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11/12/2013 | FRANCE | N°12-25974

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 11 décembre 2013, 12-25974


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... est l'auteur des paroles des chansons intitulées « A vava inouva », « Tagrawla », « Awah Awah » et « Cfiy », composées et interprétées par M. Y..., que la société Sony Music Entertainment France (la société Sony) a, en vertu d'un contrat d'enregistrement exclusif conclu avec M. Y..., produit deux phonogrammes du commerce contenant les oeuvres dérivées « A vava inouva 2 », « Révolution (Tagrawla 2) », « Illusions (Awah Awah 2) » et « Mémoire (Cf

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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que M. X... est l'auteur des paroles des chansons intitulées « A vava inouva », « Tagrawla », « Awah Awah » et « Cfiy », composées et interprétées par M. Y..., que la société Sony Music Entertainment France (la société Sony) a, en vertu d'un contrat d'enregistrement exclusif conclu avec M. Y..., produit deux phonogrammes du commerce contenant les oeuvres dérivées « A vava inouva 2 », « Révolution (Tagrawla 2) », « Illusions (Awah Awah 2) » et « Mémoire (Cfiy 2) », ainsi qu'un DVD reproduisant des extraits des oeuvres « Tagrawla » et « Awah Awah » ; que lui reprochant d'avoir ainsi porté atteinte à ses droits patrimoniaux et à son droit moral d'auteur, M. X... a engagé une action en contrefaçon à l'encontre de la société Sony ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident :
Attendu que la société Sony fait grief à l'arrêt de dire qu'en exploitant les enregistrements des oeuvres « A vava inouva 2 », « Révolution (Tagrawla 2) », « Illusions (Awah Awah 2) » et « Mémoire (Cfiy 2) » sans l'autorisation de M. X..., elle a porté atteinte au droit moral de ce dernier et de la condamner à lui payer la somme de 40 000 euros en réparation du préjudice ainsi subi, alors, selon le moyen, qu'est irrecevable toute prétention émise contre une personne dépourvue du droit d'agir ; que l'auteur dispose sur son oeuvre d'un droit de propriété exclusif et opposable à tous lui conférant des prérogatives patrimoniales et morales sur celle-ci ; que l'action tendant à voir juger une oeuvre contrefaisante et à en interdire l'exploitation nécessite donc la mise en cause des auteurs titulaires des droits sur celle-ci ; qu'en retenant en l'espèce que M. X... serait recevable à agir en contrefaçon au titre de son droit moral d'auteur à l'encontre de la seule société Sony, simple exploitante, sans appeler en la cause les coauteurs des oeuvres composites de collaboration arguées de contrefaçon, aux motifs que la règle de l'unanimité posée par l'article L. 113-3 du code de la propriété intellectuelle ne vaut que pour la défense des droits patrimoniaux et ne s'applique pas au droit moral quand l'action de M. X..., qu'elle soit fondée sur ses droits patrimoniaux ou sur son droit moral, portait de la même façon atteinte aux droits exclusifs d'exploitation des coauteurs des oeuvres incriminées, la cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation de l'article 32 du code de procédure civile ;
Mais attendu que la recevabilité de l'action engagée par l'auteur de l'oeuvre première et dirigée exclusivement à l'encontre de l'exploitant d'une oeuvre de collaboration arguée de contrefaçon n'est pas subordonnée à la mise en cause de l'ensemble des coauteurs de celle-ci ; qu'il en résulte que M. X... est recevable à agir en contrefaçon au titre de son droit moral d'auteur à l'encontre de la seule société Sony ; que par ce motif de pur droit, substitué à ceux critiqués après avis donné aux parties, la décision déférée se trouve légalement justifiée de ce chef ;
Mais sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche, du pourvoi principal :
Vu l'article L. 113-3 du code de la propriété intellectuelle ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que la recevabilité de l'action engagée par l'auteur de l'oeuvre première et dirigée exclusivement à l'encontre de l'exploitant d'une oeuvre de collaboration arguée de contrefaçon n'est pas subordonnée à la mise en cause de l'ensemble des coauteurs de celle-ci ;
