LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que se fondant sur un acte de prêt dressé le 13 février 2004 par un notaire, la Caisse de crédit mutuel de l'Etang de Berre Est (la banque) a engagé une procédure de saisie immobilière à l'encontre de M. X..., qu'elle a assigné à l'audience d'orientation d'un juge de l'exécution ; que celui-ci, après avoir mis l'affaire en délibéré, a ordonné la réouverture des débats et rappelé l'affaire à une audience au cours de laquelle M. X... a contesté l'existence d'un titre exécutoire fondant les poursuites et sollicité la mainlevée du commandement valant saisie ; qu'il a interjeté appel du jugement d'orientation le déboutant de sa contestation et ordonnant la vente forcée de l'immeuble saisi ;
Sur le premier moyen, pris en sa deuxième branche :
Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de confirmer le jugement entrepris en ce qu'il avait rejeté le moyen tiré de la violation de l'article 6 du décret n° 2006-936 du 27 juillet 2006, devenu l'article R. 311-5 du code des procédures civiles d'exécution, alors, selon le moyen, qu'à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, aucune contestation ni aucune demande incidente ne peut, sauf disposition contraire, être formée après l'audience d'orientation prévue à l'article R. 322-15 à moins qu'elle porte sur les actes de procédure postérieurs à celle-ci ; qu'en se prononçant de la sorte, après avoir constaté que les conclusions de première instance de M. X..., qui n'avait pas comparu, avaient été déposées le jour de l'audience d'orientation, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ces conclusions avaient été déposées antérieurement ou postérieurement à celle-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 311-5 du code des procédures civiles d'exécution ;
Mais attendu qu'ayant retenu que l'audience d'orientation, par l'effet de la décision de réouverture totale des débats, s'était tenue le 17 janvier 2012, la cour d'appel a, par ces seuls motifs, légalement justifié sa décision de déclarer recevables les contestations et demandes formées par M. Pallot dans ses conclusions du 13 décembre 2011 ;
Et attendu que les premières et troisième branches du moyen ne sont pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le second moyen, pris en sa seconde branche :
Vu les articles 8 et 23 du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971, dans leur rédaction applicable à la cause, ensemble l'article 1318 du code civil ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que les procurations doivent être annexées à l'acte à moins qu'elles ne soient déposées aux minutes du notaire rédacteur de l'acte ; que, dans ce cas, il est fait mention dans l'acte du dépôt de la procuration au rang des minutes ; que de la combinaison des deux autres textes il résulte que l'inobservation de ces obligations ne fait pas perdre à l'acte son caractère authentique, partant son caractère exécutoire ;
Attendu que, pour déclarer nul le commandement valant saisie immobilière, l'arrêt retient que la procuration, qui était donnée par M. X... à la fois pour acquérir le bien immobilier et pour emprunter, devait nécessairement être déposée au rang des minutes, ne pouvant être annexée à la fois à l'acte de vente et aux actes de prêt à intervenir ; que ne satisfaisant en conséquence pas aux prescriptions de l'article 8 devenu 21 du décret du 26 novembre 1971, dans sa rédaction applicable à l'époque de la signature de l'acte, l'acte de prêt, affecté d'un défaut de forme, perdait, en application de l'article 1318 du code civil, son caractère authentique et ne valait que comme écriture privée, de sorte que la banque ne disposait pas d'un titre exécutoire fondant les poursuites de saisie immobilière ;
Qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du second moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a confirmé le jugement du juge de l'exécution rejetant le moyen tiré de la violation de l'article 6 du décret n° 2006-936 du 27 juillet 2006 et se déclarant compétent, l'arrêt rendu le 20 septembre 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, sauf sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Lyon, autrement composée ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du cinq décembre deux mille treize.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils pour la Caisse de crédit Mutuel de l'Etang de Berre Est
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement entrepris en ce qu'il avait rejeté le moyen tiré de la violation de l'article 6 du décret n° 2006-936 du 27 juillet 2006, devenu l'article R. 311-5 du code des procédures civiles d'exécution,
