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08/07/2015 | FRANCE | N°14-88329

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 08 juillet 2015, 14-88329


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Jean-Marie X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NANCY, en date du 13 novembre 2014, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de vols aggravés, tentative de vol aggravé, recels, en récidive, destructions aggravées et association de malfaiteurs, l'a renvoyé devant le tribunal correctionnel et a ordonné son maintien en détention ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 23 juin 2015 où Ã

©taient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :

- M. Jean-Marie X...,

contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de NANCY, en date du 13 novembre 2014, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de vols aggravés, tentative de vol aggravé, recels, en récidive, destructions aggravées et association de malfaiteurs, l'a renvoyé devant le tribunal correctionnel et a ordonné son maintien en détention ;

La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 23 juin 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Finidori, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;

Greffier de chambre : Mme Hervé ;
Sur le rapport de M. le conseiller FINIDORI, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, avocat en la Cour, et les conclusions de M. le premier avocat général BOCCON-GIBOD ;
Vu le mémoire produit ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure qu'à l'issue d'une information ouverte notamment des chefs de vols en bande organisée, destructions par incendie en bande organisée et association de malfaiteurs, le juge d'instruction a rendu une ordonnance requalifiant les faits en vols aggravés, destructions par incendie et association de malfaiteurs et renvoyant devant le tribunal correctionnel M. X..., lequel a interjeté appel sur le fondement de l'article 186-3 du code de procédure pénale ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 132-71, 450-1 du code pénal, 179, 186, 186-3, 197, 213, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance entreprise ayant dit qu'il existe à l'encontre de M. X... des charges suffisantes d'avoir commis des délits de recels, de vols aggravés, d'actes de destructions volontaires de biens d'autrui et d'association de malfaiteurs ;
"aux motifs que l'accumulation de ces éléments (antécédents judiciaires, éléments du train de vie, découverte d'effets vestimentaires et autres, consultation de sites en ligne ayant trait à des faits de cambriolage et d'arrachage de distributeurs¿) venant se conforter les uns et les autres, auxquels viennent s'ajouter les résultats de l'expertise informatique, l'analyse du train de vie et du patrimoine de M. X... au regard de ses ressources officielles constituées exclusivement de l'allocation adulte handicapé d'à peine 800 euros par mois, constitue des charges suffisantes à l'encontre de M. X... d'avoir commis les infractions visées au dispositif ci-après et pour lesquelles il convient de confirmer son renvoi devant la juridiction de jugement ;
"alors que la chambre de l'instruction n'a pas répondu à un chef péremptoire du mémoire présenté en appel par M. X... qui faisait valoir que son téléphone portable n'a jamais été géo-localisé sur les lieux des faits, et que ses empreintes, papillaires ou génétiques, n'ont pas été retrouvées sur un quelconque objet compromettant" ;
Attendu que le moyen, étranger à l'unique objet de l'appel prévu par l'article 186-3 du code de procédure pénale en ce qu'il revient à remettre en cause les charges réunies contre le prévenu, est irrecevable, seule pouvant être discutée la qualification ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 132-71, 450-1 du code pénal, 179, 186, 186-3, 197, 213, 591 à 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale ;
"en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance entreprise ayant dit qu'il existe à l'encontre de M. X... des charges suffisantes d'avoir commis des délits de recels, de vols aggravés, d'actes de destructions volontaires du bien d'autrui et d'association de malfaiteurs ;
