La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/05/2014 | FRANCE | N°13-16398

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 20 mai 2014, 13-16398


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Brahim X... Organisation (la société BAO) du désistement de son pourvoi ;
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Starvision que sur le pourvoi incident relevé par la société Canal plus ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 février 2013) que M. X..., étant devenu champion olympique de boxe en 2000, a décidé de devenir boxeur professionnel et a constitué la société BAO afin de gérer sa carrière ; que le 29 janvier 2001, la société BAO a con

clu avec la société Starvision une convention par laquelle elle lui concédait en e...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Donne acte à la société Brahim X... Organisation (la société BAO) du désistement de son pourvoi ;
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Starvision que sur le pourvoi incident relevé par la société Canal plus ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 14 février 2013) que M. X..., étant devenu champion olympique de boxe en 2000, a décidé de devenir boxeur professionnel et a constitué la société BAO afin de gérer sa carrière ; que le 29 janvier 2001, la société BAO a conclu avec la société Starvision une convention par laquelle elle lui concédait en exclusivité la gestion de la carrière de M. X..., en l'autorisant à rétrocéder le nom et l'image de ce dernier à un diffuseur ; qu'à partir du 7 février 2001, la société Starvision a, par plusieurs contrats successifs d'une durée d'un à trois ans, cédé à la société Canal plus les droits de retransmission de tous les combats de M. X... pour les années 2001 à 2007 ; qu'après l'accession de M. X... au titre de champion du monde à l'issue d'un combat disputé le 8 décembre 2007, des pourparlers ont débuté entre les sociétés Starvision et Canal plus en vue de la signature d'un nouveau contrat ; que ces dernières ne sont pas parvenues à s'accorder sur le montant de cession des droits de diffusion ; que le combat de défense du titre, qui devait avoir lieu le 26 juillet 2008, a été annulé et, quelque temps plus tard, M. X... a mis fin à sa carrière ; que les sociétés Starvision et BAO ont fait assigner la société Canal plus en paiement de dommages-intérêts pour rupture brutale d'une relation commerciale établie ; que M. X... est intervenu volontairement à l'instance pour réclamer l'indemnisation de son préjudice personnel ;
Sur les premier et deuxième moyens du pourvoi incident, réunis :
Attendu que la société Canal plus fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à la société Starvision une certaine somme à titre de dommages et intérêts alors, selon le moyen :
1°/ que les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes, elles ne nuisent point aux tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121 du code civil ; qu'en estimant, pour conclure à l'existence d'une rupture imputable à la société Canal plus, que les conditions nouvellement offertes modifiaient substantiellement les accords antérieurement conclus entre les sociétés Canal plus et Starvision dans la mesure où l'une de ces conditions imposait à cette dernière une charge qui, dans les faits, ne pesait pas sur elle antérieurement, cependant qu'il est constaté que cette charge pesait contractuellement sur la société Starvision et que celle-ci n'avait été assumée par la société Ami Production qu'en vertu de contrats conclus avec la société Canal plus auxquels la société Starvision était tiers, la cour d'appel qui a fait produire des effets à un contrat au profit d'un tiers, a violé l'article 1165 du code civil ;
2°/ que s'agissant du contrat à durée déterminée, le préavis peut être fixé dans le contrat lui-même et prendre la forme d'une obligation de renégocier avant le terme du contrat assorti d'un délai à l'expiration duquel le contrat est valablement rompu sans faute en cas d'échec de la négociation ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que le contrat à durée déterminée du 8 décembre 2006, avec prise d'effet au 1er juillet 2006, assorti d'un terme au 31 décembre 2007, stipulait une négociation de trois mois commençant à courir le 1er septembre 2007 et que si aucun accord n'était trouvé, la société Starvision aurait alors la faculté de négocier avec un tiers ; qu'il en résultait la stipulation d'un préavis exclusif de toute brutalité dans la rupture des relations commerciales et qu'en décidant le contraire, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce ;
3°/ que le manquement d'une partie à son obligation contractuelle de négocier avant le terme fixé par le contrat est exclusif pour l'autre partie de toute brutalité dans la rupture de la relation commerciale établie ; qu'ayant constaté que les parties avaient stipulé dans l'article 6. 2 de la convention du 8 décembre 2006 une période de négociation exclusive de trois mois allant du 1er septembre au 30 novembre 2007 pour poursuivre leur collaboration au titre des combats disputés par M. X... lors de l'année 2008 et que la société Starvision n'avait pas respecté cette obligation, ayant attendu le 18 décembre 2007, après l'expiration de la période contractuelle de négociation, pour engager une négociation dont l'issue était par nature incertaine, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en imputant à la société Canal plus une brutalité dans la rupture de la relation commerciale et a violé l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce ;
4°/ qu'en lui imputant une brutalité dans la rupture de la relation commerciale établie en raison de la tardiveté de l'offre de nouveau contrat faite le 13 juin 2008 au regard de la date très proche du combat, quand en vertu de l'article 6. 2 du contrat du 8 décembre 2006, la société Starvision disposait de la liberté de négocier avec un tiers depuis le 1er décembre 2007 et qu'elle n'avait engagé aucune négociation avec la société Canal plus pendant la période du 1er septembre au 30 novembre 2007, en violation de ses engagements contractuels, ce qui est constaté, la cour d'appel a violé l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce ;
