 01/ 2014, faisant mention de la localisation de son siège social au ... à la Rochelle, dès lors que le même extrait énonce, de manière manifestement inexacte, que son établissement principal est situé à cette même adresse ; que l'article 1837 alinéa 2 du Code Civil, sur la portée duquel les parties ont été invitées à présenter leurs observations par note en délibéré, dispose : les tiers peuvent se prévaloir du siège statutaire (de la société), mais celui-ci ne leur est pas opposable par la société si le siège réel est situé en un autre lieu ; que la SARL le VASE de SEVRES soutient vainement que le prononcé de l'irrégularité de sa saisine de la Cour après mesure d'instruction la priverait de la possibilité d'accéder au juge en méconnaissance des dispositions de l'article 6-1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme, alors qu'au regard des textes précités, et suite à l'exception de procédure (nullité du mémoire) soulevée par Marie-Hélène X..., elle avait la faculté de notifier un mémoire faisant mention de son siège réel. 3. 2- En droit, les mémoires notifiés après la saisine du Juge, et a fortiori après mesure judiciaire d'instruction, constituent des actes de procédure ; que le non-respect par la SARL le VASE de SEVRES des prescriptions de l'article R. 145-24 précité du Code de Commerce constitue une cause de nullité, pour vice de forme, de son mémoire notifié le 23/ 12/ 2013 ; que l'article 114 alinéa 2 du Code de Procédure Civile dispose : la nullité ne peut être prononcée qu'à charge pour l'adversaire qui l'invoque de prouver le grief que lui cause l'irrégularité, même lorsqu'il s'agit d'une formalité substantielle ou d'ordre public ; que la SARL le VASE de SEVRES a justifié de l'adresse actuelle de son gérant dans l'Aude, expressément mentionnée en tête de ses dernières conclusions et de son mémoire du 23/ 12/ 2013 ; que dans sa note en délibéré du 10/ 01/ 2014, la SARL le VASE de SEVRES fait valoir, avec pertinence, qu'en application de l'article 654 alinéa 2 du Code de Procédure Civile, la signification à une personne morale est faite à personne lorsque l'acte est délivré à son représentant légal ; qu'en conséquence, dès lors que Marie-Hélène X...est dorénavant en mesure de faire signifier valablement le présent arrêt à la SARL le VASE de SEVRES par remise à son gérant, elle se trouvera en mesure, le cas échéant, d'agir en exécution forcée contre ladite société, en application de l'article 503 alinéa 1er du Code de Procédure Civile ; qu'il résulte des motifs qui précèdent que Marie-Hélène X...ne prouve pas que l'irrégularité constituée par le défaut d'indication, dans le mémoire de la SARL le VASE de SEVRES du 23/ 12/ 2013, de son siège réel, lui cause un grief, de sorte que la nullité de cet acte ne peut être prononcée, et que la saisine de la présente Cour par ladite SARL après mesure d'instruction ne peut être déclarée irrégulière. » »
ALORS QUE 1°) le défaut de mention de l'adresse réelle d'une société dans les conclusions d'appel rend irrecevables ces conclusions ; que la mention ultérieure de l'adresse du gérant de la société qui ne correspond pas au siège social de la société ne peut rectifier le défaut de mention ; qu'en l'espèce il est constant que la Société LE VASE DE SEVRES a indiqué dans ses conclusions d'appel du 23 décembre 2013 un siège social inexact en raison de la résiliation du bail commercial et de la perte consécutive du siège social depuis le 12 juin 2012 ; qu'est mentionné dans son Mémoire d'appel saisissant la Cour d'appel, soit un an et demi après la perte de ce siège social, une adresse sciemment inexacte ; que cette mention erronée n'a pas été rectifiée, la mention de l'adresse actuelle du gérant de la société, qui ne correspond pas au siège social, ne pouvant pallier cette irrégularité ; qu'en retenant que les conclusions étaient recevables et l'appel soutenu, aux motifs inopérants que le gérant avait ultérieurement donné sa propre adresse personnelle, la Cour d'appel a violé ensemble l'article 1837 du Code civil, l'article 114 du Code de procédure civile par fausse application et l'article 961 du même Code ;
ALORS QUE 2°) le défaut de mention de l'adresse réelle d'une société dans les conclusions d'appel rend irrecevables ces conclusions ; que cette irrégularité constitue un vice de fond qui ne suppose pas la démonstration d'un grief ; qu'en l'espèce il est constant que la Société LE VASE DE SEVRES a indiqué dans ses conclusions d'appel du 23 décembre 2013 un siège social inexact en raison de la résiliation du bail commercial et de la perte consécutive du siège social depuis le 12 juin 2012 ; qu'est mentionnée dans son Mémoire d'appel saisissant la Cour d'appel, soit un an et demi après la perte de ce siège social, une adresse sciemment inexacte ; que cette mention erronée n'a pas été rectifiée, la mention de l'adresse actuelle du gérant de la société, qui ne correspond pas au siège social, ne pouvant pallier cette irrégularité ; qu'en retenant que les conclusions étaient recevables et l'appel soutenu, aux motifs inopérants que la bailleresse ne démontrait pas l'existence d'un grief, la Cour d'appel a violé l'article 114 du Code de procédure civile par fausse application et l'article 961 du même Code ;
ALORS en toute hypothèse QUE 3°) la déclaration d'un siège social fictif empêchant toute procédure d'exécution à l'encontre d'une société fait grief ; qu'en l'espèce, la Société LE VASE DE SEVRES est redevable à l'égard de Madame X...de façon définitive de plus de 5. 900 € sans compter les frais irrépétibles (6. 400 €) et les arriérés de loyers demandés (77. 160 €) ; qu'aucune tentative de recouvrement de créance ne peut être effectuée, les avoués qui avaient tenté de recouvrer leurs émoluments n'ayant pu eux-mêmes obtenir satisfaction ; que le seul fait de la difficulté d'exécution est en soi un grief au sens de l'article 114 du Code de procédure civile ; qu'en disant que Madame X...ne démontrait pas le préjudice et le grief corrélativement subi, au motif inopérant que la Société justifiait de l'adresse actuelle de son gérant, la Cour d'appel a violé l'article 114 du Code procédure civile.