LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu leur connexité, joint les pourvois n° Z 12-20. 264, A 12-20. 265 et B 12-20. 266 ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon les arrêts attaqués, (Douai, 30 mars 2012), que la société Metaleurop Nord, filiale de la société Metaleurop SA, a notifié le licenciement pour motif économique de MM. X... et B... par lettres du 13 décembre 2002 et de M. Y... par lettre du 2 janvier 2003 ; que la société Metaleurop Nord a été placée en liquidation judiciaire le 10 mars 2003, MM. Z... et A... étant désignés liquidateurs judiciaires ; que la société-mère Metaleurop SA, nouvellement désignée Recyclex, placée en redressement judiciaire le 13 novembre 2003, a bénéficié d'un plan de continuation par jugement du tribunal de commerce du 24 novembre 2005 ; que statuant par jugement du 27 juin 2008, le conseil de prud'hommes, saisi par les salariés de diverses demandes, a dit que la société Metaleurop SA avait la qualité de co-employeur des salariés de la société Metaleurop Nord, constaté le désistement d'instance de MM. X..., Y... et B... concernant leurs demandes dirigées contre les liquidateurs judiciaires de la société Metaleurop Nord, jugé les licenciements sans cause réelle et sérieuse et fixé au passif du redressement judiciaire de la société Recylex les créances des salariés ;
Attendu que les liquidateurs judiciaires de la société Metaleurop Nord font grief aux arrêts de déclarer recevables les demandes des salariés dirigées contre eux, de fixer à certaines sommes le montant des dommages-intérêts dus et de dire qu'elles seront inscrites au passif de la liquidation de la société Metaleurop Nord, alors, selon le moyen :
1°/ que le désistement de l'intégralité des demandes formées à l'encontre d'un défendeur, qui met fin à l'instance dans les rapports entre le demandeur et ce défendeur, interdit au premier de présenter de nouvelles demandes à l'encontre du même défendeur, dans le cadre de la procédure d'appel interjetée par une autre partie ; que dès lors, en déclarant recevables les demandes dirigées en cause d'appel contre les liquidateurs judiciaires de la société Metaleurop Nord, lorsque le conseil de prud'hommes avait constaté le désistement d'instance des salariés emportant extinction de l'instance et son dessaisissement concernant les demandes formulées contre MM. Z... et A..., ès qualités, la cour d'appel a violé les articles 384 et 394 et suivants du code de procédure civile ainsi que l'article R. 1452-7 du code du travail ;
2°/ que ne constitue pas une demande nouvelle recevable en cause d'appel celle qui avait déjà été formée à l'identique dans son fondement et son quantum en première instance, mais contre un autre défendeur, et à laquelle le conseil de prud'hommes avait intégralement fait droit ; que les salariés qui avaient obtenu en première instance la condamnation de la société Recylex au paiement des indemnités pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse réclamées à l'encontre de celle-ci, ne pouvaient, en cause d'appel, demander que les mêmes indemnités soient fixées au passif de la société Metaleurop Nord ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 546 et 548 du code de procédure civile et R. 1452-7 du code du travail ;
Mais attendu, d'une part, que le désistement d'instance n'emporte pas renonciation à l'action, et, d'autre part, que les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel et contre une partie à l'égard de laquelle un désistement a été constaté ; que c'est à bon droit que la cour d'appel a statué comme elle l'a fait ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne MM. Z... et A..., ès qualités, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, les condamne à payer à MM. X..., Y... et B... la somme globale de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un janvier deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit aux pourvois par la SCP Baraduc et Duhamel, avocat aux Conseils, pour MM. Z... et A..., ès qualités.
IL EST FAIT GRIEF aux trois arrêts attaqués d'avoir déclaré recevables les demandes de MM. X..., Y... et B... dirigées contre MM. Z... et A... ès qualités de liquidateurs judiciaires de la société Metaleurop Nord, d'avoir fixé à certaines sommes le montant des dommages intérêts dus aux salariés et d'avoir dit que celles-ci seraient inscrites au passif de la société Metaleurop Nord ;
AUX MOTIFS QUE le conseil des prud'hommes a déduit de ce que les salariés ne formulaient à l'audience de demandes qu'à l'encontre de la société-mère Recylex, anciennement dénommée Metaleurop SA, un désistement implicite des demandes dirigées contre MM. Z... et A... ès qualités de liquidateurs judiciaires de la société filiale Metaleurop Nord ; qu'il a constaté, par voie de conséquence, l'extinction de l'instance et son dessaisissement ; que les salariés reprochent aux premiers juges d'avoir analysé en un désistement implicite de leurs demandes contre les liquidateurs judiciaires de Metaleurop Nord et de l'AGS ce qui était en réalité une demande en déclaration de jugement commun et d'avoir, ce faisant, confondu le désistement d'instance et la modification de leur prétention initiale, qui tendait à l'allocation de dommages et intérêts ; qu'ils considèrent qu'il s'agissait d'une demande additionnelle, recevable comme telle en cause d'appel ; qu'aux termes de l'article 394 du code de procédure civile, le demandeur peut, en toutes matières, se désister de sa demande en vue de mettre fin à l'instance ; que selon l'article 397 du même code, le désistement peut être exprès ou implicite ; qu'en matière prud'homale toutefois, les demandes nouvelles dérivant du même contrat de travail sont recevables même en appel, de sorte qu'il est possible de présenter à hauteur de la cour une demande de laquelle la partie s'est désistée en première instance, le principe de l'unicité de l'instance ne s'y opposant pas ; que ce seul élément suffit à écarter la fin de non-recevoir soulevée ;
1°) ALORS QUE le désistement de l'intégralité des demandes formées à l'encontre d'un défendeur, qui met fin à l'instance dans les rapports entre le demandeur et ce défendeur, interdit au premier de présenter de nouvelles demandes à l'encontre du même défendeur, dans le cadre de la procédure d'appel interjetée par une autre partie ; que dès lors, en déclarant recevables les demandes dirigées en cause d'appel contre les liquidateurs judiciaires de la société Metaleurop Nord, lorsque le conseil de prud'hommes avait constaté désistement d'instance des salariés emportant extinction de l'instance et son dessaisissement concernant les demandes formulées contre MM. Z... et A... ès qualités, la cour d'appel a violé les articles 384 et 394 et suivants du code de procédure civile ainsi que l'article R 1452-7 du code du travail ;
2°) ALORS QUE ne constitue pas une demande nouvelle recevable en cause d'appel celle qui avait déjà été formée à l'identique dans son fondement et son quantum en première instance, mais contre un autre défendeur, et à laquelle le conseil de prud'hommes avait intégralement fait droit ; que les salariés qui avaient obtenu en première instance la condamnation de la société Recylex au paiement des indemnités pour licenciement sans cause réelle ni sérieuse réclamées à l'encontre de celle-ci, ne pouvaient, en cause d'appel, demander que les mêmes indemnités soient fixées au passif de la société Metaleurop Nord ; que dès lors, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les articles 546 et 548 du code de procédure civile et R 1452-7 du code du travail.