Mais attendu, en premier lieu, que, par motifs propres et adoptés, l'arrêt relève que, si les conventions signées entre les parties depuis 2004 prévoyaient toutes que la société Starvision cédait à la société Canal plus tant l'exclusivité des prestations de M. X... que les droits des combats d'encadrement de chaque combat de ce dernier, prévus pour que chacune des réunions ait une durée minimum de 120 minutes, tout en faisant son affaire de l'obtention des droits concernant les combats d'encadrement auprès de l'organisateur, il ressort des pièces produites que, dans les faits, plusieurs des réunions de boxe auxquelles a participé M. X... ont donné lieu au versement de droits de diffusion supplémentaires de la part de la société Canal plus à l'organisateur, la société Ami Production, de sorte qu'en dépit des clauses des conventions la liant à la société Canal plus, la société Starvision n'avait pas la charge de l'« ensemble de la réunion » lorsque M. X... combattait ; que l'arrêt constate encore qu'il résulte des courriers échangés qu'à l'occasion de sa dernière offre, la société Canal plus a exprimé clairement la volonté de limiter désormais le montant des droits de retransmission de chaque réunion de boxe comprenant un combat de M. X... à une somme forfaitaire et une prime de victoire, combats d'encadrement compris, de sorte qu'aucune autre somme ne pourrait être exigée par l'organisateur de la réunion, et que cette précision, reprise dans les propositions relatives aux accords à conclure, était de nature à faire désormais supporter cette charge à la société Starvision ; qu'ayant ensuite comparé les montants ainsi proposés ainsi que les conditions de l'offre, l'arrêt retient que la dernière proposition de la société Canal plus marquait un recul substantiel par rapport aux contrats conclus en 2006 et 2007 et que, dès lors, la rupture de la relation doit être imputée à cette société ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations, la cour d'appel, qui n'a fait qu'apprécier des faits établissant la pratique contractuelle qui s'était instaurée entre les parties, n'a pas méconnu les dispositions de l'article 1165 du code civil ;
Attendu, en second lieu, que l'existence d'une stipulation contractuelle de préavis ne dispense pas le juge, s'il en est requis, de vérifier si le délai de préavis contractuel tient compte de la durée des relations commerciales ayant existé entre les parties et des autres circonstances ; que l'arrêt relève qu'alors que la société Starvision avait écrit le 18 décembre 2007 pour lancer les négociations, la société Canal plus a attendu le 13 juin 2008, soit une date très proche du combat de remise en jeu par M. X... de son titre de champion du monde, pour émettre sa première offre ; qu'écartant les objections de la société Canal plus, qui faisait valoir que le contrat prévoyait que la société Starvision devait engager les négociations plus tôt, l'arrêt retient, par motif adopté, que la pratique suivie par les parties a fréquemment dérogé aux prévisions contractuelles, un nouveau contrat étant souvent conclu bien après l'expiration du précédent, de sorte qu'il ne peut être reproché à la société Starvision d'avoir attendu douze jours avant l'expiration du dernier contrat pour faire part à la société Canal plus de son intérêt pour la poursuite de leur collaboration, cette dernière s'étant d'ailleurs bornée, dans sa réponse du 24 décembre 2007, à relever que les négociations s'engageaient désormais sur des bases non exclusives, tout en manifestant le souhait de connaître les projets de M. X... pour l'année 2008 ; qu'ayant encore constaté que la société Canal plus disposait depuis longtemps des données par lesquelles elle a, par la suite seulement, légitimé la diminution des rémunérations qu'elle proposait, la cour d'appel, qui n'a fait qu'apprécier la pratique qui s'était instaurée entre les parties et leur renonciation commune au délai de négociation exclusive contractuellement prévu, a pu retenir que la société Canal plus, en proposant une modification substantielle des conditions de la retransmission, défavorable à la société Starvision, à quelques semaines seulement de la remise en jeu, par M. X..., de son titre de champion du monde, avait brutalement rompu la relation commerciale établie avec cette dernière ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal :
Attendu que la société Starvision fait grief à l'arrêt de limiter le montant des dommages-intérêts alloués au titre des manquements imputables à la société Canal plus alors, selon le moyen :
1°/ que le préjudice consécutif à la rupture brutale des relations commerciales inclut l'ensemble des conséquences dommageables de la rupture ; que la détermination de ce préjudice doit tenir compte de la situation de dépendance économique objective dans laquelle se trouvait la victime à l'égard de l'auteur de la rupture ; que dans ses écritures d'appel, la société Starvision, qui se consacrait entièrement à la promotion des intérêts de M. X..., faisait valoir qu'elle se trouvait à cet égard dans une situation de dépendance économique à l'égard de la société Canal plus, hégémonique en matière de diffusion des programmes télévisés de boxe, de sorte que la rupture brutale des relations commerciales imputable à la chaîne de télévision l'avait contrainte à cesser toute activité, ce qui constituait un chef de préjudice réparable ; qu'en se bornant, pour écarter l'existence d'un tel préjudice, à relever que la société Canal plus n'avait pas sollicité une telle situation de dépendance, qui pouvait être le résultat d'un choix de la société Starvision, cependant que la situation de dépendance économique constitue une donnée objective, indépendante de la volonté de l'une ou l'autre des parties, la cour d'appel s'est déterminée par une motivation inopérante et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce et de l'article 1382 du code civil ;
2°/ que l'existence d'un état de dépendance économique d'une entreprise par rapport à une autre s'apprécie en tenant compte de la notoriété de cette dernière, de l'importance de sa part dans le marché considéré et dans le chiffre d'affaires de son cocontractant, ainsi que de l'impossibilité pour ce dernier d'obtenir d'autres partenaires ; que dans ses écritures d'appel, la société Starvision faisait valoir que « quasiment 100 % » de son chiffre d'affaires provenait de sa collaboration avec la société Canal plus et qu'en raison de l'hégémonie de cette dernière en matière de diffusion des programmes télévisés de boxe, il n'existait pour elle aucune solution alternative lui permettant de poursuivre son activité ; qu'en refusant d'indemniser la société Starvision au titre du préjudice né de la dépendance économique dans laquelle elle s'était trouvée vis-à-vis de la société Canal plus, au motif qu'il n'était « pas établi que la société Starvision ne disposait pas de solution alternative pour pallier les inconvénients résultant de la rupture », sans répondre aux éléments précis invoqués par la société Starvision, qui établissaient l'absence de solution alternative, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu qu'il résulte de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce que le préavis suffisant s'apprécie en tenant compte de la durée de la relation commerciale et des autres circonstances, notamment de l'état de dépendance économique de l'entreprise évincée, au moment de la notification de la rupture, et qu'en cas d'insuffisance du préavis, le préjudice en résultant est évalué en fonction de la durée du préavis jugé nécessaire ; qu'ayant estimé que la société Canal plus aurait dû respecter un préavis de six mois, la cour d'appel a nécessairement pris en compte l'état de dépendance économique de la société Starvision, sans avoir à lui accorder une indemnité complémentaire à ce titre ; que, procédant du postulat contraire, le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le troisième moyen du pourvoi incident :