"aux motifs qu'il est de principe qu'un même fait ne peut être retenu comme élément constitutif d'une infraction et circonstance aggravante d'une autre ; qu'ainsi il convient d'analyser les éléments de fait de l'espèce pour apprécier si les chefs de mise en examen de vols en bande organisée et association de malfaiteurs ne recouvrent pas en réalité les mêmes faits déclinés comme circonstance aggravante des vols et destruction et en même temps comme éléments constitutifs de l'association de malfaiteurs ; que la seule constitution d'une équipe de plusieurs malfaiteurs ne peut suffire à qualifier la bande organisée, la pluralité d'auteurs étant suffisamment appréhendée par la circonstance aggravante de réunion, dès lors que cette équipe ne répond pas aux critères supplémentaires de structure existant depuis un certain temps, agissant de concert pour la préparation caractérisée par un ou plusieurs faits matériels d'une ou plusieurs infractions ; qu'en outre, en l'espèce, il résulte du rappel des faits ci-dessus que les équipes ayant commis les faits n'étaient pas composées de la même manière sur chaque fait mais de façon variable avec trois, quatre ou cinq personnes ; qu'à l'issue de l'information, la cinquième personne n'a pas pu être identifiée ; les faits matériels de préparation des infractions de vols aggravés sont constitués en l'espèce, par : - les divers et nombreux repérages préalables réalisés en journée ou de nuit par les auteurs des arrachages des distributeurs à billets et coffres ; que ces repérages portaient tant sur les lieux de l'infraction principale envisagée (distributeur à billets ou coffre de casinos ou de commerce) que sur les véhicules à aller voler pour pouvoir s'en servir au moment des faits (comme véhicule bélier ou comme véhicule de transport et de fuite) ; que ces repérages visaient également des objectifs situés dans des petites villes où il n'y a pas de gendarmerie proche susceptible d'intervenir rapidement en cours de commission des faits ; - le recours à plusieurs box ou garages susceptibles de remiser les véhicules volés à l'abri de tout contrôle policier (garage loué ou appartenant à des membres de la famille des auteurs ou hangar d'une maison abandonnée) ; - l'équipement préalable en outils et matériaux nécessaires à l'arrachage des coffres (élingues, manilles, massette, sangles, pieds de biches, extincteurs à poudre pour effacer les traces...) ;- l'approvisionnement en carburant des véhicules et le dépôt d'une dizaine de jerricans et d'un tuyau d'arrosage destiné au siphonage pour ce faire dans un lieu caché en forêt ; que, dès lors, ces faits préparatoires réalisés avant la commission de l'infraction principale et dans le but de commettre cette infraction principale sont les éléments constitutifs de l'association de malfaiteurs, qu'ils ne peuvent être en sus retenus au titre de la circonstance aggravante des faits de vols ; que dans ces conditions, la qualification correctionnelle retenue par le juge d'instruction pour les divers vols aggravés de deux ou de trois circonstances (réunion et dégradation réunion, dégradation et dissimulation du visage) selon les cas doit être confirmée ; il résulte du rappel des faits que ces actes préparatoires ont été commis sur les départements limitrophes des régions Franche-Comté, Bourgogne, et Rhône-Alpes soit Jura, Doubs, Haute-Saône, Saône et Loire, Ain, Rhône et Isère à compter du 10 août 2012 et jusqu'au 27 février 2013 ; qu'ainsi, il résulte de l'information charges suffisantes contre M. X... d'avoir participé à une association de malfaiteurs dans ces circonstances de lieux et de temps pour la préparation de délits punis d'au moins cinq ans d'emprisonnement (vols aggravés par deux circonstances) et de délits punis d'au moins dix ans d'emprisonnement (vols aggravés par trois circonstances et destructions volontaires du bien d'autrui par une substance explosive ou incendie) ; que, dès lors, le renvoi de M. X... pour être jugé devant le tribunal correctionnel et non pas devant la cour d'assises doit être confirmé ;

