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16/09/2014 | FRANCE | N°13-10189

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 16 septembre 2014, 13-10189


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 décembre 2012), que a société Novartis AG, titulaire d'un brevet européen EP 443 983 déposé le 12 février 1991 et ayant expiré le 12 février 2011, a obtenu un certificat complémentaire de protection (CCP) pour le valsartan qui venait initialement à expiration le 13 mai 2011 mais qui, ayant fait l'objet d'une extension pédiatrique, a expiré le 13 novembre 2011 ; que se prévalant de ce que le brevet et le CCP seraient contrefaits par le produit générique Valsartan

hydrochlorothiazide Zentiva Lab dans différents dosages, la société ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 11 décembre 2012), que a société Novartis AG, titulaire d'un brevet européen EP 443 983 déposé le 12 février 1991 et ayant expiré le 12 février 2011, a obtenu un certificat complémentaire de protection (CCP) pour le valsartan qui venait initialement à expiration le 13 mai 2011 mais qui, ayant fait l'objet d'une extension pédiatrique, a expiré le 13 novembre 2011 ; que se prévalant de ce que le brevet et le CCP seraient contrefaits par le produit générique Valsartan hydrochlorothiazide Zentiva Lab dans différents dosages, la société Novartis AG et la société Novartis Pharma, elle-même titulaire d'une licence exclusive, (les sociétés Novartis) ont présenté une requête en interdiction provisoire contre les sociétés Sanofi-Aventis France, Sanofi Winthrop industrie et Zentiva (les sociétés Sanofi) et aux fins d'obtenir la communication de différents éléments d'information ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les sociétés Novartis font grief à l'arrêt d'avoir rétracté l'ordonnance sur requête qui avait accueilli leurs demandes, alors, selon le moyen, que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et bserver lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut dès lors soulever d'office un moyen sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'au cas présent, les sociétés Sanofi se bornaient à prétendre, pour justifier l'infirmation de l'ordonnance entreprise, que leur propre médicament générique ne constituerait pas une contrefaçon du certificat complémentaire de protection de Novartis, dès lors que ledit médicament générique était constitué d'une combinaison du Valsartan et d'un autre principe actif, le HCTZ ; qu'en revanche, les sociétés Sanofi ne contestaient pas l'existence de circonstances justifiant qu'il ait été dérogé au contradictoire, par l'ordonnance sur requête du 27 octobre 2011 ; qu'en soulevant expressément « d'office » la question de savoir si les circonstances de l'espèce justifiaient que les mesures requises aient été prises par une ordonnance sur requête rendue non contradictoirement, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ensemble l'article 6-1 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
Mais attendu que, saisie d'une demande de rétractation d'une ordonnance rendue sur requête, la cour d'appel, qui n'a pas relevé d'office un moyen de droit en procédant à la vérification de la régularité de la saisine du premier juge, n'était pas tenue d'inviter les parties à présenter leurs observations ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que les sociétés Novartis font le même grief à l'arrêt alors, selon le moyen :
1°/ qu'aux termes de l'article L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction issue de la loi 2007-1544 du 29 octobre 2007 de transposition de la Directive 2004/48/CE, la juridiction civile compétente peut ordonner toutes mesures urgentes sur requête lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur ; qu'en considérant que l'hypothèse d'un retard de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur pourrait ne pas suffire, en soi, à justifier le recours à la procédure d'ordonnance sur requête, la cour d'appel a violé l'article L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle ;
2°/ que le certificat complémentaire de protection délivré pour le produit compris dans les médicaments ayant donné lieu à une autorisation de mise sur le marché, est conféré au titulaire d'un brevet européen pour compenser, au moins partiellement, la perte d'exploitation subie pendant la période séparant le dépôt de la demande de brevet de l'autorisation de mise sur le marché, cette perte d'exploitation étant jugée de nature à empêcher l'amortissement des investissements effectués dans la recherche ; qu'au cas présent, pour retenir que le défaut d'interdiction provisoire immédiate de la diffusion des médicaments génériques de Sanofi n'aurait pas causé un préjudice irréparable à Novartis, la cour d'appel a retenu que « les investissements effectués pour découvrir le produit princeps ont été compensés par la protection accordée par le brevet et le CCP pendant plusieurs années » ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a ouvertement méconnu la raison d'être du certificat complémentaire de protection, a violé les articles 2, 3, 4 et 5 du Règlement n° 469/2009 du 6 mai 2009 concernant le certificat complémentaire de protection pour les médicaments ;
3°/ que la juridiction civile compétente peut ordonner toutes mesures urgentes sur requête lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur ; que constitue d'abord un préjudice irréparable celui qui n'est pas, ou très difficilement, évaluable en argent ; qu'au cas présent, les sociétés Novartis avaient fait valoir dans leur requête que, si Sanofi était laissé libre de distribuer ses médicaments contrefaisants ne serait-ce que pendant les dix-sept jours séparant la date de présentation de la requête de l'expiration du certificat complémentaire de protection, il s'en suivrait une perte anticipée, pour Novartis, de parts de marché en France, une baisse accélérée du prix de ses médicaments comprenant du Valsartan en France puis, rapidement, dans l'Union européenne, le lancement d'autres médicaments génériques et le développement d'importations parallèles, ainsi qu'un effet de désincitation à l'innovation chez Novartis, sans compter une perturbation du traitement des patients ; qu'en considérant que ce préjudice pourrait « se résoud(re) en dommages-intérêts » , cependant que sa teneur rendait très difficile voire impossible toute évaluation, la cour d'appel a violé les articles 9-4 de la Directive n° 2004/48/CE et L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle ;