Attendu que la société Canal plus fait grief à l'arrêt de la condamner à payer à M. X... une certaine somme à titre de dommages-intérêts alors, selon le moyen :
1°/ que la cassation qui interviendra du chef de dispositif critiqué par le premier et/ ou le deuxième moyen de cassation entraînera par voie de conséquence, en application de l'article 624 du code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif attaqué par le troisième moyen de cassation qui est dans sa dépendance, l'indemnisation accordée à M. X... n'étant justifiée qu'en raison de la faute reprochée à la société Canal plus dans la rupture de la relation commerciale établie avec la société Starvision ;
2°/ que la responsabilité encourue sur le fondement de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce est limitée au préjudice découlant directement de l'absence ou de l'insuffisance de préavis subi par le demandeur à l'occasion de la rupture de la relation commerciale établie ; d'où il suit qu'en accordant à M. X... des dommages-intérêts en réparation d'un préjudice moral-la cour excluant le préjudice d'image invoqué-subi en raison de la brutalité de la rupture de la relation commerciale établie entre les sociétés Canal plus et Starvision, la cour d'appel a violé les articles L. 442-6, I, 5° du code de commerce et 1382 du code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'il résulte du rejet des deux premiers moyens du pourvoi incident que le moyen, pris en sa première branche, manque par le fait qui lui sert de base ;

Et attendu, d'autre part, qu'après avoir retenu que les circonstances de la rupture avaient causé un préjudice moral à M. X... qui, en dépit des récompenses sportives rares et prestigieuses qu'il avait pu gagner, s'était trouvé " déconsidéré " par une société particulièrement reconnue dans le monde sportif, en particulier dans la discipline de la boxe qu'elle était la seule à diffuser, la cour d'appel a pu condamner la société Canal plus à payer à M. X... une indemnité sur le fondement de l'article 1382 du code civil, indépendamment de la responsabilité qu'elle encourait sur le fondement de l'article 442-6, I, 5° du code de commerce ;
D'où il suit que, le moyen, qui ne peut être accueilli en sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
Et sur le second moyen du pourvoi principal :
Attendu que la société Starvision fait grief à l'arrêt de la condamner à payer une certaine somme à la société Canal alors, selon le moyen, que les dommages-intérêts alloués ne sauraient excéder le préjudice subi par la victime ; qu'en condamnant la société Starvision à payer la somme de 100 000 euros à la société Canal plus au titre d'une violation de la clause de confidentialité interdisant aux parties de divulguer aux tiers le contenu de l'accord du 8 décembre 2006, au motif qu'une telle divulgation n'avait « pu que décrédibiliser la société Canal plus », sans relever toutefois le moindre élément susceptible de caractériser une telle perte de crédit du fait de la divulgation litigieuse et alors même qu'elle relevait par ailleurs que c'était la chaîne de télévision qui avait porté atteinte à la considération du boxeur Brahim X..., la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'après avoir constaté, par motifs propres et adoptés, qu'en violation du contrat du 8 décembre 2006, dans lequel les parties s'étaient interdit de communiquer ou divulguer aux tiers le contenu de leur accord, M. Acariès, qui avait mené les négociations de renouvellement du contrat pour le compte de la société Starvision, avait, avec son conseil, révélé lors d'une interview commune au journal l'Equipe le montant versé par la société Canal plus pour le combat du 8 décembre 2007, c'est souverainement que la cour d'appel a apprécié le montant du préjudice subi par la société Canal plus, dont elle a justifié l'existence par la seule évaluation qu'elle en a faite ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Laisse à chacune des parties la charge de ses dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt mai deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par Me Balat, avocat aux Conseils, pour la société Starvision.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir limité à la somme de 397. 500 € le montant des dommages et intérêts alloués à la société Starvision au titre des manquements imputables à la société Canal Plus ;

AUX MOTIFS QUE le préjudice né d'une rupture brutale de relations commerciales résulte non de la rupture, mais du caractère brutal de celle-ci ; qu'il est dès lors équivalent à la marge brute qu'aurait pu réaliser le partenaire victime de la rupture pendant la durée de préavis qui aurait dû être respecté et qui a, en l'espèce, été évalué à six mois ; que par une juste motivation que la cour adopte, le tribunal a exactement jugé que la société Canal Plus aurait dû, compte tenu du désaccord de la société Starvision avec les propositions exprimées le 20 juin 2008, maintenir les conditions du contrat antérieur jusqu'à la fin de l'année 2008 ; que ce contrat antérieur qui, ainsi que le relève à juste titre la société Starvision, couvrait les années 2006 et 2007, avait prévu deux combats par an, l'un en juillet, l'autre en décembre, d'autre part, un total de rémunération de 2. 500. 000 €, soit une moyenne de 625. 000 € par combat, auxquels devaient s'ajouter une prime de 300. 000 € en cas de victoire, soit 75. 000 € par match ; qu'il convient donc de considérer que, dans le cas du déroulement d'un préavis de six mois entre le mois de juillet et le mois de décembre 2008, deux combats se seraient déroulés et que, selon les conditions antérieures, la société Starvision aurait pu recevoir une rémunération moyenne de 1. 250000 € (625. 000 x 2) à laquelle il convient d'ajouter, compte tenu du caractère aléatoire de la victoire, 75. 000 € (75. 000/ 2) x 2), soit un total de 1. 325. 000 € (1. 250. 000 + 75. 000) ; que par ailleurs, le pourcentage de marge brute de 30 % invoqué par la société Starvision n'est pas sérieusement contesté par la société Canal Plus et qu'il n'est pas démenti par l'analyse des documents produits ; qu'en conséquence, le préjudice subi par la société Starvision s'élève à la somme de 397. 000 € (1. 325. 000 x 30 %) ; que le jugement sera donc réformé sur ce point ; que la société Starvision invoque un préjudice complémentaire qui serait constitué par le caractère irrévocable de la rupture brutale dans sa situation de dépendance économique ; qu'elle invoque sur ce point le fait qu'elle réalisait l'intégralité de son chiffre d'affaires avec la société Canal Plus, ainsi que la tardiveté de la rupture qui l'a laissée dans une impasse la plus absolue ; qu'il convient cependant de relever que si les contrats conclus par la société Starvision avec la société Canal Plus stipulaient une exclusivité sur les combats disputés par M.
