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25/09/2013 | FRANCE | N°12-26041

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 1, 25 septembre 2013, 12-26041


LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... et M. Y..., se sont mariés successivement, le 2 juillet 2001 en Algérie et le 9 avril 2005 en France ; que M. Y... s'est marié le 30 mars 1998 avec Mme Z..., dont il a divorcé le 26 mars 2002 ; que, saisi par le procureur de la République en annulation du mariage du 9 avril 2005 pour bigamie, et à titre reconventionnel, par Mme X... en annulation du mariage du 2 juillet 2001, le tribunal de grande instance a accueilli ces demandes ;
Sur le moyen unique du pour

voi incident, pris en ses deux branches, ci-après annexé :
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LA COUR DE CASSATION, PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué, que Mme X... et M. Y..., se sont mariés successivement, le 2 juillet 2001 en Algérie et le 9 avril 2005 en France ; que M. Y... s'est marié le 30 mars 1998 avec Mme Z..., dont il a divorcé le 26 mars 2002 ; que, saisi par le procureur de la République en annulation du mariage du 9 avril 2005 pour bigamie, et à titre reconventionnel, par Mme X... en annulation du mariage du 2 juillet 2001, le tribunal de grande instance a accueilli ces demandes ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en ses deux branches, ci-après annexé :
Attendu que ce moyen n'est pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en sa première branche :
Vu les articles 147 et 189 du code civil ;
Attendu que pour prononcer la nullité du mariage du 9 avril 2005 entre Mme X... et M. Y..., l'arrêt retient que si le prononcé de la nullité du mariage du 2 juillet 2001 le fait disparaître rétroactivement, la validité du mariage du 9 avril 2005 doit s'apprécier au jour de sa célébration ;
Qu'en statuant ainsi, alors que la nullité du premier mariage entraînant sa disparition rétroactive, le second mariage célébré entre les mêmes personnes ne peut être annulé du chef de bigamie, quand bien même la nullité du premier serait prononcée après la célébration du second, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, sans qu'il y ait lieu de statuer sur la seconde branche du moyen du pourvoi principal :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a prononcé la nullité du mariage célébré le 9 avril 2005 entre Mme X... et M. Y..., l'arrêt rendu le 21 juin 2012, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-cinq septembre deux mille treize.

MOYENS ANNEXES au présent arrêt :