4°/ que constitue également un préjudice irréparable celui qui est d'une ampleur ou d'une gravité telle que l'octroi de dommages-intérêts à la victime n'est pas de nature à la remettre dans la situation qui était la sienne avant la survenance de la faute, l'adoption de mesures permettant, en amont, d'empêcher ou de cantonner la réalisation du dommage apparaissant alors comme la meilleure manière de traiter ce type de cas ; qu'au cas présent, les sociétés Novartis avaient fait valoir dans leur requête que, si Sanofi était laissé libre de distribuer ses médicaments contrefaisants ne serait-ce que pendant les dix-sept jours séparant la date de présentation de la requête de l'expiration du certificat complémentaire de protection, il s'en suivrait une perte anticipée, pour Novartis, de parts de marché en France, une baisse accélérée du prix de ses médicaments comprenant du Valsartan en France puis, rapidement, dans l'Union européenne, le lancement d'autres médicaments génériques et le développement d'importations parallèles, ainsi qu'un effet de désincitation à l'innovation chez Novartis, sans compter une perturbation du traitement des patients ; qu'en considérant que le dommage décrit pourrait se résoudre en dommages-intérêts, de sorte qu'il ne serait pas irréparable, la cour d'appel, qui a négligé la circonstance qu'une perte de part de marché, une guerre des prix, des importations parallèles et la désincitation à l'innovation ne sont pas réparables par l'octroi de dommages-intérêts, et sont donc « irréparables », a violé les articles 9-4 de la Directive n° 2004/48/CE et L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Mais attendu qu'après avoir constaté que le CCP venait à expiration dix-sept jours après la présentation de la requête, l'arrêt relève qu'il était encore possible le 27 octobre 2011 d'obtenir, avant le 13 novembre 2011, une décision du juge en respectant le principe de la contradiction, par la voie du référé d'heure à heure ou à une date très rapprochée en se prévalant de l'urgence ; qu'après avoir également relevé qu'il existait un doute sur la commercialisation imminente des produits en cause à la date de présentation de la requête, il retient que le préjudice, qui résulterait de la mise sur le marché des génériques dix-sept jours avant l'expiration du CCP, était susceptible d'être réparé par l'allocation de dommages-intérêts ; que de ces constatations et appréciations souveraines, abstraction faite du motif surabondant critiqué par la première branche, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de suivre les parties dans le détail de leur argumentation, a pu déduire que les circonstances exigeant que les mesures urgentes prévues par l'article L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle soient prises de manière non contradictoire n'étaient pas réunies ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le troisième moyen, pris en ses quatrième et cinquième branches :
Attendu que les sociétés Novartis font encore le même grief à l'arrêt, alors, selon le moyen :
1°/ que le juge peut ordonner des mesures si les éléments de preuve raisonnablement accessibles au demandeur rendent vraisemblable qu'il est porté atteinte à ses droits ; que ladite atteinte peut résulter de la détention, issue d'une importation ou d'une fabrication, de médicaments contrefaisants, indépendamment même de la perspective d'une commercialisation à venir ; qu'au cas présent, les sociétés Novartis produisaient le procès-verbal d'une visite dans les locaux de la société Sanofi Winthrop Industrie faisant apparaître la présence de palettes de médicaments génériques contenant du Valsartan en association avec de l'HCTZ, ce dont les exposantes déduisaient une atteinte à leurs droits ; qu'en relevant que, dès lors qu'elles étaient dépourvues de destinataires, ces palettes étaient de nature à laisser planer un « doute sur la commercialisation imminente de produits en question », sans rechercher si lesdites palettes ne constituaient pas la preuve d'une atteinte vraisemblable aux droits de Novartis, du fait de la détention de médicaments contrefaisants, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle ;
2°/ que le responsable de la société Sanofi Winthrop industrie avait, selon les constatations de l'huissier ayant procédé à la saisie-contrefaçon dans les locaux de cette société, affirmé que « les quantités figurant sur les fiches de stock sont sujettes à variation, en fonction des commandes en cours, ce produit étant déjà commercialisé » ; qu'en affirmant que, aux termes dudit procès-verbal, « il peut exister un doute sur la commercialisation imminente des produits en question », cependant que le responsable de Sanofi Winthrop Industrie faisait lui-même état d'une commercialisation passée effective, la cour d'appel a dénaturé ledit procès-verbal, en violation de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que la cour d'appel ayant retenu que les conditions requises pour procéder de manière non contradictoire n'étaient pas réunies, le moyen est inopérant ;
Et attendu que le troisième moyen, pris en ses première, deuxième, troisième, sixième et septième branches, ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les sociétés Novartis AG et Novartis Pharma aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer aux sociétés Sanofi-Aventis France, Sanofi Winthrop industrie et Zentiva KS la somme globale de 3 000 euros et rejette leur demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du seize septembre deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour la société Novartis Pharma et autre
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé l'ordonnance entreprise, et, statuant à nouveau, d'avoir rétracté l'ordonnance sur requête du 27 octobre 2011, et rejeté toutes les demande des sociétés NOVARTIS AG et NOVARTIS PHARMA ;
Aux motifs que « les sociétés NOVARTIS déclarent agir sur le fondement de l'article L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle ; que l'article L. 615-3, alinéa 1, du code de la propriété intellectuelle dispose que "Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l'encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires qu'il utilise, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d'actes argués de contrefaçon. La juridiction civile compétente peut également ordonner toutes mesures urgentes sur requête lorsque les circonstances exigent que ces mesures ne soient pas prises contradictoirement, notamment lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur. Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu'il est porté atteinte à ses droits ou qu'une telle atteinte est imminente." ; que les sociétés NOVARTIS ont sollicité par voie de requête des mesures d'interdiction et de communication, que l'ordonnance ainsi obtenue a fait l'objet d'une demande de rétractation sur laquelle le juge a statué par l'ordonnance déférée à la cour ; qu'il appartient donc à la présente juridiction de vérifier, même d'office, si le juge avait été régulièrement saisi en recherchant si la requête ou l'ordonnance caractérisent les circonstances justifiant que la mesure sollicitée soit prise exceptionnellement en dehors de tous débats contradictoires, que ces circonstances doivent être appréciées au jour où le juge statue sur requête et ne peuvent résulter de faits postérieurement révélés et notamment des constats de la mesure ordonnée ; que la cour constate que les sociétés NOVARTIS qui ont versé aux débats 68 pièces n'ont pas cru devoir lui communiquer la requête à l'origine de la présente procédure ; que ce défaut de production est préjudiciable à l'examen du dossier ; qu'il caractérise la négligence de celles-ci et leur légèreté à l'égard de la cour ; que toutefois le cour dispose de cette requête qui a été produite par leurs adversaires ; que cette requête comporte 64 pages et un bordereau de pièces visant 54 pièces ; que celle-ci présente les droits invoqués puis les produits argués de contrefaçon et ensuite les atteintes à ces droits ; qu'il est fait mention à la page 48 de ventes de produits contrefaisants dans des pharmacies et d'éléments tangibles établissant la contrefaçon en date des 26 et 27 octobre 2011 dans une pharmacie et une saisie-contrefaçon du 26 octobre 2011 ; que la cour observe à cet égard que, tant dans la requête que dans le bordereau de communication de pièces annexé aux dernières conclusions des sociétés NOVARTIS, celles-ci mentionnent une pièce 54 "preuves de la contrefaçon" ; que cette énonciation non détaillée et ne mentionnant pas de manière précise et exhaustive celles-ci ne respecte pas là encore le principe de loyauté et de transparence dans la fourniture des éléments de preuve ; que la cour ne peut déterminer les éléments de preuves qui ont été présentés au juge des requêtes et ignore si les pièces versées aux débats devant elle sous le même numéro 54 " preuves de la contrefaçon" sont celles fournies à ce juge ; qu'en tout état de cause, la cour relève qu'en cause d'appel, figurent sous le n°54 deux requêtes sollicitant des saisies-contrefaçon dans une pharmacie Gambetta et dans l'unité de production et celle de distribution de SANOFI à Montargis ; qu'elle ne peut que constater que les deux requêtes n'explicitent pas en quoi il y a lieu de déroger au principe de la contradiction et qu'elles ont été suivies de procès-verbaux qui, pour le premier, révèle l'absence de produit commercialisé et l'impossibilité de mise en vente du produit, la spécialité présentée sur le logiciel officine ne comportant ni prix de vente ni prix d'achat et qui, pour le second, mentionne la présence de palettes de produits Valsartan ; que l'huissier ne mentionne pas avoir relevé de destinataire à ces palettes ; qu'il peut donc exister un doute sur la commercialisation imminente des produits en question ; qu'apparaît aussi une copie de feuille de soins émanant d'une pharmacie TASSE pour un produit Valsartan suite à une ordonnance du 26 octobre 2010 d'un médecin Alain X... ; que ces documents ne sont pas accompagnés d'une attestation du pharmacien, du médecin ou du malade et les conditions dans lesquelles ils ont été obtenus sont ignorées ; que ce sont les seules pièces dont dispose la cour et qui seraient celles présentées au titre des preuves de la contrefaçon, au juge des requêtes à l'appui de la demande d'interdiction ; qu'enfin la requête précise page 60 que "ces mesures ne peuvent être utilement ordonnées dans le cadre d'une procédure contradictoire compte tenu de la date d'expiration du CCP n°97C0050 et des jours chômés, une décision contradictoire ne pourrait être rendue avant qu'une partie significative de la durée restante du CCP ne soit écoulée ; qu'il est d'ailleurs permis de penser que l'espoir que des mesures efficaces ne puissent être prises avant l'expiration du CCP est précisément à l'origine du lancement prématuré des produits argués de contrefaçon ; qu'il convient de relever que la présence de produits génériques contrefaisants causerait à NOVARTIS outre le préjudice financier considérable, un dommage vraiment irréparable compte tenu des éléments rappelés plus hauts" ; qu'il convient de souligner que le texte dispose que les circonstances exigent que les mesures ne soient pas prises contradictoirement, notamment lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur ; que la requête a été présentée le 27 octobre 2011 lors que le CCP venait à expiration le 13 novembre 2011 soit 17 jours après ; qu'elle soutient que ce court délai ne permettait pas d'obtenir une décision contradictoire dans ce délai ; que, dans leurs dernières conclusions, les sociétés NOVARTIS ont cru devoir rajouter qu'il y avait des week-ends et des jours fériés et les vacances scolaires ; que toutefois il peut leur être rappelé qu'il existe une procédure urgente de référé d'heure-à-heure permettant de respecter le contradictoire dans un délai raccourci, qu'au surplus, les juridictions sont susceptibles de donner des dates d'audience en urgence notamment le week-end ou les jours fériés et que les vacances scolaires n'ont pas d'effet sur cette possibilité, a fortiori en novembre où il n'existe pas de vacations judiciaires ; que c'est si vrai que leurs adversaires ont, dès la signification de l'ordonnance d'interdiction, saisi le juge d'une demande de référé-rétractation d'heure-à-heure qu'ils ont obtenu ; que le juge a entendu les parties le 29 octobre 2011 et rendu son ordonnance le 31 octobre 2011 soit 14 jours avant l'expiration du délai du CCP ; que la cour constate que le 29 octobre était un samedi et le jour du délibéré était la veille d'un jour férié ; qu'il s'ensuit que ce motif n'est pas sérieux et ne pouvait justifier un recours à une procédure non contradictoire ; que la mention relative à l'espoir de la société adverse qu'elles ne puissent pas recourir à des mesures efficaces avant la survenue de l'expiration du CCP est hypothétique ; que les sociétés NOVARTIS invoquent un préjudice irréparable ; qu'il convient de noter que ce cas est cité comme une hypothèse où il peut y avoir recours à la procédure non contradictoire dès lors que cela figure dans le texte après l'adverbe "notamment" ; que, par ailleurs, cela ne signifie pas que cela soit suffisant ; que le préjudice irréparable invoqué est lié, selon les sociétés NOVARTIS, à leurs investissements massifs dans la conception de produits pharmaceutiques ce que n'a pas à supporter le génériqueur, que la mise en place de génériques entraîne une perte de marchés pour elles, que les génériqueurs bénéficient d'un tremplin illégitime pour leurs ventes s'ils commencent celles-ci avant l'expiration des droits ; que toutefois, les investissements effectués pour découvrir le produit princeps ont été compensés par la protection accordée par le brevet et le CCP pendant plusieurs années ; que l'existence de produits génériques est favorisée par les pouvoirs publics dans un souci de santé publique et que le préjudice résultant de la mise sur le marché de tels produits qui entraîne nécessairement une perte de marchés pour les sociétés NOVARTIS résulte de cette autorisation et de cette mise sur le marché indépendamment même d'une mise en venté prématurée à la supposer avérée pendant 17 jours ; qu'au surplus, ce dommage n'est pas irréparable mais se résout en dommages-intérêts ; que dés lors, les motifs invoqués au soutien de la requête pour autoriser le non-respect du principe de contradiction sont insuffisants ; qu'ils ne pouvaient permettre le recours à une procédure non contradictoire, alors que la contradiction était essentielle, les intérêts en jeu importants et que les mesures sollicitées d'interdiction étant elles-mêmes lourdes de conséquences pour les parties adverses ; qu'il s'ensuit que les motifs présentés pour justifier la dérogation au principe du contradictoire n'étant pas sérieux, l'ordonnance déférée qui devait examiner le motif exposé pour justifier de la dérogation à ce principe ne pouvait que rétracter la requête et qu'elle doit donc être infirmée de ce chef » (arrêt attaqué, p. 3 à 6) ;