X...
, ils ne requéraient nullement l'exclusivité de l'activité de la société Starvision dont l'objet social vise notamment « le sponsoring dans tous les domaines du sport, des arts et de la culture, la gestion de la carrière de tous sportifs ou personnes du spectacle, ainsi que la négociation de tous contrats afférents à cette carrière en qualité d'agent ou d'intermédiaire, etc ¿ » ; qu'il n'est donc pas établi que la société Starvision ne disposait pas de solution alternative pour pallier les inconvénients résultant de la rupture, ni que la situation de dépendance qu'elle invoque lui ait été imposée par la société Canal Plus et n'ait pas résulté de ses propres choix ; que par ailleurs, si les contrats de cession des droits de M.
X...
conclus entre elle et la société Canal Plus étaient depuis sept ans régulièrement renouvelés, il n'en demeure pas moins que ces contrats étaient tous conclus pour une brève durée déterminée et qu'ils étaient objectivement soumis, sans que la société Starvision puisse l'ignorer, d'une part, aux conséquences des parts d'audience réalisées, qui sont éminemment fluctuantes, d'autre part, au risque de changement de politique de programmation de la chaîne ; qu'enfin, elle n'apporte aucun justificatif des très lourds investissements qu'elle prétend avoir réalisés pour valoriser la carrière de M.
X...
et dont la rupture de la relation commerciale l'aurait empêchée de percevoir les fruits ; ALORS, D'UNE PART, QUE le préjudice consécutif à la rupture brutale des relations commerciales inclut l'ensemble des conséquences dommageables de la rupture ; que la détermination de ce préjudice doit tenir compte de la situation de dépendance économique objective dans laquelle se trouvait la victime à l'égard de l'auteur de la rupture ; que dans ses écritures d'appel (conclusions signifiées le 23 janvier 2012, p. 32), la société Starvision, qui se consacrait entièrement à la promotion des intérêts de M. Brahim
X...
, faisait valoir qu'elle se trouvait à cet égard dans une situation de dépendance économique à l'égard de la société Canal Plus, hégémonique en matière de diffusion des programmes télévisés de boxe, de sorte que la rupture brutale des relations commerciales imputable à la chaîne de télévision l'avait contrainte à cesser toute activité, ce qui constituait un chef de préjudice réparable ; qu'en se bornant, pour écarter l'existence d'un tel préjudice, à relever que la société Canal Plus n'avait pas sollicité une telle situation de dépendance, qui pouvait être le résultat d'un choix de la société Starvision (arrêt attaqué, p. 11, alinéa 2), cependant que la situation de dépendance économique constitue une donnée objective, indépendante de la volonté de l'une ou l'autre des parties, la cour d'appel s'est déterminée par une motivation inopérante et a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 442-6, I, 5° du code de commerce et de l'article 1382 du code civil ; ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'existence d'un état de dépendance économique d'une entreprise par rapport à une autre s'apprécie en tenant compte de la notoriété de cette dernière, de l'importance de sa part dans le marché considéré et dans le chiffre d'affaires de son cocontractant, ainsi que de l'impossibilité pour ce dernier d'obtenir d'autres partenaires ; que dans ses écritures d'appel (conclusions signifiées le 23 janvier 2012, p. 32, alinéa 6), la société Starvision faisait valoir que « quasiment 100 % » de son chiffre d'affaires provenait de sa collaboration avec la société Canal Plus et qu'en raison de l'hégémonie de cette dernière en matière de diffusion des programmes télévisés de boxe, il n'existait pour elle aucune solution alternative lui permettant de poursuivre son activité ; qu'en refusant d'indemniser la société Starvision au titre du préjudice né de la dépendance économique dans laquelle elle s'était trouvée vis-à-vis de la société Canal Plus, au motif qu'il n'était « pas établi que la société Starvision ne disposait pas de solution alternative pour pallier les inconvénients résultant de la rupture » (arrêt attaqué, p. 11, alinéa 2), sans répondre aux éléments précis invoqués par la société Starvision, qui établissaient l'absence de solution alternative, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile.

SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société Starvision à payer à la société Canal Plus la somme de 100. 000 € ; AUX MOTIFS QUE le contrat conclu le 8 décembre 2006 comportait à l'article 10 une clause par laquelle les parties s'interdisaient de communiquer ou de divulguer aux tiers le contenu de l'accord ; qu'en dépit de cette disposition, lors d'une interview commune au journal L'Equipe, M. Y..., avec lequel les négociations de renouvellement du contrat avaient été menées pour la société Starvision, ainsi que son conseil, ont divulgué le montant versé par la société Canal Plus pour le combat du 8 décembre 2007, ce qui démontre la violation par la société Starvision de son obligation de secret ; que cette société ne saurait justifier cette violation par le fait qu'ultérieurement la société Canal Plus ait indiqué à la presse le montant de ce qu'elle avait investi pour le développement de la carrière de M.
