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23/06/2015 | FRANCE | N°14-18679

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 23 juin 2015, 14-18679


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 67 A du code des douanes ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que toute décision prise en application du code des douanes communautaire et de ses dispositions d'application, lorsqu'elle est défavorable ou lorsqu'elle notifie une dette douanière telle que définie à l'article 4, paragraphe 9, du code des douanes communautaire, est précédée de l'envoi ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaître la

décision envisagée, les motifs de celle-ci, la référence des documents et i...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :

Vu l'article 67 A du code des douanes ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que toute décision prise en application du code des douanes communautaire et de ses dispositions d'application, lorsqu'elle est défavorable ou lorsqu'elle notifie une dette douanière telle que définie à l'article 4, paragraphe 9, du code des douanes communautaire, est précédée de l'envoi ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaître la décision envisagée, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaître ses observations dans un délai de trente jours à compter de la notification ou de la remise de ce document ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que de septembre 2006 à décembre 2010, la société Foodex (la société) a importé des algues de pays tiers à l'Union européenne ; qu'après avoir, le 15 juin 2011, adressé à la société un avis de résultat d'enquête, l'administration des douanes lui a notifié, le 28 juillet 2011, un procès-verbal d'infraction puis a émis un avis de mise en recouvrement (AMR) le 6 octobre 2011 ; que l'administration ayant, par décision du 18 mai 2012, rejeté la contestation de l'AMR formée par la société, cette dernière a saisi le tribunal d'instance aux fins d'annulation de l'AMR ;
Attendu que pour rejeter le grief tiré de ce que la notification d'infraction était fondée sur des documents qui n'avaient pas été visés par l'avis de résultat d'enquête du 15 juin 2011 et déclarer régulière la procédure de redressement suivie par l'administration des douanes, l'arrêt retient que, par procès-verbaux des 20 juin et 18 juillet 2011, ont été joints à la procédure des lettres ou documents échangés entre l'administration et la société ou son conseil, dont cette dernière ne pouvait ignorer la teneur, pas plus que de ceux adressés à ses propres transitaires, et que les autres documents joints par un procès-verbal du 14 juin 2011 sont disponibles sur internet ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résultait de ses constatations que l'administration avait fondé la notification d'infraction sur des documents et informations qui n'étaient pas visés dans l'avis de résultat d'enquête par lequel elle lui avait fait connaître la décision envisagée, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile, après avertissement délivré aux parties ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 25 mars 2014, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ;
Dit n'y avoir lieu à renvoi ;
Annule l'avis de mise en recouvrement du 6 octobre 2011 et la procédure douanière subséquente ;
Condamne le directeur national du renseignement et des enquêtes douanières aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et le condamne à payer à la société Foodex la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois juin deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour la société Foodex
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir déclarée régulière la procédure de redressement suivie par l'administration des douanes à l'égard de la société Foodex ;
AUX MOTIFS QUE la société Foodex fait valoir que la procédure imposée par l'article 67 A du code des douanes n'a pas été régulièrement suivie par l'administration car le procès-verbal du 28 juillet 2011 est fondé sur des documents et pièces dont certains non visés par l'avis de résultat du 15 juin 2011, à savoir des procès-verbaux d'enquêtes faites auprès des transitaires et des documents saisis par les procès-verbaux des 14 et 20 juin et 18 juillet 2011, dont le « Comité du codex alimentarius » ; mais que l'avis de résultat d'enquête du 15 juin 2011 par lequel l'administration a indiqué à la société Foodex que les algues en cause relevaient selon elle de la position 2008 99 67, se fonde sur les déclarations d'importation, sur des éléments communiqués par la société Foodex, sur les résultats des analyses de laboratoire et sur des éléments de réponse transmis par les autorités douanières américaines dans le cadre de l'assistance mutuelle internationale ; que la société Foodex ayant le 9 juillet 2011, demandé transmission des documents adressés par les autorités douanières américaines, ceux-ci lui ont été communiqués le 11 juillet ; que les procès-verbaux des 20 juin et 18 juillet 2011 joignent à la procédure des courriers ou documents échangés entre l'administration et la société Foodex ou son conseil ; que la société Foodex ne pouvait ignore la teneur de ces documents pas lus que de ceux rédigés auprès de ses propres transitaires ;qu'enfin, le procès-verbal du 14 juin 2011 qui joint divers documents à la procédure, dont celui du comité du codex alimentarius, mentionne expressément que ces documents « sont disponibles sur internet » ;

ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'en l'espèce, l'administration a bien, préalablement au procès-verbal de notification d'infraction, adressé un avis de résultat d'enquête le 15 juin 2011, qui mentionne la position tarifaire retenue pour les algues commercialisées par la société Foodex ainsi que les différents documents et informations sur lesquels l'administration se fonde ; que les procès-verbaux d'enquête rédigés par l'administration visent pour la plupart des documents saisis soit auprès de la société Foodex, soit auprès de ses transitaires, mais dont la requérante a forcément connaissance. Les éléments de réponse transmis par les autorités douanières américaines lui ont également été communiqués suite à sa demande formulée le 9 juillet 2011. Il est exact également que la société Foodex peut tout à fait se procurer par d'autres biais les textes généraux comme le « Comité du codex alimentarius » visé par le procès-verbal n° 19 du 14 juin 2011 ; que la société Foodex n'évoque au soutien de l'irrégularité qu'elle allègue pas d'éléments plus précis, de sorte qu'il sera retenu que l'administration des douanes a respecté la procédure exigée et régularisé la situation en ce qui concerne la non transmission des informations obtenues auprès des autorités douanières américaines ;
ALORS QUE selon l'article 67 A du code des douanes, toute décision prise en application du code des douanes communautaire et de ses dispositions d'application, lorsqu'elle est défavorable ou lorsqu'elle notifie une dette douanière telle que définie à l'article 4, paragraphe 9, du code des douanes communautaire, est précédée de l'envoi ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaître la décision envisagée, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaître ses observations dans un délai de trente jours à compter de la notification ou de la remise de ce document ; qu'en l'espèce, il ressort des motifs des juges du fond que certains documents sur lesquels l'administration des douanes a fondé le redressement douanier n'ont pas été visés ou mentionnés dans le document du 15 juin 2011 par lequel l'administration des douanes a fait connaître à la société Foodex la décision qu'elle envisageait et l'a invitée à faire connaître ses observations ; qu'en opposant que ces documents étaient de toute façon connus de la société Foodex ou avaient été saisis chez son transitaire, la Cour d'appel qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations a violé le texte susvisé ;

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé le jugement qui a dit que les algues importées par la société Foodex relèvent de la position tarifaire 1212 21 00 de la Nomenclature Douanière, et d'avoir débouté la société Foodex de ses demandes tendant à l'annulation de l'avis de mise en recouvrement du 6 octobre 2011 ainsi que de la décision de rejet de l'administration des douanes du 18 mai 2012 ;
AUX MOTIFS QUE sur les algues en cause, l'administration réplique à juste titre que la durée des opérations de séchage eu égard aux quelques secondes de l'opération de calcination ne saurait conduire à retenir qu'il s'agit d'algues « séchées » relevant de la position 1212 et non d'algues grillées ; qu'en effet, l'administration établit que les algues « yaki nori » et « kizami nori » ne sont obtenues qu'après deux phases de transformation des algues, la première permettant d'obtenir une algue séchée (hoshi nori)et la seconde au cours de laquelle l'algue séchée est grillée pour aboutir au produit transformé le yaki nori, ou kizami nori lorsque coupé en fines lamelles, (roasted seaweed se traduisant par algues rôties), le yaki nori ou algue grillée étant un produit distinct de l'algue simplement séchée car lui conférant des caractéristiques organoleptiques différentes (couleur vert sombre, saveur et odeur d'algue grillée, caractère croustillant) ; que les produits en cause sont des algues grillées ; que sur l'intitulé et la note explicative de la position 1212, les parties s'opposent sur le caractère limitatif ou non de l'énumération des algues qui « peuvent être fraîches, réfrigérées, congelées, séchées ou pulvérisées » ; que le fait invoqué par la société Foodex qu'il ne soit pas ajouté à cette énumération la mention « mais non autrement préparées », mention parfois utilisée dans d'autres positions pour limiter le mode de préparation de marchandises aux modes visés dans le libellé de la position, ne saurait conduire à affirmer que l'énumération de la position 1212 n'est pas limitative ; qu'il résulte, au contraire, du fait que le législateur a expressément précisé un certain nombre de modes de préparation que les modes de préparation non mentionnés sont exclus de la position 1212 ; qu'au surplus, si ainsi que le soulignait les deux parties, le règlement de la Commission du 9 novembre 2012 précisant que les algues grillées relèvent, non du chapitre 12 mais du chapitre 20, n'était pas encore adopté lors des opérations de dédouanement litigieuses et ne saurait trouver application en l'espèce, il n'en demeure pas moins que ce règlement confirme, si besoin était, que les modes de préparation des algues listés dans le chapitre 12 sont limitativement énumérés ; que l'administration était fondée, après avoir constaté que les algues grillées ne relevaient pas de la position 1212, à rechercher le classement desdites marchandises ; que sur le RTC invoqué par la société Foodex, cette société ne conteste pas que ce RTC a été délivré par l'administration française à un opérateur tiers mais soutient que ce RTC sème un doute raisonnable quant à l'application correcte de la nomenclature combinée et crée une discrimination entre opérateurs ; qu'outre le fait que le RTC versé aux débats par la société Foodex n'engage l'administration qu'envers l'opérateur auquel il a été délivré, force est de constater que ce RTC est relatif à des « feuilles d'algues nori (algues porhhyra séchées) comestibles, utilisées pour la préparation des sushis » ;que, relatif à des algues séchées, ce RTC n'est pas relatif à des algues telles celles en cause ici, ainsi qu'il a été dit, sont des algues grillées ; enfin, sur le classement en position 2008 99 67 retenu par l'administration, que cette dernière a classé les algues « yaki nori » et « Kizami nori » à une sous position de la position tarifaire en fonction d'une teneur en sucre déterminée par le laboratoire des douanes ; que, dès lors que les algues étaient susceptibles de relever, selon leur mode de préparation, du chapitre 20 ou du chapitre 12, la société Foodex n'est pas fondée, eu égard aux notes complémentaires 2 et 3 du chapitre 20, à contester la méthode d'analyse des algues suivie par le laboratoire des douanes et sa conclusion selon laquelle les algues analysées doivent être considérées comme « avec addition de sucre » ; que c'est à juste titre que l'administration a considéré que les algues qu'importait la société Foodex relevaient de la position 2008 99 67 supportant des droits de douane et a procédé au redressement litigieux ;

