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04/02/2014 | FRANCE | N°11-12607

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 04 février 2014, 11-12607


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Watson Brown a entreposé dans le « magasin et aire de dédouanement temporaire » (MADT) qu'elle exploite, des cigarettes en provenance de Tunisie destinées à être exportées en Algérie ; que lors de leur transfert vers le MADT de la société Tim Specialities, ces marchandises ont fait l'objet d'un vol avec armes ; que l'administration des douanes, considérant que le vol des marchandises avait fait naître une dette douanière d'un certain montant de droits d

e douane, de taxe sur la valeur ajoutée, de droit de consommation sur le...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Watson Brown a entreposé dans le « magasin et aire de dédouanement temporaire » (MADT) qu'elle exploite, des cigarettes en provenance de Tunisie destinées à être exportées en Algérie ; que lors de leur transfert vers le MADT de la société Tim Specialities, ces marchandises ont fait l'objet d'un vol avec armes ; que l'administration des douanes, considérant que le vol des marchandises avait fait naître une dette douanière d'un certain montant de droits de douane, de taxe sur la valeur ajoutée, de droit de consommation sur les tabacs manufacturés et de taxe BAPSA (budget annexe des prestations sociales agricoles), a émis un avis de mise en recouvrement (AMR) de ce montant ; que sa contestation de l'AMR ayant été rejetée, la société Watson Brown a fait assigner l'administration des douanes pour en obtenir l'annulation ;

