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19/11/2014 | FRANCE | N°13-87375

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 19 novembre 2014, 13-87375


Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Philippe X..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 6e section, en date du 3 septembre 2013, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 7 novembre 2012, pourvoi n° 11-88. 733), dans l'information suivie, sur sa plainte, contre personne non dénommée des chefs de faux et usage, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 8 octobre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1

du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Sadot, conseil...

Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Philippe X..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de PARIS, 6e section, en date du 3 septembre 2013, qui, sur renvoi après cassation (Crim., 7 novembre 2012, pourvoi n° 11-88. 733), dans l'information suivie, sur sa plainte, contre personne non dénommée des chefs de faux et usage, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction ;
La COUR, statuant après débats en l'audience publique du 8 octobre 2014 où étaient présents dans la formation prévue à l'article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Guérin, président, M. Sadot, conseiller rapporteur, Mme Nocquet, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : M. Bétron ;
Sur le rapport de M. le conseiller SADOT, les observations de la société civile professionnelle LE BRET-DESACHÉ, avocat en la Cour, et les conclusions de M. l'avocat général SASSOUST ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 8, 203, 591, 593 du code de procédure ;
" pris de ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance entreprise ;
" aux motifs que sur l'existence d'un lien de connexité entre les infractions, une information était ouverte le 14 mars 2003 du chef de faux et usage à l'encontre de personne non dénommée ; que selon les explications de M. X..., sa plainte avec constitution de partie civile du 10 octobre 2001, intervenue dans le contexte des suites de la cession de son office par Me E...à la SCP E...
X...
F..., vise une pièce présentée au titre de l'arrêté de compte lors de la nomination du suppléant de la SCP émanant de M. Y..., consultant-inspecteur comptable et M. Z..., expert-comptable, tous deux agissant à la demande de la chambre des notaires de la Guadeloupe et ayant adressé leur rapport au président de cette chambre, qui est, selon le plaignant, constitutive de faux pour plusieurs raisons explicitées par lui-même lors de deux auditions par le juge d'instruction, les 9 janvier 2002 et 17 octobre 2003, notamment le fait que des charges constitutives d'un passif étranger à la société (particulièrement celui de Me E...) ont été inscrites à son passif ; qu'il dénonçait en outre le fait que MM. Z...et Y...lui auraient imputé des irrégularités comptables en réalité imputables à son prédécesseur ; qu'il ressort également de la procédure qu'en octobre 2002, le plaignant avait saisi le président du tribunal de grande instance de Pointe-à-Pitre d'une demande de désignation d'un expert comptable afin de dresser les arrêtés de situation et comptes annuels des exercices clôturés pendant sa période d'interdiction due à la procédure pénale dont il avait fait l'objet et qu'appelé à connaître des opérations de M. Z..., l'une des conclusions du rapport d'étape établi par l'expert qui avait été désigné. M. A..., était que les comptes arrêtés par M. Danton Z...étaient faux ; qu'après avoir dans un courrier au juge d'instruction d'août 2003 dénoncé de nouveaux faits, d'escroquerie et de complicité, qui auraient été commis antérieurement à la cession de l'office par M. B..., M. X... décidait de faire délivrer une citation directe à celui-ci, principal clerc de l'étude anciennement E...; que la consultation du jugement du 11 décembre 2007 dont M. B..., son épouse, Mme Céline C..., Mme Anicette D...et l'EURL Société guadeloupéenne de promotion ont fait l'objet qui les a condamnés permet de constater qu'il s'agissait de faits finalement qualifiés d'abus de confiance aggravé, contrefaçon ou falsification de chèques pour M. B...et complicité pour les trois autres prévenus, commis de 1997 à 2000 ; que ces dernières infractions et celles dénoncées dans la constitution de partie civile telles qu'explicitées ci-dessus n'ont pas été commises en même temps par plusieurs personnes réunies ; que le faux et usage tel que dénoncé aurait été commis (à le supposer démontré) par des experts, MM. Y...et Z..., dans un rapport rendu à la chambre des notaires de Guadeloupe qui les avait mandatés dans le contexte consécutif à la cession de l'étude, que les abus de confiance aggravés et contrefaçon de chèques ayant fait l'objet du jugement précité apparaissent au contraire avoir été commis à l'intérieur de l'étude par le principal clerc avec la complicité de son épouse, salariée de l'étude et de deux autres prévenus ; que ces infractions n'apparaissent pas non plus avoir été commises par suite d'un concert qui aurait été formé entre les différentes personnes en cause ; que l'existence d'un tel concert ne ressort pas de la procédure ; qu'il n'apparaît pas davantage que certaines de ces infractions, les faux et usage et les abus de confiance aggravé et contrefaçon de chèques, auraient été commises pour se procurer les moyens de commettre les autres, pour en faciliter ou en consommer l'exécution ou que certaines de ces infractions auraient été commises pour permettre d'assurer l'impunité des autres ; qu'il ne ressort pas enfin de la procédure qu'il existait entre les faits de faux et usage tels que dénoncés dans la constitution de partie civile et les abus de confiance aggravés et contrefaçon de chèques de quelconques rapports ; que le fait que le plaignant ait ajouté à sa plainte avec constitution de partie civile en août 2003 les faits précités qu'il reprochait à M. B...n'est pas de nature à rendre connexes les infractions en cause ; qu'il n'existe donc pas de lien de connexité entre ces infractions ; que les actes ayant interrompu la prescription dans la procédure d'abus de confiance aggravé et contrefaçon de chèques ont donc été sans effet sur la prescription de l'action publique engagée sur la plainte avec constitution de partie civile du 10 octobre 2001 ; que sur les effets quant à la prescription du soit-transmis du 6 octobre 2008 du juge d'instruction au président du tribunal de grande instance ; que par soit- transmis du 6 octobre 2008 le juge d'instruction demandait au président du tribunal de Pointe-à-Pitre de l'informer sur l'existence d'une expertise comptable ordonnée sur requête de M. X... du 7 février 2003 et sur le point de savoir si l'ordonnance de remplacement de l'expert M. A...du 28 novembre 2003 avait été frappée d'appel et quelles avaient été les suites ; que, certes intervenu à la suite des réquisitions supplétives du procureur de la République en date du 13 août 2007 et notamment du point de celles-ci demandant au juge d'instruction de rechercher si l'expertise ordonnée par le président du tribunal de grande instance avait été rendue, le soit-transmis du 6 octobre 2008 n'en revêt pas moins le caractère d'une demande de renseignement par soit-transmis entre autorités judiciaires qui ne peut être qualifié d'acte de poursuite ni d'enquête et n'a donc pas d'effet interruptif de prescription contrairement à ce qui est soutenu par le plaignant ; qu'en conséquence, il y a lieu de confirmer l'ordonnance rendue par le juge d'instruction de Pointe-à-Pitre le 28 janvier 2011 qui a dit n'y avoir lieu à suivre au motif que la prescription de l'action publique apparaissait acquise ;
