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23/01/2014 | FRANCE | N°12-24681

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 2, 23 janvier 2014, 12-24681


LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 24 janvier 2006, M. X..., salarié de la société Puget service, mis à la disposition de la société Suburbaine de canalisations et de grands travaux, aux droits de laquelle se trouve la société Spac, a été victime d'un accident du travail, l'engin de chantier qu'il conduisait ayant glissé sur une pente dont le sol était gelé et effectué plusieurs tonneaux ; que cet accident a été pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primai

re d'assurance maladie de la Loire (la caisse) qui a attribué à M. X... un...

LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que le 24 janvier 2006, M. X..., salarié de la société Puget service, mis à la disposition de la société Suburbaine de canalisations et de grands travaux, aux droits de laquelle se trouve la société Spac, a été victime d'un accident du travail, l'engin de chantier qu'il conduisait ayant glissé sur une pente dont le sol était gelé et effectué plusieurs tonneaux ; que cet accident a été pris en charge au titre de la législation professionnelle par la caisse primaire d'assurance maladie de la Loire (la caisse) qui a attribué à M. X... un taux d'incapacité permanente partielle de 20 %, ramené dans les rapports entre la caisse et les sociétés Puget service et Spac à 8 % par jugement du tribunal du contentieux de l'incapacité de Lyon du 29 juin 2010 ; que M. X... a engagé devant une juridiction de sécurité sociale une action en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, lequel a appelé en la cause la société Spac afin d'être garanti du remboursement des indemnités complémentaires versées à la victime et de la charge financière de l'accident du travail ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal et les trois dernières branches du moyen unique du pourvoi incident de la société Puget service qui sont identiques, tels que reproduits en annexe :
Attendu que les sociétés Puget service et Spac font grief à l'arrêt de dire que l'accident du travail dont M. X... a été victime est imputable à une faute inexcusable ;
Mais attendu que sous le couvert des griefs non fondés de violation de l'article 455 du code de procédure civile, le moyen ne tend qu'à remettre en discussion devant la Cour de cassation l'appréciation souveraine de la valeur et de la portée des éléments de preuve par la cour d'appel qui, après avoir écarté l'attestation du chef de chantier, jugée non pertinente au regard de la chronologie des faits, a pu décider par une décision motivée, sans avoir à suivre les parties dans le détail de leur argumentation, qu'en envoyant M. X... travailler sur le chantier alors que le maître d'ouvrage n'avait pas accordé le permis de travail en raison du danger provoqué par les conditions climatiques, la société Spac, substituée à la société Puget service dans la direction du salarié, avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé celui-ci et que n'ayant pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver, elle avait commis une faute inexcusable ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le moyen unique du pourvoi incident de la société Puget service, pris en sa première branche, tel que reproduit en annexe :
Attendu que la société Puget service fait le même grief à l'arrêt ;
Mais attendu que la cour d'appel, pour reconnaître l'existence d'une faute inexcusable de l'employeur, ne s'est pas fondée sur les seules affirmations de M. X... ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le second moyen du pourvoi principal :
Vu les articles L. 241-5-1 et R. 242-6-1 du code de la sécurité sociale, ce dernier dans sa rédaction alors applicable ;
Attendu que le coût de l'accident du travail, au sens des textes susvisés, s'entend exclusivement du capital versé aux ayants droit en cas d'accident mortel et du capital représentatif de la rente accident du travail servi à la victime dont le taux d'incapacité permanente partielle est supérieur ou égal à 10 %, peu important la reconnaissance d'une faute inexcusable ;
Attendu que pour condamner la société Spac à rembourser à la société Puget service le surcroît de cotisations d'accident du travail lié à l'accident de M. X..., en précisant que le coût de l'accident mis intégralement à la charge de l'entreprise utilisatrice doit s'entendre du seul capital représentatif de la rente accident du travail, l'arrêt retient que l'accident est entièrement imputable à la faute de la société Spac et que l'article L. 241-5-1 du code de la sécurité sociale confère au juge le pouvoir de statuer sur la garantie des conséquences financières d'une reconnaissance de faute inexcusable sans restreindre ce pouvoir lorsque la rente est versée à la victime sous la forme d'un capital ;