Sur le troisième moyen :
Attendu que la société Watson Brown fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande d'annulation de l'AMR pour autant qu'il porte sur le droit de consommation, alors, selon le moyen, que le droit de consommation n'est recouvré comme en matière de douane qu'à l'importation ; qu'en l'espèce, il ressort du procès-verbal d'infraction notifié à la société Watson Brown que les droits de consommation sont poursuivis à son encontre sur le fondement de la mise à la consommation et non de l'importation ; qu'ainsi, en affirmant que la société Watson Brown n'était pas fondée à se prévaloir des dispositions du code général des impôts et, partant, que l'action de l'administration des douanes n'était pas prescrite lors de l'avis de mise en recouvrement en date du 24 janvier 2005, le fait générateur étant la mise à la consommation consécutive au vol du 22 décembre 2003, la cour d'appel a violé les articles 575 C du code général des impôts et L. 168, L. 178 et L. 189 du Livre des procédures fiscales ;
Mais attendu que l'arrêt relève que l'article 575 C du code général des impôts énonce que le droit de consommation est dû par l'importateur et recouvré comme en matière de douane ; qu'il relève également que la marchandise, en provenance de Tunisie et à destination de l'Algérie, n'était qu'en transit sur le port de Marseille ; qu'il retient que celle-ci a été, du fait du vol, mise à la consommation à partir du territoire national et doit donc être considérée comme importée ; que de ces constatations et appréciations, la cour d'appel a déduit à bon droit que seul l'article 354 du code des douanes était applicable à la prescription de l'action en recouvrement ; que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le cinquième moyen :
Attendu que la société Watson Brown fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'AMR pour autant qu'il porte sur la taxe sur la valeur ajoutée, alors, selon le moyen, que sont notamment effectuées en suspension du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens destinés à être placés sous le régime du MADT et les livraisons de biens effectuées sous un tel régime ; que la sortie du bien du régime du MADT met fin à la suspension du paiement de la taxe, laquelle doit être acquittée, si le bien a fait l'objet d'une ou plusieurs livraisons toujours sous le régime du MADT, par le destinataire de la dernière de ces livraisons ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que le destinataire de la dernière livraison était la société Tim Specialities, qui était, par conséquent, seul redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'en déclarant la société Watson Brown redevable de la TVA dès lors que la marchandise n'a pas été livrée à la société Tim Specialities, la cour d'appel a ajouté à la loi une condition qu'elle ne prévoyait pas, violant ainsi l'article 277 A-II-1-b du code général des impôts ;
Mais attendu que l'arrêt relève qu'à la suite du vol intervenu au cours du transfert, la marchandise n'a pas été livrée à la société Tim Specialities ; qu'ayant ainsi fait ressortir que celle-ci n'était pas le destinataire de la dernière livraison des marchandises, c'est à bon droit que la cour d'appel en a déduit qu'elle n'était pas redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et attendu que les premier, deuxième et sixième moyens ne seraient pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le quatrième moyen :
Vu l'article 1148 du code civil ;
Attendu que pour rejeter la demande de la société Watson Brown tendant à se voir exonérer du paiement des droits de consommation, l'arrêt retient, par motifs adoptés, que le vol, qui a pour effet de remettre les marchandises initialement soumises à un régime suspensif dans le circuit commercial, ne saurait être assimilé à une perte ou destruction constitutive de force majeure ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, alors que le droit de consommation ne relève pas des dispositions du code des douanes communautaire d'où procède cette règle, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les circonstances de l'espèce ne constituaient pas un cas de force majeure, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a rejeté la demande d'exonération du droit de consommation sur le fondement de la force majeure, l'arrêt rendu le 16 décembre 2010, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence, autrement composée ;
Condamne l'administration des douanes et droits indirects aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre février deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société Watson Brown
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté l'exception d'incompétence de l'administration des douanes soulevée par la société Watson Brown ;
AUX MOTIFS QUE l'article 343 du Code des douanes invoqué vise l'application des sanctions fiscales en matière de délits et de contraventions prévus par les lois sur les douanes et non, comme en l'espèce, le recouvrement de droits et taxes de douane éludés ; que l'action pour l'application des sanctions fiscales a le caractère d'une action publique et, par application de l'article 343-2 du Code des douanes, elle ne peut pas être exercée par l'administration des douanes dans les procédures dont ses agents ont été saisis en application des I et II de l'article 28-1 du Code de procédure pénale, celle-ci appartenant, dans ce cas, au ministère public ; qu'elle diffère de l'action de l'administration des douanes tendant au recouvrement des droits et taxes fraudés ou éludés qui a un caractère civil ;que la saisine du service national des douanes judiciaires n'a donc aucune incidence sur l'action en recouvrement des droits qui a un fondement juridique et une nature juridique différente de l'action pour l'application des sanctions fiscales et n'a pas pour effet de dessaisir l'administration des douanes de cette action ; qu'il s'en suit que l'administration des douanes était compétente pour émettre l'avis de mise en recouvrement qui ne peut être annulé du seul fait de la saisine des douanes judiciaires ; que le procès-verbal de constat rédigé et signé le 4 janvier 2005, établi pour consigner les résultats du contrôle effectué le 22 décembre 2003, soit le lendemain du vol et avant saisine du service de douane judiciaire, conformément aux dispositions de l'article 334 du Code des douanes qui impose que les résultats des contrôles soient consignés dans des procèsverbaux de constat, n'est pas constitutif d'action pour l'application des sanctions fiscales et, en toute hypothèse, la loi ne subordonne pas l'établissement d'un avis de mise en recouvrement à la rédaction préalable d'un procès-verbal de constat ; que l'administration des douanes avait donc le pouvoir d'émettre l'avis de mise en recouvrement du 24 janvier 2005 dont le caractère civil est incontestable, les contestations de créances mises en recouvrement relevant de la juridiction civile ;

