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22/10/2013 | FRANCE | N°12-19500

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 22 octobre 2013, 12-19500


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Vista automobiles que sur le pourvoi incident relevé par la société JP Froment ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte du 10 avril 2006, la société JP Froment, concessionnaire Fiat, a conclu avec la société Vista automobiles un contrat « Atelier agréé Fiat VP » permettant à cette dernière de s'approvisionner en pièces de rechange et d'assurer la vente de véhicules neufs ; qu'invoquant une rupture brutale des relations commercial

es, la société Vista automobiles a fait assigner la société JP Froment en pai...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société Vista automobiles que sur le pourvoi incident relevé par la société JP Froment ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que par acte du 10 avril 2006, la société JP Froment, concessionnaire Fiat, a conclu avec la société Vista automobiles un contrat « Atelier agréé Fiat VP » permettant à cette dernière de s'approvisionner en pièces de rechange et d'assurer la vente de véhicules neufs ; qu'invoquant une rupture brutale des relations commerciales, la société Vista automobiles a fait assigner la société JP Froment en paiement de dommages-intérêts ; que soutenant que la société Vista automobiles avait pris l'initiative de mettre fin au contrat liant les parties, la société JP Froment a conclu au rejet de ses demandes et sollicité reconventionnellement sa condamnation au paiement d'une indemnité calculée en fonction du délai de préavis contractuel ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident, qui est préalable :
Attendu que la société JP Froment fait grief à l'arrêt d'avoir limité à la somme de 39 196 euros la condamnation de la société Vista automobiles prononcée à son profit, alors, selon le moyen :
1°/ que les juges ne peuvent porter atteinte à la force obligatoire des conventions ; qu'ils ne peuvent écarter le préavis stipulé au contrat en raison de la brièveté de la relation commerciale existant entre les parties ; que la société JP Froment sollicitait dans ses écritures d'appel l'application du délai de préavis contractuel de vingt-quatre mois fixé par l'article 7.2 du contrat « Atelier Agréé Fiat VP » conclu avec la société Vista automobiles le 10 avril 2006 ; qu'en énonçant, pour limiter la durée du préavis à six mois, durée doublée à un an au motif que le contrat portait sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, qu'« un préavis de vingt-quatre mois était trop long eu égard à la faible ancienneté des relations commerciales établies entre la SA JP Froment et la SARL Vista automobiles (moins de vingt mois) », la cour d'appel, qui a ouvertement méconnu la loi des parties, a violé l'article 1134 du code civil ;
2°/ que les juges ne peuvent méconnaître la loi des parties ; que l'article 7.2 du contrat stipule que « chaque partie peut résilier le présent contrat, à tout moment, en notifiant à l'autre un préavis de vingt-quatre mois, par lettre recommandée avec avis de réception, cette résiliation prenant effet le dernier jour du vingt-quatrième mois à compter de la première présentation de la lettre de résiliation » ; qu'en énonçant par motifs éventuellement adoptés des premiers juges, pour refuser d'appliquer le préavis contractuel de vingt-quatre mois prévu par l'article 7.2 du contrat, qu'il pouvait être reproché à la société JP Froment de ne pas avoir mis en oeuvre les conditions formelles d'application de l'article 7.2, et qu'ainsi cette dernière ne pouvait se prévaloir de dispositions qu'elle n'avait pas souhaité ou voulu mettre en oeuvre, alors qu'il résulte des termes clairs et précis de cette stipulation que c'est à l'auteur de la résiliation d'adresser un courrier de résiliation par lettre recommandée avec avis de réception propre à faire courir le délai de vingt-quatre mois et que l'arrêt relève que la résiliation du contrat avait été décidée unilatéralement par la société Vista automobiles le 1er décembre 2007, la cour d'appel, qui ne pouvait refuser de faire application du préavis contractuel de vingt-quatre mois prévu à l'article 7.2 du contrat et invoqué par la société JP Froment, a méconnu la loi des parties en violation de l'article 1134 du code civil ;
3°/ que toute obligation est nulle lorsqu'elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s'oblige ; que la société JP Froment faisait valoir dans ses écritures qu'il ne pouvait lui être reproché de ne pas avoir mis en oeuvre l'article 7.2 du contrat prévoyant, en cas de résiliation du contrat, un délai de préavis de vingt-quatre mois suivant l'envoi, par l'auteur de la résiliation, d'un courrier de résiliation par lettre recommandée avec avis de réception, dès lors qu'elle n'avait jamais eu l'intention de rompre le contrat, mais au contraire de le poursuivre ; qu'en énonçant par motifs éventuellement adoptés des premiers juges, pour refuser d'appliquer le préavis contractuel de vingt-quatre mois sollicité par la société JP Froment, que cette dernière n'avait pas mis en oeuvre les conditions formelles de résiliation prévues à l'article 7.2, et qu'ainsi elle ne pouvait se prévaloir de dispositions qu'elle n'avait pas souhaité ou voulu mettre en oeuvre, alors qu'il n'était qu'au pouvoir discrétionnaire de la partie résiliant le contrat, à savoir la société Vista automobiles, de respecter ces conditions formelles et donc de faire courir le délai de préavis contractuel, la cour d'appel, qui a subordonné l'application du préavis contractuel de vingt-quatre mois au respect d'une condition purement potestative par la société Vista automobiles, a violé l'article 1174 du code civil ;
Mais attendu que l'existence d'un délai de préavis contractuel ne dispense pas la juridiction d'examiner si ce délai de préavis tient compte de la durée de la relation commerciale et d'autres circonstances au moment de la notification de la rupture ; qu'ayant constaté la faible ancienneté des relations commerciales établies entre les sociétés JP Froment et Vista automobiles, et relevé que les travaux d'aménagement du magasin de cette dernière n'avaient pas été engagés au profit de la société JP Froment, la cour d'appel, qui n'a pas adopté les motifs des premiers juges critiqués par les deuxième et troisième branches, a pu limiter à une durée de six mois le préavis raisonnable auquel la société JP Froment pouvait prétendre ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu l'article 16 du code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner la société Vista automobiles à payer à la société JP Froment une certaine somme correspondant à la perte de marge subie par cette dernière pendant un an, l'arrêt retient que le préavis raisonnable auquel la société JP Froment pouvait prétendre aurait dû être de six mois, soit un an en vertu de l'article L. 442-6 I 5° du code de commerce, qui dispose que lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur ;
Attendu qu'en statuant ainsi, sans inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen qu'elle relevait d'office, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
Rejette le pourvoi incident ;
Et sur le pourvoi principal,
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a confirmé le jugement du tribunal de commerce de Troyes ayant condamné la société Vista automobiles à payer à la société JP Froment la somme de 39 196 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi, l'arrêt rendu le 13 mars 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Reims, autrement composée ;
Condamne la société JP Froment aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette sa demande et la condamne à payer la somme de 3 000 euros à la société Vista automobiles ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux octobre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :


Moyen produit par la SCP Ortscheidt, avocat aux Conseils, pour la société Vista automobiles, demanderesse au pourvoi principal
Il est fait grief à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné la société VISTA Automobiles à payer à la société JP FROMENT une somme de 39.196 ¿ à titre de dommages et intérêts ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE la SARL VISTA AUTOMOBILES fonde son action sur l'article 1134 du code civil, dont les premier et troisième alinéa disposent que "les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites" et "doivent être exécutées de bonne foi" ; qu'en effet, il ne s'agit pas, l'appelante, de faire sanctionner la cessation abusive de simples relations commerciales ou d'affaires - qui, d'ailleurs, n'étaient pas spécialement anciennes -, mais l'abus de la résiliation d'un contrat caractérisé par la façon déloyale dont, selon elle, cette dernière a été mise en oeuvre ; que l'intimée s'oppose à cette action, en invoquant principalement, le courrier électronique que lui a adressé le gérant de la société appelante le 1er décembre 2007, ainsi libellé : "(...), les conflits ne m'intéressent (...). Je prends donc la décision d'arrêter notre collaboration sur la vente VN et je te donnerai ma position sur les pièces détachées dans le premier trimestre 2008, tes vendeurs peuvent venir récupérer les véhicules Flat quand ils le désirent."; que l'appelante soutient que ce courriel "visait expressément à faire réagir la SA FROMENT au regard de cette situation, particulièrement intolérable sur le plan contractuel et source d'une insécurité juridique (...), et ce dans l'unique objectif de solutionner au mieux cette situation'' ; qu'elle reproche à l'intimée d'avoir invoqué "une prétendue résiliation des relations contractuelles" en "jouant notamment sur les termes de e-mail du 1er décembre précité dont elle faisait une interprétation erronée de circonstance" alors que son gérant "n'avait d'autre alternative que de tenter de la faire réagir dans un objectif synergique mutuel" ; que la SARL VISTA AUTOMOBILES donne ainsi une interprétation toute personnelle de son courriel du 1er décembre 2007, alors que celui-ci, en raison même de la particulière clarté de ses termes, dépourvus de toute ambiguïté, n'en nécessitait aucune ; qu'elle ne conteste pas, en l'état de ses écritures, son absence de commande de véhicules neufs après cette date et son défaut d'approvisionnement en pièces détachées après mars 2008, mais prétend que, "sur le plan juridique, il ne saurait pourtant être tiré une quelconque conséquence d'un défaut de commande ou d'approvisionnement", alors que ces faits, avérés, corroborent sa décision, affirmée dans son courriel du l' décembre 2007, de résilier le contrat qui la liait à la SA JP FROMENT ; que la SARL VISTA AUTOMOBILES ne peut pas davantage sérieusement reprocher à sa cocontractante d'avoir repris possession des trois véhicules mis à sa disposition et de l'avoir mise ainsi "dans l'impossibilité absolue d'exercer en sa qualité d'agent agréé", alors qu'elle l'y avait expressément autorisée par ledit courriel ; que, s'agissant de l'obligation de déposer les enseignes FIAT de son magasin, qui lui a été notifiée tant par la SA JP FROMENT que par la SA FIAT FRANCE, respectivement par lettres recommandées avec demande d'avis de réception datées des 23 janvier 2009 et 25 mars 2009, la société appelante ne saurait se plaindre de "représailles", alors que cette obligation découle des termes du contrat qui liait les parties, lequel stipule qu'à "l'expiration du présent contrat, l'Atelier Agréé FIAT VP devra (...) déposer, à ses propres frais (...), les panonceaux FIAT" ; qu'au vu des observations qui précèdent, que le jugement déféré sera confirmé en ce qu'il a constaté que la société VISTA AUTOMOBILES est à l'initiative de la rupture du contrat Atelier Agréé FIAT \P et. en conséquence, débouté ladite société de l'intégralité de ses demandes ; que l'intimée invoque, au soutien de sa demande reconventionnelle en dommages-intérêts l'article L.442-6- I du Code de commerce, lequel dispose : "Engage la responsabilité de son auteur et l'oblige à réparer le préjudice causé le fait, par tout producteur, commerçant, industriel ou personne immatriculée au répertoire des