Attendu que pour déclarer M. X... irrecevable en ses demandes fondées sur l'atteinte à ses droits patrimoniaux et en sa demande subséquente d'interdiction, l'arrêt, après avoir relevé que, dans la mesure où elle serait reconnue bien fondée au fond, l'action en contrefaçon ne manquerait pas d'affecter, compte tenu des mesures réparatrices sollicitées, les conditions de l'exploitation future des enregistrements des oeuvres musicales litigieuses et, partant, les droits de leurs coauteurs, retient qu'il appartenait, dès lors, à M. X... de mettre en cause l'ensemble de ceux-ci ;
Qu'en statuant ainsi, alors que, selon ses propres constatations, l'action en contrefaçon était exclusivement dirigée contre la société Sony, en sa qualité de producteur des oeuvres musicales incriminées, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le troisième moyen du même pourvoi :
Vu l'article 624 du code de procédure civile ;
Attendu que la cassation de l'arrêt sur le premier moyen entraîne la cassation par voie de conséquence du chef de dispositif critiqué par le troisième moyen relatif à la demande de production de pièces portant sur les ventes en ligne et à l'étranger des phonogrammes litigieux ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs du pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare M. X... irrecevable en ses demandes fondées sur l'atteinte à ses droits patrimoniaux d'auteur et en sa demande subséquente d'interdiction, et en ce qu'il le déboute de sa demande de production de pièces portant sur les ventes en ligne et à l'étranger des phonogrammes, l'arrêt rendu le 13 avril 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon ;
Condamne la société Sony Music Entertainment France aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du onze décembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits au pourvoi principal par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour M. X....
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a déclaré Monsieur Mohamed X... irrecevable en ses demandes fondées sur l'atteinte à son droit patrimonial et en sa demande subséquente d'interdiction ;
AUX MOTIFS QU'« Sur la recevabilité des demandes de M. Mohamed X... au titre de l'atteinte à ses droits patrimoniaux : (...) ; qu'en ce qui concerne l'oeuvre " A vava inouva " : que par contrat de cession et d'édition d'oeuvre musicale en date du 20 mai 1975, M. Mohamed X... a cédé à la SAS WARNER CHAPPELL MUSIC FRANCE et à M. Abdelkader Z... ses droits patrimoniaux sur l'oeuvre " A vava inouva " ; que M. Abdelkader Z... et la SAS WARNER CHAPPELL MUSIC FRANCE ont été attraits à la procédure par M. Mohamed X... ; que le premier n'a comparu ni en première instance ni en appel et que la seconde ne présente aucune demande et fait valoir que tant en première instance que devant la cour, aucune demande n'est faite à son encontre ; que du fait de cette cession de ses droits patrimoniaux, M. Mohamed X... est irrecevable à agir en contrefaçon de ses droits patrimoniaux pour l'oeuvre " A vava inouva " ; en ce qui concerne les autres oeuvres : qu'il résulte des éléments de la cause que M. Mohamed X... a créé les paroles des chansons des oeuvres musicales préexistantes " Tagrawla ", " Awah Awah " et " Cfiy ", tandis que M. El Hamid Y..., dit J..., en a composé la musique et en est l'interprète ; qu'il s'agit d'oeuvres de collaboration au sens de l'article L 113-2, 1er alinéa du code de la propriété intellectuelle ; qu'en vertu des dispositions de l'article L 113-3 dudit code, M. Mohamed X... a appelé en la cause M. El Hamid Y..., dit J..., en sa qualité de coauteur des oeuvres préexistantes ; qu'il n'est pas contesté que les oeuvres musicales secondes " Révolution (Tagrawla 2) ", " Illusions (Awah Awah 2) " et " Mémoires (Cfiy 2) " sont des adaptations respectivement titrées des oeuvres préexistences susvisées par des modifications et adjonctions de couplets ; qu'il est constant que M. Mohamed X... n'a pas coopéré à l'élaboration des oeuvres musicales secondes, lesquelles doivent dès lors recevoir la qualification d'oeuvres composites au sens de l'article L 113-2, 2ème alinéa du code de la propriété intellectuelle ; qu'une oeuvre composite peut être en même temps une oeuvre de collaboration ; qu'en l'espèce, les avis de sortie des enregistrements litigieux par la société SONY, dont l'authenticité n'est pas contestée, mentionnent qu'ont participé à la création de ces oeuvres nouvelles, outre M. El Hamid Y..., dit J..., les personnes suivantes : M. Amazigh A... pour " Révolution (Tagrawla 2) ", MM Gilles B..., Dan Ar D... et Donald E... pour " Illusions (Awah Awah 2) " et MM Ramata F...
