La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/11/2013 | FRANCE | N°12-25925

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 novembre 2013, 12-25925


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 31 mai 2012), que MM. X... et Y..., associés de la société à responsabilité limitée BBS, exploitant un salon de coiffure à Nîmes, le premier ayant été, en outre, son cogérant, ont obtenu, le 23 mars 2005, le remboursement du solde créditeur de leur compte « courant » d'associé ; qu'après que la société BBS eut été mise en liquidation judiciaire le 24 janvier 2006 et la date de la cessation de ses paiements fixée au 25 juillet 2004, le liquidateur judiciai

re a demandé l'annulation des paiements reçus par MM. X... et Y..., faisant va...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Nîmes, 31 mai 2012), que MM. X... et Y..., associés de la société à responsabilité limitée BBS, exploitant un salon de coiffure à Nîmes, le premier ayant été, en outre, son cogérant, ont obtenu, le 23 mars 2005, le remboursement du solde créditeur de leur compte « courant » d'associé ; qu'après que la société BBS eut été mise en liquidation judiciaire le 24 janvier 2006 et la date de la cessation de ses paiements fixée au 25 juillet 2004, le liquidateur judiciaire a demandé l'annulation des paiements reçus par MM. X... et Y..., faisant valoir qu'ils avaient eu connaissance de l'état de cessation des paiements ;
Sur le premier moyen :
Attendu que le liquidateur fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande à l'égard de M. X..., alors, selon le moyen :
1°/ que le dirigeant d'une société est réputé connaître l'état de cessation des paiements de la société ; qu'ainsi, l'annulation du paiement d'une dette échue survenu en période suspecte n'est pas subordonné à la preuve d'une connaissance personnelle par le bénéficiaire du paiement de l'état de cessation des paiements lorsque le bénéficiaire du paiement n'est autre que le dirigeant de la société ; qu'au cas présent, pour débouter le liquidateur de sa demande d'annulation du remboursement de compte courant d'associé de M. X..., gérant de la SARL BBS, la cour d'appel a affirmé qu'il n'était pas prouvé que M. X... aurait eu personnellement connaissance de l'état de cessation des paiements de la société au jour du remboursement de son compte courant d'associé ; qu'en exigeant ainsi une preuve non nécessaire en raison de la qualité de dirigeant de M. X..., la cour d'appel a violé l'article L. 632-2 du code de commerce ;