métiers : (...) ; 5° De rompre brutalement, même partiellement, une relation commerciale établie, sans préavis écrit tenant compte de la durée de la relation commerciale et respectant la durée minimale de préavis déterminée, en référence aux usages du commerce, par des accords interprofessionnels. Lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur. A défaut de tels accords, des arrêtés du ministre chargé de l'économie peuvent, pour chaque catégorie de produits, fixer, en tenant compte des usages du commerce, un délai minimum de préavis et encadrer les conditions de rupture des relations commerciales, notamment en fonction de leur durée. Les dispositions qui précèdent ne font pas obstacle à la faculté de résiliation sans préavis, en cas d'inexécution par l'autre partie de ses obligations ou en cas de force majeure ; (...)." qu'entre dans le champ d'application de ce texte toute relation commerciale établie, que celle-ci porte sur la fourniture d'un produit ou d'une prestation de service ; que tel est le cas de la relation commerciale entre la SA JP FROMENT et la SARL VISTA AUTOMOBILES, matérialisée par un contrat "Atelier Agréé FIAT VP" conclu le 10 avril 2006 ; que l'article 7.2 dudit contrat stipule que "chaque partie peut résilier le présent contrat, à tout moment, en notifiant à l'autre un préavis de vingt-quatre mois, par lettre recommandée avec avis de réception, cette résiliation prenant effet le dernier jour du vingt- quatrième mois à compter de la première présentation de la lettre de résiliation" ; que la SARL VISTA AUTOMOBILES n'a respecté ni le formalisme imposé pour la résiliation de cette convention, ni la durée du préavis prévue par celle-ci ; que toutefois, un préavis de vingt-quatre mois était trop long eu égard à la faible ancienneté des relations commerciales établies entre la SA JP FROMENT et la SARL VISTA AUTOMOBILES (moins de vingt mois), étant, par ailleurs, observé, d'une part, que les travaux d'aménagement de son magasin invoqués par cette dernière société ne peuvent être considérés comme ayant été exécutés pour satisfaire la première citée, dès lors qu'il résulte des productions que lesdits travaux ont fait l'objet d'une facture établie le 06 décembre 2007 (pièce n°10 de l'appelante), soit après l'envoi du courriel du 1er décembre 2007 ci-dessus évoqué, et, d'autre part, que l'appelante est concessionnaire KIA pour le département de la Marne ; que le préavis raisonnable auquel la SA JP FROMENT aurait pu prétendre aurait dû être de six mois, soit un an en vertu de l'article L. 442-6- 15° du Code de commerce, qui édicte que "lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur" ; que n'ayant pas respecté un tel délai, la SARL VISTA AUTOMOBILES a ainsi commis une faute dans la rupture de ses relations commerciales avec la SA JP FROMENT, dont elle doit réparation à cette dernière ; que, n'ayant observé aucun préavis, la SARL VISTA AUTOMOB ILES doit indemniser la SA JP FROMENT de la perte de marge subie par celle-ci sur un an, soit 39 196 ¿ ainsi que l'a jugé le tribunal ; que la décision entreprise sera donc confirmée en ce qu'elle a condamné la SARL VISTA AUTOMOBILES à payer une somme de 39 196 à la SA JP FROMENT à titre de dommages et intérêts en réparation du préjudice subi ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QU'il est établi que la Sté VISTA. AUTOMOBILES a cessé de s'approvisionner auprès de la Sté dès le 1er décembre 2007-sans aucun préavis- pour les véhicules neufs, et à compter d'avril 2008 pour les pièces détachées ; que le Tribunal jugera fondée la demande de réparation de la Sté JP FROMENT ; que selon l'attestation établie par Monsieur Eric MAERTE, commissaire aux compte de la SA JP FROMENT, la marge moyenne annuelle réalisée avec la Sté VISTA AUTOMOBILES entre 2005 et 2007 ressort à 39196 ¿ ; (¿) ; que le tribunal fixera l'indemnité à un an de marge moyenne, correspondant à l'exercice 2008 durant lequel la rupture brutal de relation de al Sté VISTA AUTOMOBILES s'est pleinement concrétisée ;