G... et Frédéric H... pour " Mémoires (Cfiy 2) " ; qu'il est ainsi justifié qu'il s'agit d'oeuvres de collaboration ; que la règle de l'unanimité des coauteurs d'une oeuvre de collaboration posée par l'article L 113-3 précité, a pour finalité d'assurer la protection des auteurs ; que, dans la mesure où elle serait reconnue bien fondée au fond, l'action en contrefaçon engagée par M. Mohamed X... à l'encontre de la seule société SONY, en sa qualité de producteur des oeuvres musicales litigieuses ne manquerait pas d'affecter, compte tenu des mesures réparatrices sollicitées, les conditions de l'exploitation future des enregistrements de ces oeuvres, et partant, les droits de leurs coauteurs ; que dès lors il appartenait à M. Mohamed X... seul, et non pas à la société SONY ou à la SACEM comme il le demande à titre subsidiaire, de mettre en cause devant les premiers juges l'ensemble des coauteurs des oeuvres secondes, étant rappelé que M. El Hamid Y..., dit J..., n'a été appelé en la cause qu'en sa seule qualité de coauteur des oeuvres préexistantes (...) ; qu'en conséquence le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a déclaré M. Mohamed X... irrecevable en ses demandes fondées sur l'atteinte à son droit patrimonial d'auteur et en sa demande subséquente d'interdiction ; (...) Sur le bien fondé de l'action en contrefaçon de droit d'auteur : (...) que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu'il a dit que la société SONY avait commis des actes de contrefaçon en enregistrant et en exploitant, sans l'autorisation de M. Mohamed X..., les oeuvre composites litigieuses et avait de ce fait porté atteinte au droit moral » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'« il convient de relever que si les oeuvres dérivées, à savoir les chansons " A vava inouva 2 ", " Révolution (Tagrawla 2) ", " Illusions (Awah Awah 2) et " Mémoires (Cfiy 2) ", constituent des oeuvres de collaboration au sens de l'article L. 113-2 alinéa 1er du code de la propriété intellectuelle, à l'égard de Monsieur X..., cette qualification ne peut être retenue ; qu'en effet, il n'a pas contribué à la création de ces nouvelles chansons et la reprise de parties de ses poèmes a été réalisée sans son accord. ; qu'elles constituent donc des oeuvres composites définies par l'article L. 113-2 alinéa 2 puisqu'a été incorporée une partie des textes crées par le demandeur, sans qu'il y collaboré ; que les oeuvres " A vava inouva 2 ", " Révolution (Tagrawla 2) ", " Illusions (Awah Awah 2) et " Mémoires (Cfiy 2) " ont d'autres coauteurs que Monsieur El Hamid Y... : pour la première, Madame Karen I..., pour la seconde, Amaz A... et GNAWA DIFFUSION, pour la troisième Gilles B... et pour la dernière Ramata F...
G... et Frédéric H... ; qu'ils n'ont pas été mis en cause par Monsieur X... alors que les demandes qu'il formule au titre des atteintes à son droit patrimonial ont des incidences sur les droits des coauteurs, de même que la mesure d'interdiction qui est sollicitée ; qu'en l'absence de mise en cause des coauteurs des oeuvres nouvelles, la demande au titre des atteintes aux droits patrimoniaux et la demande d'interdiction seront déclarées irrecevables ; sur les actes de contrefaçon du fait de l'atteinte au droit moral (...), que la société SONY BMG MUSIC ENTERTAINMENT a (...) commis des actes de contrefaçon en exploitant, sans l'autorisation de Monsieur X..., les enregistrements des chansons " A vava inouva 2 ", " Révolution (Tagrawla 2) ", " Illusions (Awah Awah 2) et " Mémoires (Cfiy 2) " ».