2°/ que le paiement d'une dette échue survenu en période suspecte encourt l'annulation lorsque son bénéficiaire savait ou aurait dû savoir que la société était en état de cessation des paiements ; qu'au cas présent, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que M. X... était gérant de la SARL BBS et que la société était, depuis le mois d'août 2004 dans une situation déficitaire qui avait donné lieu à des rejets de chèques sans provision ; qu'en déboutant le liquidateur de sa demande d'annulation du remboursement du compte courant de M. X... au motif qu'il n'était pas établi que M. X... aurait eu connaissance de l'état de cessation des paiements de la société lors du remboursement de son compte courant, cependant qu'elle devait rechercher si, au regard de ces éléments, M. X..., en sa qualité de dirigeant, n'aurait pas dû savoir que la société était en état de cessation de paiements, ce qui suffisait à prononcer l'annulation du remboursement de son compte courant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 632-2 du code de commerce ;
3°/ que le dirigeant d'une société doit, en toutes circonstances, s'informer personnellement et directement de la situation financière de son entreprise ; qu'au cas présent, pour considérer que la connaissance par M. X..., gérant de la SARL BBS, de l'état de cessation des paiements de la SARL BBS n'était pas établie, la cour d'appel a relevé que M. X... soutenait qu'il n'aurait pas eu connaissance des rejets de chèque sans provision et d'impayés de cotisations URSSAF, éléments qui n'auraient été connus que de son cogérant, M. Z... ; qu'en faisant droit à de tels arguments, la cour d'appel, qui est partie du postulat qu'un dirigeant pourrait s'abstenir de s'informer par lui-même de la situation financière de son entreprise, a violé l'article L. 223-18 du code de commerce ;
Mais attendu que l'article L. 632-2 du code de commerce, rendu applicable à la liquidation judiciaire par l'article L. 641-14, alinéa 1er, du même code, subordonne l'annulation d'un paiement pour dettes échues reçu en période suspecte à la connaissance personnelle par son bénéficiaire de la cessation des paiements du débiteur, sans que cette connaissance résulte nécessairement, lorsque celui-ci est une personne morale, de la qualité de dirigeant du bénéficiaire ; qu'ayant relevé que, bien qu'il ait été cogérant de la société BBS, M. X..., qui exploitait personnellement un salon de coiffure à Lyon, n'était pas présent à Nîmes, seul M. Z..., autre cogérant, ayant la gestion du salon exploité en ce lieu, que MM. X... et Z... étaient en conflit et que, sans être contesté, M. X... faisait valoir qu'en raison de ce conflit et de son absence, il n'était pas informé du rejet de chèques et du non-paiement de cotisations sociales, la cour d'appel a pu, dans l'exercice de son pouvoir souverain d'appréciation et par une décision motivée, estimer que M. X... n'avait pas connaissance de l'état de cessation des paiements de la société BBS au moment du remboursement de son compte courant ; que le moyen n'est pas fondé ;
Et sur le second moyen :
Attendu que le liquidateur fait le même grief à l'arrêt en ce qui concerne M. Y..., alors, selon le moyen, qu'en présence de remboursements de comptes courants scellant le départ concomitant de deux associés, la connaissance par l'un d'eux de l'état de cessation des paiements de la société ne peut être appréciée sans prendre en compte la connaissance dont dispose l'autre associé de la situation de la société ; qu'en appréciant la connaissance par M. Y... de l'état de cessation des paiements de la SARL BBS en prenant en compte sa seule qualité d'associé, cependant que, du fait de la concomitance des deux opérations, la connaissance par M. Y... de l'état de cessation des paiements de la SARL BBS ne pouvait être appréciée sans prendre en compte celle dont disposait M. X..., associé et gérant de la société, la cour d'appel a violé l'article L. 632-2 du code de commerce ;
Mais attendu que la connaissance de l'état de cessation des paiements exigée par l'article L. 632-2 du code de commerce est personnelle à chaque bénéficiaire d'un paiement annulable ; que, dans l'exercice de son pouvoir souverain, la cour d'appel n'était, dès lors, pas tenue, même en présence de paiements concomitants, d'apprécier la connaissance par M. Y... de l'état de cessation des paiements de la société BBS en fonction de celle que pouvait en avoir M. X... et qu'elle a, au surplus, écartée ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. A..., en sa qualité de liquidateur judiciaire de la société BBS, aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf novembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyens produits par la SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin, avocat aux Conseils, pour M. A...