Aux motifs que, sur la recevabilité de la contestation au regard de l'article 6 du décret n° 2006-936 du 27 juillet 2006 (article R. 311-5 du code nouveau des procédures civiles d'exécution), cet article dispose que, à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, aucune contestation, ni aucune demande incidente ne peut, sauf dispositions contraires, être formée après l'audience d'orientation prévue à l'article 49 (actuel R. 322-15) à moins qu'elle porte sur les actes de procédure postérieurs à celle-ci ; que dans ce cas, la contestation ou la demande incidente est formée dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'acte ; qu'il résulte du jugement que l'audience d'orientation s'est tenue initialement le décembre 2011, et que le même jour, M. X..., qui n'avait pas comparu, avait fait déposer des écritures par l'entremise de son conseil non constitué en faisant valoir notamment les dispositions de l'article 1318 du code civil et l'article 8 de l'ancien décret du 26 novembre 1971, soit la contestation sur le caractère authentique du titre exécutoire en vertu duquel la procédure de saisie immobilière est engagée ; que par simple mention au dossier le juge de l'exécution a ordonné la réouverture des débats pour permettre l'admission de la constitution de l'avocat et l'admission des écritures, pour tenir l'audience le 17 janvier 2012 ; que les parties ont été avisées par simple lettre du greffe du juge de l'exécution en date du 3 janvier 2012 ; que l'article 444 du code de procédure civile prévoit que le président peut ordonner la réouverture des débats ; que cette faculté qui est accordée au président, relève de son pouvoir discrétionnaire ; qu'elle constitue une mesure d'administration judiciaire insusceptible de recours ; que l'appel contre la décision par mention au dossier d'ordonner la réouverture des débats est irrecevable ; que pour être complet, il sera constaté que les débats de l'audience d'orientation du 13 décembre 2011, ayant été reportés au 17 janvier 2012, alors qu'il n'existe aucune décision de clôture de la procédure, l'audience d'orientation, par l'effet de la décision de réouverture des débats s'est tenue le 17 janvier 2012 ; que l'article 6 du décret n° 2006-936 du 27 juillet 2006 (article R. 311-5 du code nouveau des procédures civiles d'exécution) est inapplicable ; que le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté le moyen soulevé par la Caisse de Crédit Mutuel
de l'Etang de Berre tire de la violation de l'article 6 du décret n° 2006-936 du 27 juillet 2006 (article R. 311-5 du Code nouveau des procédures civiles d'exécution) ;
Et aux motifs réputés adoptés qu'il convient dès à présent de rejeter le moyen soulevé par la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST tiré de la violation de l'article 6 du décret du 27 juillet 2006 en ce que le Tribunal a ordonné la réouverture des débats pour admettre les écritures de M. X...,
Alors, d'une part, qu'une cour d'appel qui décide que l'appel dont elle est saisie est irrecevable excède ses pouvoirs en statuant au fond sur le jugement qui fait l'objet de cet appel ; qu'en confirmant le jugement entrepris en ce qu'il avait rejeté le moyen tiré de la violation de l'article 6 du décret n° 2006-936 du 27 juillet 2006, devenu l'article R 311-5 du code des procédures civiles d'exécution, ce texte étant à son sens « inapplicable », après avoir retenu que « l'article 444 du code de procédure civile prévoit que le président peut ordonner la réouverture des débats. Cette faculté qui est accordée au président relève de son pouvoir discrétionnaire ; elle constitue une mesure d'administration judiciaire insusceptible de recours » et que « l'appel contre la décision par mention au dossier d'ordonner la réouverture des débats est irrecevable », la cour d'appel, qui a excédé ses pouvoirs, a violé l'article 562 du code de procédure civile,
Alors, d'autre part, qu'à peine d'irrecevabilité prononcée d'office, aucune contestation ni aucune demande incidente ne peut, sauf disposition contraire, être formée après l'audience d'orientation prévue à l'article R. 322-15 à moins qu'elle porte sur les actes de procédure postérieurs à celle-ci ; qu'en se prononçant de la sorte, après avoir constaté que les conclusions de première instance de M. X..., qui n'avait pas comparu, avaient été déposées le jour de l'audience d'orientation, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée, si ces conclusions avaient été déposées antérieurement ou postérieurement à celle-ci, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article R. 311-5 du code des procédures civiles d'exécution,
Et alors, enfin, qu'en ne répondant pas aux conclusions d'appel de la Caisse dans lesquelles celle-ci soutenait que les conclusions de M. X... déposées le jour de l'audience d'orientation, qui s'était tenue le 13 décembre 2011, n'avaient été signifiées que le 16 décembre 2011, soit trois jours après celle-ci, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de l'article 455 du code de procédure civile.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué, infirmatif de ce chef, d'avoir déclaré nul le commandement de payer valant saisie immobilière du 20 juin 2011 et condamné la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE EST à en donner mainlevée, à ses frais,
