LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 31 janvier 2013), que la société civile immobilière Suzanne (la société Suzanne) a vendu une maison à la société civile immobilière RDRE (la société RDRE) ; que l'acte, auquel était joint un devis établi par la société SEP services et prestations (la société SEP) le 26 juillet 2001, prévoyait des travaux de remise en état de la toiture et des travaux d'intérieur à la charge de la venderesse ; que la vente définitive a été conclue après achèvement des travaux ; que, se plaignant d'infiltrations, la société RDRE a, après expertise, assigné la société Suzanne et la société SEP en indemnisation de ses préjudices ;
Attendu que la société SEP fait grief à l'arrêt de la condamner in solidum avec la société Suzanne à payer certaines sommes à la société RDRE alors, selon le moyen :
1°/ que l'acceptation délibérée des risques par le maître de l'ouvrage est une cause d'exonération de la responsabilité des constructeurs ; qu'ainsi que l'a constaté l'arrêt attaqué, par motifs propres et adoptés, l'entrepreneur avait établi deux devis dont le premier avait été refusé par le maître d'ouvrage par souci d'économie, et le second, dressé, à la demande de ce dernier, pour des travaux provisoires moins onéreux, mettait en garde le maître de l'ouvrage en lui indiquant que «le caractère vétuste général de la toiture empêch(ait) toute garantie de ces travaux. Le conseil du professionnel serait d'exécuter les travaux de manière définitive», étant souligné que, dans le devis initial, le constructeur avait préconisé la dépose de la toiture en précisant que « l'examen de la toiture montr(ait) que de simples réparations ponctuelles (n'étaient) pas envisageables », ce dont il résultait que, dûment informé des risques inhérents aux travaux qu'il souhaitait, le maître de l'ouvrage les avait délibérément acceptés en signant le second devis et en refusant le premier ; qu'en imputant la responsabilité des désordres au constructeur, la cour d'appel a violé l'article 1792 du code civil ;
2°/ que le constructeur accomplit son devoir de conseil en informant de manière claire et précise le maître de l'ouvrage de la nécessité d'une réfection totale de la toiture et de ce que les travaux provisoires qu'il souhaite ne sont pas suffisants ; qu'en reprochant à l'entrepreneur de ne pas avoir accompli son travail avec sérieux en réalisant des travaux inefficaces et d'avoir exécuté son devoir de conseil de manière insuffisante tout en constatant par ailleurs, d'un côté, qu'il avait établi deux devis dans lesquels il conseillait clairement au maître de l'ouvrage de réaliser des travaux définitifs, l'état de la toiture ne permettant pas d'envisager des travaux ponctuels, et, de l'autre, que le seul souci d'économie et non l'efficacité des travaux avait déterminé le choix du second devis par le maître de l'ouvrage, ce dont il se déduisait que celui-ci n'avait cure du conseil et de la mise en garde du constructeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant derechef l'article 1792 du code civil ;
3°/ que le constructeur faisait valoir que le compromis de vente signé le 22 novembre 2001 mentionnait que le vendeur allait réaliser des travaux de remise en état de la toiture mais sans préciser lesquels puisque le devis joint à cet acte n'était pas le bon ; qu'il en déduisait que le vendeur avait sciemment dissimulé à l'acheteur la nature des travaux qu'il avait commandés ; qu'en omettant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le vendeur et maître de l'ouvrage avait, en toute connaissance de cause, accepté des travaux qu'il savait insuffisants pour en avoir été averti par le constructeur, raison pour laquelle il avait sciemment dissimulé une partie du devis à l'acquéreur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil ;
4°/ que les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes clairs et précis des écrits soumis à leur examen ; que, dans son rapport d'expertise du 26 août 2008, le technicien avait estimé que « la vétusté de la couverture, la pente par trop faible de cette dernière, auxquelles s'ajout(ai)ent l'absence de véritable traitement des points singuliers de couverture et de l'emploi de velux standards m'apparaiss(ai)ent bien à l'origine des infiltrations (...) » ajoutant que « les réparations "de fortune" entreprises par la société SEP n'étaient pas en mesure de pallier les anomalies constatées » et que cette société « faisait bien état, dans son second devis, d'un montant au demeurant nettement inférieur à son devis initial, que le caractère vétuste de la toiture empêch(ait) toute garantie de ces travaux et qu'il conviendrait d'exécuter les travaux de manière définitive » ; qu'il résultait de cette appréciation que l'origine directe des infiltrations se trouvait dans les anomalies constatées dans la conception de la toiture et non dans les travaux réalisés