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19/11/2013 | FRANCE | N°12-26404

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 novembre 2013, 12-26404


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce, ensemble les articles 8-II de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982, dite LOTI et 12-2 du contrat type approuvé par le décret n° 2003-1295 du 26 décembre 2003 ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que les usages commerciaux en référence desquels doit s'apprécier la durée du préavis de résiliation du contrat de sous-traitance de transport contractuellement convenu sont nécessairement compris comme conformes au

contrat type dont dépendent les professionnels concernés ;
Attendu, selon ...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le premier moyen :
Vu l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce, ensemble les articles 8-II de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982, dite LOTI et 12-2 du contrat type approuvé par le décret n° 2003-1295 du 26 décembre 2003 ;
Attendu qu'il résulte de la combinaison de ces textes que les usages commerciaux en référence desquels doit s'apprécier la durée du préavis de résiliation du contrat de sous-traitance de transport contractuellement convenu sont nécessairement compris comme conformes au contrat type dont dépendent les professionnels concernés ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la société Chronopost a conclu plusieurs contrats de sous-traitance à durée indéterminée avec la société Marseille courses ; qu'en vue d'un nouvel appel d'offres, elle a résilié le dernier contrat en respectant le préavis contractuel de trois mois qu'elle a ensuite accepté de prolonger d'un mois sur demande de son sous-traitant ; que la société Marseille courses, qui n'a pas été retenue pour le contrat suivant, a, le 16 octobre 2009, assigné la société Chronopost en paiement d'une indemnité sur le fondement de l'article L. 442-6 du code de commerce, soutenant que le préavis qui lui avait été accordé était insuffisant et que la rupture du contrat était donc brutale ;
Attendu que, pour condamner la société Chronopost à payer à la société Marseille courses la somme de 118 467,66 euros à titre de dommages-intérêts, l'arrêt retient qu'il n'y a pas lieu d'écarter l'application de l'article L. 442-6-I-5° du code de commerce, dès lors que les rapports entre la société Chronopost et la société Marseille courses ne sont pas régis par le contrat type institué par la loi LOTI ; qu'il retient encore qu'il appartient au juge d'apprécier si le délai du préavis accordé par la société Chronopost, serait-il identique à celui, supplétif, prévu par le contrat type, était suffisant en considération de la durée de la relation commerciale et en déduit qu'en considération de la durée de la relation commerciale de sept années, de la répercussion de la perte d'un tel volume de chiffre d'affaires, des conditions contractuelles, notamment pour la mise en place des tournées journalières nécessitant un personnel et un matériel dédiés uniquement à l'activité de la société Chronopost, un préavis jusqu'au 31 décembre 2009 aurait été nécessaire pour que la société Marseille courses se réorganisât ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé par fausse application le premier des textes susvisés, et, par refus d'application, les deux autres ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 26 juillet 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles, autrement composée ;
Condamne la société Marseille courses aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Piwnica et Molinié, avocat aux Conseils, pour la société Chronopost
PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société CHRONOPOST au paiement de la somme de 118.467,66 euros ;
AUX MOTIFS QUE la loi du 30 décembre 1982 d'orientation des transports intérieurs (dite loi LOTI) qui a institué, dans son article 8 § II un contrat type de soustraitance de transport qui règle les rapports entre l'opérateur de transport et le transporteur dispose que" Tout contrat de transport public de marchandises doit comporter des clauses précisant la nature et l'objet du transport, les modalités d'exécution du service en ce qui concerne le transport proprement dit et les conditions d'enlèvement et de livraison des objets transportés, les obligations respectives de l'expéditeur, du commissionnaire, du transporteur et du destinataire, et le prix du transport ainsi que celui des prestations accessoires prévues. A défaut de convention écrite définissant les rapports entre les parties au contrat sur les matières mentionnées à l'alinéa précédent, les clauses de contrats types s'appliquent de plein droit. Ces contrats types sont établis par décret, après avis des organismes professionnels concernés et du conseil national des transports." ; que l'article 12.2 du contrat type applicable aux transporteurs publics routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants qui figure en annexe I du décret n°2003-1285 du 26 décembre 2003 portant approbation du contrat type applicable aux transports publics routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants, énonce que " le contrat de sous-traitance à durée indéterminée peut-être résilié par l'une ou l'autre partie par l'envoi d'une lettre recommandée avec accusé de réception moyennant un préavis d'un mois quand le temps déjà écoulé depuis le début d'exécution du contrat n'est pas supérieur à six mois. Le préavis est porté à deux mois quand ce temps est supérieur à six mois et inférieur à un an. Le préavis à respecter est de trois mois quand la durée de la relation est d'un an et plus " : qu'il résulte de l'article L 442-6 1 5 du code de commerce qu'engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers, de rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels ; qu'il est admis par les parties qu'elles ont entretenu à compter d'avril 2002 une relation commerciale établie au sens de l'article précité du code de commerce ; qu'il est établi que tout au long de cette relation commerciale et en particulier au moment de la rupture de celle-ci, les parties ont convenu entre elles des modalités réglant leurs relations, par des conventions successives, le contrat n°555 conclu le 2 avril 2002 puis le contrat n° 643 du 29 novembre 2004 avec effet au 2 novembre 2003, enfin le contrat n° 777 du 2 novembre 2006 avec effet au 2 janvier 2007 ; que les parties ont manifesté à l'article 3.1 du contrat n°777 leur volonté de soumettre toutes les conventions intervenues entre elles audit contrat de sous-traitance, réservant le cas de "l'éventuelle application" du contrat type «messagerie» prévu par la loi dite LOTI à raison de son caractère supplétif, conformément au dispositif mis en place par l'article 8 de la loi LOTI qui rappelle le rôle premier de la volonté des parties, invitées à prévoir par écrit les modalités de leurs relations et définit ensuite, à défaut d'un écrit, l'élaboration de règles