LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1351 du code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'ayant exercé diverses fonctions en entreprise, puis dans une administration, M. X... a de nouveau sollicité son admission au barreau de Saint-Denis sous le bénéfice des dispenses de formation prévues pour les juristes d'entreprise justifiant de huit années au moins de pratique professionnelle et pour les fonctionnaires de catégorie A ou les personnes assimilées ayant, en cette qualité, exercé des activités juridiques pendant la même durée ; que le conseil de l'ordre a rejeté la demande par une délibération du 19 octobre 2012 contre laquelle le postulant a formé un recours ;
Attendu que, pour rejeter la demande de M. X..., l'arrêt retient que seules les expériences professionnelles non invoquées dans l'instance antérieure, ou postérieures à celle-ci, peuvent être prises en compte, dès lors qu'il a déjà été jugé par décision irrévocable, d'une part, que l'activité du postulant au sein de ces entreprises ne correspondait pas à l'exercice exclusif de fonctions dans un service spécialisé chargé dans l'entreprise de traiter les problèmes juridiques posés par l'activité de celle-ci, d'autre part, qu'il n'était pas établi que les activités exercées au sein de la collectivité locale avaient un caractère juridique prépondérant, de sorte que la condition d'une expérience professionnelle juridique d'au moins huit années n'était pas remplie ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'autorité de la chose jugée, attachée au seul dispositif de la décision, ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice, la cour d'appel a méconnu le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur l'autre branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 1er mars 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis, autrement composée ;
Condamne l'ordre des avocats au barreau de Saint-Denis aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du seize avril deux mille quinze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Capron, avocat aux Conseils, pour M. X...
Le pourvoi fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé la décision du conseil de l'Ordre des avocats au barreau de Saint-Denis du 19 octobre 2012 ayant refusé l'inscription de M. Jean-Pierre X... au tableau de l'ordre ;
AUX MOTIFS QUE « M. X... sollicite son inscription au tableau de l'Ordre des avocats au Barreau de Saint-Denis à raison des activités exercées et des expériences professionnelles de juriste acquises au sein du Cerfa -de janvier 2002 à octobre 2005-, de la Sidr -de novembre 2006 à avril 2007-, de la mairie de Saint-André -de juin à septembre 2007-, de l'Earl Palmistes Réunion -de février 2006 à décembre 2010- et de la société Invest Oi -de septembre 2007 à décembre 2010-, en considération desquelles il soutient remplir les conditions posées par l'article 98-3° et 4° du décret du 27 novembre 1991 (cf. arrêt attaqué p. 5, § antépénultième) ; qu'en ce qu'elle s'applique aux activités exercées et aux expériences professionnelles de juriste acquises au sein du Cerfa, de la Sidr, de la mairie de Saint-André et de la société Invest Oi, sa demande se heurte à l'autorité de la chose jugée cf. arrêt attaqué p. 5, § pénultième) ; qu'en effet, aux termes de son arrêt en date du 16 mai 2012, la cour de cassation a cassé sans renvoi l'arrêt de la cour d'appel du 1er octobre 2010 qui avait admis son inscription sur le fondement de ces mêmes activités - ainsi que sur le fondement de celles au sein du cabinet 2msp Consultants qui n'est pas reprise - et ce pour la période de janvier 2002 à octobre 2010 (cf. arrêt attaqué p. 5, § dernier) ; que conformément aux articles 627 du code de procédure civil et L. 411-3 du code de l'organisation judiciaire, il résulte de cette cassation sans renvoi qu'il a été définitivement jugé (sur la première branche du moyen de pourvoi) qu'au sein du Cerfa, de la Sidr et de la société Invest Oi - et non pas seulement au sein du cabinet 2msp Consultants -, M. X... a, au titre de certaines de ses activités, conseillé les clients de son employeur et rempli des missions de formation ou d'information de telle sorte qu'au contraire du juriste d'entreprise au sens