" 1°) alors que les dispositions de l'article 203 du code de procédure pénale relatives à la connexité ne sont pas limitatives et s'étendent aux cas dans lesquels il existe entre les faits des rapports étroits, analogues à ceux que la loi a spécialement prévus ; qu'il en est ainsi en cas d'unité de lieu, de temps, de dessein poursuivi par les auteurs de différentes infractions révélant leur communauté de pensée, ou encore en présence d'une unité de relation de cause à effet ; qu'il résulte de l'arrêt attaqué et de la procédure que M. Z..., mandaté par la chambre des notaires de la Guadeloupe pour établir avec M. Y..., un rapport sur la comptabilité de l'étude de la société civile professionnelle E...-X...-F..., dans un contexte de cession de l'office notarial, était en même temps le comptable du cédant dans ce même contexte et pour la période de temps incluse dans sa mission ; que ce rapport était argué de faux par la partie civile, qui reprochait à M. Z...d'avoir couvert les irrégularités comptables du cédant et de lui en avoir transféré la responsabilité ; que la partie civile ajoutait que le principal clerc de notaire, M. B...était l'organisateur des irrégularités et avait fait l'objet d'une citation directe devant le tribunal correctionnel pour des faits d'escroquerie requalifiés par le tribunal en abus de confiance aggravé et falsification de chèques ; qu'en énonçant qu'il n'existait pas de lien quelconque entre les infractions de faux et usage dénoncés par la partie civile et les délits de falsification de chèque et abus de confiance aggravé reprochés au principal clerc de notaire, sans rechercher s'il n'existait pas entre ces faits des rapports analogues à ceux spécialement prévus par la loi, et invoqués par la partie civile dans ses écritures, eu égard à l'unité de la comptabilité de l'étude notariale, à l'unité de personne du fait que M. Z...était chargé à la fois de la comptabilité de l'étude et d'établir le rapport de la chambre des notaires, à l'unité de temps résultant de ce que le rapport de M. Z...portait sur la comptabilité de l'étude avant et pendant la cession des parts, au moment même des faits reprochés au clerc de notaire, eu égard aussi à l'unité de dessein, tirée du fait que la fausseté du rapport co-établi par M. Z...avait pour objet ou pour effet de disculper les véritables auteurs des irrégularités comptables, et d'en imputer la responsabilité à la partie civile, la chambre de l'instruction a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés ;
" 2°) alors que constituent des actes interruptifs de la prescription de l'action publique tous ceux qui ont pour objet de constater les délits et d'en découvrir ou d'en convaincre les auteurs ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt attaqué que par un réquisitoire supplétif du 13 août 2007, le parquet avait requis un supplément d'information pour entendre M. Z..., dont le rapport était argué de falsification par la partie civile ; qu'en exécution de ce réquisitoire supplétif, le juge d'instruction avait écrit le 8 octobre 2008 au président du tribunal de grande instance pour connaître de l'existence et des suites de l'expertise comptable demandée par la partie civile devant la juridiction civile ; qu'il en résulte que cette demande faite en exécution du réquisitoire supplétif visait à établir la réalité des faits dénoncés par la partie civile et constituait par conséquent un acte de nature à interrompre l'action publique ; qu'en décidant autrement, la chambre de l'instruction n'a pas tiré de ses constatations les conséquences juridiques qui en découlaient et a privé sa décision de base légale au regard des textes susvisés " ;
Vu les articles 7 et 8 du code de procédure pénale ;
Attendu que tout acte d'instruction tendant à la poursuite de l'information interrompt le cours de la prescription de l'action publique ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué qu'à la suite de l'acquisition d'une étude de notaire par la société civile professionnelle E...-X...-F...dont M. X... est le gérant, celui-ci a porté plainte et s'est constitué partie civile le 10 octobre 2001 des chefs de faux et usage à propos d'un rapport établi par M. Z..., mandataire de la chambre des notaires de Guadeloupe, plainte suivie d'un réquisitoire introductif du 14 mars 2003 ;
Attendu qu'au cours de l'instruction, le ministère public a sollicité un complément d'information par réquisitions supplétives du 13 août 2007 auxquelles le juge d'instruction a donné suite par un soit-transmis adressé, le 6 octobre 2008, au président du tribunal pour obtenir de lui les renseignements requis ; que, sur réquisitions définitives du ministère public du 29 décembre 2010, le magistrat instructeur, après avoir relevé qu'entre cette dernière date et le 13 août 2007, n'était intervenu aucun acte interruptif de la prescription, a dit celle-ci acquise et a rendu une ordonnance de non-lieu ;
Attendu que, pour confirmer cette ordonnance, l'arrêt prononce par les motifs repris au moyen ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que la demande, faisant suite aux réquisitions du ministère public, qui a été adressée le 6 octobre 2008 par le juge d'instruction à l'autorité compétente pour fournir les renseignements nécessaires à la poursuite de l'information constitue, au sens de l'article 7 susvisé, un acte d'instruction interruptif de la prescription, la chambre de l'instruction n'a pas justifié sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE et ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, en date du 3 septembre 2013, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Versailles, à ce désignée par délibération spéciale prise en chambre du conseil ;
ORDONNE l'impression du présent arrêt, sa transcription sur les registres du greffe de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris et sa mention en marge ou à la suite de l'arrêt annulé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président le dix-neuf novembre deux mille quatorze ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre ;


