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18/12/2013 | FRANCE | N°12-25686;12-25687;12-25688;12-25689;12-25690;12-25691;12-25692;12-25693;12-25694;12-25695;12-25696;12-25697;12-25698;12-25699;12-25700;12-25701;12-25702;12-25703;12-25704;12-25705;12-25706;12-25707;12-25708;12-25709;12-25710;12-25711;12-25712;12-25713;12-25714;12-25715;12-25716;12-25717;12-25718;12-25719;12-25720;12-25721;12-25722;12-25723;12-25724;12-25725;12-25726;12-25727;12-25728;12-25729;12-25730;12-25731;12-25732;12-25733;12-25734

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 18 décembre 2013, 12-25686 et suivants


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° T 12-25.686 à V 12-25.734 ;
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu l'article 19 du Règlement n° 44/2001/CE du Conseil du 22 décembre 2000 ;
Attendu, selon ce texte, que l'employeur ayant son domicile dans le territoire d'un Etat membre peut être attrait dans un autre Etat membre, notamment devant le tribunal du lieu où le travailleur accomplit habituellement son tra

vail ; que selon l'interprétation faite par la Cour de justice des Commun...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois n° T 12-25.686 à V 12-25.734 ;
Sur le moyen relevé d'office, après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l'article 1015 du code de procédure civile :
Vu l'article 19 du Règlement n° 44/2001/CE du Conseil du 22 décembre 2000 ;
Attendu, selon ce texte, que l'employeur ayant son domicile dans le territoire d'un Etat membre peut être attrait dans un autre Etat membre, notamment devant le tribunal du lieu où le travailleur accomplit habituellement son travail ; que selon l'interprétation faite par la Cour de justice des Communautés européennes des dispositions de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, qui est transposable pour l'application de l'article 19 du Règlement n° 44/2001/CE, l'employeur est défini comme la personne pour le compte de laquelle le travailleur accomplit pendant un certain temps, en sa faveur et sous sa direction, des prestations en contrepartie desquelles elle verse une rémunération ;
Attendu, selon les arrêts attaqués statuant en référé, que Mme X... et quarante-huit autres salariés de la société Sodimédical, filiale à 100 % de la société Lohmann et Rauscher France, elle-même détenue en totalité par la société de droit allemand Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG, ont saisi la juridiction prud'homale aux fins d'obtenir la condamnation solidaire des sociétés Sodimédical et Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG à leur fournir, sous astreinte, la prestation de travail et à leur payer, à compter du mois d'octobre 2011, leurs salaires ;
Attendu que pour rejeter l'exception d'incompétence opposée par la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG et accueillir les demandes formées à son encontre, les arrêts, après avoir rappelé qu'en application des dispositions de l'article R. 1455-6 du code du travail, la formation de référé, juge de l'apparence, peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite, d'une part, constatent que les salariés de la société Sodimédical exercent leur activité à son siège social à Plancy-l'Abbaye (Aube), d'autre part, relèvent que le rapport de l'expert du comité d'entreprise de la société Sodimédical, qui conclut que celle-ci, en tant qu'unité de production, ne possède aucune latitude pour développer et prospecter de nouveaux débouchés, et que la société Lohmann et Rauscher France, dont c'était la responsabilité, a retiré brutalement sa clientèle à la société de production et ce, sans qu'aucune alternative économique n'ait pu être présentée et a fortiori mise en oeuvre, que le rapport d'enquête du juge-commissaire, dont il résulte que la société Sodimédical est une filiale à 100 % de Lohmann et Rauscher France, elle-même filiale à 100 % de Lohmann et Rauscher GmbH et que le président du conseil d'administration de la société de droit allemand est également celui du conseil d'administration de la société mère française, que, depuis deux ans, Sodimédical n'avait pour client unique que la société Lohmann et Rauscher France, que toute la comptabilité Sodimedical est traitée chez Lohmann et Rauscher France, que les budgets Sodimédical sont validés directement par l'Allemagne (donc Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG), via Lohmann et Rauscher France, que la société de droit allemand a consenti une avance de trésorerie à Sodimédical et un abandon de créances au profit de Lohmann et Rauscher France, et que les conclusions du juge-commissaire, selon lesquelles il appartiendra à l'administrateur judiciaire d'avoir la possibilité d'appeler directement en comblement de passif la société Lohmann et Rauscher France ainsi qu'éventuellement la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG, justifient d'une apparence de confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre la maison-mère allemande via Lohmann et Rauscher France et la société Sodimédical, qui ne disposait d'aucune autonomie ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne résultait pas de ses constatations une situation apparente de coemploi constituée par une confusion d'intérêts, d'activités et de direction se manifestant par une immixtion de la société mère dans la gestion économique et sociale de sa filiale et justifiant sa compétence à l'égard de la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG , la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'ils se déclarent compétents pour statuer sur les demandes formées à l'encontre de la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG, et la condamnent, sous astreinte, à fournir aux salariés de la société Sodimédical la prestation de travail et à leur payer diverses sommes, les arrêts rendus le 11 juillet 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne les défendeurs aux dépens ;