ALORS QUE lorsque les agents des douanes habilités ont été saisis par l'autorité judiciaire en application des I et II de l'article 28-1 du Code de procédure pénale, l'administration des douanes est dessaisie et ne peut exercer l'action pour l'application des sanctions fiscales ; que, dans une telle hypothèse, elle est ainsi incompétente pour rechercher et constater les éventuelles infractions et, partant, pour établir un procès-verbal de notification d'infraction ; qu'en l'espèce, il ressort des pièces de la procédure que la douane judiciaire avait été saisie par le juge d'instruction dans le cadre d'une commission rogatoire en date du 17 novembre 2004, ce dont il résultait que l'administration des douanes ne pouvait établir, dans cette affaire, ni un procès-verbal de notification d'infraction, ni un avis de mise en recouvrement fondé sur un tel procès-verbal ; qu'en refusant néanmoins de faire droit à l'exception d'incompétence de l'administration des douanes soulevée par la société Watson Brown, la Cour d'appel a violé, par fausse application, l'article 343 du Code des douanes.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir déclaré la société Watson Brown responsable de la marchandise volée à l'égard de l'administration des douanes et d'avoir, en conséquence, rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'avis de mise en recouvrement de la somme de 1.461.492 € du 24 janvier 2005 et de la décision de l'administration de rejet de sa contestation en date du 19 mai 2006 ;
AUX MOTIFS QU'en application de l'article 82 ter du code des douanes, l'admission des marchandises dans un magasin ou aire de dépôt temporaire est subordonnée au dépôt par l'exploitant d'une déclaration sommaire ou d'un document en tenant lieu, cette admission ayant pour effet de placer les marchandises sous la responsabilité de l'exploitant vis à vis de l'administration des douanes ; qu'il n'est pas contesté que la société WATSON BROWN a rempli une telle déclaration le 19 décembre 2003 lors de l'admission dans son magasin ou aire de dépôt temporaire de la marchandise, en l'occurrence 900 cartons de cigarettes, soit 45.000 cartouches de cigarettes, débarquée d'un navire en provenance de Tunisie ; que cette marchandise a été volée le 23 décembre 2003 lors de son transfert vers le magasin ou aire de dépôt temporaire de la société TIM SPÉCIALITÉ ; qu'il n'est pas discuté que ce vol a fait naître une dette douanière et que par application de l'article 203 du code des douanes communautaire l'exploitant du magasin ou aire de dépôt temporaire sous la responsabilité duquel se trouvait la marchandise est débiteur de cette dette, la société WATSON BROWN prétendant que la responsabilité de la société TIM SPÉCIALITÉ s'était substituée à la sienne dès lors qu'elle avait effectué les formalités douanières en plaçant la marchandise sous sa responsabilité par la déclaration de transfert 011 N°200321 autorisé par le bureau de douane et celle informatique SOFI de mise sous son magasin ou aire de dépôt temporaire avant le vol commis le 22 décembre 2003 à 9 heures 10 ; que L'ADMINISTRATION DES DOUANES conteste ce transfert de responsabilité en se prévalant de la convention d'exploitation de magasin ou aire de dépôt temporaire signé par la société WATSON BROWN en application des dispositions de l'article 82 bis du code des douanes et prétendant que, même si la société TIM SPÉCIALITÉ a rempli la déclaration de transfert modèle 011 incombant à la société WATSON BROWN, la marchandise est restée sous la responsabilité de cette dernière tant que n'ont pas été accomplies les formalités d'entrée dans le magasin ou aire de dépôt temporaire de la société TIM SPÉCIALITÉ ; que suivant la convention d'exploitation signée par la société WATSON BROWN et l'autorité douanière, dans le cas de transfert entre 2 magasins ou aires de dépôt temporaire gérés par le système Protis-Import dépendant du même bureau de douane, comme en l'espèce, les marchandises doivent circuler sous déclaration modèle 011 établie sous la responsabilité du magasin ou aire de dépôt temporaire de départ et devant être présentée et soumise au visa du service des douanes lorsque les marchandises transférées sont des produits soumis à accise comme les tabacs ; que la société TIM SPÉCIALITÉ est effectivement l'auteur de la déclaration de transfert du magasin poste 30 de la société WATSON BROWN à son magasin en date du 22 décembre 2003, 8 heures, et d'une déclaration SOFI, provenance saisie Protis, à son nom le 22 décembre 2003 à 8 heures 17 faisant référence à un BAE (bon à enlever) du même jour 8 heures 15 ; qu'il résulte de la convention signée par la société WATSON BROWN et l'ADMINISTRATION DES DOUANES, § D, que la responsabilité de la société WATSON BROWN est engagée, non seulement pour les marchandises placées en dépôt de douane sur place mais aussi pour celles transférées sous déclaration modèle 0 Il à destination d'un autre magasin ou aire de dépôt temporaire ; que, par ailleurs, suivant le bulletin