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03/02/2015 | FRANCE | N°12-15827

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 03 février 2015, 12-15827


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par l'administration des douanes et droits indirects que sur le pourvoi incident relevé par la société Jardins du Midi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Duran, devenue la société Jardins du Midi, et M. X... ont réalisé à La Réunion, entre le 31 août 2001 et le 24 janvier 2003, des opérations d'importation d'ail en provenance de Chine ou du Myanmar soumises à des droits de douane, à l'octroi de mer et à la TVA, ainsi qu' à un droit

spécifique de 1 200 euros par tonne pour lequel est prévue une exonération en fa...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par l'administration des douanes et droits indirects que sur le pourvoi incident relevé par la société Jardins du Midi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Duran, devenue la société Jardins du Midi, et M. X... ont réalisé à La Réunion, entre le 31 août 2001 et le 24 janvier 2003, des opérations d'importation d'ail en provenance de Chine ou du Myanmar soumises à des droits de douane, à l'octroi de mer et à la TVA, ainsi qu' à un droit spécifique de 1 200 euros par tonne pour lequel est prévue une exonération en faveur des importateurs titulaires du certificat d'importation AGRIM délivré par l'Office national interprofessionnel des fleurs et de l'horticulture ; qu'un contrôle de l'administration des douanes a révélé que la société Duran, qui détenait le certificat d'importation AGRIM, avait permis à M. X... de réaliser des opérations d'importation d'ail sous le couvert de ce certificat incessible et qu'en outre, la valeur des marchandises importées avait été minorée ; que l'administration des douanes, ayant notifié à la société Jardins du Midi un procès-verbal d' infractions de fausses déclarations de valeur, d'importations sans déclaration de marchandises fortement taxées et de détournement de certificats d'importation nominatifs, a liquidé les droits et taxes éludés du fait de ces infractions puis a émis à son encontre, le 14 février 2007, un avis de mise en recouvrement (AMR) ; que l'administration des douanes ayant rejeté sa contestation, la société Jardins du Midi l'a assignée en annulation de l'AMR ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que la société Jardins du Midi fait grief à l'arrêt de n'annuler que partiellement l'AMR et de dire que la créance de l'administration des douanes à son égard s'élève à une certaine somme au titre du droit de douane spécifique alors, selon le moyen, que ne constitue pas une opération fictive le fait d'acheter des marchandises à un importateur, de les dédouaner en utilisant le certificat adéquat, de les revendre ensuite audit importateur pour qu'il procède à leur revente à des tiers et de se partager ensuite avec lui les bénéfices tirés de cette seconde revente ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 399 du code des douanes ;
Mais attendu que l'article 201, paragraphe 3, alinéa 1er, du code des douanes communautaire énonce que le débiteur de la dette douanière est le déclarant, lequel s'entend, aux termes de l'article 4, point 18, du même code, également comme la personne au nom de laquelle la déclaration en douane est faite ; qu'ayant constaté que l'ail avait été déclaré au nom de la société Duran, ce dont il résultait que celle-ci était débitrice, à l'égard de l'administration des douanes, du droit de douane spécifique sur les marchandises déclarées en son nom, la cour d'appel a fait l'exacte application des textes précités ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu les articles 4, point 18, et 201, paragraphe 3, alinéa 1er , du code des douanes communautaire ;
Attendu que le second de ces textes énonce que le débiteur de la dette douanière est le déclarant, lequel s'entend, aux termes du premier texte, également comme la personne au nom de laquelle la déclaration en douane est faite ;
Attendu que pour annuler partiellement l'AMR au titre des autres droits et taxes, l'arrêt retient que la société Duran n'est pas le véritable importateur de l'ail déclaré par M. X... et que c'est à l'importateur des marchandises et donc à M. X... qui, en sa qualité de déclarant, répond par ailleurs du paiement des droits de douane vis-à-vis de l'administration des douanes, qu'incombe en définitive le paiement de ces droits ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors qu' elle avait relevé que l'ail avait été déclaré au nom de la société Duran, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal :
REJETTE le pourvoi incident ;
Et sur le pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il valide la créance de l'administration des douanes et droits indirects au titre des droits spécifiques, l'arrêt rendu le 13 mai 2011, entre les parties, par la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion ; remet, en conséquence, sur les autres points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, autrement composée ;