Vu l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande de la SCP Didier et Pinet ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite des arrêts partiellement cassés ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit décembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens communs produits par la SCP Gaschignard, avocat aux Conseils, pour la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG, demanderesse aux pourvois n°s T 12-25.686 à V 12-25.734
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
:
Il est fait grief à l'arrêt attaqué de s'être déclaré matériellement et territorialement compétent pour connaître des demandes formées par les salariés de la société Sodimedical à l'encontre de la société allemande Lohmann et Rauscher GmbH et Co.KG,
AUX MOTIFS QUE c'est par des motifs pertinents que la cour adopte expressément que le conseil des prud'hommes de Troyes a retenu sa compétence matérielle et territoriale, les salariés ayant pu saisir cette juridiction en application des articles R. 1451-1 du code du travail et 749 du code de procédure civile, en présence de deux défendeurs dont l'un a son siège à Plancy-L'Abbaye dans l'Aube ; qu'en outre, le contrat de travail ayant été conclu en France et s'exerçant en France dans le ressort du conseil des prud'hommes de Troyes, les salariés ont pu attraire la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG devant cette juridiction ;
ET AUX MOTIFS QU¿aux termes des articles R. 1451-1 du code du travail et 749 du code de procédure civile, la procédure devant les juridictions prud'homales est régie par les dispositions du livre premier du code de procédure civile sous réserve des dispositions du code du travail ; qu'en application de l'alinéa 2 de l'article 42 du code de procédure civile, lorsqu'il y a plusieurs défendeurs, le demandeur saisit, à son choix, la juridiction du lieu où demeure l'un d'eux ; que pour soutenir, in limine litis, l'incompétence matérielle et territoriale du conseil des prud'hommes de Troyes, la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co. KG rappelle que la juridiction prud'homale est exclusivement compétente pour connaître des litiges individuels entre salariés et employeurs et que cette règle est d'ordre public ; qu'elle affirme qu'en l'absence de démonstration de sa qualité d'employeur conjoint, seuls les tribunaux civils de droit allemand sont juridiquement compétents pour connaître des demandes formées à son encontre ; que les salariés ont conclu un contrat de travail avec la SARL Sodimedical ; que la qualification de ce contrat n'est pas contestée ; que les salariés invoquent l'entière dépendance de leur employeur à l'égard de la société Lohmann et Rauscher Gmbh et Co KG pour justifier l'ensemble des demandes formulées à son encontre ; qu'en raison de la pluralité de défendeurs, ils se trouvent nécessairement en droit de se prévaloir de la prorogation de compétence édictée par l'article 42 alinéa 2 du code de procédure civile pour saisir le conseil des prud'hommes du lieu du siège social de l'une des deux sociétés en cause ; que par conséquent, le conseil des prud'hommes de Troyes est territorialement et matériellement compétent pour connaître des demandes formées par les salariés à l'encontre de la SARL Sodimedical et de la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co. KG ;
1° ALORS QUE la prorogation de compétence prévue par l'article 42, alinéa 2, du code de procédure civile, applicable dans l'ordre international, suppose que les diverses demandes, dirigées contre des défendeurs différents, soient dans un lien étroit de connexité ; qu'en affirmant qu'en raison de la pluralité de défendeurs, les salariés étaient « nécessairement » en droit de saisir la juridiction française, lieu du siège social de l'une des deux sociétés en cause, sans constater que les demandes dirigées contre la société Lohmann et Rauscher Gmbh et Co KG présentaient un lien étroit de connexité avec les demandes présentées contre la société Sodimedical, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard de l'article 42 du code de procédure civile ;
2° ALORS QUE la juridiction prud'homale connaît des seuls différends qui peuvent s'élever à l'occasion de tout contrat de travail entre les employeurs et les salariés qu'ils emploient ; que la société Lohmann et Rauscher Gmbh et Co KG faisait valoir qu'elle n'était pas liée aux salariés de la société Sodimedical par un contrat de travail, qu'elle n'avait pas même la qualité de co-employeur, et qu'en conséquence le juge prud'homal n'était pas compétent pour connaître des demandes formées à son encontre ; que pour écarter cette exception d'incompétence, la cour d'appel s'est bornée à constater que les salariés étaient liés par un contrat de travail à la société Sodimedical et qu'ils invoquaient « l'entière dépendance » de celle-ci à l'égard de la société Lohmann et Rauscher Gmbh et Co KG ; qu'en statuant par de tels motifs, d'où il ne résulte pas que les demandeurs étaient liés à la société Lohmann et Rauscher Gmbh et Co KG par un contrat de travail, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 1411-1 du code du travail.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire) :
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir partiellement infirmé le jugement entrepris et d'avoir dit y avoir lieu à référé, d'avoir fait injonction à la société Lohmann et Rauscher Gmbh et Co KG de fournir aux salariés la prestation de travail conformément à leur contrat de travail et de régulariser le paiement des cotisations de la mutuelle souscrite auprès de Vigie sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard et par salarié à compter du huitième jour suivant la notification de l'arrêt, de l'avoir condamnée à payer les salaires nets d'octobre, novembre, décembre 2011 et janvier 2012, sous astreinte de 400 euros par jour de retard et par salarié à compter du huitième jour suivant la notification de l'arrêt, de l'avoir condamnée à la reprise du paiement des salaires au 30 ou 31 de chaque mois sous astreinte de 400 euros par jour de retard et par salarié passé le terme échu, et de l'avoir condamnée solidairement avec la société Sodimedical au paiement de la prime trimestrielle brute du mois d'octobre 2011,