X...
ou qu'elle ait fait état de la somme que la société Starvision revendiquait pour l'année 2008 ; qu'en effet, ces déclarations ne divulguent pas des éléments du contrat de 2006 et que de plus, elles ont été faites après la violation initiale par la société Starvision de ses propres obligations ; que le préjudice résultant de cette violation de confidentialité qui n'a pu que décrédibiliser la société Canal Plus a justement été fixé, compte tenu des éléments produits, à la somme de 100. 000 € ; ALORS QUE les dommages et intérêts alloués ne sauraient excéder le préjudice subi par la victime ; qu'en condamnant la société Starvision à payer la somme de 100. 000 ¿ à la société Canal Plus au titre d'une violation de la clause de confidentialité interdisant aux parties de divulguer aux tiers le contenu de l'accord du 8 décembre 2006, au motif qu'une telle divulgation n'avait « pu que décrédibiliser la société Canal + » (arrêt attaqué, p. 13, alinéa 2), sans relever toutefois le moindre élément susceptible de caractériser une telle perte de crédit du fait de la divulgation litigieuse et alors même qu'elle relevait par ailleurs que c'était la chaîne de télévision qui avait porté atteinte à la considération du boxeur Brahim
X...
(arrêt attaqué, p. 12, alinéa 5), la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article 1147 du code civil.

Moyens produits au pourvoi incident par la SCP Boutet, avocat aux Conseils, pour la société d'Edition de Canal Plus.

PREMIER MOYEN DE CASSATION :
: IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société CANAL + à payer à titre de dommages et intérêts à la société STARVISION la somme de 397. 500 € ; AUX MOTIFS QUE, sur l'existence d'une rupture, le 8 décembre 2007, Monsieru
X...
est devenu champion du monde de boxe dans sa catégorie et les sociétés Starvision et Canal + ont alors entamé des pourparlers qui n'ont jamais abouti en raison de leur désaccord sur le montant auquel le diffuseur paiera les droits ; qu'elles s'opposent sur l'existence d'une rupture, la société Starvision soutenant que la proposition de la société Canal + représentait une modification substantielle des termes du contrat et qu'elle équivaut à une rupture, et cette dernière répliquant que la comparaison des propositions avec les conditions antérieures permet de constater que la modification n'était pas substantielle et qu'elle était, en outre justifiée par la diminution de l'intérêt public pour la boxe et donc des parties d'audience réalisées par ce sport ; que, contremaître à ce qu'à retenu le tribunal, il convient de considérer que la dernière offre de la société Canal + est une offre formulée verbalement, dont font état la société Starvision dans une lettre du 20 juin 2008 et Monsieur
X...
dans une interview donnée au quotidien Le Parisien, le 10 juillet 2008 ; que si une lettre du 20 juin 2008, adressée cette fois par la société Canal + à la société Starvision, mentionne à nouveau la proposition de départ à 500. 000 euros par match, il n'en demeure pas moins qu'il résulte des pièces émanant de la société Starvision que l'offre de 550. 000 euros pas match pour deux matchs a été présentée et qu'elle a, comme la précédente, été refusée par la société Starvision ; que la dernière offre de la société Canal + était donc la suivante : 550. 000 euros pour le combat du 26 juillet 2008 au Cannet, combat dans lequel Monsieur
X...
devait remettre en jeu son titre de champion du monde, ainsi qu'une prime de 100. 000 euros en cas de victoire, et « aux mêmes conditions (500. 000 € + 100. 000 € de prime), un second combat dans le dernier trimestre 2008, si Brahim conserve son titre le 26 juillet », le montant de 500. 000 euros ayant été augmenté verbalement, ainsi qu'il a été relevé précédemment, à 550. 000 euros ; que le montant de 550. 000 euros par match, soit 1. 100. 000 euros pour deux matchs, était proposé avec la condition expressément mentionnée dans la lettre de Monsieur Z..., directeur des acquisitions et des événements du pôle sport de la chaîne, que Monsieur
X...
gagne le combat du 26 juillet 2008 ; qu'il apparaît, en première analyse et si l'on considère acquise la victoire de Monsieur
X...
, en augmentation par rapport à la rémunération convenue en 2006 (1. 000. 000 d'euros pour deux matchs) mais il constitue une nette diminution par rapport à la rémunération de 2007 (1. 500. 000 pour deux matchs et 150. 000 euros de prime) qui concernait des matchs de championnat du monde ; qu'à cette diminution s'ajoute le fait que l'offre pour 2008 était faite « pour la réunion dans son ensemble », c'est-à-dire pour l'événement regroupant dans un même lieu un certain nombre de combats entre divers boxeurs encadrant le match vedette disputé par Monsieur
X...
; que cette précision « pour la réunion dans son ensemble » avait donc pour conséquence de faire supporter à la société Starvision la charge des frais ainsi que de cession des droits de diffusion des autres boxeurs ; qu'ainsi que le fait observer la société Canal +, les conventions signées entre les parties depuis 2004 prévoyaient toutes, à l'article 1. 4 que la société Starvision s'engageait à céder à la société Canal + tant l'exclusivité des prestations de Monsieur
X...
que les droits des combats d'encadrement de chaque combat de ce dernier ; que, cependant, il ressort des pièces produites par les parties que, dans les faits, la société Canal + a, à plusieurs reprises, versé à une société dénommée Ami Production de sommes relatives à des réunions dans lesquelles combattait aussi Monsieur
X...