ALORS, D'UNE PART, QUE les algues « yaki nori » et « Kizami nori » qui sont des algues séchées et soumises pendant quelques secondes à une opération de calcination, sont des algues relevant de la position tarifaire 1212 21 00 « - Algues ¿ -destinées à l'alimentation humaine » qui est une sous position de la position tarifaire 1212 intitulée « Caroubes, algues, betteraves à sucre et cannes à sucre, fraîches, réfrigérées, congelées ou séchées, même pulvérisées ; ¿ » ; que cette sous position, si elle précise que les algues peuvent être fraîches, réfrigérées, congelées, séchées ou pulvérisées, n'exclut pas d'autres modes de fabrication ou de préparation ;qu'en décidant néanmoins que les algues en cause relevaient du chapitre 20 et de la position 2008 99 67, la Cour d'appel a violé la Nomenclature Combinée ;

ALORS, D'AUTRE PART, QUE les notes explicatives élaborées, en ce qui concerne la NC, par la Commission européenne, et en ce qui concerne la SH par l'OMD, contribuent de façon importante à l'interprétation de la portée des différentes positions tarifaires ; que les notes explicatives du système harmonisé de la position 1212 A) précisent que « toutes les algues, comestibles ou non, relèvent de la présente position » et que les notes explicatives de la NC renvoient pour les algues - position 1212 aux notes explicatives du SH ; qu'en décidant que les algues en cause relevaient du chapitre 20 et de la position 2008 99 67, la Cour d'appel a violé la Nomenclature Combinée et les notes explicatives susvisées ;
ALORS, ENFIN, QU'un règlement précisant les conditions de classement dans une position ou sous position tarifaire, revêt un caractère constitutif et ne saurait sortir des effets rétroactifs ; que si par un règlement n° 1055/2012 du 9 novembre 2012, la Commission européenne a modifié l'ordonnancement juridique en matière de classement des algues et publié une note complément n° 9 au chapitre 20 de la Nomenclature Combinée qui a valeur légale au terme de laquelle « les algues préparées ou conservées par des procédés non prévus au chapitre 12, telle que la cuisson ¿ relèvent du chapitre 20 en tant que préparation d'autres parties de plantes », il en résulte qu'avant l'entrée en vigueur de ce règlement ¿ et donc pour les importations litigieuses les algues grillées ne relevaient pas du chapitre 20, mais bien du chapitre 12 et de la sous position 1212 21 00 ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la Cour d'appel a méconnu le principe de non rétroactivité des modifications de la Nomenclature Combinée.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 14-18679
Date de la décision : 23/06/2015
Sens de l'arrêt : Cassation sans renvoi
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

DOUANES - Droits - Recouvrement - Avis de mise en recouvrement - Droits de la défense avant sa délivrance - Inobservation - Portée

DOUANES - Droits - Recouvrement - Avis de mise en recouvrement - Notification d'infraction - Formalités - Respect - Défaut - Portée

Selon l'article 67 A du code des douanes, toute décision prise en application du code des douanes communautaire et de ses dispositions d'application, lorsqu'elle est défavorable ou lorsqu'elle notifie une dette douanière telle que définie à l'article 4, paragraphe 9, du code des douanes communautaire, est précédée de l'envoi ou de la remise à la personne concernée d'un document par lequel l'administration des douanes fait connaître la décision envisagée, les motifs de celle-ci, la référence des documents et informations sur lesquels elle sera fondée ainsi que la possibilité dont dispose l'intéressé de faire connaître ses observations dans un délai de trente jours à compter de la notification ou de la remise de ce document. Encourt la cassation l'arrêt qui déclare régulière la procédure de redressement suivie par l'administration des douanes alors qu'il résulte de ses constatations que l'administration avait fondé la notification d'infraction sur des documents et informations qui n'étaient pas visés dans l'avis de résultat d'enquête par lequel elle lui avait fait connaître la décision envisagée


Références :

article 67 A du code des douanes

article 4, paragraphe 9, du code des douanes communautaire

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 25 mars 2014

Cf. :CJCE, arrêt du 18 décembre 2008, Sopropé, C-349/07


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 23 jui. 2015, pourvoi n°14-18679, Bull. civ. 2015, n°833, Com., n°1258
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2015, n°833, Com., n°1258

Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard
Avocat général : M. Debacq
Rapporteur ?: M. Contamine
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 12/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:14.18679
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