officiel des douanes du 15 décembre 1992, la responsabilité de l'exploitant du magasin ou aire de dépôt temporaire prend fin et une autre responsabilité se substitue à la sienne lorsque la marchandise a été transférée dans un autre magasin ou aire de dépôt temporaire, ce qui implique que l'opération de transfert ait été terminée ; qu'il est précisé dans ce même bulletin que l'admission des marchandises en magasin ou aire de dépôt temporaire est subordonnée à la production par l'exploitant d'une déclaration sommaire, que le dépôt de cette déclaration et la présentation des marchandises pour l'admission dans le magasin ou aire de dépôt temporaire doivent être simultanées ; or que force est de constater que la société TIM SPÉCIALITÉ n'a pas présenté la marchandise pour l'admission dans son magasin ou aire de dépôt temporaire puisqu'elle avait été volée en cours de transfert ; que la responsabilité de la société TIM SPÉCIALITÉ ne s'est pas substituée à celle de la société WATSON BROWN dès lors que les formalités d'entrée dans son magasin ou aire de dépôt temporaire, à savoir dépôt de la déclaration sommaire et présentation de la marchandise, n'ont pas été accomplies, peu important que ce soit la société TIM SPÉCIALITÉ qui ait déposé la déclaration modèle 0 Il en vue du transfert de la marchandise et déclaré la marchandise en sortie du magasin ou aire de dépôt temporaire de la société WATSON BROWN ; que l'autorisation de transfert de la marchandise donnée par le service des douanes, qui était obligatoire pour permettre la sortie du magasin ou aire de dépôt temporaire de la société WATSON BROWN dès lors que tout enlèvement et transfert de marchandise soumise à accise, comme le tabac, doit faire l'objet d'un visa préalable du service des douanes, n'a pas emporté un transfert de responsabilité de la société WATSON BROWN à la société TIM SPÉCIALITÉ en l'absence d'accomplissement des formalités d'entrée dans le magasin ou aire de dépôt temporaire de cette dernière société ; qu'il convient, par ailleurs, de relever que seule la déclaration de transfert porte le tampon de l'ADMINISTRATION DES DOUANES et que la déclaration SOFI du 22 décembre 2003 à 8 heures 17 faite par la société TIM SPÉCIALITÉ n'a pas fait l'objet d'une acceptation par le service de douane, la mention d'un bon à enlever du même jour 8 heures 15 y figurant n'étant pas constitutive d'une telle acceptation mais seulement une référence à l'autorisation de transfert donnée ; que la société WATSON BROWN était encore responsable de la marchandise à l'égard de l'ADMINISTRATION DES DOUANES lorsqu'elle a été volée, les formalités d'entrée dans le magasin de la société TIM SPÉCIALITÉ, qui a reconnu lors de son audition devant les services sa responsabilité en qualité de commissionnaire de transport, n'ayant pas été alors accomplies ;
1° ALORS QUE l'article 203 § 3 du Code des douanes communautaire qui vise, parmi les catégories de personnes à la charge desquelles est mise la dette douanière lorsque celle-ci naît à la suite de la soustraction d'une marchandise passible de droits à l'importation à la surveillance douanière, la « personne qui doit exécuter les obligations qu'entraîne le séjour en dépôt temporaire de la marchandise », doit être interprété en ce sens que ces termes désignent la personne qui, après déchargement de ladite marchandise, détient celle-ci pour en assurer le déplacement ou le stockage ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que les marchandises ont été volées lors du transfert de celles-ci par le commissionnaire de transport, la société Tim Specialities, du MADT de la société Watson Brown à son propre MADT, ce dont il résultait que cette deuxième société n'était plus détentrice de la marchandise ; qu'en déclarant néanmoins la société Watson Brown responsable de la marchandise volée à l'égard de l'administration des douanes, la Cour d'appel a violé l'article précité et l'article 184-2 du règlement d'application du Code des douanes communautaires ;
2° ALORS QUE l'admission des marchandises dans un MADT, laquelle est subordonnée au dépôt par l'exploitant d'une déclaration sommaire, a pour effet de placer lesdites marchandises sous la responsabilité de l'exploitant vis-à-vis de l'administration des douanes ; que la responsabilité de l'exploitant du MADT prend fin lorsqu'une autre responsabilité se substitue à la sienne et, notamment, lors du transfert des marchandises sur le MADT d'un autre exploitant ; qu'en cas de transfert d'un MADT à un autre situé auprès du même bureau de douane, le bulletin officiel des douanes prévoit que l'admission des marchandises sur le MADT d'arrivée et, avec elle, le placement des marchandises sous la responsabilité de l'exploitant de ce MADT sont subordonnés au dépôt d'une déclaration sommaire avant le transfert, lequel ne peut s'effectuer qu'avec l'autorisation du service des douanes ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que, préalablement au transfert, l'exploitant du MADT d'arrivée, la société