1°) ALORS QUE le juge doit, en toutes circonstances, respecter le principe de la contradiction ; qu'en fixant la durée du préavis à douze mois, motif pris que le préavis raisonnable auquel la société JP FROMENT aurait pu prétendre aurait dû être de six mois et donc « d'un an en application de l'article L.442-6 I V du code de commerce, qui prévoit que lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la durée minimale de préavis est double de celle qui serait applicable si le produit n'était pas fourni sous marque de distributeur », sans inviter les parties à s'expliquer sur ce moyen qu'elle soulevait d'office, la cour d'appel a violé l'article 16 du code de procédure civile ;
2°) ALORS QU'en décidant que la durée du préavis devait être fixée à un an, motif pris qu'en application de l'article L.442-6 I V du code de commerce, la durée minimale de préavis est double lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, alors qu'il n'était pas soutenu que les produits étaient vendus sous marque de distributeur, la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QUE qu'en cas de rupture d'une relation commerciale établie la durée minimale de préavis n'est doublée que lorsque la relation commerciale porte sur la fourniture de produits sous marque de distributeur ; qu'en estimant qu'il convenait de doubler la durée du préavis de six mois auquel la société JP FROMENT aurait pu prétendre, après avoir pourtant constaté que la société VISTA Automobiles s'approvisionnait en pièces de rechange et véhicules neufs Fiat auprès de la société JP FROMENT, ce dont il résulte que la relation commerciale ne portait pas sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, la cour d'appel a violé, par fausse application, l'article L.442-6 I 5° du code de commerce ;
4°) ALORS, SUBSIDIAIREMENT, QU'en fixant le montant des dommages et intérêts accordés à la société JP FROMENT à hauteur de la perte de marché subie par celle-ci sur la durée d'un an, sans caractériser précisément le préjudice subi par celle-ci, résultant de la rupture de la relation commerciale, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard de l'article L.442-6 I 5° du code de commerce. Moyen produit par la SCP Fabiani et Luc-Thaler, avocat aux Conseils, pour la société JP Froment, demanderesse au pourvoi incident
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir limité à la somme de 39.196 euros la condamnation de la Société VISTA AUTOMOBILES prononcée au profit de la Société JP FROMENT ;
Aux motifs que « l'article 7.2 dudit contrat stipule que "chaque partie peut résilier le présent contrat, à tout moment, en notifiant à l'autre un préavis de vingt-quatre mois, par lettre recommandée avec avis de réception, cette résiliation prenant effet le dernier jour du vingt-quatrième mois à compter de la première présentation de la lettre de résiliation" ; que la SARL VISTA AUTOMOBILES n'a respecté ni le formalisme imposé pour la résiliation de cette convention, ni la durée du préavis prévue par celle-ci ; que toutefois, un préavis de vingt-quatre mois était trop long eu égard à la faible ancienneté des relations commerciales établies entre la SA JP FROMENT et la SARL VISTA AUTOMOBILES (moins de vingt mois), étant, par ailleurs, observé, d'une part, que les travaux d'aménagement de son magasin invoqués par cette dernière société ne peuvent être considérés comme ayant été exécutés pour satisfaire la première citée, dès lors qu'il résulte des productions que lesdits travaux ont fait l'objet d'une facture établie le 06 décembre 2007 (pièce n° 10 de l'appelante), soit après l'envoi du courriel du 1er décembre 2007 ci-dessus évoqué, et, d'autre part, que l'appelante est concessionnaire KIA pour le département de la Marne » ;
Et aux motifs éventuellement adoptés des premiers juges qu' « il est incontestable que les conditions formelles de résiliation prévues à l'article 7-2 du contrat n'ont pas été appliquées, qu'en l'espèce, ce constat peut être imputé à chacune des parties ; qu'en conséquence, le Tribunal dira qu'a contrario, aucune des parties ne pourra se prévaloir des dispositions conventionnelles de résiliation stipulées à l'article 7.2, notamment le préavis de 24 mois ; (¿) que la Société JP FROMENT estime son indemnité à 24 mois de marge moyenne (soit 78 392 ¿), ce à titre reconventionnel, en compensation du préavis dont elle aurait dû bénéficier dans les conditions prévues à l'article 7-2 du contrat d'Atelier Agréé FIAT VN ; mais que - comme exposé supra - la Société JP FROMENT est mal fondée à se prévaloir de dispositions qu'elle n'a pas souhaité ou voulu mettre en oeuvre, le Tribunal fixera l'indemnité à un an de marge moyenne, correspondant à l'exercice 2008 durant lequel la rupture brutale de la relation de la Société VISTA AUTOMOBILES s'est pleinement concrétisée » ;