AUX MOTIFS QUE qu'en application de l'article R. 1455-6 du code du travail, la formation de référé, juge de l'apparence, peut toujours, même en présence d'une contestation sérieuse, prescrire les mesures conservatoires ou de remise en état qui s'imposent pour prévenir un dommage imminent ou faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu'aux termes de l'article R. 1455-5 du code du travail, dans tous les cas d'urgence, le conseil des prud'hommes peut ordonner toutes les mesures que justifie l'existence d'un différend ; qu'en l'espèce, même si la reconnaissance de la qualité de co-employeur relève d'une décision au fond, il n'est ni contestable ni contesté que le contrat de travail conclu entre la SARL Sodimedical et les salariés ne sont pas rompus et que ces salariés n'ont plus ni travail, ni rémunération depuis plusieurs mois, ce qui constitue un trouble manifestement illicite qu'il y a urgence à faire cesser ; qu'il y a donc lieu à statuer en référé contrairement à ce qu'a retenu le conseil des prud'hommes de Troyes dont l'ordonnance sera infirmée sur ce point ; que les salariés produisent un plan de sauvegarde de l'emploi du 23 novembre 2010 concernant Sodimedical, un document intitulé « examen du plan de sauvegarde de l'emploi », « constat provisoire de l'expert du comité d'entreprise » de Sodimedical, établi par un cabinet d'expertise comptable en juin 2010 ainsi qu'un rapport d'enquête établi par un juge enquêteur désigné par jugement du tribunal de commerce du 5 juillet 2011 conformément aux dispositions des articles L. 621-1 et L. 623-2 du code de commerce ; que dans le plan de sauvegarde, on retrouve cette conclusion que la transformation de Sodimedical entre 2005 et 2006 en simple sous-traitant du groupe mis en concurrence avec les autres fournisseurs sans aucune marge de manoeuvre est une condamnation pure et simple du site ; que s'agissant du rapport de l'expert du comité d'entreprise, il conclut que de toute évidence, l'arrêt de l'activité étant bien trop brutale pour être attribuée au contexte général de crise et aux difficultés du secteur de la santé ; qu'il ajoute que, alors que la société en tant qu'unité de production ne possède aucune latitude pour développer et prospecter de nouveaux débouchés, la société commerciale Lohmann et Rauscher France dont c'était la responsabilité a retiré brutalement sa clientèle à la société de production et ce, sans qu'aucune alternative économique n'ait pu être présentée et a fortiori mise en oeuvre ; que s'agissant du rapport d'enquête du juge commissaire, il retient ce qui suit : la SARL Sodimedical est filiale à 100 % de la SAS Lohmann et Rauscher France, ellemême filiale à 100 % de la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG (aux termes de l'extrait Kbis produit, le président du conseil d'administration de Lohmann et Rauscher France est d'ailleurs la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG) ; que les résultats du groupe cumulés du 31 décembre 2008 au 31 décembre 2009 font apparaître un bénéfice de 31.977.774,00 euros, le chiffre d'affaires étant apprécié à un peu plus de 19.000.000 euros entre 2008 et 2009, soit une augmentation de 4,80 % ; que le juge enquêteur explique que depuis deux ans, Sodimedical n'avait pour client unique que la SAS Lohmann et Rauscher France, les clients qu'elle pouvait avoir en direct étant remontés directement chez cette dernière ; qu¿il précise que toute la comptabilité Sodimedical est traitée chez Lohmann et Rauscher France, que les budgets Sodimedical sont validés directement par l'Allemagne (donc Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG), via Lohmann et Rauscher France (maintenance, informatique, logiciels, matériaux) ; qu¿il indique que le procès-verbal du conseil d'administration en date du 16 juin 2011 mentionne notamment qu'il n'y avait plus de trésorerie chez Sodimedical, que le tiers des salaires du mois de mai a été versé grâce à une avance de trésorerie consentie par le groupe ; qu¿à cet égard, le rapport mentionne qu'en 2010, la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG a consenti un abandon de créances à la SAS Lohmann et Rauscher France à hauteur de 1.500.000,00 euros ; que les conclusions du juge enquêteur sont les suivantes : « les éléments de l'enquête confirment indéniablement la mise sous perfusion et la dépendance totale de la société Sodimedical vis-à-vis de sa maison mère française et in extenso vis-à-vis de la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG (maison mère de droit allemand) depuis plusieurs années¿ Il appartiendra à l'administrateur judiciaire d'avoir la possibilité d'appeler directement en comblement de passif la société Lohmann et Rauscher France ainsi qu'éventuellement la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG » ; que ces rapports ou conclusions sont certes contestés par la Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG qui toutefois ne produit au débat aucune pièce venant expressément les contredire ; que dès lors, ces documents justifient d'une apparence de confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre la maison-mère allemande, via Lohmann et Rauscher France et la société Sodimedical qui ne disposait d'aucune autonomie ; qu¿il sera donc fait droit aux demandes de condamnation de la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG ; qu¿il convient de faire injonction à la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG de fournir aux salariés la prestation de travail conformément à leur contrat de travail et ce sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard et par salarié à compter du huitième jour suivant la notification de l'arrêt et de régulariser le paiement des cotisations de la mutuelle souscrite auprès de Vigie et ce sous astreinte de 1.000,00 euros par jour de retard et par salarié à compter du huitième jour suivant la notification de la décision ; qu¿il convient de condamner la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG à payer les salaires nets d'octobre, novembre, décembre 2011 et janvier 2012 sous astreinte de 400 euros par jour de retard et par salarié à compter du huitième jour suivant la notification de l'arrêt et de la condamner à la reprise du paiement des salaries au 30 ou 31 de chaque mois, condamnation sous astreinte de 400 euros par jour de retard et par salarié passé le terme échu ; que la société Sodimedical précise qu'il n'y a pas lieu à astreinte puisqu'elle a fait les démarches nécessaires pour remplir ses obligations en se déclarant en état de cessation des paiements, le projet de fermeture du site ayant échoué pour des raisons indépendantes de sa volonté ; qu¿il résulte de ce qui précède que le défaut de paiement résulte de la carence des sociétés ; que l'astreinte est justifiée ;