Qu'en statuant ainsi alors qu'il ressortait de ses propres constatations que le taux d'incapacité permanente partielle de M. X... opposable aux sociétés Spac et Puget service avait été ramené à 8 % par un jugement du tribunal du contentieux de l'incapacité de Lyon du 29 juin 2010, ce dont il résultait que le coût de l'accident litigieux ne pouvait être mis à la charge en tout ou partie de l'entreprise utilisatrice ;
Et vu l'article 627 du code de procédure civile ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la société Spac à rembourser à la société Puget service le surcroît de cotisations d'accident du travail lié à l'accident en cause et prévu à l'article D. 242-6-3 du code de la sécurité sociale, avec cette précision que le coût de l'accident du travail intégralement mis à la charge de l'entreprise utilisatrice doit s'entendre du seul capital représentatif de la rente accident du travail, l'arrêt rendu le 22 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déboute la société Puget service de sa demande de remboursement du coût de l'accident ;
Condamne la société Puget service aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société Puget service ; la condamne à payer à la société Spac la somme de 3 000 euros ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois janvier deux mille quatorze.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Spac.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué :
D'AVOIR jugé que l'accident du travail dont Monsieur X... avait été victime le 24 janvier 2006 était imputable à la faute inexcusable de son employeur, la société PUGET SERVICE, et, par suite, d'avoir majoré la rente attribuée à Monsieur X... au taux maximum prévu par la loi, d'avoir rappelé que la Caisse primaire d'assurance maladie de la Loire était en droit de recouvrer sur la société PUGET SERVICE le montant de la majoration de la rente dans la limite du taux de 8 % reconnu par le Tribunal du contentieux de l'incapacité de Lyon, d'avoir condamné la société SPAC à relever et garantir la société PUGET SERVICE des conséquences financières de cet accident du travail et à lui rembourser le surcroît de cotisations d'accident du travail liées à l'accident, et d'avoir ordonné une expertise médicale de Monsieur X... ;
AUX MOTIFS QU'« en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers ce dernier d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail ; le manquement à cette obligation a je caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L.452-1 du code de la sécurité sociale lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident survenu au salarié et il suffit qu'elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée alors même que d'autres fautes ont concouru au dommage. Le jour de l'accident, Miguel X... était affecté par la S.A. SPAC, entreprise utilisatrice, à l'exécution d'un chantier réalisé pour le compte de la société GEOSEL ; il conduisait un tractopelle sur une pente à 45° dont le sol était gelé pour rejoindre un chantier ; le tractopelle a glissé et a effectué des tonneaux ; Miguel X... a été éjecté et blessé. Les circonstances de l'accident sont ainsi parfaitement déterminées ; elles ne sont d'ailleurs pas discutées par les parties ; est en divergence la question de savoir si Miguel X... a agi sur l'ordre de son supérieur ou s'est rendu sur le chantier de son propre chef et à l'insu de son supérieur. Miguel X... affirme qu'il a obéi à son supérieur hiérarchique qui lui a commandé de faire le travail et l'entreprise utilisatrice soutient le contraire. Les enquêtes effectuées par les services de l'inspection du travail et de la gendarmerie saisis par Miguel X... ont révélé que, le matin, Miguel X... a réalisé un travail avec la pelleteuse, qu'en début d'après-midi, il s'est rendu avec le tractopelle sur un autre chantier, que l'accident est survenu sur le trajet, que la réalisation de ce chantier était subordonnée à la délivrance d'un permis de travail par le maître d'ouvrage, GEOSEL et que GEOSEL n'avait pas délivré le permis en raison des conditions climatiques qui avaient gelé le sol. Le chef de chantier a déclaré aux gendarmes qu'il avait montré le matin du 24 janvier 2006 à Miguel X... les deux chantiers GEOSEL à réaliser, qu'il lui a dit que pour le second chantier "on verrait plus tard" car il présentait des risques en raison de la pente et que Miguel X... a, de sa propre initiative, sans ordre de travail et sans le permis de travail de l'exploitant, décidé de travailler sur le second chantier. Il résulte des témoignages et des constatations que le matin Miguel X... a travaillé sur le premier chantier, qu'il a pris sa pause de midi au réfectoire, qu'à 13 heures, il est retourné terminer le premier chantier et que l'accident est survenu a 13 heures 20 ; ces horaires démontrent qu'il a suffi d'environ un quart d'heure à Miguel X... pour terminer le premier chantier après sa pause. En premier lieu, Miguel X... a la qualité de salarié et se trouve en lien de subordination envers l'entreprise utilisatrice qui l'occupe ; sa version des faits est donc conforme à la réalité de son statut ; en second lieu, la version du chef de chantier n'est pas étayée par les faits car elle se heurte à deux incohérences ; d'une part, elle ne