PREMIER MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Maître A... de sa demande tendant à voir prononcer la nullité du paiement reçu le 23 mars 2005 par M. X... en remboursement de son compte courant d'associé et à voir condamner, en conséquence, M. X... à la restitution de la somme de 24.700 ¿ en principal augmenté des intérêts au taux légal jusqu'au complet paiement ;
Aux motifs propres que « le jugement d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la SARL BBS a été prononcé le 24 janvier 2006 par le tribunal de commerce de Nîmes ; qu'il s'ensuite que les dispositions légales applicables à cette procédure collective sont celles issues de la loi n°2005-845 du 26 juillet 2005, entrée en vigueur le 1er janvier 2006 ; qu'en conséquence l'action en annulation des paiements de dettes échues effectués par la SARL BBS durant la période suspecte, engagée par Me Bernard A..., agissant en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de cette société, est donc fondée sur les dispositions de l'article L. 632-2 du code de commerce, dès lors qu'il n'invoque plus par ailleurs l'existence d'une dation en paiement mais seulement le remboursement par la société des comptes courants d'associés de MM. X... et Y..., le 23 mars 2005 ; qu'aux termes de ces dispositions, les paiements pour dettes échues effectués à compter de la date de cessation des paiements peuvent être annulés si ceux qui ont traité avec le débiteur ont eu connaissance de la cessation des paiements ; qu'en l'espèce la date de cessation des paiements a été fixée provisoirement par le tribunal de commerce de Nîmes dans son jugement d'ouverture de la procédure collective susvisé à la date du 25 juillet 2004, soit 18 mois avant sa décision ; que cette décision fixant la date de la cessation des paiements n'a pas été contestée par la SARL BBS, débiteur, ni par M. Jean-Jacques X..., par l'exercice d'une tierce opposition ; qu'il est de principe en ce cas, ainsi que l'a rappelé la chambre commerciale de la Cour de cassation dans son arrêt du 13 février 2007, que ce dernier ne peut donc plus la contester ; qu'il s'ensuit que le remboursement du solde créditeur de son compte courant d'associé, ainsi que de celui de M. Jean-Luc Y..., intervenu le 23 mars 2005 respectivement pour les sommes de 29.700 ¿ et de 5.300 ¿ constitue un paiement de dettes échues par la SARL BBS, alors en cessation des paiements depuis le 25 juillet 2004 ; que le liquidateur judiciaire soutient que les deux associés, MM. X... et Y..., connaissaient l'état de cessation des paiements à cette date, ce qui justifie l'annulation de ces paiements et la restitution des sommes à la SARL BBS, en liquidation judiciaire ; qu'en effet, il est de principe que c'est au jour du paiement de la dette échue dont la nullité est recherchée que doit être appréciée la connaissance qu'avait le créancier payé de l'état de cessation des paiements de son débiteur ; qu'à l'égard de M. Y..., qui avait seulement la qualité d'associé à hauteur de 250 des 750 parts sociales lorsqu'il a obtenu le remboursement par la SARL BBS du solde créditeur de son compte courant d'associé à hauteur de la somme de 5.300 ¿, Me A..., ès qualités, invoque le fait qu'il avait accepté, par acte sous seing privé en date du 17 décembre 2004, de céder ses parts sociales sous conditions suspensives à M. Pascal Z..., co-gérant avec M. X... pour un prix symbolique de 1¿ et la décharge de ses engagements de cautionnement solidaire envers cette société, souscrits lors de la conclusion d'un prêt professionnel le 16 septembre 2004 avec M. X... à hauteur de la somme de 116.000 ¿, sans prévoir une clause de garantie de passif ; qu'il soutient que, comme M. X..., M. Y... avait connaissance de la situation nette négative de la SARL BBS résultant du dernier bilan, arrêté au 31 août 2004, dont il ressortait que les capitaux propres étaient négatifs de 39.974 ¿ ; qu'il en tire qu'il avait aussi connaissance de l'état de cessation des paiements, qui avait donné