; que tel a été le cas pour le combat du 8 décembre 2007, pour lequel 500. 000 euros ont été versés par la société Canal + à la société Ami Production en plus des 750. 000 euros et 150. 000 euros de primes versées à la société Starvision, mais aussi pour les combats du 5 décembre 2005 et du 8 novembre 2004, pou lesquels respectivement 300. 000 euros et 500. 000 euros ont été versés à la société Ami Production ; que la société Canal + démontre qu'en 2005 et 2006 pour 2007, ainsi qu'en 2008, elle a conclu, en plus de ses conventions avec la société Starvision, des contrats avec la société Ami Production portant sur la cession des droits de représentation et de diffusion d'un certain nombre de matchs disputés par d'autres boxeurs que Monsieur
X...
; qu'elle soutient que c'est en application de ces contrats qu'elle a été conduite à verser des sommes complémentaires à la société Ami Production parce que les matchs cédés par ces accords étaient regroupés dans une même réunion avec ceux de Monsieur
X...
; qu'elle ajoute que rien n'empêchait la société Starvision de s'entendre avec la société Ami Production pour organiser ensemble la réunion du 26 juillet 2008, ce qui était d'ailleurs prévu ; qu'elle précise sur ce point qu'elle était déjà liée envers cette société qui devait lui fournir six réunions incluant au moins un championnat d'Europe avec un boxeur français ; que, cependant, s'il est établi que la société Canal + avait effectivement conclu des contrats avec la société Ami Production et qu'elle a versé des sommes en paiement de rencontres dans lesquelles Monsieur
X...
ne figurait pas, il n'en demeure pas moins qu'en raison de ces contrats conclus entre les sociétés Canal + et Ami Production, la société Starvision n'avait dans la réalité de faits et en dépit des clauses des conventions la liant à la société Canal +, pas la charge de l'« ensemble de la réunion » lorsque Monsieur
X...
combattait et que la précision litigieuse inscrite dans les propositions relatives aux accords à conclure, était de nature à lui faire supporter cette charge ; que, par ailleurs, la société Canal + ne démontre pas qu'un accord avec la société Ami Production aurait permis à la société Starvision de se dégager de la charge de l'ensemble de la réunion concernant chaque match, ce qu'elle ne lui a d'ailleurs, nullement suggéré, proposé ou opposé lors de leurs pourparlers ; que les déclarations à la presse de Monsieur Z..., indiquant que les propositions faites devaient se comprendre en les replaçant dans le contexte des contrats parallèles conclus avec la société Ami Production n'apparaissent à cet égard que comme des justifications postérieures à l'échec des négociations, alors que ce contexte n'a nullement été opposé dans le cadre des négociations ; qu'ainsi, même si l'on considère que l'offre était ferme pour deux matchs et non conditionnée à une victoire de Monsieur.
X...
dans le premier, comme le soutient la société Canal +, ce qui ne ressort pas des terme de la lettre du 20 juin 2008, retranscrits ci-dessus, il est établi que la proposition de celle-ci à la société Starvision représentait, en tout état de cause, une diminution chiffrée de 500. 000 euros, même en cas de victoire, par rapport à l'année 2007 et était donc très nettement inférieure aux rémunérations antérieurement versées ; que de surcroît, les conditions offertes modifiaient substantiellement les accords antérieurement conclus ; que ces deux modifications substantielles constituaient ainsi une rupture des relations commerciales établies depuis 2001 ; ALORS QUE les conventions n'ont d'effet qu'entre les parties contractantes ; elles ne nuisent point aux tiers, et elles ne lui profitent que dans le cas prévu par l'article 1121 du Code civil ; qu'en estimant, pour conclure à l'existence d'une rupture imputable à la société Canal +, que les conditions nouvellement offertes modifiaient substantiellement les accords antérieurement conclus entre les sociétés Canal + et Starvision dans la mesure où l'une de ces conditions imposait à cette dernière une charge qui, dans les faits, ne pesait pas sur elle antérieurement, cependant qu'il est constaté que cette charge pesait contractuellement sur la société Starvision et que celle-ci n'avait été assumée par la société Ami Production qu'en vertu de contrats conclus avec la société Canal + auxquels la société Starvision était tiers, la Cour d'appel qui a fait produire des effets à un contrat au profit d'un tiers, a violé l'article 1165 du Code civil.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
:
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société CANAL + à payer à titre de dommages et intérêts à la société STARVISION la somme de 397. 500 € ; AUX MOTIFS QUE, sur la brutalité de la rupture, contrairement à ce que soutient la société Canal + la rupture d'une relation contractuelle sans préavis écrit constitue une rupture brutale des relations commerciales ; que, par ailleurs, ainsi qu'il a été précisé dans les développements ci-dessus, la diminution de la rémunération proposée a été faite sans que les arguments justificatifs de la baisse des parts d'audience ou de la rémunération excessive des prestations par rapport à d'autres équivalentes, ne soient invoquées préalablement dans un temps permettant à la société Starvision de chercher des solutions alternatives ; que de plus, la proposition de nouveau contrat a été faite le 13 juin 2008, alors que le précédent contrat était expiré depuis le 31 décembre 2007, à une date très proche du contrat qui devait avoir lieu à la fin du mois de juillet 2008 et au cours duquel Monsieur
X...
devait remettre en jeu son titre de champion du monde, alors que la société Starvision avait écrit, par l'intermédiaire de son conseil, dès le 18 décembre 2007 pour lancer les négociations ; que le caractère particulièrement tardif de l'offre dans des circonstances qui ne pouvaient qu'être tendues pour Monsieur
X...