permet pas de comprendre pourquoi le second chantier a été montré au salarié s'il ne devait pas y travailler, et, d'autre part, elle implique, eu égard aux horaires, que Miguel X... n'aurait pas eu de travail et serait resté inoccupé durant toute l'après-midi. Des témoins ont attesté que, pendant la pause de midi, Miguel X... leur a affirmé qu'un tractopelle ne se renversait pas et qu'il n'y avait pas de risques alors qu'eux-mêmes mettaient en exergue les dangers ; il ne peut se déduire des déclarations de Miguel X... qu'il agissait de son propre chef, ses déclarations pouvant parfaitement venir marquer son adhésion à la décision de son supérieur ; en revanche, les témoignages confirment que plusieurs personnes savaient que Miguel X... se rendrait sur le second chantier d'après-midi. Des témoins ont attesté que Miguel X... leur a déclaré après l'accident qu'il avait fait "une connerie" ; faute de plus de précision, il n'est pas possible d'interpréter cette déclaration comme l'aveu par Miguel X... qu'il ne devait pas effectuer le travail, l'erreur pouvant aussi bien renvoyer à la manière dont Miguel X... a conduit le tractopelle et a géré la glissade de l'engin. Les éléments aux débats établissent que la S.A. SPAC a envoyé Miguel X... travailler sur un chantier alors que le maître d'ouvrage n'avait pas accordé le permis de travail en raison du danger provoqué par les conditions climatiques. Dans ces conditions, l'employeur avait conscience du danger auquel était exposé le salarié et n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver. En conséquence, l'accident du travail survenu le 24 janvier 2006 à Miguel X... est imputable à la faute inexcusable de l'employeur, la S.A. PUGET SERVICES » ;
1°) ALORS QUE la société SPAC faisait valoir que, le matin de l'accident, le chef de chantier et Monsieur X... avaient examiné les lieux pour vérifier la faisabilité des travaux ; qu'en se bornant néanmoins à affirmer, pour retenir la faute inexcusable de l'employeur, que la version du chef de chantier ne permettait pas de comprendre pourquoi ce chantier avait été montré au salarié s'il ne devait pas y travailler, sans répondre aux conclusions de la société SPAC exposant le motif de cette visite, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'en se bornant à relever, pour retenir la faute inexcusable de l'employeur, que la version du chef de chantier se heurtait à une incohérence, en ce qu'elle impliquait, eu égard aux horaires, que Monsieur X... n'aurait pas eu de travail et serait resté inoccupé durant toute l'après-midi, sans indiquer les éléments sur lesquels elle se fondait pour se livrer à une telle affirmation, la Cour d'appel a privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du Code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE la société SPAC faisait valoir que Monsieur X... savait, de par son expérience et sa formation, qu'il était nécessaire d'obtenir un permis de travail du maître de l'ouvrage, validé par l'exploitant, avant d'intervenir dans une zone du chantier ; qu'en se bornant néanmoins à relever, pour retenir la faute inexcusable de l'employeur, que la version des faits donnée par Monsieur X... était conforme à la réalité de son statut de salarié, que la version du chef de chantier impliquait, de façon incohérente, que le salarié ne devait pas travailler sur le chantier qui lui avait été montré et devait rester inoccupé tout l'après-midi, et que plusieurs personnes savaient que Monsieur X... devait se rendre sur le chantier litigieux l'après-midi, sans répondre aux conclusions de la société SPAC selon lesquelles Monsieur X... connaissait parfaitement l'impérieuse nécessité d'obtenir préalablement le permis de travail de l'exploitant après vérification de la faisabilité des travaux, la Cour d'appel a violé l'article 455 du Code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Le moyen reproche à l'arrêt infirmatif attaqué :
D'AVOIR condamné la société SPAC à rembourser à la société PUGET SERVICE le surcroît de cotisations d'accident du travail liées à l'accident de Monsieur X... et prévu par l'article D. 242-6-3 du Code de la sécurité sociale, avec cette précision que le coût de l'accident du travail intégralement mis à la charge de l'entreprise utilisatrice devait s'entendre du seul capital représentatif de la rente accident du travail ;
AUX MOTIFS QUE « l'article L.241-5-1 du Code de la sécurité sociale confère au juge le pouvoir de statuer sur la garantie des conséquences financières d'une reconnaissance de faute inexcusable sans restreindre ce pouvoir lorsque la rente est versée à la victime sous forme de capital ; l'article D.242-6-3 du Code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable eu égard à la date de l'accident vise les capitaux représentatifs des rentes et exclut uniquement "les Indemnités en capital versées après révision du taux d'incapacité permanente des victimes"*; cette exclusion ne rentre pas dans la situation de l'espèce. En application de l'article L.241-5-1 du code de la sécurité sociale, la S.A. SPAC doit être condamnée à rembourser à la S.A. PUGET SERVICES le surcroît de cotisations d'accident du travail liées à l'accident en cause et prévu par l'article D.242-6-3 du Code de la sécurité sociale, avec cette précision que le coût de l'accident du travail intégralement mis à la charge de l'entreprise utilisatrice doit s'entendre, en vertu de l'article R.242-6-1 du code de la sécurité sociale, du seul capital représentatif de la rente accident du travail » ;