"1°) alors que le délit d'association de malfaiteurs et la circonstance aggravantes de bande organisée sont caractérisés par les mêmes éléments, à savoir un groupement formé ou toute entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'une ou de plusieurs infractions ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction ne pouvait sans contradiction décider que la circonstance aggravante de bande organisée ne pouvait pas être retenue pour les faits qui étaient reprochés à Jean-Marie X..., tout en considérant qu'il pouvait être renvoyé du chef d'association de malfaiteurs, qui nécessite la caractérisation des mêmes éléments constitutifs ; qu'en statuant ainsi, la chambre de l'instruction a privé sa décision de toute base légale ;
"2°) alors que la bande organisée est caractérisée par un groupement formé ou toute entente établie en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, d'une ou de plusieurs infractions ; qu'en l'espèce, la chambre de l'instruction a constaté la constitution d'une équipe de plusieurs malfaiteurs ainsi que la réalisation de nombreux faits matériels de préparation à des infractions de vols aggravés et destructions de biens ; que, dès lors, en écartant la circonstance aggravante de bande organisée, au motif inopérant que les vols étaient commis par des équipes qui n'étaient pas composées de la même manière sur chaque fait mais de façon variable avec trois, quatre ou cinq personnes, la chambre de l'instruction a ajouté une condition à la loi et ainsi violé les textes susvisés ;
"3°) alors que l'association de malfaiteurs ne peut être retenue que lorsque les faits préparatoires caractérisent eux-mêmes la circonstance aggravante d'un délit ou d'un crime qui a été commis ; qu'en l'espèce, en retenant la qualification correctionnelle d'association de malfaiteurs en lieu et place de la circonstance aggravante de bande organisée, en relevant que les faits préparatoires réalisés avant la commission de l'infraction principale et dans le but de commettre cette infraction principale sont les éléments constitutifs de l'association de malfaiteurs, la chambre de l'instruction a violé les textes et le principe susvisés" ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance entreprise, l'arrêt énonce que la seule constitution d'une équipe de plusieurs malfaiteurs ne peut suffire à qualifier la bande organisée dès lors que cette équipe ne répond pas au critère supplémentaire de structure existant depuis un certain temps ; que les juges ajoutent qu'en outre les équipes de malfaiteurs n'étaient pas toujours constituées de la même manière mais de façon variable avec trois, quatre ou cinq membres ;
Attendu qu'en l'état de ces seuls motifs, et dès lors que la bande organisée suppose la préméditation des infractions et, à la différence de l'association de malfaiteurs, une organisation structurée entre ses membres, la chambre de l'instruction a justifié sa décision ;
D'où il suit que le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le huit juillet deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 14-88329
Date de la décision : 08/07/2015
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CHAMBRE DE L'INSTRUCTION - Arrêts - Arrêt de renvoi devant le tribunal correctionnel - Circonstance aggravante de bande organisée - Caractérisation - Défaut - Cas

BANDE ORGANISEE - Circonstance aggravante - Eléments constitutifs - Détermination

Il résulte de la décision du Conseil constitutionnel n° 2004-492 DC du 2 mars 2004 que la bande organisée suppose la préméditation des infractions et, à la différence de l'association de malfaiteurs, une organisation structurée entre ses membres. Justifie en conséquence sa décision la chambre de l'instruction qui, pour retenir les qualifications correctionnelles de vols aggravés, destructions par incendie et association de malfaiteurs et renvoyer le prévenu devant le tribunal correctionnel, énonce que la seule constitution d'une équipe de plusieurs malfaiteurs ne peut suffire à qualifier la bande organisée dès lors que cette équipe ne répond pas au critère supplémentaire de structure existant depuis un certain temps et qu'en l'espèce les équipes de malfaiteurs n'étaient pas toujours constituées de la même manière mais de façon variable avec trois, quatre ou cinq membres


Références :

articles 132-71 et 450-1 du code pénal

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Nancy, 13 novembre 2014

Sur la qualification de bande organisée, à rapprocher :Cons. const., 2 mars 2004, décision n° 2004-492 DC, Loi portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 08 jui. 2015, pourvoi n°14-88329, Bull. crim. 2016, n° 834, Crim., n° 29
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle 2016, n° 834, Crim., n° 29

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat général : M. Boccon-Gibod (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Finidori
Avocat(s) : SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.88329
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