par l'entrepreneur, que l'expert n'avait en outre à aucun moment regardés comme contraires aux règles de l'art ; qu'en affirmant que l'expert indiquait clairement que les réparations "de fortune" réalisées par l'entrepreneur étaient à l'origine directe des infiltrations et qu'il résultait de son rapport que ces travaux étaient contraires aux règles de l'art, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce rapport, en violation de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, sans dénaturation, qu'il appartenait à la société SEP, en sa qualité de professionnelle, de faire des travaux conformes aux règles de l'art et d'accomplir son travail avec sérieux, ce qui n'avait pas été le cas ainsi que cela résultait du rapport d'expertise, et de refuser d'exécuter les travaux qu'elle savait inefficaces, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision ;
PAR CES MOTIFS : REJETTE le pourvoi ;Condamne la société SEP aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, condamne la société SEP à payer à la société RDRE la somme de 3 000 euros ; rejette la demande de la société SEP ; Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un mai deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Masse-Dessen, Thouvenin et Coudray, avocat aux Conseils, pour la société SEP services et prestations.Le moyen reproche à l'arrêt attaqué d'avoir condamné un constructeur (la société SEP, l'exposante), in solidum avec le maître de l'ouvrage vendeur de l'immeuble (la SCI SUZANNE), à indemniser l'acquéreur (la société RDRE) des désordres survenus sur cet immeuble, après avoir retenu une faute personnelle du constructeur ; AUX MOTIFS propres et éventuellement adoptés QU'il résultait du rapport d'expertise que la pente du toit était trop faible, que nombre de tuiles étaient poreuses et friables, que la couverture en ligne de faite venait sur une paroi d'adossement qui surplombait le versant ; que des réparations de fortune avaient été entreprises par la mise en oeuvre de bandes solines collées directement sur la paroi d'adossement et ce sans protection en rive de tête de type solin engravé ; qu'il existait aussi des problèmes au niveau des ouvertures ; qu'enfin les velux posés sur le toit étaient de type standard et non pas pour des toits de faible pente ; que l'isolation thermique de la toiture n'était pas satisfaisante et les joints de maçonnerie en pierres environnantes étaient plus ou moins dégradés et ponctuelle-ment très dégradés, voire inexistants ; que la souche où les parements étaient en briques de terre cuite n'était pas enduite ; que l'expert en concluait que l'ensemble de ces constatations étaient à l'origine des infiltrations qui affectaient le logement ;que les réparations de fortune faites par la SCI RDRE (lire la société SEP) n'étaient pas de nature à pallier ces anomalies ; que la toiture devait entièrement être refaite ; que la SARL SEP faisait soutenir son absence de responsabilité indiquant avoir établi deux devis dont le premier avait été refusé par la SCI SUZANNE et le second accepté le 23 décembre 2001 ; que, dans le cadre de ce second devis, elle avait indiqué qu'il s'agissait de travaux provisoires qui entraîneraient un surcoût lorsqu'il s'agirait de refaire la toiture, que le caractère vétuste général de la toiture empêchait toute garantie de ces travaux, que le conseil professionnel était d'exécuter les travaux de manière définitive ; qu'elle ajoutait que son conseil de professionnel n'avait pas été suivi par le maître de l'ouvrage et que la SCI RDRE devait démontrer la faute qui lui aurait causé un dommage ; que la cour rappelait que "travaux provisoires" ne signifiait nullement "travaux inefficaces" et indiquait qu'il appartenait à la société SEP de faire des travaux conformes aux règles de l'art, ce qui n'avait pas été le cas ainsi que cela résultait clairement des conclusions du rapport d'expertise ; que le technicien indiquait que toutes les réparations de fortune étaient à l'origine directe des infiltrations ; que la cour disait aussi qu'il appartenait à la société SEP, en sa qualité de professionnel et en l'absence d'architecte, d'accomplir son travail avec sérieux, ce qui n'avait pas été le cas ; qu'il s'agissait là d'une faute directe et personnelle de cette entre-prise en relation de cause à effet avec les préjudices subis par la SCI RDRE ; que la SCI SUZANNE était le vendeur de la SCI RDRE et devait à ce titre sa garantie à son acquéreur ; que de plus, la société SEP avait sciemment réalisé des travaux qu'elle savait inefficaces et de "fortune" ; qu'elle se devait, en l'absence d'architecte, d'accomplir avec vigilance et sérieux son devoir de conseil, eu égard au caractère constaté de vétusté de la couverture empêchant toute garantie des travaux, qui manifestement en l'espèce était insuffisant, le seul souci d'économie apparaissant avoir dicté le nouveau devis de