1° - ALORS QUE exerçant ses pouvoirs dans la limite de la compétence du conseil des prud'hommes, le juge des référés, juge de l'évidence, peut seulement ordonner les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ; qu'il ne peut trancher lui-même la contestation relative à la qualité de co-employeur d'une société membre du même groupe que l'employeur ; qu'après avoir constaté l'existence d'une contestation sérieuse sur la qualité de co-employeur de la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG, la cour d'appel a estimé que le juge des référés, « juge de l'apparence », pouvait rechercher s'il existait une « apparence » de co-emploi, et jugeant qu'il existait une « apparence » de confusion d'intérêts, d'activités et de direction entre la maison-mère allemande, via la maison mère française, et la société Sodimedical, elle a fait droit aux demandes dirigées contre celle-ci ; qu'en statuant ainsi, le juge des référés a excédé ses pouvoirs et violé les articles R. 1455-5 et R. 1455-7 du code du travail ;
2° - ALORS QU'une société relevant du même groupe que l'employeur n'est pas, en cette seule qualité, débitrice des obligations de celui-ci à l'égard de ses salariés, à moins que sa qualité de co-employeur ne soit pas sérieusement contestable ; que ne peut dès lors constituer un trouble manifestement illicite le fait pour une société, dont la qualité de co-employeur est contestée, de ne pas fournir du travail aux salaires d'une société de son groupe qui a cessé toute activité et ne remplit plus ellemême cette obligation ; qu'en condamnant la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG à fournir du travail aux salariés de la société Sodimedical et à régler les cotisations de la mutuelle souscrite à leur profit, au motif que la société Sodimedical est filiale à 100 % de la société Laboratoires Lohmann et Rauscher, elle-même filiale à 100 % de la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG, après avoir pourtant constaté qu'il existait une contestation sérieuse sur le point de savoir si cette dernière avait la qualité de co-employeur, la cour d'appel a violé les articles R. 1455-6 et R. 1455-7 du code du travail ;
3° - ALORS QU'une société relevant du même groupe que l'employeur n'est pas, en cette seule qualité, débitrice des obligations de celui-ci à l'égard de ses salariés, à moins que sa qualité de co-employeur ne soit pas sérieusement contestable ; que ne peut dès lors constituer un trouble manifestement illicite le fait, pour une société, dont la qualité de co-employeur est contestée, de ne pas acquitter les cotisations dues par une société de son groupe au titre du contrat de mutuelle souscrit au profit des salariés de cette filiale ; qu'en condamnant la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG, au motif que la société Sodimedical est filiale à 100 % de la société Laboratoires Lohmann et Rauscher, elle-même filiale à 100 % de la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG, après avoir constaté qu'il existait une contestation sérieuse sur le point de savoir si cette dernière avait la qualité de coemployeur, la cour d'appel a violé les articles R. 1455-6 et R. 1455-7 du code du travail ;
4° - ALORS, subsidiairement, QUE la situation de co-emploi entre deux sociétés membres du même groupe suppose une confusion d'intérêts, d'activité et de direction conduisant l'une à s'immiscer directement dans la gestion de l'autre et dans la direction de son personnel ; qu'il résulte seulement de l'arrêt que la société Sodimedical est filiale à 100 % de la société Laboratoires Lohmann et Rauscher, ellemême filiale à 100 % de la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG, que la société Sodimedical avait pour client unique la société Lohmann et Rauscher France et que toute la comptabilité de la société Sodimedical est traitée chez Lohmann et Rauscher France ; qu'en statuant par de tels motifs impropres à caractériser une confusion d'intérêts, d'activité et de direction directement entre la société Sodimedical et la société Lohmann et Rauscher GmbH et Co KG, et d'où ne résulte pas que celle-ci se soit immiscée directement dans la gestion et la direction du personnel de la société Sodimedical, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 1221-1 du code du travail ;
5° - ALORS, subsidiairement, QUE l'employeur ne peut être condamné à exécuter son obligation de fournir du travail à ses salariés que si l'exécution de cette obligation n'apparaît pas manifestement impossible ; qu'à défaut, les salariés peuvent seulement prétendre à l'octroi de dommages et intérêts ; qu'en ordonnant que du travail soit fourni aux salariés, sous astreinte de 1.000 euros par jour de retard et par salarié à compter du huitième jour suivant la notification de l'arrêt, sans rechercher si, du fait de la cessation d'activité de la société Sodimédical et de l'ouverture d'une procédure de liquidation judiciaire à son encontre, l'exécution de cette obligation n'était pas manifestement impossible, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles R. 1455-6 et R. 1455-7 du code du travail.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 12-25686;12-25687;12-25688;12-25689;12-25690;12-25691;12-25692;12-25693;12-25694;12-25695;12-25696;12-25697;12-25698;12-25699;12-25700;12-25701;12-25702;12-25703;12-25704;12-25705;12-25706;12-25707;12-25708;12-25709;12-25710;12-25711;12-25712;12-25713;12-25714;12-25715;12-25716;12-25717;12-25718;12-25719;12-25720;12-25721;12-25722;12-25723;12-25724;12-25725;12-25726;12-25727;12-25728;12-25729;12-25730;12-25731;12-25732;12-25733;12-25734
Date de la décision : 18/12/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