et par conséquent, la société Starvision, alors que la société Canal + disposait depuis longtemps des données par lesquelles elle a, par la suite seulement, légitimé la diminution de la rémunération qu'elle proposait constitue le caractère brutal de la rupture ; qu'il se déduit de l'ensemble de ces éléments, ainsi que de ceux non contraires du jugement, que celui-ci doit être confirmé en ce qu'il a retenu que la société Canal + était responsable d'une rupture brutale des relations commerciales avec la société Starvision ; que sur la durée du préavis, il n'est pas contesté que la relation entre les parties a duré sept ans ; que le dernier contrat signé entre elles, le 8 décembre 2006, prévoyait une durée de négociation de trois mois commençant à courir le 1er septembre 2007 et que si aucun accord n'était trouvé, la société Starvision aurait alors la faculté de négocier avec un tiers ; que compte tenu de ces précisions, de la nature du domaine concerné et du caractère volatile des parts d'audience, mais aussi du fait que depuis sept ans la société Canal + avait soutenu la carrière de Monsieur
X...
sans formuler aucun reproche ou aucune réserve sur les avantages qu'elle retirait de ce soutien, le Tribunal a justement fixé le délai de préavis à une durée de six mois ; ET AUX MOTIFS DU TRIBUNAL QU'il n'est pas contesté que Canal + s'est conformée au mécanisme de négociation fixé par l'article 6. 2 du dernier contrat d'achat des droits de retransmission du 8 décembre 2006 pour mener avec Starvision les pourparlers visant à la conclusion d'un nouveau contrat ; que toutefois, la notation de relation commerciale établie vise une situation née de la pratique instaurée entre les parties entretenant des relations d'affaires stables, suivies et anciennes, qu'elle qu'en soit la forme, et que le seul respect des stipulations relatives au mécanisme de la reconduction d'un nouveau contrat ne suffit pas pour exonérer l'auteur de la rupture de la faute délictuelle qui lui est imputée ; qu'en outre, la pratique suivie par les parties a fréquemment dérogé aux précisions contractuelles ; qu'ainsi, le second contrat a été conclu le 29 avril 2004 alors que le précédent était expiré depuis le 28 janvier précédent ; que de même, le troisième contrat du 5 avril 2005 a été signé un peu plus de trois mois après l'expiration du précédent ; qu'enfin le dernier contrat a été régularisé par les parties le 7 décembre 2006, près d'un an après l'expiration du précédent et alors que Monsieur
X...
avait déjà disputé deux des quatre combats prévus par ce nouveau contrat ; que dans ces conditions, il ne peut être tiré sur le plan juridique, aucune conclusion du fait que Starvision a attendu le 18 décembre 2007, soit douze jours seulement avant l'expiration du contrat, pour faire part à Canal +, par l'intermédiaire de son conseil, de son intérêt pour la poursuite de leur collaboration ; que dans sa réponse du 24 décembre 2007, Canal + a relevé ce retard mais sans en déduire d'autre conséquence que les négociations qui allaient alors s'engager se dérouleraient sur des bases non exclusives ; qu'elle a, à cette occasion, manifesté le souhait de connaître les projets de Starvision et de Monsieur
X...
pour 2008 ; que, par courriel du 14 janvier 2008, Canal + a, de nouveau, « insisté sur la nécessaire visibilité du programme de Brahim pour l'année 2008 pour nous engager dans une négociation pouvant aboutir à un nouveau partenariat » ; que les parties ne versent aucune autre pièce à l'appui de leurs allégations respectives sur les conditions dans lesquelles les pourparlers se sont déroulés ; qu'il n'est toutefois pas contesté que c'est par lettre du 13 juin 2008 que Canal + « prenant en considération les éléments de discussion échangés » a, pour la première fois, informé Starvision de sa décision de ramener à 500. 000 euros, outre une prime de victoire de 100. 000 euros, le prix d'acquisition des droits de retransmission de la réunion du 26 juillet suivant, au cours de laquelle Monsieur
X...
devait défendre son titre de champion du monde ; que cette lettre a cristallisé le différend opposant les parties sur la valorisation des droits de retransmission, Starvision considérant que Canal + devait acquitter les mêmes niveaux de prix que ceux du contrat précédent et la chaîne estimant, pour sa part, que ces montants n'étaient plus envisageables dans ce qu'elle considérait comme le contexte de crise générale de la boxe en France, se traduisant notamment par la désaffection du public et la baisse des audiences ; que les discussions engagées sur la base de cette proposition ont, un temps, conduit Canal + à revaloriser son offre, en la portant à 550. 000 euros, outre une prime de victoire de 100. 000 euros, pour chacun des deux combats programmés pour 2008 ; que, devant le refus de Starvision d'accepter cette nouvelle offre, Canal + a, par lettre du 20 juin 2008, informé Starvision de son « ultime » offre : 500. 000 + 100. 000 euros pour le combat du 26 juillet 2008 et les mêmes sommes pour un second combat en 2008 en cas de victoire à l'issue du premier ; que cette dernière proposition, qui caractérise la rupture partielle de la relation établie entre les parties, n'a été notifiée à Starvision qu'à peine plus d'un mois avant la date du combat de Monsieur
X...
, soit un délai à l'évidence insuffisant pour permettre à Starvision de rechercher un autre financement auprès d'une chaîne de télévision concurrente de Canal + ou des « sponsors » ; qu'au sens de L. 442-6, 1, 5° du Code de commerce, la rupture de la relation établie entre les parties est donc intervenue de façon brutale ; ALORS D'UNE PART QUE s'agissant du contrat à durée déterminée, le préavis peut être fixé dans le contrat lui-même et prendre la forme d'une obligation de renégocier avant le terme du contrat assorti d'un délai à l'expiration duquel le contrat est valablement rompu sans faute en cas d'échec de la négociation ; qu'il résulte des constatations de l'arrêt que le contrat à durée déterminée du 8 décembre 2006, avec prise d'effet au 1er juillet 2006, assorti d'un terme au 31 décembre 2007 (arrêt, p. 7, al. 3), stipulait une négociation de trois mois commençant à courir le 1er septembre 2007 et que si aucun accord n'était trouvé, la société Starvision aurait alors la faculté de négocier avec un tiers (arrêt, p. 10, avant dernier alinéa) ; qu'il en résultait la stipulation d'un préavis exclusif de toute brutalité dans la rupture des relations commerciales et qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et violé l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce ; ALORS D'AUTRE PART QUE le manquement d'une partie à son obligation contractuelle de négocier avant le terme fixé par le contrat est exclusif pour l'autre partie de toute brutalité dans la rupture de la relation commerciale établie ; qu'ayant constaté que les parties avaient stipulé dans l'article 6. 2 de la convention du 8 décembre 2006 une période de négociation exclusive de trois mois allant du 1er septembre au 30 novembre 2007 pour poursuivre leur collaboration au titre des combats disputés par Monsieur
X...