lieu à la fin de l'année 2004 à des rejets de chèques sans provision et à des impayés de cotisations à l'URSSAF du Gard ; qu'il ressort de ces seuls éléments que M. Y..., simple associé, connaissait certainement la situation déficitaire de la SARL BBS et qu'il était désireux de ne plus conserver la qualité d'associé et de caution solidaire de cette société ; mais que la cession pour un prix symbolique de ses parts sociales correspond à la valorisation de cette société, créée seulement depuis le 29 avril 2003 et dont les capitaux propres étaient négatifs à hauteur de 39.974 ¿, qui ne réalisait pas de bénéfices et qui nécessitait une recapitalisation importante pour poursuivre son activité, ce qui était justement prévu dans l'acte sous-seing privé du 17 décembre 2004 ; que dans cet acte, le troisième associé égalitaire en parts sociales, M. Pascal Z..., co-gérant avec M. X... de la SARL BBS, s'engageait en effet à obtenir un financement supplémentaire de 40.000 ¿ et déposer une somme de 7.000 ¿ sur le compte bancaire de la société ; que dans l'acte réitéré et modifié de cession des parts sociales établi le 21 mars 2005, c'est à Mme Delphine B... que M. Y... a finalement cédé ses 250 parts sociales, cette nouvelle associée, devenue ensuite gérante apportant par ailleurs une somme de 49.500 ¿ à la SARL BBS le 17 mars 2005, qui a permis le remboursement des comptes courants d'associés sans mettre à découvert le compte courant de la société à la Banque Populaire du Midi (pièce n°4), demeurant créditeur de la somme de 8.716,03 ¿ le 25 mars 2005 ; qu'il ne résulte pas des éléments susvisés la preuve que M. Jean-Luc Y..., dont rien n'établit qu'il a eu personnellement connaissance des incidents de paiement des chèques ou des impayés des cotisations URSSAF depuis le 2ème trimestre 2004, avait connaissance de l'état de cessation des paiements de la SARL BBS lorsqu'il a reçu le paiement du solde créditeur de son compte courant d'associé, le 23 mars 2005 ; qu'il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Me A..., ès qualités, de son action en annulation de ce paiement et de sa demande de restitution par M. Y... de la somme de 5.300 ¿ ; qu'en ce qui concerne M. X..., celui-ci a cédé, pour le même prix symbolique de 1¿, 100 de ses parts sociales à Mlle B... et les 150 autres parts sociales à M. PASCAL Z..., obtenant par ailleurs la décharge de ses engagements de caution solidaire le 16 mars 2005, puis le remboursement du solde créditeur de son compte courant d'associé le 23 mars 2005, à hauteur de la somme de 29.700 ¿ ; que M. X... soutient qu'il n'a jamais eu connaissance des avis de rejet des chèques sans provision en novembre et décembre 2004 qui sont versés aux débats, précisant que M. Pascal Z... était cogérant avec lui de la SARL BBS et était le seul présent à l'adresse de la société à Nîmes, lui-même exploitant un salon de coiffure à Lyon, ce qui n'est pas particulièrement contesté en fait ; qu'il conteste également avoir eu connaissance des impayés des cotisations URSSAF depuis le 2ème trimestre de l'année 2004 et au début de l'année 2005, relevant selon lui de la gestion directe de M. Pascal Z... avec lequel il était en conflit, ce dernier ayant usé de procédé qu'il considérait comme de la concurrence déloyale envers la SARL BBS en ouvrant un salon de coiffure à proximité immédiate ; qu'en l'état des éléments susvisés il n'est pas rapporté la preuve que M. Jean-Jacques X..., nonobstant sa qualité de co-gérant de la SARL BBS, a personnellement eu connaissance de l'état de cessation des paiements de cette société lorsqu'il a reçu le paiement de la somme de 29.700 ¿ au titre du solde créditeur de son compte courant d'associé le 23 mars 2005 ; qu'il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Me A..., ès qualités, de son action en annulation de ce paiement et de sa demande de restitution par M. X... de la somme de 24.700 ¿ » (arrêt p. 4-6) ;