Alors que, de première part, les juges ne peuvent porter atteinte à la force obligatoire des conventions ; qu'ils ne peuvent écarter le préavis contractuel stipulé au contrat en raison de la brièveté de la relation commerciale existant entre les parties ; que la Société JP FROMENT sollicitait dans ses écritures d'appel l'application du délai de préavis contractuel de 24 mois fixé par l'article 7.2 du "Atelier Agréé FIAT VP" conclu avec la Société VISTA AUTOMOBILES le 10 avril 2006 ; qu'en énonçant, pour limiter la durée du préavis à six mois, durée doublée à un an au motif que le contrat portait sur la fourniture de produits sous marque de distributeur, qu' « un préavis de vingt-quatre mois était trop long eu égard à la faible ancienneté des relations commerciales établies entre la SA JP FROMENT et la SARL VISTA AUTOMOBILES (moins de vingt mois) », la Cour d'appel, qui a ouvertement méconnu la loi des parties, a violé l'article 1134 du Code civil ;
Alors que, de deuxième part, les juges ne peuvent méconnaître la loi des parties ; que l'article 7.2 du contrat stipule que « chaque partie peut résilier le présent contrat, à tout moment, en notifiant à l'autre un préavis de vingt-quatre mois, par lettre recommandée avec avis de réception, cette résiliation prenant effet le dernier jour du vingt-quatrième mois à compter de la première présentation de la lettre de résiliation » ; qu'en énonçant par motifs éventuellement adoptés des premiers juges, pour refuser d'appliquer le préavis contractuel de 24 mois prévu par l'article 7.2 du contrat, qu'il pouvait être reproché à la Société JP FROMENT de ne pas avoir mis en oeuvre les conditions formelles d'application de l'article 7.2, et qu'ainsi cette dernière ne pouvait se prévaloir de dispositions qu'elle n'avait pas souhaité ou voulu mettre en oeuvre, alors qu'il résulte des termes clairs et précis de cette stipulation que c'est à l'auteur de la résiliation d'adresser un courrier de résiliation par lettre recommandée avec avis de réception propre à faire courir le délai de 24 mois et que l'arrêt relève que la résiliation du contrat avait été décidée unilatéralement par la Société VISTA AUTOMOBILES le 1er décembre 2007, la Cour d'appel, qui ne pouvait refuser de faire application du préavis contractuel de 24 mois prévu à l'article 7.2 du contrat et invoqué par la Société JP FROMENT, a méconnu la loi des parties en violation de l'article 1134 du Code civil ;
Alors que, de troisième part, toute obligation est nulle lorsqu'elle a été contractée sous une condition potestative de la part de celui qui s'oblige ; que la Société JP FROMENT faisait valoir dans ses écritures qu'il ne pouvait lui être reproché de ne pas avoir mis en oeuvre l'article 7.2 du contrat prévoyant, en cas de résiliation du contrat, un délai de préavis de 24 mois suivant l'envoi, par l'auteur de la résiliation, d'un courrier de résiliation par lettre recommandée avec avis de réception, dès lors qu'elle n'avait jamais eu l'intention de rompre le contrat, mais au contraire de le poursuivre ; qu'en énonçant par motifs éventuellement adoptés des premiers juges, pour refuser d'appliquer le préavis contractuel de 24 mois sollicité par la Société JP FROMENT, que cette dernière n'avait pas mis en oeuvre les conditions formelles de résiliation prévues à l'article 7.2, et qu'ainsi elle ne pouvait se prévaloir de dispositions qu'elle n'avait pas souhaité ou voulu mettre en oeuvre, alors qu'il n'était qu'au pouvoir discrétionnaire de la partie résiliant le contrat, à savoir la Société VISTA AUTOMOBILES, de respecter ces conditions formelles et donc de faire courir le délai de préavis contractuel, la Cour d'appel, qui a subordonné l'application du préavis contractuel de 24 mois au respect d'une condition purement potestative pour la Société VISTA AUTOMOBILES, a violé l'article 1174 du Code civil.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 12-19500
Date de la décision : 22/10/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

