LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Sami X..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de LYON, en date du 13 décembre 2013, qui a déclaré irrecevable son appel de l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction dans l'information suivie, sur sa plainte, contre personne non dénommée, des chefs de blessures involontaires et non-assistance à personne en danger ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 17 février 2015 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Talabardon, conseiller rapporteur, M. Straehli, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller référendaire TALABARDON, les observations de la société civile professionnelle LE BRET-DESACHÉ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général CORDIER ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation de l'article préliminaire du code de procédure pénale, des articles 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 1382 du code civil, 2, 3, 591, 593 du code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt infirmatif attaqué a déclaré irrecevable l'appel de la partie civile ;
" aux motifs que l'action civile en réparation d'un dommage causé par un délit appartient seulement aux personnes ayant personnellement souffert du dommage directement causé par l'infraction ; que tel n'est pas le cas de M. X... dont la constitution de partie civile a été reçue à tort alors que seule sa mère Mme Aïcha X..., est susceptible d'avoir personnellement et directement souffert des éventuelles infractions non démontrées par ailleurs, et qu'il n'apporte pas la preuve d'un dommage dont il aurait personnellement souffert, l'intéressé ayant d'ailleurs lors de sa plainte avec constitution de partie civile clairement précisé qu'il intervenait au nom de sa mère, Mme X... ; que selon ses dires recueillis à l'audience sa mère ne faisait l'objet d'aucun régime de protection juridique ; qu'il n'avait pas ainsi qualité pour mettre en mouvement l'action publique en déposant plainte avec constitution de partie civile devant le juge d'instruction ;
"1°) alors que le droit à un procès équitable au sens de l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, ainsi que l'article préliminaire du code de procédure pénale impliquent que la chambre de l'instruction saisie de l'appel d'une ordonnance de non-lieu ne peut relever d'office l'irrecevabilité de la constitution de partie civile sans avoir invité au préalable la partie civile à présenter ses observations sur ce point ; qu'en l'espèce, en relevant d'office le moyen tiré de l'irrecevabilité de la constitution de partie civile au motif qu'elle serait dépourvue de « qualité pour mettre en mouvement l'action publique », sans qu'il résulte de sa décision qu'elle ait mis la partie civile en mesure de présenter ses observations, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés ;
"2°) alors que, et en tout état de cause, il résulte des articles 2 et 3 du code de procédure pénale, que les proches de la victime d'une infraction sont recevables à rapporter la preuve d'un dommage dont ils ont personnellement souffert et qui découle directement des faits, objet de la poursuite ; qu'ainsi les proches de la victime de blessures volontaires ou involontaires, et tout particulièrement leurs enfants subissent, sauf preuve du contraire, un indéniable préjudice moral découlant directement de cette infraction ; qu'en énonçant, pour déclarer irrecevable la constitution de partie civile, que M. X... avait « précisé dans sa plainte qu'il intervenait au nom de sa mère », et que « seule sa mère était susceptible d'avoir personnellement et directement souffert des éventuels infractions » poursuivies, sans rechercher comme il lui appartenait de le faire, si l'intéressé pouvait se prévaloir d'un intérêt éventuel à agir, compte tenu notamment de ce que sa mère, affaiblie par l'âge et victime d'un AVC et n'était pas en mesure physiquement de se défendre elle même, et en déniant dans ces conditions à son fils le droit de déposer plainte et de se prévaloir d'un préjudice personnel découlant directement des faits poursuivis, la chambre de l'instruction a violé les textes susvisés" ;
Vu l'article 6 de la Convention européenne des droits de l'homme et l'article préliminaire du code de procédure pénale, ensemble l'article 87 du même code ;
Attendu que, selon ces textes, la chambre de l'instruction, saisie de l'appel d'une ordonnance de non-lieu, ne peut relever d'office l'irrecevabilité de la constitution de partie civile sans avoir invité au préalable les parties à présenter leurs observations ;
Attendu qu'il ressort de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X..., déclarant agir au nom de sa mère, Mme Aïcha X..., a porté plainte et s'est constitué partie civile contre personne non dénommée des chefs de blessures involontaires et non-assistance à personne en danger ; qu'à l'issue de l'information, le juge d'instruction a rendu une ordonnance de non-lieu, dont la partie civile a relevé appel ;
Attendu que la chambre de l'instruction, statuant sur cet appel, a, d'office et sans avoir invité les parties à présenter leurs observations, relevé l'irrecevabilité de la constitution de partie civile de M. X... et, partant, celle de son appel, au motif que l'intéressé n'avait pas qualité pour mettre en mouvement l'action publique ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la chambre de l'instruction a méconnu les textes susvisés et le principe ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, en date du 13 décembre 2013, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon, autrement composée, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Lyon et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le quatorze avril deux mille quinze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.