Aux motifs que sur le caractère exécutoire de la copie exécutoire, au titre de la représentation à la copie exécutoire de l'acte authentique de prêt du 13 février 2004, il est notamment indiqué, concernant l'emprunteur : « M. Bill X... est représenté par Mlle Sophie Y..., clerc de notaire en l'office notarial sis à LYON 3ème,..., en vertu d'une procuration authentique reçue en brevet par Me Christopher A..., notaire à PARIS 10ème arrondissement, le 24 septembre 2003. Cette procuration est annexée à la minute de l'acte d'acquisition reçu ce jour par Maître Philippe Z..., notaire soussigné » ; que la procuration n'est pas mentionnée comme déposée au rang des minutes du notaire ; que ni la copie de l'acte de vente, ni la copie de la procuration ne sont produites ; qu'il est établi et même revendiqué par la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE qu'il n'existe qu'une seule procuration pour l'acte de vente et pour l'acte de prêt ; or, que l'article 8 devenu 21 du décret du 26 novembre 1971, dans sa rédaction applicable à l'époque de la signature de l'acte disposait : « les pièces annexées à l'acte doivent être revêtues d'une mention constatant cette annexe et signées du notaire. Les procurations sont annexées à l'acte à moins qu'elles ne soient déposées aux minutes du notaire rédacteur de l'acte. Dans ce cas, il est fait mention dans l'acte du dépôt de la procuration au rang des minutes » ; qu'en l'espèce, la procuration donnée par M. X... a été faite à la fois pour acquérir le bien immobilier et pour emprunter : cette procuration pour plusieurs actes devait nécessairement être déposée au rang des minutes, ne pouvant être annexée à la fois à l'acte de vente et aux actes de prêt à intervenir ; que l'acte notarié de prêt ne satisfait pas en conséquence aux prescriptions de l'article 8 devenu 21 du décret du 26 novembre 1971, dans sa rédaction applicable à l'époque de la signature de l'acte ; il est affecté d'un défaut de forme ; qu'en application de l'article 1318 du code civil, cet acte perd son caractère authentique et ne vaut que comme écriture privée, sur ce seul moyen, sans qu'il soit nécessaire de statuer sur les autres moyens soulevés par la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE ; qu'en conséquence, la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE ne dispose pas d'un titre exécutoire fondant les poursuites de saisie immobilière ; que le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande de mainlevée, dit le commandement de payer valant saisie immobilière, régulier, et a ordonné la vente forcée ; que le commandement de payer valant saisie immobilière sera déclaré nul, ainsi que la procédure subséquente pour défaut de titre exécutoire ; que la CAISSE DE CREDIT MUTUEL DE L'ETANG DE BERRE sera condamnée à donner mainlevée du commandement, à ses frais ;
Alors, d'une part, que n'a pas à être annexée à la minute d'un des actes pour la conclusion duquel elle a été donnée la procuration qui a déjà été déposée au rang des minutes du notaire rédacteur par son annexion à la minute d'un acte précédent ; qu'en considérant que l'acte notarié de prêt ne satisfaisait pas aux prescriptions de l'article 8, devenu 21, du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971, après avoir constaté qu'il indiquait, par une mention qui vaut jusqu'à inscription de faux, que « M. Bill X... est représenté par Mlle Sophie Y..., clerc de notaire en l'office notarial sis à LYON 3ème,..., en vertu d'une procuration authentique reçue en brevet par Me Christopher A..., notaire à PARIS 10ème arrondissement, le 24 septembre 2003. Cette procuration est annexée à la minute de l'acte d'acquisition reçu ce jour par Me Philippe Z..., notaire soussigné », la cour d'appel a violé l'article 8, devenu 21, du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971, ensemble l'article 1318 du code civil,
Et alors, d'autre part, et en toute hypothèse, que l'inobservation de l'obligation, pour le notaire, de faire figurer les procurations en annexe de l'acte authentique ou de les déposer au rang de ses minutes, mention de ce dépôt étant faite dans l'acte, ne fait pas perdre à l'acte son caractère authentique, partant son caractère exécutoire ; qu'en considérant qu'en l'état du défaut d'annexion de la procuration donnée par l'emprunteur à l'acte de prêt, lequel ne mentionne pas son dépôt au rang des minutes, cet acte perdait son caractère exécutoire et ne valait que comme écriture privée, la cour d'appel a violé les articles 8, devenu 21, et 23, devenu 41, du décret n° 71-941 du 26 novembre 1971, ensemble l'article 1318 du code civil.