.
Moyen produit AU POURVOI PRINCIPAL par la SCP Bénabent et Jéhannin, avocat aux Conseils, pour Mme X....
Il est fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir confirmé le jugement en ce qu'il avait prononcé la nullité du mariage contracté le 9 avril 2005 au CHESNAY par Monsieur Mohamed-Nadir Y... et Madame Hadjillah X... ;
AUX MOTIFS QUE « Hadjillah X... se prévaut des dispositions de l'article 189 du Code civil aux termes duquel si les nouveaux époux opposent la nullité du premier mariage, la validité ou la nullité de ce mariage doit être jugée préalablement ; mais que si le prononcé de la nullité fait disparaître rétroactivement le mariage célébré le 2 juillet 2001, la validité du second mariage doit s'apprécier au jour de sa célébration, soit le 9 avril 2005 ; qu'à cette date, Mohamed-Nadir Y... et Hadjillah X... se trouvaient en état de bigamie, le mariage célébré le 2 juillet 2001 n'étant pas dissout ; que la circonstance que le premier mariage ait été contracté entre les mêmes personnes est inopérante ; que le jugement entrepris sera également confirmé en ce qu'il a prononcé la nullité du mariage contracté le 9 avril 2005 au Chesnay (78) » ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES QU'« il y a lieu de constater que les deux défendeurs étaient en état de bigamie lors de la conclusion de leur second mariage, l'article 147 du Code civil précisant que l'on ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier ; que la défenderesse ne peut faire valoir la nullité du mariage précédent dans la mesure où ladite nullité n'est prononcée que ce jour par la présente décision ; qu'en conséquence, il y a lieu de prononcer la nullité du mariage contracté le 9 avril 2005 par Monsieur Mohamed-Nadir Y... et Madame Hadjillah X... au CHESNAY (78) » ;
1/ ALORS QUE la nullité du mariage produit effet rétroactif ; que si un premier mariage est annulé, il est réputé n'avoir jamais existé, de sorte que le second mariage conclu entre les mêmes personnes est valable, peu important que l'annulation du premier mariage soit prononcée après la célébration du second ; qu'en l'espèce, la Cour d'appel a annulé le mariage célébré le 2 juillet 2001 en relevant qu'à la date de sa conclusion, Monsieur Y... était en état de bigamie, son précédent mariage avec Madame Z... n'ayant pas encore été dissout par divorce ; que le mariage du 2 juillet 2001 étant réputé n'avoir jamais existé, le mariage de Monsieur Y... et de Madame X... célébré le 9 avril 2005 n'était pas nul pour cause de bigamie ; qu'en prononçant pourtant la nullité du mariage contracté le 9 avril 2005 en relevant que « la validité du second mariage doit s'apprécier au jour de sa célébration, soit le 9 avril 2005 » (arrêt, p. 4, alinéa 1er), cependant que le premier mariage ayant été annulé, serait-ce après la célébration du second, la dernière union était parfaitement valable, la Cour d'appel a violé l'article 147 du Code civil, ensemble l'article 189 du même Code ;
2/ ALORS ET SUBSIDIAIREMENT QUE le second mariage conclu entre les mêmes époux avant la dissolution du premier n'est pas nul pour cause de bigamie, celle-ci impliquant la pluralité de conjoints ; qu'en l'espèce, et même à admettre que la validité du mariage célébré le 9 avril 2005 devait être appréciée au jour de sa formation sans tenir compte de l'annulation ultérieure du mariage conclu le 2 juillet 2001, il n'en demeure pas moins que ces deux mariages avaient été conclus entre les mêmes époux, de sorte que l'annulation du second mariage ne pouvait être prononcée pour cause de bigamie ; qu'en décidant pourtant, pour prononcer la nullité du mariage célébré le 9 avril 2005, que « la circonstance que le premier mariage ait été contracté entre les mêmes personnes est inopérante » (arrêt, p. 4, alinéa 2), la Cour d'appel a violé par fausse application l'article 147 du Code civil.
Moyen produit AU POURVOI INCIDENT par Me Foussard, avocat aux Conseils, pour M. Y....
L'arrêt attaqué encourt la censure ;
EN CE QU'il a considéré comme recevable et accueilli comme fondée la demande visant à l'annulation du mariage contracté en Algérie le 2 juillet 2001, et annulé ce mariage ;