ALORS QUE l'indemnité en capital attribuée au travailleur temporaire victime d'un accident du travail ayant entraîné une incapacité permanente de moins de 10 % est mise à la charge du seul employeur ; que son coût ne donne lieu à aucune répartition entre l'entreprise de travail temporaire et l'entreprise utilisatrice ; qu'en considérant néanmoins, pour condamner la société SPAC à rembourser à la société PUGET SERVICE le surcroît de cotisations d'accidents du travail lié à l'accident de Monsieur X..., que la répartition du coût de cet accident entre l'entreprise de travail temporaire et l'entreprise utilisatrice pouvait être modifiée par le juge, bien que le taux d'incapacité permanente partielle de Monsieur X... opposable aux sociétés SPAC et PUGET SERVICE ait été ramené à 8 % par jugement du Tribunal du contentieux de l'incapacité de Lyon du 29 juin 2010, ce dont il résultait qu'aucune somme ne pouvait être imputée au compte de la société SPAC, la Cour d'appel a violé les articles L.241-5-1 et R.242-6-1 du Code de la sécurité sociale.Moyen produit au pourvoi incident par Me Le Prado, avocat aux Conseils, pour la société Puget service.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR jugé que l'accident du travail dont monsieur X... avait été victime le 24 janvier 2006 était imputable à la faute inexcusable de son employeur, la société PUGET SERVICES, et par suite d'AVOIR majoré la rente attribué à monsieur X... au taux maximum prévu par la loi, d'AVOIR rappelé que la CPAM de la Loire était en droit de recouvrer sur la société PUGET SERVICE le montant de la majoration de la rente dans la limite du taux de 8 % reconnu par le tribunal du contentieux de l'incapacité de Lyon et d'AVOIR ordonné une expertise médicale de monsieur X... ;
AUX MOTIFS QU'en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l'employeur est tenu envers ce dernier d'une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail; le manquement à cette obligation a le caractère d'une faute inexcusable au sens de l'article L.452-1 du code de la sécurité sociale lorsque l'employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver ; il est indifférent que la faute inexcusable commise par l'employeur ait été la cause déterminante de l'accident survenu au salarié et il suffit qu'elle en soit une cause nécessaire pour que la responsabilité de l'employeur soit engagée alors même que d'autres fautes ont concouru au dommage. Le jour de l'accident, Miguel X... était affecté par la S.A. SPAC, entreprise utilisatrice, à l'exécution d'un chantier réalisé pour le compte de la société GEOSEL ; il conduisait un tractopelle sur une pente à 45° dont le sol était gelé pour rejoindre un chantier ; le tractopelle a glissé et a effectué des tonneaux ; Miguel X... a été éjecté et blessé. Les circonstances de l'accident sont ainsi parfaitement déterminées; elles ne sont d'ailleurs pas discutées par les parties ; est en divergence la question de savoir si Miguel X... a agi sur l'ordre de son supérieur ou s'est rendu sur le chantier de son propre chef et à l'insu de son supérieur. Miguel X... affirme qu'il a obéi à son supérieur hiérarchique qui lui a commandé de faire le travail et l'entreprise utilisatrice soutient le contraire. Les enquêtes effectuées par les services de l'inspection du travail et de la gendarmerie saisis par Miguel X... ont révélé que, le matin, Miguel X... a réalisé un travail avec la pelleteuse, qu'en début d'après-midi, il s'est rendu avec le tractopelle sur un autre chantier, que l'accident est survenu sur le trajet, que la réalisation de ce chantier était subordonnée à la délivrance d'un permis de travail par le maître d'ouvrage, GEOSEL et que GEOSEL n'avait pas délivré le permis en raison des conditions climatiques qui avaient gelé le sol. Le chef de chantier a déclaré aux gendarmes qu'il avait montré le matin du 24 janvier 2006 à Miguel X... les deux chantiers GEOSEL à réaliser, qu'il lui a dit que pour le second chantier "on verrait plus tard" car il présentait des risques en raison de la pente et que Miguel X... a, de sa propre initiative, sans ordre de travail et sans le permis de travail de l'exploitant, décidé de travailler sur le second chantier. Il résulte des témoignages et des constatations que le matin Miguel X... a travaillé sur le premier chantier, qu'il a pris sa pause de midi au réfectoire, qu'à 13 heures, il est retourné terminer le premier chantier et que l'accident est survenu à 13 heures 20 ; ces horaires démontrent qu'il a suffi d'environ un quart d'heure à Miguel X... pour terminer le premier chantier après sa pause. En premier lieu, Miguel X... a la qualité de salarié