UNION EUROPEENNE - Coopération judiciaire en matière civile - Compétence judiciaire, reconnaissance et exécution des décisions - Règlement (CE) n° 44/2001 - Article 19 - Domaine d'application - Cas - Coemployeur - Qualité résultant d'une confusion d'intérêts

PRUD'HOMMES - Compétence - Compétence territoriale - Domaine d'application - Cas - Employeur établi dans un Etat membre de l'Union européenne - Condition CONFLIT DE JURIDICTIONS - Compétence internationale - Règlement (CE) n° 44/2001 du 22 décembre 2000 - Article 19 - Compétence en matière de contrats individuels de travail - Employeur - Définition - Portée CONTRAT DE TRAVAIL, EXECUTION - Employeur - Détermination - Co-employeurs - Caractérisation - Défaut - Cas

En application de l'article 19 du Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000, l'employeur qui a son domicile dans le territoire d'un autre Etat membre peut être attrait dans un autre Etat membre, notamment devant le tribunal du lieu où le travailleur accomplit habituellement son travail. Selon l'interprétation faite par la Cour de justice des Communautés européennes des dispositions de la Convention de Bruxelles du 27 septembre 1968, qui est transposable pour l'application du règlement, l'employeur est la personne pour le compte de laquelle le travailleur accomplit pendant un certain temps, en sa faveur et sous sa direction, des prestations en contrepartie desquelles elle verse une rémunération. Doit en conséquence être cassé l'arrêt qui retient la compétence du juge prud'homal pour connaître d'une demande en paiement des salaires formée par des salariés travaillant en France et dirigée contre une société ayant son siège en Allemagne et qui condamne celle-ci en qualité de coemployeur, dès lors qu'il ne résulte pas de ses constatations une situation apparente de coemploi constituée par une confusion d'intérêts, d'activité et de direction se manifestant par une immixtion de la société mère dans la gestion économique et sociale de sa filiale et permettant de justifier sa compétence


