LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique, pris en ses deux premières branches :
Vu l'article 17 de la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005 ;
Attendu, selon ce texte , que le montant du bonus exceptionnel distribué aux salariés et exonéré de cotisations sociales peut être modulé selon les salariés ; que cette modulation ne peut s'effectuer qu'en fonction du salaire, de la qualification, du niveau de classification, de l'ancienneté ou de la durée de présence dans l'entreprise du salarié ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, qu'à la suite d'un contrôle d'application de la législation sociale portant sur la période du 1er janvier 2006 au 31 décembre 2008, l'URSSAF de la Loire a notifié à la société Valentin traiteur (la société) par lettre d'observations du 5 septembre 2009, un redressement portant notamment réintégration dans l'assiette des cotisations sociales, d'un bonus exceptionnel distribué par la société à l'ensemble de ses salariés entre le 1er janvier 2006 et le 10 juillet 2006, déduction faite des absences non assimilées à du travail effectif ; que contestant ce redressement, la société a saisi un tribunal des affaires de sécurité sociale aux fins d'annulation ;
Attendu que pour rejeter ce recours, l'arrêt retient que l'article 17 de la loi du 19 décembre 2005 ne prévoit pas la possibilité pour l'employeur d'enserrer la durée de présence du salarié dans l'entreprise entre deux dates déterminées et que ce critère doit s'entendre de l'ancienneté, déduction faite des périodes de suspension du contrat de travail et doit s'apprécier dans sa globalité et sans référence à une période déterminée ;
Qu'en se déterminant ainsi par des motifs insuffisants à caractériser le critère de la durée de présence prévu par le texte susvisé, distinct de celui de l'ancienneté, en tenant compte des dispositions conventionnelles applicables au sein de la société, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la dernière branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 15 janvier 2013, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne l'URSSAF de la Loire aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Valentin traiteur ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois avril deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat aux Conseils, pour la société Valentin traiteur
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR dit que devait être maintenu le redressement infligé à la SAS VALENTIN en ce qui concerne les « primes diverses » à hauteur de 29.473 €, et d'AVOIR débouté la SAS VALENTIN TRAITEUR de sa demande d'annulation du redressement à ce titre ;
AUX MOTIFS QUE «la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005 de financement de la sécurité sociale pour 2006 a prévu, en son article 17, la possibilité pour les entreprises de verser à l'ensemble de leurs salariés un bonus exceptionnel d'un montant maximum 1000 euro par salarié ; Qu'il est prévu que « le montant de ce bonus exceptionnel peut être modulé selon les salariés ; cette modulation ne peut s'effectuer qu'en fonction du salaire, de la qualification, du niveau de classification, de l'ancienneté ou de la durée de présence dans l'entreprise du salarié » ; que la société Valentin Traiteur a versé à ses salariés un bonus exceptionnel de 72.809 euros qu'elle a exonéré de cotisations de sécurité sociale ; Qu'elle a déclaré à l'Urssaf le 13 novembre 2006 avoir fait application du critère de modulation de durée de présence dans l'entreprise explicité de la façon suivante : « Durée de présence de 84 à 100 % - montant versé 542,06 euros effectif bénéficiaire 134 ; Durée de présence inférieure à 84 % - montant versé 11,84 euros effectif bénéficiaire 16 » ; Que dans sa lettre de réponse du 1er octobre 2009, elle a formulé les observations suivantes « Les modalités de versement de la prime de 500 euros étaient les suivantes : Un montant uniforme à tous les salariés cumulé à la durée de présence sur la période d'emploi du salarié du 1er janvier au 10 juillet 2006 seulement alors que la durée de présence doit tenir compte de l'ancienneté dans l'entreprise » ; attendu que l'URSSAF de la LOIRE a retenu pour procéder au redressement et réintégrer dans l'assiette des cotisations la totalités des bonus versés que « l'accord conclu au sein de la société prend en compte la durée de la présence du 1er janvier au 10 juillet 2006 seulement alors que la durée de présence doit tenir de l'ancienneté dans l'entreprise » ; Attendu que la société Valentin Traiteur a entendu enfermer la durée de présence entre deux dates ; Que cette possibilité restrictive n'a pas été prévue par la loi, la durée de présence s'entendant de l'ancienneté déduction faite des périodes de suspension du contrat de travail et devant être appréciée dans sa globalité sans référence à une période délimitée ; Attendu que les exonérations de charges et de contribution définies à l'article 9 de cette même loi ne peuvent être accordées que sous réserve des modalités légales d'attribution ; Que les modalités n'ayant pas été respectées, l'exonération appliquée ne peut être maintenue ; Que le redressement opéré par I'URSSAF de la LOIRE doit être maintenu et le jugement infirmé de ce chef » ;
ALORS, D'UNE PART, QU'est exonéré de cotisations sociales le bonus exceptionnel prévu par l'article 17 de la loi n°200 5-1579 du 19 décembre 2005 versé à l'ensemble des salariés et modulé en fonction « du salaire, de la qualification, du niveau de classification, de l'ancienneté ou de la durée de présence dans l'entreprise » des salariés ; que le critère de « durée de présence dans l'entreprise » visé par ce texte, distinct du critère « d'ancienneté », doit nécessairement s'entendre comme la durée de présence dans l'entreprise au cours de l'année ou sur une période donnée ; qu'en décidant au contraire que ce critère légal devait être assimilé au critère d'ancienneté, déduction faite des périodes de suspension du contrat de travail, pour retenir que le bonus exceptionnel versé aux salariés modulé selon leur durée de présence au cours de la période allant du 1er janvier au 10 juillet 2006 ne remplissait pas les conditions posées par l'article 17 de la loi n° 2005-1579 du 1 9 décembre 2005, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
ALORS, D'AUTRE PART, QUE l'ancienneté s'entend de la période courant à compter de l'embauche du salarié déduction faite des périodes de suspension du contrat de travail ; qu'aussi en décidant que « la durée de présence devait s'entendre de l'ancienneté déduction faite des périodes de suspension du contrat de travail », ce qui revenait à assimiler le critère de modulation du bonus exceptionnel lié à la « durée de présence » au critère de modulation lié à « l'ancienneté », la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 17 de la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005 ;
ALORS, DE TROISIEME PART, QU'en vertu de l'article L. 243-6-2 du code de la sécurité sociale, un cotisant peut opposer à une URSSAF l'interprétation admise par une Circulaire publiée ; que selon la question réponse n° 18 de la Circulaire DSS/5B/DRT/NC3/2006/174 du 8 avril 2006, publiée au Bulletin officiel du ministère de la santé du 15 mai 2006, le versement du bonus exceptionnel peut être modulé et conditionné en fonction d'un critère de présence du salarié dans l'entreprise à une date donnée ; qu'en décidant au contraire que le critère de « durée de présence » prévu par l'article 17 de la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005 « deva it être apprécié dans sa globalité sans référence à une période délimitée », la cour d'appel a violé l'article L. 243-6-2 du code de la sécurité sociale, ensemble la Circulaire publiée DSS/5B/DRT/NC3/2006/174 du 8 avril 2006 et l'article 17 de la loi n° 2005-1579 du 19 décembre 2005.