Alors que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction ; qu'il ne peut dès lors soulever d'office un moyen sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'au cas présent, les sociétés SANOFI se bornaient à prétendre, pour justifier l'infirmation de l'ordonnance entreprise, que leur propre médicament générique ne constituerait pas une contrefaçon du certificat complémentaire de protection de NOVARTIS, dès lors que ledit médicament générique était constitué d'une combinaison du Valsartan et d'un autre principe actif, le HCTZ ; qu'en revanche, les sociétés SANOFI ne contestaient pas l'existence de circonstances justifiant qu'il ait été dérogé au contradictoire, par l'ordonnance sur requête du 27 octobre 2011 ; qu'en soulevant expressément « d'office » (arrêt p. 3, dernier al.) la question de savoir si les circonstances de l'espèce justifiaient que les mesures requises aient été prises par une ordonnance sur requête rendue non contradictoirement, sans inviter les parties à présenter leurs observations sur ce point, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ensemble l'article 6-1 de la CEDH.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé l'ordonnance entreprise, et, statuant à nouveau, d'avoir rétracté l'ordonnance sur requête du 27 octobre 2011, et rejeté toutes les demande des sociétés NOVARTIS AG et NOVARTIS PHARMA ;
Aux motifs que « les sociétés NOVARTIS déclarent agir sur le fondement de l'article L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle ; que l'article L. 615-3, alinéa 1, du code de la propriété intellectuelle dispose que "Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l'encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires qu'il utilise, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d'actes argués de contrefaçon. La juridiction civile compétente peut également ordonner toutes mesures urgentes sur requête lorsque les circonstances exigent que ces mesures ne soient pas prises contradictoirement, notamment lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur. Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu'il est porté atteinte à ses droits ou qu'une telle atteinte est imminente." ; que les sociétés NOVARTIS ont sollicité par voie de requête des mesures d'interdiction et de communication, que l'ordonnance ainsi obtenue a fait l'objet d'une demande de rétractation sur laquelle le juge a statué par l'ordonnance déférée à la cour ; qu'il appartient donc à la présente juridiction de vérifier, même d'office, si le juge avait été régulièrement saisi en recherchant si la requête ou l'ordonnance caractérisent les circonstances justifiant que la mesure sollicitée soit prise exceptionnellement en dehors de tous débats contradictoires, que ces circonstances doivent être appréciées au jour où le juge statue sur requête et ne peuvent résulter de faits postérieurement révélés et notamment des constats de la mesure ordonnée ; que la cour constate que les sociétés NOVARTIS qui ont versé aux débats 68 pièces n'ont pas cru devoir lui communiquer la requête à l'origine de la présente procédure ; que ce défaut de production est préjudiciable à l'examen du dossier ; qu'il caractérise la négligence de celles-ci et leur légèreté à l'égard de la cour ; que toutefois le cour dispose de cette requête qui a été produite par leurs adversaires ; que cette requête comporte 64 pages et un bordereau de pièces visant 54 pièces ; que celle-ci présente les droits invoqués puis les produits argués de contrefaçon et ensuite les atteintes à ces droits ; qu'il est fait mention à la page 48 de ventes de produits contrefaisants dans des pharmacies et d'éléments tangibles établissant la contrefaçon en date des 26 et 27 octobre 2011 dans une pharmacie et une saisie-contrefaçon du 26 octobre 2011 ; que la cour observe à cet égard que, tant dans la requête que dans le bordereau de communication de pièces annexé aux dernières conclusions des sociétés NOVARTIS, celles-ci mentionnent une pièce 54 "preuves de la contrefaçon" ; que cette énonciation non détaillée et ne mentionnant pas de manière précise et exhaustive celles-ci ne respecte pas là encore le principe de loyauté et de transparence dans la fourniture des éléments de preuve ; que la cour ne peut déterminer les éléments de preuves qui ont été présentés au juge des requêtes et ignore si les pièces versées aux débats devant elle sous le même numéro 54 " preuves de la contrefaçon" sont celles fournies à ce juge ; qu'en tout état de cause, la cour relève qu'en cause d'appel, figurent sous le n°54 deux requêtes sollicitant des saisiescontrefaçon dans une pharmacie Gambetta et dans l'unité de production et celle de distribution de SANOFI à Montargis ; qu'elle ne peut que constater que les deux requêtes n'explicitent pas en quoi il y a lieu de déroger au principe de la contradiction et qu'elles ont été suivies de procès-verbaux qui, pour le premier, révèle l'absence de produit commercialisé et l'impossibilité de mise en vente du produit, la spécialité présentée sur le logiciel officine ne comportant ni prix de vente ni prix d'achat et qui, pour le second, mentionne la présence de palettes de produits Valsartan ; que l'huissier ne mentionne pas avoir relevé de destinataire à ces palettes ; qu'il peut donc exister un doute sur la commercialisation imminente des produits en question ; qu'apparaît aussi une copie de feuille de soins émanant d'une pharmacie TASSE pour un produit Valsartan suite à une ordonnance du 26 octobre 2010 d'un médecin Alain X... ; que ces documents ne sont pas accompagnés d'une attestation du pharmacien, du médecin ou du malade et les conditions dans lesquelles ils ont été obtenus sont ignorées ; que ce sont les seules pièces dont dispose la cour et qui seraient celles présentées au titre des preuves de la contrefaçon, au juge des requêtes à l'appui de la demande d'interdiction ; qu'enfin la requête précise page 60 que "ces mesures ne peuvent être