de l'article 98-3° et 4° du décret du 27 novembre 1991, il n'a donc pas « exclusivement exercé ses fonctions dans un service spécialisé chargé dans l'entreprise de traiter les problèmes juridiques posés par l'activité de celle-ci » (cf. arrêt attaqué p. 6 § 1er) ; qu'il a de même été définitivement jugé (sur la deuxième branche du moyen de pourvoi) qu'il n'était pas établi que les activités de M. X... en qualité d'attaché territorial au sein de la mairie de Saint-André, « avaient un caractère juridique prépondérant » de telle sorte qu'elle ne pouvaient pas être prises en compte au titre d'activités juridiques d'agent contractuel assimilé à la catégorie A de la fonction publique au sens de l'article 98-3° et 4° du décret du 27 novembre 1991 (cf. arrêt attaqué p. 6 § 2) ; que notamment en ce qui concerne ses activités au bénéfice des adhérents du Cerfa et de son emploi au sein de la mairie de Saint-André, M. X... excipe de fondements juridiques et de moyens de preuve nouveaux (cf. arrêt attaqué p. 6 § 3) ; qu'il ne s'appuie que sur des faits intervenus antérieurement à la première instance, il ne démontre aucunement ni même n'allègue qu'il était dans l'impossibilité de les invoquer à l'occasion de cette première instance (cf. arrêt attaqué p. 6 § 4) ; que selon le principe de concentration des moyens, la nouvelle demande qui invoque des fondements juridiques ou des moyens de preuve que le demandeur s'était abstenu de soulever en temps utile se heurte à la chose précédemment jugée relativement à la même contestation, le demandeur devant présenter dès l'instance relative à la première demande l'ensemble des moyens qu'il estime de nature à fonder celle-ci (cf. arrêt attaqué p. 6 § 5) ; qu'il résulte de tout ce qui précède que seules les prétentions de M. X... relatives à ses activités au sein de la société Invest Oi - pour la période d'octobre à décembre 2010 - et au sein de l'Earl Palmistes Réunion - de février 2006 à décembre 2010 -, dont il ne s'était pas précédemment prévalu, ne se heurtent pas à l'autorité de la chose jugée (cf. arrêt attaqué p. 6 § 6) ; que cependant, s'agissant de ces activités, la condition de durée posée par l'article 98-3° et 4° du décret du 27 novembre 1991, lequel requiert une expérience professionnelle cumulée d'au moins 8 ans, n'est pas remplie ; qu'ainsi, en tout état de cause, elles ne peuvent suffire à permettre l'inscription de M. X... au tableau de l'Ordre des avocats au barreau de Saint-Denis (cf. arrêt attaqué p. 6 § pénultième) ; qu'en conséquence, la cour ne peut que confirmer la décision de refus d'inscrire M. X... au tableau de l'Ordre des avocats au barreau de Saint-Denis (cf. arrêt attaqué p. 6 § dernier) » ;
1. ALORS QUE l'autorité de la chose jugée ne peut être opposée lorsque des événements postérieurs sont venus modifier la situation antérieurement reconnue en justice ; qu'en opposant l'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt de la cour de cassation rendu 16 mai 2012 pour la période professionnelle antérieure à octobre 2010, cependant que M. X... se prévalait d'un événement modifiant la situation antérieurement reconnue par l'arrêt du 16 mai 2012 dans la mesure où il avait poursuivi une activité professionnelle lui permettant de justifier d'une durée totale d'activité professionnelle de 8 ans 4 mois et 12 jours à la date du 17 août 2012, date de la nouvelle demande, la cour d'appel a violé l'article 1351 du code civil ;
2. ALORS QUE sont dispensés de la formation théorique et pratique et du certificat d'aptitude à la profession d'avocat les juristes d'entreprise justifiant de huit ans au moins de pratique professionnelle au sein du service juridique d'une ou plusieurs entreprises ; que la condition d'expérience doit être remplie à la date à laquelle le postulant sollicite son admission au barreau ; qu'en se fondant sur la seule durée d'activité qui n'avait pas été examinée lors de la première demande pour juger que la condition d'expérience n'était pas satisfaite, quand il lui appartenait d'examiner la demande d'inscription au barreau de M. X... en prenant en compte l'ensemble des activités professionnelles antérieures à la demande du 17 août 2012, la cour d'appel a violé l'article 98-3 du décret n° 91-1197 du 27 novembre 1991.