Tim Specialities, a effectué les formalités douanières requises en établissant une déclaration de transfert, en obtenant l'autorisation dudit transfert par le bureau de douane compétent et en effectuant une déclaration sommaire par le système informatique SOFI, ce dont il résultait que sa responsabilité s'était substituée à celle de l'exploitant du MADT de départ, la société Watson Brown ; qu'en déclarant néanmoins la société Watson Brown responsable de la marchandise volée à l'égard de l'administration des douanes, motif pris de ce que les formalités d'entrée dans le MADT d'arrivée n'auraient pas été accomplies, la société Tim Specialities n'ayant pas présenté la marchandise pour l'admission dans son MADT en raison du vol intervenu pendant le transfert, la Cour d'appel a ajouté à la loi une condition qu'elle ne prévoyait pas, violant les articles 82 ter du Code des douanes et 4 de l'arrêté du 29 novembre 1995 ;
3° ALORS QUE la convention d'exploitation du magasin ou aire de dédouanement temporaire conclue le 11 avril 1997 entre la société Watson Brown et le service des douanes prévoit, en son paragraphe D, que la première s'engage à respecter les obligations, interdictions, charges et responsabilités résultant de l'autorisation d'exploitation du MADT qui lui a été accordée y compris pour les marchandises placées en dépôt de douane sur place ainsi que pour celles transférées sous déclaration modèle O11 à destination d'un autre MADT ; que, s'agissant de ce dernier type de marchandises, la convention précise uniquement qu'elles doivent circuler sous « déclaration modèle O11 », ledit document étant établi sous la responsabilité de l'exploitant du MADT de départ, et qu'elles doivent être présentées et soumises au visa du service des douanes si ce sont des produits soumis à accises ; qu'en affirmant cependant qu'il résulte de cette convention que la responsabilité de la société Watson Brown est engagée, non seulement pour les marchandises placées en dépôt de douane sur place mais aussi pour celles transférées sous déclaration modèle O11 à destination d'un autre magasin ou aire de dépôt temporaire, la Cour d'appel a dénaturé cet acte, en violation de l'article 1134 du Code civil.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de la société Watson Brown tendant à l'annulation de l'avis de mise en recouvrement de la somme de 1.461.492 € du 24 janvier 2005 et de la décision de l'administration de rejet de sa contestation en date du 19 mai 2006 ;
AUX MOTIFS QUE la société WATSON BROWN ne conteste pas que les droits de douanes sont dus en application de l'article 203 du code des douanes communautaire et conformément à la jurisprudence de la C.J.C.E suivant laquelle l'article 206 du même code n'est pas applicable en cas de vol, les marchandises étant dans cette hypothèse mises à la consommation ; elle conteste les droits de consommation aux motifs de la prescription et de l'exonération prévue par l'article 1805 du code général des impôts et la TVA ; par application de l'article 285 du code des douanes, l'administration des douanes est chargée de recouvrer ou de faire garantir la perception des taxes sur le chiffre d'affaires, des taxes intérieures prévues par la législation des contributions indirectes et de tous autres droits et taxes exigibles à l'importation ou à l'exportation ; l'article 575 C du code général des impôts dispose qu'à l'importation, le droit de consommation est dû par l'importateur et recouvré comme en matière de douane ; la marchandise en provenance de Tunisie qui ne devait rester qu'en transit sur le port de Marseille avant son départ pour Alger prévu le 28 décembre 2003, suivant les déclaration du dirigeant de la société TIM SPÉCIALITÉ a été, du fait du vol, mise à la consommation à partir du territoire national et doit donc être considérée comme importée ; d'ailleurs la société WATSON BROWN ne conteste pas dans ses dernières conclusions que les droits de douanes sont dus, ce qui implique sa reconnaissance d'une dette douanière à l'importation telle que prévue par l'article 203 du code des douanes communautaire et née de la soustraction à la surveillance douanière de la marchandise passible de droits à l'importation dont elle est redevable en sa qualité de débitrice des obligations qu'entraîne le séjour en dépôt temporaire de la marchandise ; la société WATSON BROWN n'est pas, en conséquence, fondée à se prévaloir des dispositions du code général des impôts et du livre des procédures fiscales, seul le code des douanes étant applicable ; en application de l'article 354 du code des douanes, la prescription est de 3 ans à compter du fait générateur; l'action de l'ADMINISTRATION DES DOUANES n'était pas prescrite lors de l'avis de mise en recouvrement en date du 24 janvier 2005, le fait générateur étant la mise à la consommation consécutive au vol du 22 décembre 2003 ;