et se trouve en lien de subordination envers l'entreprise utilisatrice qui l'occupe ; sa version des faits est donc conforme à la réalité de son statut ; en second lieu, la version du chef de chantier n'est pas étayée par les faits car elle se heurte à deux incohérences ; d'une part, elle ne permet pas de comprendre pourquoi le second chantier a été montré au salarié s'il ne devait pas y travailler, et, d'autre part, elle implique, eu égard aux horaires, que Miguel X... n'aurait pas eu de travail et serait resté inoccupé durant toute l'après-midi. Des témoins ont attesté que, pendant la pause de midi, Miguel X... leur a affirmé qu'un tractopelle ne se renversait pas et qu'il n'y avait pas de risques alors qu'eux-mêmes mettaient en exergue les dangers; il ne peut se déduire des déclarations de Miguel X... qu'il agissait de son propre chef, ses déclarations pouvant parfaitement venir marquer son adhésion à la décision de son supérieur; en revanche, les témoignages confirment que plusieurs personnes savaient que Miguel X... se rendrait sur le second chantier d'après-midi. Des témoins ont attesté que Miguel X... leur a déclaré après l'accident qu'il avait fait "une connerie" ; faute de plus de précision, il n'est pas possible d'interpréter cette déclaration comme l'aveu par Miguel X... qu'il ne devait pas effectuer le travail, "erreur pouvant aussi bien renvoyer à la manière dont Miguel X... a conduit le tractopelle et a géré la glissade de l'engin. Les éléments aux débats établissent que la S.A. SPAC a envoyé Miguel X... travailler sur un chantier alors que le maître d'ouvrage n'avait pas accordé le permis de travail en raison du danger provoqué par les conditions climatiques. Dans ces conditions, l'employeur avait conscience du danger auquel était exposé le salarié et n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver. En conséquence, l'accident du travail survenu le 24 janvier 2006 à Miguel X... est imputable à la faute inexcusable de l'employeur, la S.A. PUGET SERVICES ;
1. - ALORS QUE la preuve de la faute inexcusable incombe à la victime et ne peut résulter de ses seules déclarations ; qu'ainsi qu'il résulte de l'arrêt, la question en litige était de savoir si monsieur X... avait agi sur l'ordre de son supérieur ou s'était rendu sur le chantier de son propre chef et à l'insu de son supérieur ; qu'en l'espèce, pour retenir que la SA SPAC l'avait envoyé travailler sur un chantier en dépit de conditions climatiques dangereuses et sans permis de travail du maître d'ouvrage, la Cour d'appel s'est fondée sur les seules déclarations de la victime affirmant que son supérieur hiérarchique lui avait commandé de faire le travail, ce que l'entreprise utilisatrice contestait ; qu'en statuant ainsi, pour juger établie la faute inexcusable de la société PUGET SERVICE, la Cour d'appel a violé l'article 1315 du code civil ensemble l'article L.452-1 du code de la sécurité sociale ;
2. - ALORS QUE la société SPAC faisait valoir que, le matin de l'accident, le chef de chantier et monsieur X... avaient examiné les lieux pour vérifier la faisabilité des travaux ; qu'en se bornant néanmoins à affirmer, pour retenir la faute inexcusable de l'employeur, que la version du chef de chantier ne permettait pas de comprendre pourquoi ce chantier avait été montré au salarié s'il ne devait pas y travailler, sans répondre aux conclusions de la société SPAC exposant le motif de cette visite, la Cour d'appel aurait violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3. - ALORS QU'en se bornant à relever, pour retenir la faute inexcusable de l'employeur, que la version du chef de chantier se heurtait à une incohérence, en ce qu'elle impliquait, eu égard aux horaires, que monsieur X... n¿aurait pas eu de travail et serait resté inoccupé durant toute l'après-midi, sans indiquer les éléments sur lesquels elle se fondait pour se livrer à une telle affirmation, la Cour d'appel aurait privé sa décision de motifs, en violation de l'article 455 du code de procédure civile ;
4. - ALORS QUE la société SPAC faisait valoir que monsieur X... savait, de par son expérience et sa formation qu'il était nécessaire d'obtenir un permis de travail du maître de l'ouvrage, validé par l'exploitant, avant d'intervenir dans une zone du chantier ; qu'en se bornant néanmoins à relever, pour retenir la faute inexcusable de l'employeur, que la version des faits donnée par monsieur X... était conforme à la réalité de son statut de salarié, que la version du chef de chantier impliquait, de façon incohérente, que le salariée ne devait pas travailler sur le chantier qui lui avait été montré et devait rester inoccupé tout l'après-midi, et que plusieurs personnes savaient que monsieur X... devait se rendre sur le chantier litigieux l'après-midi sans répondre aux conclusions de la société SPAC selon lesquelles monsieur X... connaissait parfaitement l'impérieuse nécessité d'obtenir préalablement le permis de travail de l'exploitant après vérification de la faisabilité des travaux, la Cour d'appel aurait violé l'article 455 du code de procédure civile ;


