LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Vu l'article 3 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... a été victime, sur le territoire français, d'un accident de la circulation, constituant pour lui un accident de trajet, dont Mme Y..., conductrice du véhicule assuré auprès de la Mutuelle assurances des travailleurs mutualistes (« Matmut »), a été déclarée tenue de réparer les conséquences dommageables ; que la société Allianz IARD, assureur-loi de l'employeur monégasque de la victime, a réclamé à la Matmut le remboursement de l'intégralité de ses débours ;
Attendu que, pour dire la Matmut mal fondée à prétendre limiter l'assiette du recours du tiers payeur au montant des chefs de dommages dont les prestations de l'assureur-loi assurent la réparation (frais médicaux, arrêt de travail, IPP) susceptibles de revenir à M. X..., l'arrêt retient que la loi monégasque n° 636 du 11 janvier 1958 consacre le droit pour l'assureur-loi de poursuivre le remboursement intégral des prestations servies à la victime, que d'origine légale, il n'a pour limite que le montant des prestations mises par la loi à la charge de l'employeur ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la loi du lieu de l'accident définit l'assiette du recours de l'organisme d'assurance sociale qui indemnise la victime de cet accident, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 10 avril 2013, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société Allianz IARD aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Allianz IARD et la condamne à payer à la société Matmut la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre juin deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat aux Conseils, pour la société Mutuelle assurance des travailleurs mutualistes
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR dit que le recours subrogatoire de la société Assurances Générales de France (A.G.F.), aux droits de laquelle vient la société Allianz Iard, en tant qu'assureur¿loi de l'hôtel « le Colombus Monaco » à l'encontre de la société Matmut, assureur du véhicule impliqué dans l'accident du travail/trajet dont a été victime à Menton, le 29 janvier 2004, Giacolomo X..., employé de l'hôtel « Le Colombus Monaco » est soumis à la loi monégasque et d'AVOIR en conséquence, condamné la Matmut à payer, en deniers ou quittances, à la société A.G.F., devenue Allianz Iard, la somme de 188.524,79 euros en remboursement de l'intégralité des prestations par elle servies, en tant qu'assureur-loi de l'employeur monégasque, à Giacolomo X... ;
AUX MOTIFS QUE sur le droit à indemnisation de la victime les articles 1er et 3 de la convention de la Haye du 4 mai 1971 sur la loi applicable en matière d'accident de la circulation, entrée en vigueur en France le 3 juin 1975, soumettent la responsabilité extra-contractuelle en découlant à la loi interne sur le territoire duquel il est survenu, soit en l'espèce, la loi française. En vertu des articles 4 et 5 de la loi du 5 juillet 1985 le conducteur victime d'un accident de la circulation est indemnisé des dommages qu'il a subis sauf s'il a commis une faute ayant contribué à la réalisation de son préjudice qui a pour effet de limiter ou d'exclure son indemnisation et qui doit s'apprécier en faisant abstraction du comportement du conducteur de l'autre véhicule impliqué. L'examen du constat amiable d'accident signé des deux parties, seul élément versé aux débats, révèle que la moto avait entrepris le dépassement de l'automobile, s'était très largement déportée à gauche à proximité des places de parking situées tout au long de la voie de circulation et se trouvait à hauteur de la voiture lorsque celle-ci a viré brusquement à gauche pour prendre un stationnement. L'impact du choc sur la voiture, à l'aile et à la portière avant gauche confirme que Mme Y... a effectué sa manoeuvre alors que la moto était déjà en train de la doubler. Aucune faute ne peut dès lors être retenue à l'encontre de M. X... qui effectuait normalement un dépassement autorisé et qui, alors qu'il était en voie de l'achever, a vu sa route coupée par une manoeuvre inopinée de l'automobiliste ;
ET AUX MOTIFS QUE sur la loi applicable l'article 2 de la convention de La Haye du 4 mai 1971 sur la loi applicable en matière d'accident de la circulation exclut expressément de son champ d'application les actions et les recours exercés par ou contre les organismes de sécurité sociale, d'assurance sociale ou autres institutions analogues ; que selon les règles de droit international privé, ces actions et recours sont régis par la loi de l'organisme en cause ; que la convention franco-monégasque du 28 février 1952 sur a sécurité sociale, rendue exécutoire par l'ordonnance monégasque n° 937 du 17 mars 1954, ne fait pas exception à ce principe puisque son article 3 paragraphe 1 englobe la législation monégasque sur la déclaration, la réparation et l'assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles et son article 3 paragraphe 1 soumet les travailleurs français ou monégasques, salariés ou assimilés