destinées à remédier à l'absence ou au caractère lacunaire des manifestations de volonté des parties ; qu'en l'espèce, le dernier contrat de sous-traitance n°777 définit en son article 12 les conditions dans lesquelles les parties ont convenu de pouvoir résilier ledit contrat et notamment le délai de préavis contractuel à respecter ; qu'ainsi peu important que les parties aient adopté, sur la durée du préavis, des dispositions identiques à celles supplétives prévues par le contrat type, elles ont soumis leur relation commerciale de sous-traitance en matière de transports routiers de marchandises, à des dispositions contractuelles et la rupture intervenue en 2009 à l'initiative de la société Chronopost est régie par les dispositions du contrat n°777 ; que si l'article L442-6, I, 5 du code de commerce ne s'applique pas dans le cadre des relations commerciales de transports publics routiers de marchandises exécutés par des soustraitants lorsque le contrat type institué par la loi LOTI régit les rapports du sous-traitant et de l'opérateur de transport, en l'espèce, il n'y pas lieu d'écarter son application puisque les rapports entre la société Chronopost et la société Marseille Courses ne sont pas régis par ce contrat type ; qu'au regard de l'article L. 442-6, I, 5, il appartient donc au juge d'apprécier si la durée du préavis accordé par la société Chronopost était suffisante en considération de la durée de la relation commerciale, sans s'arrêter au respect de la durée contractuellement prévue entre les parties ;
1) ALORS QUE les clauses contractuelles conformes aux dispositions du contrat-type de transport approuvé par décret pour l'application de la loi n°82-1153 du 30 décembre 1982 sont licites ; qu'une résiliation intervenue dans le respect du préavis prévu à ce contrat type ne peut être abusive ; qu'en énonçant, pour dire la résiliation abusive, que le préavis, dont elle a constaté qu'il avait respecté, et même excédé, la durée prévue par l'article 12-2 du contrat type approuvé par le décret n°2003-1295 du 26 décembre 2003, était insuffisant, la cour d'appel a violé les articles 8-II de la loi n°82-1153 du 30 décembre 1982 et 12-2 du contrat type approuvé par le décret n°2003-1295 du 26 décembre 2003 ;
2) ALORS QUE l'article L442-6, I, 5° du code de commerce qui instaure une responsabilité de nature délictuelle ne s'applique pas dans le cadre des relations commerciales de transports public routiers de marchandises exécutés par des sous-traitants, lorsque le contrat-type qui prévoit la durée des préavis de rupture institués par la LOTI régit, faute de dispositions contractuelles, les rapports du soustraitant et de l'opérateur de transport ; que la cour d'appel a constaté que « les parties avaient adopté, sur la durée du préavis, des dispositions identiques à celle de la LOTI » ; qu'il s'en déduisait que la question de la résiliation était régie par le contrat-type de la LOTI, à l'exclusion de l'article L442-6, I, 5° du code de commerce, sans qu'il y ait à distinguer selon que les parties avaient procédé par simple renvoi au contrat-type ou en en reproduisant, dans leur convention, les dispositions ; qu'en décidant que la durée du préavis devait être appréciée au regard de l'article L442-6, I, 5° du code de commerce, la cour d'appel a violé ce texte, ensemble les articles 8-II de la loi n°82-1153 du 30 décembre 1982 et 12-2 du contrat type approuvé par le décret n°2003-1295 du 26 décembre 2003.
SECOND MOYEN DE CASSATION :
(subsidiaire)
Il est reproché à l'arrêt attaqué d'avoir condamné la société CHRONOPOST au paiement de la somme de 118.467,66 euros,
AUX MOTIFS QUE sur le montant du dommage résultant de la brutalité de la rupture, celui-ci inclut le manque à gagner pendant la durée qui aurait dû être celle du préavis ainsi que les préjudices annexes consécutifs de la rupture ; que la société Marseille Courses sollicite en principal la somme de 210.213¿ correspondant à la perte de marge brute qu'elle aurait dû dégager sur 18 mois ; qu'elle produit une attestation de son expert comptable qui atteste que la marge sur coûts directs, calculée en retenant les frais de personnel et les frais d'utilisation des véhicules, directement affectés à la société Chronopost, s'est établie en moyenne à 26 % du chiffre d'affaires hors taxes sur la période 2005-1er semestre 2009 ; que la société Chronopost se borne à affirmer qu'il est surprenant de lire sous la plume du comptable de la société Marseille Courses qu'elle réaliserait une marge brute de 25 % bien supérieure à celle ordinairement réalisée dans ce secteur d'activité alors que le transport routier traverse à l'image de toute l'économie une crise sans précédent ; que cependant, ces considérations générales qui ne sont étayées par aucune pièce sur la marge habituelle dans ce secteur d'activité ne sont pas de nature à contredire l'attestation rédigée par un expert comptable, commissaire aux comptes, dont rien ne permet de mettre en doute les éléments chiffrés qu'elle contient ; que sur la base donc d'une marge brute de 25 %, du chiffre d'affaires moyen réalisé pendant les trois années précédant la rupture et de celui réalisé sur le premier semestre 2009, la société Marseille Courses a donc subi un manque à gagner de 81.122 euros résultant de la rupture brutale ; que par ailleurs, le licenciement du personnel dédié à l'exécution du contrat Chronopost résulte bien de la brutalité de la rupture qui n'a pas permis à la société Marseille Courses de fournir à ses salariés du travail pour de nouveaux clients et a dû s'en séparer ; qu'il est justifié que la société Marseille Courses a supporté une somme totale de 37.525,66 euros de ce chef ; qu'en revanche, le seul document produit relatif aux coûts des véhicules cédés en juin, juillet et août 2009 est insuffisant à établir le lien de causalité entre ces cessions, les moins-values de cessions et surcoûts de loyers de crédit-bail postérieurs à la rupture allégués et la brutalité de la rupture ; qu'en définitive, la société Chronopost sera donc condamnée à payer à la société Marseille Courses la somme de 118.467,66 euros à titre de dommages-intérêts,
ALORS QUE la cour d'appel a estimé que la société MARSEILLE COURSES aurait dû bénéficier d'un préavis jusqu'au 31 décembre 2009 au lieu du 30 juin 2009, soit 6 mois de plus ; qu'elle a constaté que la société MARSEILLE COURSES réclamait « un préjudice de 210.213 euros, correspondant à la marge brute qu'elle aurait dû dégager sur 18 mois », soit un préjudice mensuel de 11.671,50 euro ; que compte tenu d'une insuffisance de préavis de 6 mois, il s'en déduisait un préjudice de 70.029 euro au titre de la perte de marge ; qu'en fixant ce préjudice à 81.122 euros, la cour d'appel, qui a accordé à la société MARSEILLE COURSES davantage que ce qu'elle réclamait, a violé les articles 4 et 5 du code de procédure civile.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-26404
Date de la décision : 19/11/2013
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