1°/ ALORS QUE le juge doit faire respecter et respecter lui-même le principe du contradictoire ; qu'il ne peut relever d'office un moyen sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur celui-ci ; qu'en relevant d'office l'irrecevabilité de Monsieur X... à agir en contrefaçon des droits patrimoniaux sur l'oeuvre « A vava inouva » du fait de la cession de ces droits à la société WARNER CHAPPELL MUSIC FRANCE et à Monsieur Abdelkader Z..., sans avoir au préalable invité les parties à s'en expliquer contradictoirement, la Cour d'appel a violé l'article 16 du Code de procédure civile ;
2°/ ALORS QUE les contrats de cession de droit d'auteurs doivent être interprétés strictement ; qu'il en résulte que la cession par l'auteur de ses droits à un éditeur ne lui fait perdre sa qualité à agir en contrefaçon que s'il ne s'est pas réservé la possibilité de poursuivre les tiers contrefacteurs ; qu'en l'espèce, le contrat d'édition du 20 mai 1975 par lequel Monsieur X... a cédé ses droits patrimoniaux sur l'oeuvre « A vava inouva » à la société WARNER CHAPPELL MUSIC FRANCE et à Monsieur Abdelkader Z... mettait expressément à la charge du cédant l'obligation de « faire respecter le droit de propriété cédé et de le défendre contre toutes les atteintes qui lui seraient portées » ; que Monsieur X... s'était ainsi réservé la possibilité de poursuivre les tiers contrefacteurs en raison des atteintes portées aux droits patrimoniaux sur l'oeuvre « A vava inouva » ; qu'en jugeant toutefois que « du fait de cette cession de ses droits patrimoniaux, M. X... est irrecevable à agir en contrefaçon de ses droits patrimoniaux pour l'oeuvre « A vava inouva », la Cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil et l'article L. 131-3 du Code de la propriété intellectuelle ;
3°/ ALORS QUE la personne dont l'oeuvre a été intégrée dans une oeuvre composite sans son autorisation peut choisir de n'exercer une action en contrefaçon que contre le producteur de cette oeuvre composite ; que la recevabilité de son action n'est alors pas subordonnée à la mise en cause de l'auteur de ladite oeuvre ; que la Cour d'appel a relevé que l'action en contrefaçon de Monsieur Mohamed X... était dirigée « à l'encontre de la seule société SONY, en sa qualité de producteur des oeuvres musicales litigieuses » ; qu'en déclarant toutefois irrecevables les demandes de l'exposant fondées sur l'atteinte à son droit patrimonial, faute pour ce dernier d'avoir mis en cause les auteurs des oeuvres litigieuses, la Cour d'appel a violé les articles L. 122-4, L. 113-4 et L. 335-3 du Code de la propriété intellectuelle ;
4°/ ALORS QUE la personne dont l'oeuvre a été intégrée dans une oeuvre composite sans son autorisation peut choisir de n'exercer une action en contrefaçon que contre le producteur de cette oeuvre composite ; que le fait que celle-ci soit une oeuvre de collaboration n'a pas pour effet de subordonner la recevabilité de l'action en contrefaçon exercée contre son producteur à la mise en cause de ses coauteurs ; que la Cour d'appel a relevé que l'action en contrefaçon de Monsieur Mohamed X... était dirigée « à l'encontre de la seule société SONY, en sa qualité de producteur des oeuvres musicales litigieuses », et non à l'égard de l'un des auteurs de l'oeuvre contrefaisante ; qu'en déclarant toutefois irrecevables les demandes de l'exposant fondées sur l'atteinte à son droit patrimonial, faute pour ce dernier d'avoir mis en cause l'ensemble des coauteurs des oeuvres litigieuses, la Cour d'appel a violé l'article L. 113-3 du Code de la propriété intellectuelle ;
5°/ ALORS QUE, AU SURPLUS, les tiers, non mis en cause, dont les intérêts risquent d'être affectés par la solution d'un litige, peuvent intervenir volontairement à l'instance ou former tierce opposition contre le jugement qui sera rendu ; que dès lors, en se fondant, pour subordonner la recevabilité des demandes formées par Monsieur Mohamed X... à l'encontre de l'éditeur des oeuvres contrefaisantes à la mise en cause des coauteurs desdites oeuvres, sur l'incidence que pourrait avoir la décision rendue sur les « droits » de ces coauteurs, la Cour d'appel a statué par des motifs inopérants et ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-3 du Code de la propriété intellectuelle ;