Références :

article 19 du Règlement (CE) n° 44/2001 du Conseil, du 22 décembre 2000

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 11 juillet 2012

Sur la définition du coemploi, dans le même sens que :Soc., 6 juillet 2011, pourvoi n° 09-69689, Bull. 2011, V, n° 185 (cassation partielle). Sur l'incidence de la réunion des critères du coemploi s'agissant de la compétence de la juridiction prud'homale à l'égard d'une société ayant son siège à l'étranger, à rapprocher :Soc., 30 novembre 2011, pourvoi n° 10-22971, Bull. 2011, V, n° 284 (rejet)

arrêt cité


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Proposition de citation : Cass. Soc., 18 déc. 2013, pourvoi n°12-25686;12-25687;12-25688;12-25689;12-25690;12-25691;12-25692;12-25693;12-25694;12-25695;12-25696;12-25697;12-25698;12-25699;12-25700;12-25701;12-25702;12-25703;12-25704;12-25705;12-25706;12-25707;12-25708;12-25709;12-25710;12-25711;12-25712;12-25713;12-25714;12-25715;12-25716;12-25717;12-25718;12-25719;12-25720;12-25721;12-25722;12-25723;12-25724;12-25725;12-25726;12-25727;12-25728;12-25729;12-25730;12-25731;12-25732;12-25733;12-25734, Bull. civ. 2013, V, n° 312
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, V, n° 312

Composition du Tribunal
Président : M. Lacabarats
Avocat général : M. Foerst
Rapporteur ?: Mme Ducloz
Avocat(s) : SCP Didier et Pinet, SCP Gaschignard

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.25686
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