TRANSPORTS ROUTIERS - Marchandises - Contrat de transport - Contrat de sous-traitance - Résiliation - Durée du préavis - Stipulation identique à celle prévue au contrat type - Effets - Rupture brutale (non)

CONCURRENCE - Transparence et pratiques restrictives - Rupture brutale des relations commerciales - Préavis - Secteur des transports - Contrat de sous-traitance - Usages commerciaux nécessairement conformes au contrat type

Il résulte de la combinaison des articles L. 442-6, I, 5°, du code de commerce, ensemble les articles 8, II, de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982, dite LOTI, et 12, 2, du contrat type approuvé par le décret n° 2003-1295 du 26 décembre 2003, que les usages commerciaux en référence desquels doit s'apprécier la durée du préavis de résiliation du contrat de sous-traitance de transport contractuellement convenu sont nécessairement compris comme conformes au contrat type dont dépendent les professionnels concernés


Références :

article L. 442-6, I, 5°, du code de commerce

article 8, II, de la loi n° 82-1153 du 30 décembre 1982, dite LOTI

article 12, 2, du contrat type sous-traitance approuvé par le décret n° 2003-1295 du 26 décembre 2003

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 26 juillet 2012

A rapprocher :Com., 4 octobre 2011, pourvoi n° 10-20240, Bull. 2011, IV, n° 151 (cassation)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 19 nov. 2013, pourvoi n°12-26404, Bull. civ. 2013, IV, n° 171
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, IV, n° 171

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : M. Le Mesle (premier avocat général)
Rapporteur ?: Mme Vallansan
Avocat(s) : Me Occhipinti, SCP Piwnica et Molinié

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.26404
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