ALORS QUE le droit de consommation n'est recouvré comme en matière de douane qu'à l'importation ; qu'en l'espèce, il ressort du procès-verbal d'infraction notifié à la société Watson Brown que les droits de consommation sont poursuivis à son encontre sur le fondement de la mise à la consommation et non de l'importation ; qu'ainsi, en affirmant que la société Watson Brown n'était pas fondée à se prévaloir des dispositions du Code général des impôts et, partant, que l'action de l'administration des douanes n'était pas prescrite lors de l'avis de mise en recouvrement en date du 24 janvier 2005, le fait générateur étant la mise à la consommation consécutive au vol du 22 décembre 2003, la Cour d'appel a violé les articles 575 C du Code général des impôts et L. 168, L. 178 et L. 189 du Livre des procédures fiscales.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de la société Watson Brown tendant à se voir exonérée du paiement des droits de consommation mis à sa charge pour un montant de 972.000 € ;
AUX MOTIFS QUE l'article 1805 du Code des impôts qui prévoit une décharge de responsabilité pénale pour les sanctions fiscales encourues en matière de contributions indirectes ne peut trouver application en l'espèce, dès lors que l'avis de mise en recouvrement, qui vise à obtenir le paiement d'une dette civile, ne revêt aucun caractère pénal ; que la société Watson Brown dépositaire en son magasin ou aire de dépôt temporaire ou aire de dépôt temporaire de la marchandise placée sous douane et responsable de celle-ci à l'égard de l'administration des douanes lorsqu'elle a été mise à la consommation est redevable de cette taxe à hauteur de 966.484 ¿ compte tenu des 260 cartouches de cigarettes saisies dans le cadre de l'enquête pénale sur le vol et pour lesquelles le droit de consommation n'est pas dû ;
1° ALORS QUE, tenu de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui sont applicables, le juge doit donner ou restituer leur exacte qualifications aux faits et actes litigieux ; qu'en l'espèce, la société Watson Brown faisait valoir, dans ses écritures, que le vol commis l'exonérait de toute responsabilité et de toute poursuite en paiement des droits prétendument éludés, sur le fondement de l'article 1805 du Code général des impôts et de la jurisprudence de la Cour de cassation en matière de force majeure ; qu'ainsi, en se prononçant au seul regard de l'article 1805 du Code général des impôts et non également au regard de l'article 1148 du Code civil relatif à la force majeure, la Cour d'appel a violé l'article 12 du Code de procédure civile ;
2° ALORS QUE la force majeure exonère le redevable légal des droits éludés de toute responsabilité pénale et de toute poursuite en paiement desdits droits ; qu'en l'espèce, la société Watson Brown faisait valoir que la marchandise avait été volée et qu'aucun défaut de surveillance ne pouvait lui être reprochée, de sorte qu'elle devait bénéficier de la force majeure conformément à l'article 1805 du Code général des impôts et à la jurisprudence de la Cour de cassation ; qu'en se bornant néanmoins à énoncer que l'article 1805 du Code des impôts qui prévoit une décharge de responsabilité pénale pour les sanctions fiscales encourues en matière de contributions indirectes ne peut trouver application en l'espèce, dès lors que l'avis de mise en recouvrement, qui vise à obtenir le paiement d'une dette civile, ne revêt aucun caractère pénal, sans rechercher, comme elle y était pourtant invitée, si les circonstances de l'espèce ne constituaient pas un cas de force majeure exonérant la société Watson Brown du paiement des droits de consommation, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1148 du Code civil.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir rejeté la demande de la société Watson Brown tendant à l'annulation de l'avis de mise en recouvrement de la somme de 1.461.492 € du 24 janvier 2005 et de la décision de l'administration de rejet de sa contestation en date du 19 mai 2006 ;
AUX MOTIFS QUE la société Watson Brown est redevable de la TVA dès lors que la marchandise n'a pas été livrée à la société Tim Specialities ;
ALORS QUE sont notamment effectuées en suspension du paiement de la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens destinés à être placés sous le régime du MADT et les livraisons de biens effectuées sous un tel régime ;que la sortie du bien du régime du MADT met fin à la suspension du paiement de la taxe, laquelle doit être acquittée, si le bien a fait l'objet d'une ou plusieurs livraisons toujours sous le régime du MADT, par le destinataire de la dernière de ces livraisons ; qu'en l'espèce, il ressort des constatations de l'arrêt attaqué que le destinataire de la dernière livraison était la société Tim Specialities, qui était, par conséquent, seul redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ; qu'en déclarant la société Watson Brown redevable de la TVA dès lors que la marchandise n'a pas été livrée à la société Tim Specialities, la Cour d'appel a ajouté à la loi une condition qu'elle ne prévoyait pas, violant ainsi l'article 277 A-II-1-b du Code général des impôts.