Condamne la société Jardins du Midi aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, la condamne à payer à l'administration des douanes et droits indirects la somme de 3 000 euros ; rejette les autres demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trois février deux mille quinze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit au pourvoi principal par la SCP Boré et Salve de Bruneton, avocat aux Conseils, pour le directeur général des douanes et droits indirects, le chef de l'agence de poursuites de la Direction nationale du renseignement et des enquêtes douanières et le directeur régional des douanes et droits indirects de La Réunion.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR annulé partiellement l'avis de mise en recouvrement du 14 février 2007, d'AVOIR dit que l'administration des douanes et droits indirects ne peut réclamer à la société JARDINS DU MIDI que le droit de douane spécifique sur les opérations d'importation d'aulx intervenues entre le 31 août 2001 et le 24 janvier 2003 et d'AVOIR dit que la créance de l'administration des douanes sur la société JARDINS DU MIDI ne s'élève qu'à la somme de 480.900 euros au titre des droits de douane spécifiques ;
AUX MOTIFS QU'il résulte du procès-verbal de constat établi par les agents de douanes le 6 décembre 2005 que l'ail déclaré au nom de la société DURAN était en réalité importé par Monsieur Alain X... de Chine ou de Myanmar ; que Monsieur X... le revendait avant dédouanement à la société DURAN pour pouvoir utiliser son certificat « AGRIM » et bénéficier ainsi de l'exonération du droit de douane spécifique ; qu'il le rachetait ensuite à la société DURAN pour le commercialiser, les deux partenaires se partageant ensuite les bénéfices de l'opération ; qu'il apparaît que l'achat avant dédouanement et la revente tout de suite après le dédouanement étaient des opérations fictives et n'avaient pour but que de permettre à Monsieur X... d'utiliser le certificat « AGRIM » délivré à la société DURAN ; que le caractère fictif des achats et des reventes est corroboré par l'incapacité de la société DURAN de produire pour les 8 dernières opérations d'importation, les documents commerciaux relatifs aux achats et reventes ; qu'or, le certificat « AGRIM » est incessible ; qu'il est ainsi établi que la société DURAN en a fait une utilisation frauduleuse en permettant à Monsieur X... de réaliser des importations d'ail masquées par des achats et reventes fictifs ; qu'elle en a été rémunérée par une commission lors de la revente de la marchandise après dédouanement et le partage par moitié des bénéfices après la commercialisation ; qu'il résulte du procès-verbal de constat des douanes du 6 décembre 2005 que ces manoeuvres frauduleuses ont permis d'éluder au total 480.900 euros de droits de douane spécifiques ; qu'il convient d'obliger la société DURAN à rembourser à l'administration des douanes cette somme ; qu'il est constant que Monsieur X..., déclarant en douane mandaté par la société DURAN, a minoré parfois la quantité de marchandises déclarées et toujours leur valeur pour éluder les droits de douane à payer sur ces marchandises ; mais qu'il vient d'être démontré que la société DURAN n'était pas le véritable importateur de l'ail déclaré par Monsieur X... ; que c'est également ce qu'a soutenu l'administration des douanes ; qu'or, c'est à l'importateur des marchandises et donc à Monsieur X... qui, en sa qualité de déclarant, répond par ailleurs du paiement des droits de douane vis-à-vis de l'administration des douanes, qu'incombe en définitive le paiement de ces droits ; qu'il n'est pas démontré que la société DURAN a participé à la minoration des valeurs ou des quantités de marchandises lors de leur déclaration en douane, ni qu'elle en a bénéficié ; qu'au contraire, il ressort du procès-verbal de constat des douanes du 6 décembre 2005 que celle-ci se contentait, suivant l'accord des parties, d'encaisser sa part des bénéfices tels qu'ils étaient calculés par Monsieur X... sans vérifier la sincérité des éléments que ce dernier lui rapportait ; qu'ainsi, il est établi par exemple que le prix d'achat déclaré en douane et celui mentionné sur les factures d'achat qui lui étaient adressées étaient différents ; que, dès lors, c'est à tort que l'administration des douanes et droits indirects réclament à la société DURAN paiement de ces impositions ; qu'il convient en conséquence d'annuler l'avis de mise en recouvrement du 14 février 2007 par lequel sont réclamées à la société LES JARDINS DU MIDI, venant aux droits de la société DURAN la somme de 562.123 euros ; que seule est due à l'administration des douanes et droits indirects la somme de 480.900 euros correspondant au droit de douane spécifique ;
1°) ALORS QUE l'opérateur qui a recours à un mandataire pour procéder aux opérations de dédouanement est solidairement débiteur, avec ce dernier, de la dette douanière à l'égard de l'administration des douanes ; qu'en affirmant que les autorités douanières n'auraient pu réclamer à la société DURAN le paiement des droits et taxes calculés sur la valeur déclarée des marchandises importées, du fait qu'il incomberait en définitive à Monsieur X... seul de payer de tels droits et taxes, quand elle relevait elle-même que ce dernier avait été mandaté par la société DURAN pour déclarer en douane les marchandises, ce dont il résultait que cette société était solidairement tenue, avec lui, du paiement des droits et taxes éludés, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation de l'article 201 du Code des douanes communautaire ;