6°/ ALORS QUE, en tout état de cause, l'action en contrefaçon a pour objet premier de faire cesser les actes contrefaisants ; que le juge qui caractérise des actes de contrefaçon doit donc ordonner toutes les mesures nécessaires pour faire cesser ces actes ; que Monsieur Mohamed X... avait exercé une action en contrefaçon en vue d'obtenir, outre la réparation de son préjudice, qu'il soit fait interdiction à la société SONY MUSIC ENTERTAINMENT FRANCE d'exploiter les enregistrements des oeuvres contrefaisant ses droits ; que la Cour d'appel a constaté que la société SONY MUSIC ENTERTAINMENT FRANCE « avait commis des actes de contrefaçon en enregistrant et en exploitant, sans l'autorisation de Monsieur X..., les oeuvres composites litigieuses et avait de ce fait porté atteinte à son droit moral » ; qu'en déclarant toutefois irrecevable la demande d'interdiction formée par ce dernier, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a ainsi violé les articles L. 121-1 et L. 335-3 du Code de la propriété intellectuelle.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Mohamed X... de sa demande subsidiaire tendant à voir condamner la société SONY MUSIC ENTERTAINMENT FRANCE et la SACEM à lui communiquer les identités et adresses de chacun des coauteurs des oeuvres litigieuses ;
AUX MOTIFS QUE « les identités des coauteurs des oeuvres litigieuses sont connues et que M. Mohamed X... ne justifie pas des circonstances insurmontables qui lui auraient interdit de les appeler en intervention forcée devant les premiers juges ni de l'évolution du litige qui aurait rendu recevable leur intervention forcée devant la cour conformément aux dispositions de l'article 555 du Code de procédure civile » ;
ALORS QUE Monsieur Mohamed X... soutenait qu'il était dans l'impossibilité de mettre en cause les coauteurs des oeuvres litigieuses dans la mesure où il n'avait pu obtenir leurs identités et coordonnées, malgré les démarches qu'il avait effectuées à cet effet auprès de la SACEM ; qu'il demandait en conséquence à la Cour d'appel d'ordonner à la société SONY MUSIC ENTERTAINMENT FRANCE et à la SACEM de lui communiquer les noms, adresses et coordonnées actuelles de chacun des coauteurs des oeuvres litigieuses et de surseoir à statuer sur le fond jusqu'à la mise en cause de ces derniers ; qu'en se bornant à retenir, pour rejeter cette demande de communication, puis déclarer son action irrecevable, que « les identités des coauteurs des oeuvres litigieuses sont connues et que M. Mohamed X... ne justifie pas de circonstances insurmontables qui lui auraient interdit de les appeler en intervention forcée devant les premiers juges », sans expliquer de quelle manière ce dernier pouvait surmonter l'impossibilité dans laquelle il se trouvait, en dépit des démarches qu'il avait déjà effectuées, de connaître les noms, adresses et coordonnées actuelles de chacun des auteurs concernés, la Cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 113-3 du Code de la propriété intellectuelle ensemble l'article 6 § 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il a débouté Monsieur Mohamed X... de sa demande tendant à voir condamner la société SONY MUSIC ENTERTAINMENT FRANCE à lui communiquer sous astreinte différentes pièces destinées à évaluer son préjudice patrimonial ;
AUX MOTIFS QU'« il n'y a pas lieu à production de pièces destinées à évaluer le préjudice patrimonial compte tenu de ce qui précède ; que, de ce fait, c'est à juste titre que les premiers juges n'ont pas fait droit à la demande de M. Mohamed X... de production de pièces portant sur les ventes en ligne et à l'étranger des phonogrammes ; que le jugement entrepris sera confirmé de ce chef » ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE « la demande de Monsieur X... sur le fondement de son droit patrimonial ayant été déclarée irrecevable, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de productions de pièces portant sur les ventes en ligne et à l'étranger des phonogrammes » ;
ALORS QUE la cassation à intervenir du chef de l'arrêt ayant déclaré Monsieur Mohamed X... irrecevable en ses demandes fondées sur l'atteinte à son droit patrimonial entraînera, par application de l'article 624 du Code de procédure civile, celle du chef ayant débouté Monsieur Mohamed X... de sa demande de production de pièces.
Moyen produit au pourvoi incident par la SCP Hémery et Thomas-Raquin, avocat aux Conseils, pour la société Sony Music Entertainment France.