Et aux motifs éventuellement adoptés des premiers juges que « l'article L. 632-2 du code de commerce prévoit une nullité facultative pour certains actes passés en cours de période suspecte ; que toutefois, cette cause de nullité est subordonnée à la connaissance par la personne ayant traité avec le débiteur de l'état de cessation des paiements de celui-ci ; qu'en l'espèce, il n'est nullement démontré que M. X... avait connaissance de l'état de cessation des paiements de la société BBS ; qu'en effet, ce dernier avait cédé ses parts sociales détenues au sein du débiteur principal ; que M. X... pouvait légitimement croire que M. Z..., assisté de son conseil, avait pu exécuter ses engagements, à savoir l'obtention d'un financement de 40.000 ¿ et l'apport en trésorerie de la somme de 7.000 ¿ ; que ces deux éléments constituaient une condition suspensive à la réalisation de l'acte ; que dans ses conclusions, Maître A... indique également que le 21 mars 2005 les conditions suspensives étaient considérées comme acquises ; que dès lors il n'est nullement démontré par le requérant la connaissance de l'état de cessation des paiements du débiteur au jour du paiement en argent intervenu » (jugement p. 6-7) ;
1) Alors que le dirigeant d'une société est réputé connaître l'état de cessation des paiements de la société ; qu'ainsi, l'annulation du paiement d'une dette échue survenu en période suspecte n'est pas subordonné à la preuve d'une connaissance personnelle par le bénéficiaire du paiement de l'état de cessation des paiements lorsque le bénéficiaire du paiement n'est autre que le dirigeant de la société ; qu'au cas présent, pour débouter Maître A..., ès-qualités, de sa demande d'annulation du remboursement de compte courant d'associé de M. X..., gérant de la SARL BBS, la cour d'appel a affirmé qu'il n'était pas prouvé que M. X... aurait eu personnellement connaissance de l'état de cessation des paiements de la société au jour du remboursement de son compte courant d'associé ; qu'en exigeant ainsi une preuve non nécessaire en raison de la qualité de dirigeant de M. X..., la cour d'appel a violé l'article L. 632-2 du code de commerce ;
2) Alors subsidiairement que le paiement d'une dette échue survenu en période suspecte encourt l'annulation lorsque son bénéficiaire savait ou aurait dû savoir que la société était en état de cessation des paiements ; qu'au cas présent, il ressort des propres constatations de l'arrêt attaqué que M. X... était gérant de la SARL BBS et que la société était, depuis le mois d'août 2004 dans une situation déficitaire qui avait donné lieu à des rejets de chèques sans provision ; qu'en déboutant Maître A..., ès-qualités, de sa demande d'annulation du remboursement du compte courant de M. X... au motif qu'il n'était pas établi que M. X... aurait eu connaissance de l'état de cessation des paiements de la société lors du remboursement de son compte courant, cependant qu'elle devait rechercher si, au regard de ces éléments, M. X..., en sa qualité de dirigeant, n'aurait pas dû savoir que la société était en état de cessation de paiements, ce qui suffisait à prononcer l'annulation du remboursement de son compte courant, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 632-2 du code de commerce ;
3) Alors que le dirigeant d'une société doit, en toutes circonstances, s'informer personnellement et directement de la situation financière de son entreprise ; qu'au cas présent, pour considérer que la connaissance par M. X..., gérant de la SARL BBS, de l'état de cessation des paiements de la SARL BBS n'était pas établie, la cour d'appel a relevé que M. X... soutenait qu'il n'aurait pas eu connaissance des rejets de chèque sans provision et d'impayés de cotisations URSSAF, éléments qui n'auraient été connus que de son co-gérant, M. Z... ; qu'en faisant droit à de tels arguments, la cour d'appel, qui est partie du postulat qu'un dirigeant pourrait s'abstenir de s'informer par lui-même de la situation financière de son entreprise, a violé l'article L. 223-18 du code de commerce.
SECOND MOYEN DE CASSATION :

Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir débouté Maître A... de sa demande tendant à voir prononcer la nullité du paiement reçu le 23 mars 2005 par M. Y... en remboursement de son compte courant d'associé et à voir condamner, en conséquence M. Y... à la restitution de la somme de 5.300 ¿ en principal augmenté des intérêts au taux légal jusqu'au complet paiement ;
Aux motifs propres que « le jugement d'ouverture de la procédure de liquidation judiciaire de la SARL BBS a été prononcé le 24 janvier 2006 par le tribunal de commerce de Nîmes ; qu'il s'ensuite que les dispositions légales applicables à cette procédure collective sont celles issues de la loi n°2005-845 du 26 juillet 2005, entrée en vigueur le 1er janvier 2006 ; qu'en conséquence l'action en annulation des paiements de dettes échues effectués par la SARL BBS durant la période suspecte, engagée par Me Bernard A..., agissant en sa qualité de mandataire liquidateur judiciaire de cette société, est donc fondée sur les dispositions de l'article L. 632-2 du code de commerce, dès lors qu'il n'invoque plus par ailleurs l'existence d'une dation en paiement mais seulement le remboursement par la société des comptes courants d'associés de MM. X... et Y..., le 23 mars 2005 ; qu'aux termes de ces dispositions, les paiements pour dettes échues effectués à compter de la date de cessation des paiements peuvent être annulés si ceux qui ont traité avec le débiteur ont eu connaissance de la cessation des paiements ; qu'en l'espèce la date de cessation des paiements a été fixée provisoirement par le tribunal de commerce de Nîmes dans son jugement d'ouverture de la procédure collective susvisé à la date du 25 juillet 2004, soit 18 mois avant sa décision ; que cette décision fixant la date de la cessation des paiements n'a pas été contestée par la SARL BBS, débiteur, ni par M. Jean-Jacques X..., par l'exercice d'une tierce opposition ; qu'il est de principe en ce cas, ainsi que l'a rappelé la chambre commerciale de la Cour de cassation dans son arrêt du 13 février 2007, que ce dernier ne peut donc plus la contester ; qu'il s'ensuit que le remboursement du solde créditeur de son compte courant d'associé, ainsi que de celui de M. Jean-Luc Y..., intervenu le 23 mars 2005 respectivement pour les sommes de 29.700 ¿ et de 5.300 ¿ constitue un paiement de dettes échues par la SARL BBS, alors en cessation des paiements depuis le 25 juillet 2004 ; que le liquidateur judiciaire soutient que les deux associés, MM. X... et Y..., connaissaient l'état de cessation des paiements à cette date, ce qui justifie l'annulation de ces paiements et la restitution des sommes à la SARL BBS, en liquidation judiciaire ; qu'en effet, il est de principe que c'est au jour du paiement de la dette échue dont la nullité est recherchée que doit être appréciée la connaissance qu'avait le créancier payé de l'état de cessation des paiements de son débiteur ; qu'à l'égard de M. Y..., qui avait seulement la qualité d'associé à hauteur de 250 des 750 parts sociales lorsqu'il a obtenu le remboursement par la SARL BBS du solde créditeur de son compte courant d'associé à hauteur de la somme de 5.300 ¿, Me A..., ès qualités, invoque le fait qu'il avait accepté, par acte sous seing privé en date du 17 décembre 2004, de céder ses parts sociales sous conditions suspensives à M. Pascal Z..., co-gérant avec M. X... pour un prix symbolique de 1¿ et la décharge de ses engagements de cautionnement solidaire envers cette société, souscrits lors de la conclusion d'un prêt professionnel le 16 septembre 2004 avec M. X... à hauteur de la somme de 116.000 ¿, sans prévoir une clause de garantie de passif ; qu'il soutient que, comme M. X..., M. Y... avait connaissance de la situation nette négative de la SARL BBS résultant du dernier bilan, arrêté au 31 août 2004, dont il ressortait que les capitaux propres étaient négatifs de 39.974 ¿ ; qu'il en tire qu'il avait aussi connaissance de l'état de cessation des paiements, qui avait donné lieu à la fin de l'année 2004 à des rejets de chèques sans provision et à des impayés de cotisations à l'URSSAF du Gard ; qu'il ressort de ces seuls éléments que M. Y..., simple associé, connaissait certainement la situation déficitaire de la SARL BBS et qu'il était désireux de ne plus conserver la qualité d'associé et de caution solidaire de cette société ; mais que la cession pour un prix symbolique de ses parts sociales correspond à la valorisation de cette société, créée seulement depuis le 29 avril 2003 et dont les capitaux propres étaient négatifs à hauteur de 39.974 ¿, qui ne réalisait pas de bénéfices et qui nécessitait une recapitalisation importante pour poursuivre son activité, ce qui était justement prévu dans l'acte sous-seing privé du 17 décembre 2004 ; que dans cet acte, le troisième associé égalitaire en parts sociales, M. Pascal Z..., co-gérant avec M. X... de la SARL BBS, s'engageait en effet à obtenir un financement supplémentaire de 40.000 ¿ et déposer une somme de 7.000 ¿ sur le compte bancaire de la société ; que dans l'acte réitéré et modifié de cession des parts sociales établi le 21 mars 2005, c'est à Mme Delphine B... que M. Y... a finalement