AUX MOTIFS PROPRES QU'« il ressort de la copie de l'acte de naissance de Mohamed-Nadir Y... qu'il acquis la nationalité français le 7 septembre 1999 ; que les conditions de validité de son mariage sont donc régies par la loi française ; que le 2 juillet 2001, date à laquelle Mohamed-Nadir Y... et Hadjillah X... ont contracté mariage, celui-ci se trouvait encore dans les liens de son mariage avec Annie Z... qui n'a été dissous qu'ensuite du jugement du 26 mars 2002 prononçant le divorce, si le mariage célébré le 2 juillet 2001 a été dissous par jugement prononcé le 16 mars 2009 par le tribunal de Bir-Mourad-Rais, décision confirmée le 22 décembre 2009 par la cour d'Alger, l'état de bigamie, contraire à l'ordre public français, entraîne la nullité de l'union contractée en violation de ces règles de forme, qui ne peut être régularisée a posteriori par le divorce, Mohamed-Nadir Y... ne peut donc opposer l'irrecevabilité de la demande en nullité formée par Hadjillah X... au motif que ce ménage a été dissous postérieurement, il s'ensuit que le jugement entrepris doit être confirmé en ce qu'il a prononcé l'annulation du mariage contracté le 2 juillet 2001, en application des dispositions de-l'article 147 du Code civil » ;
AUX MOTIFS ADOPTES QUE « Sur la demande d'annulation du mariage contracté le 2 juillet 2001 entre Monsieur Mohamed-Nadir Y... et Madame Hadjillah X... ; que Madame Hadjillah X... sollicite à titre reconventionnel l'annulation du premier mariage litigieux, que pour une meilleure compréhension de l'affaire, cette demande reconventionnelle sera examinée préalablement à la demande principale, dans le respect de l'ordre chronologique des faits ; que la demande de Madame Hadjillah X... visant à l'annulation du mariage contracté en Algérie est recevable, celle-ci se rattachant par un lien suffisant à la demande principale ; qu'il est constant que Monsieur Mohamed-Nadir Y... a contracté mariage avec Madame Annie Z... le 30 mars 1998 à ANTONY (92) et qu'il a acquis la nationalité française le 7 septembre 1999 ; qu'en conséquence, lors de son premier mariage avec Madame Hadjillah X... ¿ deuxième mariage en ce qui le concerne), il était de nationalité française, de sorte que la validité du mariage contracté le 2 juillet 2001 en ALGERIE doit être examinée au regard de la loi française ; qu'à la date d 2 juillet 2001, Monsieur Mohamed-Nadir Y... était encore dans les liens du mariage avec Madame Annie Z... (dont il a divorcé plus tard, à savoir le 26 mars 2002), de sorte qu'il est devenu bigame ; que la bigamie, contraire à l'ordre public français, justifie l'annulation du mariage contracté le 2 juillet 2001 en Algérie » (jugement p. 4) ;
ALORS QUE, premièrement, lorsque le juge prend une décision dans le cadre d'une première instance, qui postule la validité d'un acte, il est exclu que l'une des parties puisse, ultérieurement, engager une autre procédure pour faire statuer sur la nullité de cet acte ; que la solution doit être retenue, non seulement lorsque la première décision est rendue par une juridiction française, mais également lorsque, rendue par une juridiction étrangère, elle produit de plans ses effets ; qu'en l'espèce, il est expressément constaté que le mariage célébré le 2 juillet 2001 a été dissout par un jugement du 16 mars 2009, confirmé par un arrêt du 22 décembre 2009, lesquels ont prononcé le divorce ; qu'en considérant recevable la demande dirigée contre le mariage célébré en Algérie le 2 juillet 2001, les juges du fond ont violé les articles 480 du code de procédure civile et 1351 du code civil ;
ALORS QUE, deuxièmement le prononcé du divorce résultant des décisions algériennes faisant obstacle à ce que le mariage dissout par divorce puisse faire l'objet d'une action en nullité, l'arrêt a été, en tout état de cause, rendu en violation du principe suivant lequel une décision de justice ayant été précédemment rendue pour faire produire effet à un acte, une action ultérieure en nullité de cet acte est exclu.


Synthèse
Formation : Chambre civile 1
Numéro d'arrêt : 12-26041
Date de la décision : 25/09/2013
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

MARIAGE - Nullité - Bigamie - Domaine d'application - Exclusion - Cas - Nullité du premier mariage - Rétroactivité - Portée

La nullité du premier mariage entraînant sa disparition rétroactive, le second mariage célébré entre les mêmes personnes ne peut être annulé du chef de bigamie, quand bien même la nullité du premier serait prononcée après la célébration du second


Références :

articles 147 et 189 du code civil

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles, 21 juin 2012

Sur la portée de l'annulation rétroactive du premier mariage quant au sort de l'action en nullité du second mariage pour bigamie, à rapprocher :1re Civ., 26 octobre 2011, pourvoi n° 10-25285, Bull. 2011, I, n° 184 (cassation)


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 1re, 25 sep. 2013, pourvoi n°12-26041, Bull. civ. 2013, I, n° 184
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 2013, I, n° 184

Composition du Tribunal
Président : M. Charruault
Avocat général : M. Jean
Rapporteur ?: Mme Capitaine
Avocat(s) : Me Foussard, SCP Bénabent et Jéhannin

Origine de la décision
Date de l'import : 23/03/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2013:12.26041
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