occupés dans l'un de ces pays, aux législations en vigueur au lieu de leur travail ; qu'ainsi le recours subrogatoire de la Sa Allianz Iard en tant qu'assureur-loi monégasque, et donc organisme social tiers payeur, contre l'assureur du tiers responsable de l'accident est soumis à la loi applicable au lieu d'exécution du contrat de travail de l'assuré social, M. X..., soit la loi monégasque qui détermine l'étendue et les droits de cet organisme ; sur l'étendue du recours que l'article 13 de la loi monégasque n°636 du 11 janvier 1958 tendant à modifier et à codifier la législation sur la déclaration, la réparation et l'assurance des accidents du travail consacre le droit pour l'assureur-loi de poursuivre le remboursement intégral des prestations par lui servies à la victime au titre des indemnités mises par la loi à la charge de l'employeur sur le tiers auteur entièrement responsable de l'accident, sans qu'il y ait lieu de limiter ce remboursement à l'évaluation en droit commun du préjudice de la victime ; qu'en effet, l'alinéa 1 autorise la victime à agir contre l'auteur de l'accident ; que l'alinéa 2 précise que si la responsabilité de celui-ci est entière (comme en l'espèce), l'indemnité allouée dans le cadre du droit commun exonèrera l'employeur des indemnités mises à sa charge et devra comporter, en cas d'incapacité permanente, une rente égale à celle fixée par la présente loi augmenté, s'il y a lieu, des allocations et majorations qu'elle prévoit et, le cas échéant, d'une rente supplémentaire destinée à rendre la réparation égale au préjudice causé ; l'article 3 indique que si la responsabilité du tiers n'est que partielle, l'employeur n'est exonéré que de la fraction des indemnités légales correspondant à la part de responsabilité du tiers et l'indemnité due par ce dernier devra comporter, en cas d'incapacité permanente, la fraction de la ou des rentes légales mises à sa charge eu égard à sa fraction de responsabilité augmentée d'une rente supplémentaire pour réparer le préjudice causé ; l'alinéa prévoit qu'outre les rentes, le tiers reconnu responsable pourra être condamné à payer ou à rembourser à la victime ou à l'employeur les autres indemnités prévues aux articles 4 (indemnités journalières pendant l'incapacité temporaire notamment) et 10 (frais d'hospitalisation, médicaux, pharmaceutiques, de transport...) ; et l'article 5 autorise l'exercice de l'action par l'employeur et son assureur pour lui permettre de faire valoir ses droits propres ; le tiers reconnu responsable est donc rendu directement débiteur de l'employeur ou de son assureur à l'effet de désintéresser celui-ci de ce qu'il a pu débourser à cause de l'accident ; que le recours est ouvert pour l'intégralité des prestations exposées par l'assureur-loi pour le compte de la victime ; que d'origine légale, il n'a pour limite que le montant des prestations mises par la loi à la charge de l'employeur ; que la Sa Matmut est donc mal fondée à prétendre voir limiter l'assiette du recours du tiers payeur au montant des chefs de dommage dont les prestations de l'assureur-loi assurent la réparation (frais médicaux, arrêt de travail, IPP) susceptibles de revenir à M. X... sur la base du rapport d'expertise du docteur Z... désigné par le juge des référés français ;
ALORS QUE si la loi en vertu de laquelle l'organisme d'assurance sociale a indemnisé la victime d'un accident de la circulation définit le principe et l'étendue de la subrogation, en revanche, la loi du lieu de l'accident reste en applicable dans les relations entre le tiers responsable et l'organisme d'assurance sociale, et définit notamment l'assiette du recours de cet organisme et les limitations dans lesquelles il est enfermé ; que la convention franco-monégasque du 28 février 1952 sur la sécurité sociale ne fait pas exception à ce principe ; que si, en droit interne, les articles 31 et 33 de la loi du 5 juillet 1985 disposent que les tiers payeurs ne peuvent exercer leur recours subrogatoire qu'à concurrence de l'indemnité mise à la charge du responsable, l'article 13 de la loi monégasque n°636 du 11 janvier 1958 prévoit que l'assureur-loi a le droit de poursuivre le remboursement intégral des prestations par lui servies à la victime au titre des indemnités mises par la loi à la charge de l'employeur sur le tiers auteur entièrement responsable de l'accident, sans qu'il y ait lieu de limiter ce remboursement à l'évaluation en droit commun du préjudice de la victime ; qu'en décidant de soumettre à la loi monégasque non seulement l'existence et l'étendue du recours subrogatoire de la société Allianz contre le tiers responsable de l'accident subi par son assuré, mais aussi l'étendue et les modalités de la dette du tiers responsable pourtant régies par la loi française prise comme loi du lieu du délit, pour en déduire que la société Matmut était mal fondée à prétendre voir limiter l'assiette du recours du tiers payeur au montant des chefs de dommage dont les prestations de l'assureur-loi assurent la réparation, la cour d'appel a violé l'article 3 du Code civil.