lors de l'année 2008 et que la société Starvision n'avait pas respecté cette obligation, ayant attendu le 18 décembre 2007, après l'expiration de la période contractuelle de négociation, pour engager une négociation dont l'issue était par nature incertaine, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations en imputant à la société Canal + une brutalité dans la rupture de la relation commerciale et a violé l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce ; ALORS ENFIN QU'en imputant à la société Canal + une brutalité dans la rupture de la relation commerciale établie en raison de la tardiveté de l'offre de nouveau contrat faite le 13 juin 2008 au regard de la date très proche du combat, quand en vertu de l'article 6. 2 du contrat du 8 décembre 2006, la société Starvision disposait de la liberté de négocier avec un tiers depuis le 1er décembre 2007 (arrêt, p. 10, avant dernier alinéa) et qu'elle n'avait engagé aucune négociation avec la société Canal + pendant la période du 1er septembre au 30 novembre 2007, en violation de ses engagements contractuels, ce qui est constaté, la Cour d'appel a violé l'article L. 442-6 I 5° du Code de commerce.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
:
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué D'AVOIR condamné la société Canal + à payer à titre de dommages et intérêts à Monsieur
X...
la somme de 200. 000 € ; AUX MOTIFS QUE Monsieur
X...
demande encore la réparation des préjudices moral et d'image sur le fondement de l'article 1382 du Code civil, invoqué dans le visa du dispositif des conclusions ; que le caractère brutal de la rupture imputable à la société Canal +, constitue, compte tenu de la manière et du contexte dans lequel elle est intervenue, décrits ci-dessus, une faute de sa part ; que les différents articles de presse produits permettent de constater que les conditions de cette rupture ont considérablement affecté Monsieur
X...
, qui, en dépit des récompenses sportives rares et prestigieuses qu'il avait pu gagner, s'est trouvé déconsidéré par une société particulièrement reconnue dans le monde sportif en général, et dans la discipline de la boxe qu'elle était la seule à diffuser, en particulier ; qu'il est, par ailleurs, établi que ces faits ont eu des répercussions sur sa santé ; qu'en revanche, le lien entre le caractère brutal de la rupture et la cession de sa carrière n'est pas établi, ni le fait qu'il ait désormais l'image d'un sportif capricieux et mercantile, les articles de presse produits le présentant, dans l'ensemble, davantage comme une victime et lui témoignant une sympathie manifeste ; qu'il se déduit des éléments du dossier que compte tenu de la notoriété de Monsieur
X...
, son préjudice s'établit à la somme de 200. 000 € ; ALORS D'UNE PART QUE la cassation qui interviendra du chef de dispositif critiqué par le premier et/ ou le deuxième moyen de cassation entraînera par voie de conséquence, en application de l'article 624 du Code de procédure civile, la cassation du chef de dispositif attaqué par le troisième moyen de cassation qui est dans sa dépendance, l'indemnisation accordée à Monsieur
X...
n'étant justifiée qu'en raison de la faute reprochée à la société Canal + dans la rupture de la relation commerciale établie avec la société Starvision ; ALORS D'AUTRE PART QUE la responsabilité encourue sur le fondement de l'article L. 442-6 I, 5° du Code de commerce est limitée au préjudice découlant directement de l'absence ou de l'insuffisance de préavis subi par le demandeur à l'occasion de la rupture de la relation commerciale établie ; d'où il suit qu'en accordant à Monsieur
X...
des dommages et intérêts en réparation d'un préjudice moral-la Cour excluant le préjudice d'image invoqué-subi en raison de la brutalité de la rupture de la relation commerciale établie entre les sociétés Canal + et Starvision, la Cour d'appel a violé les articles L. 442-6 I, 5° du Code de commerce et 1382 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 13-16398
Date de la décision : 20/05/2014
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CONCURRENCE - Transparence et pratiques restrictives - Rupture brutale des relations commerciales - Préavis - Délai - Eléments d'appréciation - Etat de dépendance économique - Effets - Préjudice distinct de celui de la rupture brutale (non)

En cas de rupture d'une relation commerciale établie, le préavis suffisant s'apprécie en tenant compte de la durée de la relation commerciale et des autres circonstances, notamment de l'état de dépendance économique de l'entreprise évincée, au moment de la notification de la rupture, et en cas d'insuffisance du préavis, le préjudice en résultant est évalué en fonction de la durée du préavis jugée nécessaire. Il en résulte que la victime de la rupture ne peut prétendre à une indemnisation complémentaire au titre de son état de dépendance économique, cette circonstance ayant déjà été prise en compte pour la détermination de son préjudice consécutif à la brutalité de la rupture


Références :

article L. 442-6, I, 5°, du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 14 février 2013

A rapprocher :Com., 3 mai 2012, pourvoi n° 11-10544, Bull. 2012, IV, n° 85 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 20 mai. 2014, pourvoi n°13-16398, Bull. civ.Bull. 2014, IV, n° 89
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles Bull. 2014, IV, n° 89

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Rapporteur ?: Mme Mouillard
Avocat(s) : Me Balat, SCP Boutet

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:13.16398
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award