2°) ALORS QUE l'opérateur, tenu solidairement avec le déclarant qu'il a mandaté au paiement de la dette douanière, bénéficie de la minoration de la valeur ou de la quantité des marchandises dédouanées qui a pour effet de réduire le montant des droits dus ; qu'en affirmant que la société DURAN n'aurait pas bénéficié de la minoration des valeurs ou des quantités des marchandises dédouanées, tout en relevant elle-même qu'elle avait mandaté Monsieur X... aux fins de procéder à ce dédouanement, ce dont il résultait qu'elle avait nécessairement bénéficié, en sa qualité de redevable solidaire de la dette douanière, de la minoration des droits résultant de la diminution de la valeur ou de la quantité des marchandises importées, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 399 du Code des douanes et 201 du Code des douanes communautaire ;
3°) ALORS QUE l'opérateur qui partage avec le déclarant qu'il a mandaté pour procéder aux opérations de dédouanement les bénéfices de la commercialisation des marchandises dédouanées, bénéficie de la minoration de la valeur ou de la quantité des marchandises dédouanées qui a pour effet d'augmenter la marge réalisée lors de la commercialisation des marchandises ; qu'en affirmant que la société DURAN n'aurait pas bénéficié de la minoration des valeurs ou des quantités des marchandises dédouanées, tout en relevant elle-même qu'elle avait partagé par moitié avec Monsieur X... les bénéfices de la commercialisation des marchandises dédouanées, ce dont il résultait qu'elle avait nécessairement bénéficié de la minoration des droits qui avait augmenté la marge réalisée par Monsieur X... lors de la revente des marchandises, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en violation des articles 399 du Code des douanes et 201 du Code des douanes communautaire.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils pour la société Jardins du Midi, M. Y..., ès qualités, et Mme Z..., ès qualités.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué de n'AVOIR annulé que partiellement l'avis de mise en recouvrement du 14 février 2007 et d'AVOIR dit que la créance de l'Administration des Douanes et Droits indirects sur la société JARDINS DU MIDI s'élève à la somme de 480.900 euros au titre des droits de douane spécifiques ;
AUX MOTIFS QU'« il résulte du procès-verbal de constat établi par les agents des douanes le 6 décembre 2005 que l'ail déclaré au nom de la société DURAN était en réalité importé par Alain X... de Chine ou de Myamang ; que X... le revendait avant dédouanement à la société DURAN pour pouvoir utiliser son certificat AGRIM et bénéficier ainsi de l'exonération du droit de douane spécifique ; qu'il le rachetait ensuite à DURAN pour le commercialiser, les deux partenaires se partageant ensuite les bénéfices de l'opération ; qu'il apparaît que l'achat avant dédouanement et la revente tout de suite après le dédouanement étaient des opérations fictives et n'avaient pour but que de permettre à Alain X... d'utiliser le certificat AGRIM délivré à la société DURAN ; que le caractère fictif des achats et des reventes est corroboré par l'incapacité de DURAN de produire pour les 8 dernières opérations d'importation, les documents commerciaux relatifs aux achats et reventes ; qu'or le certificat AGRIM est incessible ; qu'il est ainsi établi que la société DURAN en a fait une utilisation frauduleuse en permettant à Alain X... de réaliser des importations d'ail masquées par des achats et reventes fictifs ; qu'elle en a été rémunérée par une commission lors de la revente de la marchandise après dédouanement et le partage par moitié des bénéfices de la commercialisation ; qu'il résulte du procès-verbal de constat des douanes du 6 décembre 2005 que ces manoeuvres frauduleuses ont permis d'éluder au total 480.900 euros de droits de douane spécifiques ; qu'il convient d'obliger la société DURAN à rembourser à l'Administration des Douanes cette somme » ;
ALORS QUE ne constitue pas une opération fictive le fait d'acheter des marchandises à un importateur, de les dédouaner en utilisant le certificat adéquat, de les revendre ensuite audit importateur pour qu'il procède à leur revente à des tiers et de se partager ensuite avec lui les bénéfices tirés de cette seconde revente ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 399 du code des douanes.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-15827
Date de la décision : 03/02/2015
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

UNION EUROPEENNE - Douanes - Dette douanière - Débiteur - Qualité de déclarant

UNION EUROPEENNE - Douane - Déclarations en douane - Représentation indirecte - Qualité de déclarant - Personne au nom de laquelle la déclaration est faite

Le débiteur de la dette douanière est le déclarant, lequel s'entend, également, comme la personne au nom de laquelle la déclaration en douane est faite


Références :

articles 4, point 18, et 201, § 3, alinéa 1er, du code des douanes communautaire

Décision attaquée : Cour d'appel de Saint-Denis de la Réunion, 13 mai 2011


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 03 fév. 2015, pourvoi n°12-15827, Bull. civ. 2015, IV, n° 16
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2015, IV, n° 16

Composition du Tribunal
Président : Mme Mouillard
Avocat général : M. Mollard
Rapporteur ?: M. Grass
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 24/02/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2015:12.15827
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