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir dit qu'en exploitant les enregistrements des oeuvres « A vava inouva 2 », « Revolution (Tagrawla 2) », « Illusions (Awah Awah 2) » et « Mémoires (Cfiy 2) » sans l'autorisation de Monsieur Mohamed X..., la société SONY MUSIC ENTERTAINMENT FRANCE a porté atteinte à son droit moral et d'avoir condamné cette dernière à payer à Monsieur X... la somme de 40 000 euros en réparation du préjudice ainsi subi
AUX MOTIFS QUE « SUR LA RECEVABILITÉ DES DEMANDES DE M. MOHAMED X... AU TITRE DE L'ATTEINTE À SON DROIT MORAL : que les premiers juges ont dit que la société SONY a commis des actes de contrefaçon en exploitant, sans l'autorisation de M. Mohamed X..., les enregistrements des chansons " A vava inouva 2 ") " Révolution (Tagrawla 2) " " Illusions (Awah Awah 2) " et " Mémoires (Cfly 2) » qui reprenaient une partie de ses textes en les modifiant et les adaptant, portant ainsi atteinte à son droit moral d'auteur ; que M. Mohamed X... fait valoir qu'aux termes de l'article L 121-1 du code de la propriété intellectuelle, il dispose d'un droit personnel, inaliénable et imprescriptible de voir sanctionner toute violation de son droit moral et qu'il est en droit de s'opposer à toute dénaturation de son oeuvre, quelle que soit la position de M. El Hamid Y..., dit J..., en sa qualité de coauteur des oeuvres préexistantes, à l'égard de ces adaptations ; que pour sa part, la société SONY soutient que les motifs pour lesquels les demandes de M. Mohamed X... fondées sur l'atteinte à ses droits patrimoniaux et sur la demande d'interdiction ont été déclarées irrecevables doivent être étendus à ses demandes fondées sur l'atteinte à son droit moral et que M. Mohamed X... doit donc être également déclaré irrecevable en ses demandes à ce titre ; que la règle de l'unanimité posée par l'article L 113-3 du code de la propriété intellectuelle ne vaut que pour la défense des droits patrimoniaux et ne s'applique pas au droit moral en raison de la nature personnelle des prérogatives en cause ; que de ce fait M. Mohamed X... est recevable à agir en contrefaçon au titre de son droit moral d'auteur à l'encontre de la seule société SONY » ;
ALORS QU'est irrecevable toute prétention émise contre une personne dépourvue du droit d'agir ; que l'auteur dispose sur son oeuvre d'un droit de propriété exclusif et opposable à tous lui conférant des prérogatives patrimoniales et morales sur celle-ci ; que l'action tendant à voir juger une oeuvre contrefaisante et à en interdire l'exploitation nécessite donc la mise en cause des auteurs titulaires des droits sur celle-ci ; qu'en retenant en l'espèce que Monsieur X... serait recevable à agir en contrefaçon au titre de son droit moral d'auteur à l'encontre de la seule société SONY MUSIC ENTERTAINMENT FRANCE, simple exploitante, sans appeler en la cause les coauteurs des oeuvres composites de collaboration arguées de contrefaçon, aux motifs que la règle de l'unanimité posée par l'article L. 113-3 du Code de la propriété intellectuelle ne vaut que pour la défense des droits patrimoniaux et ne s'applique pas au droit moral quand l'action de Monsieur X..., qu'elle soit fondée sur ses droits patrimoniaux ou sur son droit moral, portait de la même façon atteinte aux droits exclusifs d'exploitation des coauteurs des oeuvres incriminées, la Cour d'appel a statué par un motif inopérant en violation de l'article 32 du Code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-25974
Date de la décision : 11/12/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

PROPRIETE LITTERAIRE ET ARTISTIQUE - Oeuvre de l'esprit - Oeuvre de collaboration - Action en contrefaçon - Action dirigée contre l'exploitant de l'oeuvre - Recevabilité - Conditions - Mise en cause de tous les coauteurs (non)

La recevabilité de l'action engagée par l'auteur de l'oeuvre première et dirigée exclusivement à l'encontre de l'exploitant d'une oeuvre de collaboration arguée de contrefaçon n'est pas subordonnée à la mise en cause de l'ensemble des coauteurs de celle-ci


Références :

article L. 113-3 du code de la propriété intellectuelle

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 13 avril 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 11 déc. 2013, pourvoi n°12-25974, Bull. civ. 2013, I, n° 241
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, I, n° 241

Composition du Tribunal
Président : M. Gridel (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat général : M. Legoux
Rapporteur ?: Mme Canas
Avocat(s) : SCP Bénabent et Jéhannin, SCP Hémery et Thomas-Raquin

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.25974
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