utilement ordonnées dans le cadre d'une procédure contradictoire compte tenu de la date d'expiration du CCP n°97C0050 et des jours chômés, une décision contradictoire ne pourrait être rendue avant qu'une partie significative de la durée restante du CCP ne soit écoulée ; qu'il est d'ailleurs permis de penser que l'espoir que des mesures efficaces ne puissent être prises avant l'expiration du CCP est précisément à l'origine du lancement prématuré des produits argués de contrefaçon ; qu'il convient de relever que la présence de produits génériques contrefaisants causerait à NOVARTIS outre le préjudice financier considérable, un dommage vraiment irréparable compte tenu des éléments rappelés plus hauts" ; qu'il convient de souligner que le texte dispose que les circonstances exigent que les mesures ne soient pas prises contradictoirement, notamment lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur ; que la requête a été présentée le 27 octobre 2011 lors que le CCP venait à expiration le 13 novembre 2011 soit 17 jours après ; qu'elle soutient que ce court délai ne permettait pas d'obtenir une décision contradictoire dans ce délai ; que, dans leurs dernières conclusions, les sociétés NOVARTIS ont cru devoir rajouter qu'il y avait des week-ends et des jours fériés et les vacances scolaires ; que toutefois il peut leur être rappelé qu'il existe une procédure urgente de référé d'heure-à-heure permettant de respecter le contradictoire dans un délai raccourci, qu'au surplus, les juridictions sont susceptibles de donner des dates d'audience en urgence notamment le week-end ou les jours fériés et que les vacances scolaires n'ont pas d'effet sur cette possibilité, a fortiori en novembre où il n'existe pas de vacations judiciaires ; que c'est si vrai que leurs adversaires ont, dès la signification de l'ordonnance d'interdiction, saisi le juge d'une demande de référé-rétractation d'heure-à-heure qu'ils ont obtenu ; que le juge a entendu les parties le 29 octobre 2011 et rendu son ordonnance le 31 octobre 2011 soit 14 jours avant l'expiration du délai du CCP ; que la cour constate que le 29 octobre était un samedi et le jour du délibéré était la veille d'un jour férié ; qu'il s'ensuit que ce motif n'est pas sérieux et ne pouvait justifier un recours à une procédure non contradictoire ; que la mention relative à l'espoir de la société adverse qu'elles ne puissent pas recourir à des mesures efficaces avant la survenue de l'expiration du CCP est hypothétique ; que les sociétés NOVARTIS invoquent un préjudice irréparable ; qu'il convient de noter que ce cas est cité comme une hypothèse où il peut y avoir recours à la procédure non contradictoire dès lors que cela figure dans le texte après l'adverbe "notamment" ; que, par ailleurs, cela ne signifie pas que cela soit suffisant ; que le préjudice irréparable invoqué est lié, selon les sociétés NOVARTIS, à leurs investissements massifs dans la conception de produits pharmaceutiques ce que n'a pas à supporter le génériqueur, que la mise en place de génériques entraîne une perte de marchés pour elles, que les génériqueurs bénéficient d'un tremplin illégitime pour leurs ventes s'ils commencent celles-ci avant l'expiration des droits ; que toutefois, les investissements effectués pour découvrir le produit princeps ont été compensés par la protection accordée par le brevet et le CCP pendant plusieurs années ; que l'existence de produits génériques est favorisée par les pouvoirs publics dans un souci de santé publique et que le préjudice résultant de la mise sur le marché de tels produits qui entraîne nécessairement une perte de marchés pour les sociétés NOVARTIS résulte de cette autorisation et de cette mise sur le marché indépendamment même d'une mise en venté prématurée à la supposer avérée pendant 17 jours ; qu'au surplus, ce dommage n'est pas irréparable mais se résout en dommages-intérêts ; que dés lors, les motifs invoqués au soutien de la requête pour autoriser le non-respect du principe de contradiction sont insuffisants ; qu'ils ne pouvaient permettre le recours à une procédure non contradictoire, alors que la contradiction était essentielle, les intérêts en jeu importants et que les mesures sollicitées d'interdiction étant elles-mêmes lourdes de conséquences pour les parties adverses ; qu'il s'ensuit que les motifs présentés pour justifier la dérogation au principe du contradictoire n'étant pas sérieux, l'ordonnance déférée qui devait examiner le motif exposé pour justifier de la dérogation à ce principe ne pouvait que rétracter la requête et qu'elle doit donc être infirmée de ce chef » (arrêt attaqué, p. 3 à 6) ;
1° Alors que, aux termes de l'article L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle, dans sa rédaction issue de la loi 2007-1544 du 29 octobre 2007 de transposition de la Directive 2004/48/CE, la juridiction civile compétente peut ordonner toutes mesures urgentes sur requête lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur ; qu'en considérant que l'hypothèse d'un retard de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur pourrait ne pas suffire, en soi, à justifier le recours à la procédure d'ordonnance sur requête (arrêt p. 5, al. 7), la cour d'appel a violé l'article L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle ;
2° Alors que le certificat complémentaire de protection délivré pour le produit compris dans les médicaments ayant donné lieu à une autorisation de mise sur le marché, est conféré au titulaire d'un brevet européen pour compenser, au moins partiellement, la perte d'exploitation subie pendant la période séparant le dépôt de la demande de brevet de l'autorisation de mise sur le marché, cette perte d'exploitation étant jugée de nature à empêcher l'amortissement des investissements effectués dans la recherche ; qu'au cas présent, pour retenir que le défaut d'interdiction provisoire immédiate de la diffusion des médicaments génériques de SANOFI n'aurait pas causé un préjudice irréparable à NOVARTIS, la cour d'appel a retenu que « les investissements effectués pour découvrir le produit princeps ont été compensés par la protection accordée par le brevet et le CCP pendant plusieurs années » (arrêt p. 5, dernier al.) ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel, qui a ouvertement méconnu la raison d'être du certificat complémentaire de protection, a violé les articles 2, 3, 4 et 5 du Règlement n° 469/2009 du 6 mai 2009 concernant le certificat complémentaire de protection pour les médicaments ;