cédé ses 250 parts sociales, cette nouvelle associée, devenue ensuite gérante apportant par ailleurs une somme de 49.500 ¿ à la SARL BBS le 17 mars 2005, qui a permis le remboursement des comptes courants d'associés sans mettre à découvert le compte courant de la société à la Banque Populaire du Midi (pièce n°4), demeurant créditeur de la somme de 8.716,03 ¿ le 25 mars 2005 ; qu'il ne résulte pas des éléments susvisés la preuve que M. Jean-Luc Y..., dont rien n'établit qu'il a eu personnellement connaissance des incidents de paiement des chèques ou des impayés des cotisations URSSAF depuis le 2ème trimestre 2004, avait connaissance de l'état de cessation des paiements de la SARL BBS lorsqu'il a reçu le paiement du solde créditeur de son compte courant d'associé, le 23 mars 2005 ; qu'il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Me A..., ès qualités, de son action en annulation de ce paiement et de sa demande de restitution par M. Y... de la somme de 5.300 ¿ ; qu'en ce qui concerne M. X..., celui-ci a cédé, pour le même prix symbolique de 1¿, 100 de ses parts sociales à Mlle B... et les 150 autres parts sociales à M. PASCAL Z..., obtenant par ailleurs la décharge de ses engagements de caution solidaire le 16 mars 2005, puis le remboursement du solde créditeur de son compte courant d'associé le 23 mars 2005, à hauteur de la somme de 29.700 ¿ ; que M. X... soutient qu'il n'a jamais eu connaissance des avis de rejet des chèques sans provision en novembre et décembre 2004 qui sont versés aux débats, précisant que M. Pascal Z... était cogérant avec lui de la SARL BBS et était le seul présent à l'adresse de la société à Nîmes, lui-même exploitant un salon de coiffure à Lyon, ce qui n'est pas particulièrement contesté en fait ; qu'il conteste également avoir eu connaissance des impayés des cotisations URSSAF depuis le 2ème trimestre de l'année 2004 et au début de l'année 2005, relevant selon lui de la gestion directe de M. Pascal Z... avec lequel il était en conflit, ce dernier ayant usé de procédé qu'il considérait comme de la concurrence déloyale envers la SARL BBS en ouvrant un salon de coiffure à proximité immédiate ; qu'en l'état des éléments susvisés il n'est pas rapporté la preuve que M. Jean-Jacques X..., nonobstant sa qualité de co-gérant de la SARL BBS, a personnellement eu connaissance de l'état de cessation des paiements de cette société lorsqu'il a reçu le paiement de la somme de 29.700 ¿ au titre du solde créditeur de son compte courant d'associé le 23 mars 2005 ; qu'il convient donc de confirmer le jugement déféré en ce qu'il a débouté Me A..., ès qualités, de son action en annulation de ce paiement et de sa demande de restitution par M. X... de la somme de 24.700 ¿ » (arrêt p. 4-6) ;
Alors qu'en présence de remboursements de comptes courants scellant le départ concomitant de deux associés, la connaissance par l'un d'eux de l'état de cessation des paiements de la société ne peut être appréciée sans prendre en compte la connaissance dont dispose l'autre associé de la situation de la société ; qu'en appréciant la connaissance par M. Y... de l'état de cessation des paiements de la SARL BBS en prenant en compte sa seule qualité d'associé, cependant que, du fait de la concomitance des deux opérations, la connaissance par M. Y... de l'état de cessation des paiements de la SARL BBS ne pouvait être appréciée sans prendre en compte celle dont disposait M. X..., associé et gérant de la société, la cour d'appel a violé l'article L. 632-2 du code de commerce.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-25925
Date de la décision : 19/11/2013
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Redressement judiciaire - Nullité des actes de la période suspecte - Nullité facultative - Actes à titre onéreux - Conditions - Connaissance personnelle de la cessation des paiements - Preuve - Appréciation souveraine

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 26 juillet 2005) - Redressement judiciaire - Nullité des actes de la période suspecte - Nullité facultative - Actes à titre onéreux - Conditions - Connaissance personnelle de la cessation des paiements - Moment - Date du paiement annulable

Une cour d'appel peut estimer, par une appréciation souveraine des circonstances, que le dirigeant d'une société débitrice ne connaissait pas personnellement l'existence de l'état de cessation des paiements de celle-ci au sens de l'article L. 632-2, alinéa 1er, du code de commerce, lorsqu'il a bénéficié de la part de cette société d'un paiement annulable sur le fondement de ce texte


Références :

article L. 632-2, alinéa 1er, du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Nîmes, 31 mai 2012


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 19 nov. 2013, pourvoi n°12-25925, Bull. civ. 2013, IV, n° 169
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, IV, n° 169

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Avocat général : M. Le Mesle (premier avocat général)
Rapporteur ?: M. Rémery
Avocat(s) : SCP Nicolaÿ, de Lanouvelle et Hannotin

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.25925
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award