CONCURRENCE - Transparence et pratiques restrictives - Rupture brutale des relations commerciales - Préavis - Délai - Eléments d'appréciation - Délai de préavis contractuel - Adéquation à la durée de la relation commerciale et aux autres circonstances - Examen nécessaire

CONCURRENCE - Transparence et pratiques restrictives - Rupture brutale des relations commerciales - Préavis - Délai - Moment d'appréciation - Notification de la rupture CONCURRENCE - Transparence et pratiques restrictives - Rupture brutale des relations commerciales - Préavis - Délai - Eléments d'appréciation - Délai de préavis contractuel - Limitation par le juge - Constatations suffisantes

L'existence d'un délai de préavis contractuel ne dispense pas la juridiction d'examiner si ce délai de préavis tient compte de la durée de la relation commerciale et d'autres circonstances au moment de la notification de la rupture. Une cour d'appel peut ainsi limiter le préavis raisonnable auquel une société peut prétendre, nonobstant l'existence d'un préavis contractuel plus long, après avoir constaté la faible ancienneté des relations commerciales établies entre les parties et relevé que les travaux d'aménagement entrepris par l'une des parties n'avaient pas été engagés au profit de l'autre


Références :

article 1134 du code civil

article L. 442-6, I, 5°, du code de commerce

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims, 13 mars 2012

Sur l'office du juge en matière de préavis, à rapprocher : Com., 3 mai 2012, pourvoi n° 11-10544, Bull. 2012, IV, n° 85 (rejet)

arrêt cité


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 22 oct. 2013, pourvoi n°12-19500, Bull. civ. 2013, IV, n° 156
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, IV, n° 156

Composition du Tribunal
Président : M. Espel
Rapporteur ?: M. Fédou
Avocat(s) : SCP Fabiani et Luc-Thaler, SCP Ortscheidt

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.19500
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