SIXIEME MOYEN DE CASSATION :

IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'avoir dit la société Watson Brown redevable de la somme de 1.167.208 € ;
ALORS QU'en vertu des articles 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 et 1er du Protocole additionnel n° 1 à la Convention européenne des droits de l'homme, une ingérence dans le droit de propriété n'est justifiée qu'à condition qu'il existe un rapport raisonnable de proportionnalité entre les moyens employés et le but visé ; que, par suite, le juge doit s'assurer, avant de se prononcer sur le montant de la taxation due, que la dette douanière mise à la charge de l'exploitant de MADT suite au vol des marchandises n'est pas excessive par rapport à la valeur des marchandises ; qu'ainsi, en disant la société Watson Brown redevable la somme de 1.167.208 € sans rechercher si le montant de cette taxation, trois fois supérieure pourtant à la valeur des marchandises volées, ne portait pas une atteinte excessive et disproportionnée au droit de celle-ci au respect de sa propriété, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles précités.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 11-12607
Date de la décision : 04/02/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Contributions indirectes - Tabac - Droit de consommation - Exonération - Vol - Force majeure - Recherche nécessaire

Ne donne pas de base légale à sa décision la cour d'appel qui, pour rejeter la demande d'une société tendant à se voir exonérer du paiement des droits de consommation, sans rechercher, comme elle y était invitée, si les circonstances de l'espèce ne constituaient pas un cas de force majeure, retient que le vol, qui a pour effet de remettre les marchandises initialement soumises à un régime suspensif dans le circuit commercial, ne saurait être assimilé à une perte ou destruction constitutive de force majeure, alors que le droit de consommation ne relève pas des dispositions du code des douanes communautaire d'où procède cette règle


Références :

Sur le numéro 1 : article 575 C du code général des impôts

article 354 du code des douanes
Sur le numéro 2 : article 575 C du code général des impôts

article 1148 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 16 décembre 2010


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 04 fév. 2014, pourvoi n°11-12607, Bull. civ. 2014, IV, n° 29
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, IV, n° 29

Composition du Tribunal
Président : M. Petit (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Debacq
Rapporteur ?: M. Grass
Avocat(s) : SCP Boré et Salve de Bruneton, SCP Waquet, Farge et Hazan

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
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