3° Alors que la juridiction civile compétente peut ordonner toutes mesures urgentes sur requête lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur ; que constitue d'abord un préjudice irréparable celui qui n'est pas, ou très difficilement, évaluable en argent ; qu'au cas présent, les sociétés NOVARTIS avaient fait valoir dans leur requête (p. 52 à 57) que, si SANOFI était laissé libre de distribuer ses médicaments contrefaisants ne serait-ce que pendant les 17 jours séparant la date de présentation de la requête de l'expiration du certificat complémentaire de protection, il s'en suivrait une perte anticipée, pour NOVARTIS, de parts de marché en France, une baisse accélérée du prix de ses médicaments comprenant du Valsartan en France puis, rapidement, dans l'Union européenne, le lancement d'autres médicaments génériques et le développement d'importations parallèles, ainsi qu'un effet de désincitation à l'innovation chez NOVARTIS, sans compter une perturbation du traitement des patients ; qu'en considérant que ce préjudice pourrait « se résoud(re) en dommages-intérêts » (p. 6, al. 1er), cependant que sa teneur rendait très difficile voire impossible toute évaluation, la cour d'appel a violé les articles 9-4 de la Directive n° 2004/48/CE et L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle ;
4° Alors en tout état de cause que constitue également un préjudice irréparable celui qui est d'une ampleur ou d'une gravité telle que l'octroi de dommages-intérêts à la victime n'est pas de nature à la remettre dans la situation qui était la sienne avant la survenance de la faute, l'adoption de mesures permettant, en amont, d'empêcher ou de cantonner la réalisation du dommage apparaissant alors comme la meilleure manière de traiter ce type de cas ; qu'au cas présent, les sociétés NOVARTIS avaient fait valoir dans leur requête (p. 52 à 57) que, si SANOFI était laissé libre de distribuer ses médicaments contrefaisants ne serait-ce que pendant les 17 jours séparant la date de présentation de la requête de l'expiration du certificat complémentaire de protection, il s'en suivrait une perte anticipée, pour NOVARTIS, de parts de marché en France, une baisse accélérée du prix de ses médicaments comprenant du Valsartan en France puis, rapidement, dans l'Union européenne, le lancement d'autres médicaments génériques et le développement d'importations parallèles, ainsi qu'un effet de désincitation à l'innovation chez NOVARTIS, sans compter une perturbation du traitement des patients ; qu'en considérant que le dommage décrit pourrait se résoudre en dommages-intérêts, de sorte qu'il ne serait pas irréparable, la cour d'appel, qui a négligé la circonstance qu'une perte de part de marché, une guerre des prix, des importations parallèles et la désincitation à l'innovation ne sont pas réparables par l'octroi de dommages-intérêts, et sont donc «irréparables », a violé les articles 9-4 de la Directive n° 2004/48/CE et L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir infirmé l'ordonnance entreprise, et, statuant à nouveau, d'avoir rétracté l'ordonnance sur requête du 27 octobre 2011, et rejeté toutes les demande des sociétés NOVARTIS AG et NOVARTIS PHARMA ;
Aux motifs que « les sociétés NOVARTIS déclarent agir sur le fondement de l'article L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle ; que l'article L. 615-3, alinéa 1, du code de la propriété intellectuelle dispose que "Toute personne ayant qualité pour agir en contrefaçon peut saisir en référé la juridiction civile compétente afin de voir ordonner, au besoin sous astreinte, à l'encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires qu'il utilise, toute mesure destinée à prévenir une atteinte imminente aux droits conférés par le titre ou à empêcher la poursuite d'actes argués de contrefaçon. La juridiction civile compétente peut également ordonner toutes mesures urgentes sur requête lorsque les circonstances exigent que ces mesures ne soient pas prises contradictoirement, notamment lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur. Saisie en référé ou sur requête, la juridiction ne peut ordonner les mesures demandées que si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu'il est porté atteinte à ses droits ou qu'une telle atteinte est imminente." ; que les sociétés NOVARTIS ont sollicité par voie de requête des mesures d'interdiction et de communication, que l'ordonnance ainsi obtenue a fait l'objet d'une demande de rétractation sur laquelle le juge a statué par l'ordonnance déférée à la cour ; qu'il appartient donc à la présente juridiction de vérifier, même d'office, si le juge avait été régulièrement saisi en recherchant si la requête ou l'ordonnance caractérisent les circonstances justifiant que la mesure sollicitée soit prise exceptionnellement en dehors de tous débats contradictoires, que ces circonstances doivent être appréciées au jour où le juge statue sur requête et ne peuvent résulter de faits postérieurement révélés et notamment des constats de la mesure ordonnée ; que la cour constate que les sociétés NOVARTIS qui ont versé aux débats 68 pièces n'ont pas cru devoir lui communiquer la requête à l'origine de la présente procédure ; que ce défaut de production est préjudiciable à l'examen du dossier ; qu'il caractérise la négligence de celles-ci et leur légèreté à l'égard de la cour ; que toutefois le cour dispose de cette requête qui a été produite par leurs adversaires ; que cette requête comporte 64 pages et un bordereau de pièces visant 54 pièces ; que celle-ci présente les droits invoqués puis les produits argués de contrefaçon et ensuite les atteintes à ces droits ; qu'il est fait mention à la page 48 de ventes de produits contrefaisants dans des pharmacies et d'éléments tangibles établissant la contrefaçon en date des 26 et 27 octobre 2011 dans une pharmacie et une saisie-contrefaçon du 26 octobre 2011 ; que la cour observe à cet égard que, tant dans la requête que dans le bordereau de communication de pièces annexé aux dernières conclusions des sociétés NOVARTIS, celles-ci mentionnent une pièce 54 "preuves de la contrefaçon" ; que cette énonciation non détaillée et ne mentionnant pas de manière précise et exhaustive celles-ci ne respecte pas là encore le principe de loyauté et de transparence dans la fourniture des éléments de preuve ; que la cour ne peut déterminer les éléments de preuves qui ont été présentés au juge des requêtes et ignore si les pièces versées aux débats devant elle sous le même numéro 54 " preuves de la contrefaçon" sont celles fournies à ce juge ; qu'en tout état de cause, la cour relève qu'en cause d'appel, figurent sous le n°54 deux requêtes sollicitant des saisies-contrefaçon dans une pharmacie Gambetta et dans l'unité de production et celle de distribution de SANOFI à Montargis ; qu'elle ne peut que constater que les deux requêtes n'explicitent pas en quoi il y a lieu de déroger au principe de la contradiction et qu'elles ont été suivies de procès-verbaux qui, pour le premier, révèle l'absence de produit commercialisé et l'impossibilité de mise en vente du produit, la spécialité présentée sur le logiciel officine ne comportant ni prix de vente ni prix d'achat et qui, pour le second, mentionne la présence de palettes de produits Valsartan ; que l'huissier ne mentionne pas avoir relevé de destinataire à ces palettes ; qu'il peut donc exister un doute sur la commercialisation imminente des produits en question ; qu'apparaît aussi une copie de feuille de soins émanant d'une pharmacie TASSE pour un produit Valsartan suite à une ordonnance du 26 octobre 2010 d'un médecin Alain X... ; que ces documents ne sont pas accompagnés d'une attestation du pharmacien, du médecin ou du malade et les conditions dans lesquelles ils ont été obtenus sont ignorées ; que ce sont les seules pièces dont dispose la cour et qui seraient celles présentées au titre des preuves de la contrefaçon, au juge des requêtes à l'appui de la demande d'interdiction ; qu'enfin la requête précise page 60 que "ces mesures ne peuvent être utilement ordonnées dans le cadre d'une procédure contradictoire compte tenu de la date d'expiration du CCP n°97C0050 et des jours chômés, une décision contradictoire ne pourrait être rendue avant qu'une partie significative de la durée restante du CCP ne soit écoulée ; qu'il est d'ailleurs permis de penser que l'espoir que des mesures efficaces ne puissent être prises avant l'expiration du CCP est précisément à l'origine du lancement prématuré des produits argués de contrefaçon ; qu'il convient de relever que la présence de produits génériques contrefaisants causerait à NOVARTIS outre le préjudice financier considérable, un dommage vraiment irréparable compte tenu des éléments rappelés plus hauts" ; qu'il convient de souligner que le texte dispose que les circonstances exigent que les mesures ne soient pas prises contradictoirement, notamment lorsque tout retard serait de nature à causer un préjudice irréparable au demandeur ; que la requête a été présentée le 27 octobre 2011 lors que le CCP venait à expiration le 13 novembre 2011 soit 17 jours après ; qu'elle soutient que ce court délai ne permettait pas d'obtenir une décision contradictoire dans ce délai ; que, dans leurs dernières conclusions, les sociétés NOVARTIS ont cru devoir rajouter qu'il y avait des week-ends et des jours fériés et les vacances scolaires ; que toutefois il peut leur être rappelé qu'il existe une procédure urgente de référé d'heure-à-heure permettant de respecter le contradictoire dans un délai raccourci, qu'au surplus, les juridictions sont susceptibles de donner des dates d'audience en urgence notamment le week-end ou les jours fériés et que les vacances scolaires n'ont pas d'effet sur cette possibilité, a fortiori en novembre où il n'existe pas de vacations judiciaires ; que c'est si vrai que leurs adversaires ont, dès la signification de l'ordonnance d'interdiction, saisi le juge d'une demande de référé-rétractation d'heure-à-heure qu'ils ont obtenu ; que le juge a entendu les parties le 29 octobre 2011 et rendu son ordonnance le 31 octobre 2011 soit 14 jours avant l'expiration du délai du CCP ; que la cour constate que le 29 octobre était un samedi et le jour du délibéré était la veille d'un jour férié ; qu'il s'ensuit que ce motif n'est pas sérieux et ne pouvait justifier un recours à une procédure non contradictoire ; que la mention relative à l'espoir de la société adverse qu'elles ne puissent pas recourir à des mesures efficaces avant la survenue de l'expiration du CCP est hypothétique ; que les sociétés NOVARTIS invoquent un préjudice irréparable ; qu'il convient de noter que ce cas est cité comme une hypothèse où il peut y avoir recours à la procédure non contradictoire dès lors que cela figure dans le texte après l'adverbe "notamment" ; que, par ailleurs, cela ne signifie pas que cela soit suffisant ; que le préjudice irréparable invoqué est lié, selon les sociétés NOVARTIS, à leurs investissements massifs dans la conception de produits pharmaceutiques ce que n'a pas à supporter le génériqueur, que la mise en place de génériques entraîne une perte de marchés pour elles, que les génériqueurs bénéficient d'un tremplin illégitime pour leurs ventes s'ils commencent celles-ci avant l'expiration des droits ; que toutefois, les investissements effectués pour découvrir le produit princeps ont été compensés par la protection accordée par le brevet et le CCP pendant plusieurs années ; que l'existence de produits génériques est favorisée par les pouvoirs publics dans un souci de santé publique et que le préjudice résultant de la mise sur le marché de tels produits qui entraîne nécessairement une perte de marchés pour les sociétés NOVARTIS résulte de cette autorisation et de cette mise sur le marché indépendamment même d'une mise en venté prématurée à la supposer avérée pendant 17 jours ; qu'au surplus, ce dommage n'est pas irréparable mais se résout en dommages-intérêts ; que dés lors, les motifs invoqués au soutien de la requête pour autoriser le non-respect du principe de contradiction sont insuffisants ; qu'ils ne pouvaient permettre le recours à une procédure non contradictoire, alors que la contradiction était essentielle, les intérêts en jeu importants et que les mesures sollicitées d'interdiction étant elles-mêmes lourdes de conséquences pour les parties adverses ; qu'il s'ensuit que les motifs présentés pour justifier la dérogation au principe du contradictoire n'étant pas sérieux, l'ordonnance déférée qui devait examiner le motif exposé pour justifier de la dérogation à ce principe ne pouvait que rétracter la requête et qu'elle doit donc être infirmée de ce chef » (arrêt attaqué, p. 3 à 6) ;
1° Alors que si les sociétés NOVARTIS avaient saisi, à l'origine, le président du tribunal de grande instance par une requête, il est constant que les sociétés NOVARTIS étaient en position d'intimées devant la cour, et que, ainsi que l'arrêt attaqué le constate lui-même (p. 4, al. 3), les sociétés SANOFI, appelantes, avaient versé d'emblée aux débats d'appel, en pièce n°1, la requête initiale des sociétés NOVARTIS ; que, dans ces conditions, les sociétés NOVARTIS n'avaient fait preuve ni de négligence, ni de légèreté, en ne produisant pas à leur tour cette pièce ; qu'en affirmant au contraire que « ce défaut de production est préjudiciable à l'examen du dossier » et « qu'il caractérise la négligence de celles-ci et leur légèreté à l'égard de la cour » (arrêt p. 4, al. 2), la cour d'appel a violé les articles 15, 132 et 906 du code de procédure civile ;
2° Alors que le juge qui se heurte à une difficulté d'identification d'une pièce versée aux débats, difficulté qui n'a pas été relevée par les parties, est tenu de rouvrir les débats et d'appeler les parties à formuler des observations pour lui permettre de réaliser l'identification nécessaire ; qu'au cas présent, la cour d'appel a stigmatisé la manière dont était libellée la pièce n° 54 « preuves de la contrefaçon », en énonçant que sa dénomination ne serait pas suffisamment détaillée pour lui permettre de vérifier « si les pièces versées aux débats devant elle sous le même numéro « preuves de la contrefaçon » sont celles fournies » à l'appui de la requête (arrêt p. 4, al. 6, et dans le même sens : p. 4, avant-dernier al.) ; qu'en statuant ainsi, sans appeler les parties à apporter les explications susceptibles de dissiper cette difficulté, cependant que les sociétés SANOFI n'avaient pas critiqué cette pièce, et qu'elles avaient elles-mêmes versé aux débats, sous les numéros 3, 4 et 5, les principaux documents couverts par ce numéro 54, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
