LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 21 novembre 2012), que Mme Paule X..., aux droits de laquelle se trouve M. Didier X..., a consenti à M. Francis Y... un bail rural verbal sur trois parcelles ; que ce dernier a fait délivrer congé à M. Y... et au GAEC Vert de mai, à la disposition duquel deux des parcelles avaient été mises ; que M. Francis Y..., le GAEC Vert de mai et M. Benjamin Y... (les consorts Y...) ont contesté le congé ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de déclarer nul le congé et de dire que le bail se poursuivra à compter du 1er janvier 2012 pour neuf ans, alors, selon le moyen :
1°/ qu'en se déterminant comme elle l'a fait par une motivation alternative, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
2°/ que lorsque les échanges irréguliers sont intervenus antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 13 juillet 2006, la résiliation du bail ou le refus de renouvellement sont encourus sans qu'il y ait lieu de rechercher l'existence d'un préjudice du bailleur ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, sans avoir précisé ni recherché si les échanges incriminés n'étaient pas antérieurs à l'entrée en vigueur de cette ordonnance, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 411-31, L. 411-39 et L. 411-53 du code rural et de la pêche maritime dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance ci-dessus visée ;
3°/ qu'en toute hypothèse, M. X... avait soutenu que les échanges incriminés avaient été effectués par M. Francis Y..., auquel le bail avait été consenti à compter du 1er janvier 1994 ; que dès lors, en retenant, pour statuer comme elle l'a fait, que le bailleur n'avait pas agi à l'encontre de son preneur, cependant qu'il avait refusé le renouvellement du bail en se fondant précisément sur « la non-exploitation personnelle » par ce dernier des parcelles louées, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 411-31, L. 411-39, L. 411-50 et L. 411-53 du code rural et de la pêche maritime ;
Mais attendu qu'ayant constaté qu'aucun élément n'était produit aux débats sur la date des échanges culturaux et relevé que l'instance avait été introduite par lettre recommandée du 1er septembre 2010, la cour d'appel, abstraction faite de motifs erronés mais surabondants, en a exactement déduit, sans statuer par des motifs dubitatifs ou hypothétiques, que le refus de renouvellement du bail se trouvait soumis aux dispositions des articles L. 411-53 et L. 411-39 du code rural et de la pêche maritime, dans leur rédaction issue de l'ordonnance du 13 juillet 2006, et retenant souverainement que M. X... ne démontrait pas que l'absence d'information prévue à l'article L. 411-39 du code rural et de la pêche maritime lui avait porté préjudice et sans être tenue de répondre à un moyen que ses constatations rendaient inopérant, a légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de M. X... ; le condamne à payer aux consorts Y... et au GAEC Vert de mai la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du neuf juillet deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Garreau, Bauer-Violas et Feschotte-Desbois, avocat aux Conseils, pour M. X...Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir, par confirmation du jugement entrepris, déclaré nul le congé délivré le 30 juin 2010 par Monsieur Didier X... et dit que le bail relatif aux deux parcelles situées sur la commune de LUYERES, cadastrées ZK 16, pour une contenance de 1 ha 99 a 40 ca et ZS n° 27 pour une contenance de 2 ha 28 a 29 ca se poursuivra, à compter du 1er janvier 2012, pour une nouvelle période de neuf ans ;
AUX MOTIFS QUE l'article L. 411-53 du code rural et de la pêche maritime prévoit, en sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2006-870 du 13 juillet 2006, applicable à l'espèce que le bailleur ne peut s'opposer au renouvellement du bail que s'il justifie de l'un des motifs mentionnés à l'article L. 411-31 du même code, relatif aux motifs de résiliation du bail, au nombre desquels figure « la contravention aux obligations dont le preneur est tenu en application des articles L. 411-39 si elle est de nature à porter préjudice au bailleur » ; que l'article L. 411-39 du même code autorise le preneur à effectuer des échanges de parcelles dans le but d'une meilleure exploitation du fonds ; qu'il a été rappelé que la relation contractuelle s'agissant d'un bail en cours était soumise aux dispositions légales issues de l'ordonnance du 13 juillet 2006 ; qu'aucun élément n'est produit aux débats sur la date des échanges culturaux qui ne sont pas contestés ; qu'à supposer ceux-ci intervenus avant l'entrée en vigueur avant l'ordonnance précitée M. Didier X..., seul ou en qualité d'ayant droit de Paule X..., ne peut invoquer l'absence de notification au bailleur de cet échange pour s'opposer au renouvellement du bail rural, à défaut d'avoir agi à l'encontre de son preneur ; qu'à supposer les échanges culturaux intervenus après l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 31 juillet 2006, il incombe au bailleur de justifier le préjudice subi du fait de cet échange ; qu'en l'espèce, sans contester que l'échange de la totalité des parcelles louées ans le cadre de ce bail verbal (à la barre, Didier X... indiquant que le bail concernant la parcelle ZT 39 a été résilié amiablement, ce que contestent les intimés sans en justifier ni en tirer les conséquences juridiques) concerne une surface n'excédant pas le 1/5 de la superficie minimum d'installation définie à l'article L. 312-4 du code rural et de la pêche maritime, le bailleur, sans invoquer que l'échange compromet la bonne exploitation du fonds loué ou que le coéchangiste du preneur ne met pas correctement en valeur la parcelle qu'il a reçue n'établit pas l'existence d'un préjudice sur le seul fondement du caractère « intuitu personae » d'un contrat synallagmatique, qu'il ne peut, davantage, invoquer la mauvaise foi du preneur qui tient de la loi le droit de pratiquer des échanges de parcelles ; que le défaut de notification par le preneur au bailleur de l'échange de parcelles réalisé, non contesté, en l'absence de préjudice établi est insuffisant à justifier l'opposition du bailleur au renouvellement du bail ;
ALORS, D'UNE PART, QU'en se déterminant comme elle l'a fait par une motivation alternative, la Cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du c ode de procédure civile ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE, lorsque les échanges irréguliers sont intervenus antérieurement à l'entrée en vigueur de l'ordonnance du 13 juillet 2006, la résiliation du bail ou le refus de renouvellement sont encourus sans qu'il y ait lieu à rechercher l'existence d'un préjudice du bailleur ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, sans avoir précisé, ni recherché si les échanges incriminés n'étaient pas antérieurs à l'entrée en vigueur de cette ordonnance, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 411-31, L. 411-39 et L. 411-53 du code rural et de la pêche maritime dans leur rédaction antérieure à l'ordonnance ci-dessus visée ;
ALORS, ENFIN, QU'en toute hypothèse, M. X... avait soutenu que les échanges incriminés avaient été effectués par Monsieur Francis Y..., auquel le bail avait été consenti à compter du 1er janvier 1994 ; que dès lors, en retenant, pour statuer comme elle l'a fait, que le bailleur n'avait pas agi à l'encontre de son preneur, cependant qu'il avait refusé le renouvellement du bail en se fondant précisément sur « la non-exploitation personnelle » par ce dernier des parcelles louées, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 411-31, L. 411-39, L. 411-50 et L. 411-53 du code rural et de la pêche maritime.