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 13-87375
Date de la décision : 19/11/2014
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

PRESCRIPTION - Action publique - Interruption - Acte d'instruction ou de poursuite - Demande de renseignements nécessaires à la poursuite de l'information adressée par un juge d'instruction à un juge des référés

ACTION PUBLIQUE - Extinction - Prescription - Interruption - Acte d'instruction ou de poursuite - Demande de renseignements nécessaires à la poursuite de l'information adressée par un juge d'instruction à un juge des référés

La demande, faisant suite aux réquisitions du ministère public, que le juge d'instruction adresse, par courrier, au juge des référés afin d'obtenir des renseignements nécessaires à la poursuite de l'information constitue un acte d'instruction interruptif de prescription au sens de l'article 7 du code de procédure pénale


Références :

articles 7 et 8 du code de procédure pénale

Décision attaquée : Chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris, 03 septembre 2013

Sur la notion d'acte d'instruction interruptif de prescription, à rapprocher :Crim., 11 février 2009, pourvoi n° 08-81731, Bull. crim. 2009, n° 37 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 19 nov. 2014, pourvoi n°13-87375, Bull. crim. criminel 2014, n° 248
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2014, n° 248

Composition du Tribunal
Président : M. Guérin
Avocat général : M. Sassoust
Rapporteur ?: M. Sadot
Avocat(s) : SCP Le Bret-Desaché

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.87375
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