3° Alors que l'ordonnance sur requête autorisant la saisie-contrefaçon n'est pas subordonnée à l'établissement de circonstances justifiant qu'il soit dérogé au principe de la contradiction ; qu'au cas présent, la cour d'appel a relevé, à propos des saisies-contrefaçon ayant permis d'apporter la preuve de la contrefaçon au président du tribunal de grande instance de Paris, qu'« elle ne peut que constater que les deux requêtes n'explicitent pas en quoi il y a lieu de déroger au principe de la contradiction » (arrêt p. 4, al. 7) ; qu'en statuant ainsi, cependant que les requêtes aux fins de saisie-contrefaçon n'avaient pas à expliquer en quoi il y avait lieu de déroger au contradictoire, la cour d'appel a violé l'article L.615-5 du code de la propriété intellectuelle ;
4° Alors que le juge peut ordonner des mesures si les éléments de preuve raisonnablement accessibles au demandeur rendent vraisemblable qu'il est porté atteinte à ses droits ; que ladite atteinte peut résulter de la détention, issue d'une importation ou d'une fabrication, de médicaments contrefaisants, indépendamment même de la perspective d'une commercialisation à venir ; qu'au cas présent, les sociétés NOVARTIS produisaient le procès-verbal d'une visite dans les locaux de SANOFI WINTHROP INDUSTRIE faisant apparaître la présence de palettes de médicaments génériques contenant du Valsartan en association avec de l'HCTZ, ce dont les exposantes déduisaient une atteinte à leurs droits (requête p. 49, al.1er, § i) ; qu'en relevant que, dès lors qu'elles étaient dépourvues de destinataires, ces palettes étaient de nature à laisser planer un « doute sur la commercialisation imminente de produits en question », sans rechercher si lesdites palettes ne constituaient pas la preuve d'une atteinte vraisemblable aux droits de NOVARTIS, du fait de la détention de médicaments contrefaisants, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle ;
5° Alors en tout état de cause, sur ce dernier point, que le responsable de SANOFI WINTHROP INDUSTRIE avait, selon les constatations de l'huissier ayant procédé à la saisie-contrefaçon dans les locaux de cette société, affirmé que « les quantités figurant sur les fiches de stock sont sujettes à variation, en fonction des commandes en cours, ce produit étant déjà commercialisé » (production, p. 3) ; qu'en affirmant que, aux termes dudit procès-verbal, « il peut exister un doute sur la commercialisation imminente des produits en question » (arrêt p. 4, al. 7), cependant que le responsable de SANOFI WINTHROP INDUSTRIE faisait lui-même état d'une commercialisation passée effective, la cour d'appel a dénaturé ledit procès-verbal, en violation de l'article 1134 du code civil ;
6° Alors que le juge doit, en toutes circonstances, observer le principe de la contradiction, et inviter les parties à formuler des observations, y compris sur les explications qu'il retient ; qu'au cas présent, aucune des remarques formulées en incise par la cour d'appel en page 4 de sa décision, relatives à la requête et à ses pièces annexées, n'avait été effectuée par les parties dans leurs conclusions d'appel, de sorte qu'en les effectuant, sans appeler les parties à apporter des explications de ce chef, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
7° Alors que toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal impartial ; qu'au cas présent, la cour d'appel a consacré une page de sa décision à des observations critiques sur la manière dont les sociétés NOVARTIS avaient présenté leur requête initiale, en stigmatisant tout particulièrement, de manière infondée, « la négligence de celles-ci et leur légèreté à l'égard de la cour », ou encore leur manque de « transparence dans la fourniture des éléments de preuve » à la cour, mais sans jamais en tirer la moindre conséquence juridique quant à une éventuelle irrégularité dont aurait été affectée la requête initiale ; qu'en énonçant ainsi des motifs négatifs à l'encontre des sociétés NOVARTIS, sans autre dessein que de critiquer gratuitement le comportement procédural qu'elle leur prêtait, la cour d'appel a manqué à l'exigence d'impartialité, violant ainsi l'article 6-1 de la CEDH.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-10189
Date de la décision : 16/09/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

PROCEDURE CIVILE - Droits de la défense - Moyen - Moyen soulevé d'office - Exclusion - Cas - Ordonnance sur requête - Vérification de la régularité de la saisine du premier juge

PROCEDURE CIVILE - Ordonnance sur requête - Rétractation - Juge de la rétractation - Office - Régularité de la demande - Vérification - Observations préalables des parties (non)

Une cour d'appel, saisie d'une demande de rétractation d'une ordonnance rendue sur requête, qui procède à la vérification de la régularité de la saisine du premier juge ne relève pas d'office un moyen de droit et n'est donc pas tenue d'inviter les parties à présenter leurs observations. Une cour d'appel qui, après avoir constaté que le certificat complémentaire de protection (CCP) expirait dix-sept jours après la présentation de la requête fondée sur les dispositions de l'article L. 615-3 du code de la propriété intellectuelle, relève qu'il était encore possible d'obtenir une décision du juge en respectant le principe de la contradiction, par la voie du référé d'heure à heure ou à une date très rapprochée en se prévalant de l'urgence, et qui, après avoir également relevé qu'il existait un doute sur la commercialisation imminente des produits en cause à la date de présentation de la requête, retient que le préjudice qui résulterait de la mise sur le marché des génériques dix-sept jours avant l'expiration du CCP était susceptible d'être réparé par l'allocation de dommages-intérêts a pu déduire que les circonstances exigeant que les mesures urgentes soient prises de manière non contradictoire n'étaient pas réunies


Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 11 décembre 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 16 sep. 2014, pourvoi n°13-10189, Bull. civ. 2014, IV, n° 126
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, IV, n° 126

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : M. Debacq
Rapporteur ?: Mme Darbois
Avocat(s) : Me Bertrand, SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.10189
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