Synthèse
Formation : Chambre civile 2
Numéro d'arrêt : 12-24681
Date de la décision : 23/01/2014
Sens de l'arrêt : Cassation partielle sans renvoi
Type d'affaire : Civile

Analyses

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Conséquences financières - Travail temporaire - Faute imputable à l'entreprise utilisatrice - Coût de l'accident du travail - Définition - Portée

SECURITE SOCIALE, ACCIDENT DU TRAVAIL - Faute inexcusable de l'employeur - Conséquences financières - Charge - Répartition - Modalités - Travail temporaire - Faute imputable à l'entreprise utilisatrice - PortéeTRAVAIL TEMPORAIRE - Sécurité sociale - Accident du travail - Faute inexcusable - Faute imputable à l'entreprise utilisatrice - Conséquences financières - Charge - Répartition - Modalités

Le coût de l'accident du travail au sens de l'article L. 241-5-1 du code de la sécurité sociale et de l'article R. 242-6-1 du même code dans sa rédaction alors applicable, s'entend exclusivement du capital versé aux ayants droit en cas d'accident mortel et du capital représentatif de la rente accident du travail servi à la victime dont le taux d'incapacité permanente partielle est supérieur ou égal à 10 %, peu important la reconnaissance d'une faute inexcusable. Dès lors viole ces textes, la cour d'appel qui condamne l'entreprise utilisatrice à rembourser à la société d'intérim, employeur, le surcroît de cotisations lié à l'accident du travail de l'un de ses salariés, alors qu'elle constatait que le taux d'incapacité permanente partielle opposable à l'employeur était inférieur à 10 %


Références :

articles L. 241-5-1 et R. 242-6-1 du code de la sécurité sociale

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 22 juin 2012

A rapprocher :2e Civ., 17 décembre 2009, pourvoi n° 08-20690, Bull. 2009, II, n° 293 (rejet)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 2e, 23 jan. 2014, pourvoi n°12-24681, Bull. civ. 2014, II, n° 14
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2014, II, n° 14

Composition du Tribunal
Président : Mme Flise
Avocat général : Mme de Beaupuis
Rapporteur ?: Mme Touati
Avocat(s) : Me Le Prado, SCP Gatineau et Fattaccini

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2014:12.24681
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