travaux en date du 26 juillet 2001, et non l'efficacité de ces travaux ; que le fait d'indiquer qu'il s'agissait de travaux provisoires n'impliquait pas qu'il s'agissait de travaux inefficaces et pas "envisageables", bien que proposés et réalisés ; ALORS QUE l'acceptation délibérée des risques par le maître de l'ouvrage est une cause d'exonération de la responsabilité des constructeurs ; qu'ainsi que l'a constaté l'arrêt attaqué, par motifs propres et adoptés, l'entrepreneur avait établi deux devis dont le premier avait été refusé par le maître d'ouvrage par souci d'économie, et le second, dressé, à la demande de ce dernier, pour des travaux provisoires moins onéreux, mettait en garde le maître de l'ouvrage en lui indiquant que « le caractère vétuste général de la toiture empêch(ait) toute garantie de ces travaux. Le conseil du professionnel serait d'exécuter les travaux de manière définitive », étant souligné que, dans le devis initial, le constructeur avait préconisé la dépose de la toiture en précisant que « l'examen de la toiture montr(ait) que de simples réparations ponctuelles (n'étaient) pas envisageables », ce dont il résultait que, dûment informé des risques inhérents aux travaux qu'il souhaitait, le maître de l'ouvrage les avait délibérément acceptés en signant le second devis et en refusant le premier ; qu'en imputant la responsabilité des désordres au constructeur, la cour d'appel a violé l'article 1792 du code civil ;ALORS QUE le constructeur accomplit son devoir de conseil en informant de manière claire et précise le maître de l'ouvrage de la nécessité d'une réfection totale de la toiture et de ce que les travaux provisoires qu'il souhaite ne sont pas suffisants ; qu'en reprochant à l'entrepreneur de ne pas avoir accompli son travail avec sérieux en réalisant des travaux inefficaces et d'avoir exécuté son devoir de conseil de manière insuffisante tout en constatant par ailleurs, d'un côté, qu'il avait établi deux devis dans lesquels il conseillait clairement au maître de l'ouvrage de réaliser des travaux définitifs, l'état de la toiture ne permettant pas d'envisager des travaux ponctuels, et, de l'autre, que le seul souci d'économie et non l'efficacité des travaux avait déterminé le choix du second devis par le maître de l'ouvrage, ce dont il se déduisait que celui-ci n'avait cure du conseil et de la mise en garde du constructeur, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, violant derechef l'article 1792 du code civil ;
ALORS QUE le constructeur faisait valoir (v. ses concl. notifiées le 8 novembre 2012, p. 3, alinéas 10 et 11, et p. 17) que le compromis de vente signé le 22 novembre 2001 mentionnait que le vendeur allait réaliser des travaux de remise en état de la toiture mais sans préciser lesquels puisque le devis joint à cet acte n'était pas le bon ; qu'il en déduisait que le vendeur avait sciemment dissimulé à l'acheteur la nature des travaux qu'il avait commandés ; qu'en omettant de rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si le vendeur et maître de l'ouvrage avait, en toute connaissance de cause, accepté des travaux qu'il savait insuffisants pour en avoir été averti par le constructeur, raison pour laquelle il avait sciemment dissimulé une partie du devis à l'acquéreur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1792 du code civil ; ALORS QUE les juges du fond ne peuvent dénaturer les termes clairs et précis des écrits soumis à leur examen ; que, dans son rapport d'expertise du 26 août 2008 (V. p. 10), le technicien avait estimé que « la vétusté de la couverture, la pente par trop faible de cette dernière, auxquelles s'ajout(ai)ent l'absence de véritable traitement des points singuliers de couverture et de l'emploi de velux standards m'apparaiss(ai)ent bien à l'origine des infiltrations (¿) » ajoutant que « les réparations "de fortune" entreprises par la société SEP n'étaient pas en mesure de pallier les anomalies constatées » et que cette société « faisait bien état, dans son second devis, d'un montant au demeurant nettement inférieur à son devis initial, que le caractère vétuste de la toiture empêch(ait) toute garantie de ces travaux et qu'il conviendrait d'exécuter les travaux de manière définitive» ; qu'il résultait de cette appréciation que l'origine directe des infiltrations se trouvait dans les anomalies constatées dans la conception de la toiture et non dans les travaux réalisés par l'entrepreneur, que l'expert n'avait en outre à aucun moment regardés comme contraires aux règles de l'art ; qu'en affirmant que l'expert indiquait clairement que les réparations "de fortune" réalisées par l'entrepreneur étaient à l'origine directe des infiltrations et qu'il résultait de son rapport que ces travaux étaient contraires aux règles de l'art, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce rapport, en violation de l'article 1134 du code civil.