LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Agen, 19 juin 2012), que M. X..., de nationalité marocaine, est entré en France, le 16 mai 2006, avec son épouse et son fils, Omar, né le 30 avril 2005 ; que la caisse d'allocations familiales du Lot (la caisse) lui ayant refusé le bénéfice de prestations familiales au motif qu'il ne produisait pas le certificat médical délivré par l'Office français de l'immigration et de l'intégration, M. X... a saisi d'un recours une juridiction de sécurité sociale ;
Attendu que la caisse fait grief à l'arrêt de la condamner à la régularisation des prestations familiales à compter du mois de juin 2006 du fait et en faveur de l'enfant Omar, alors, selon le moyen :
1°/ que selon l'article L. 512-2 du code de la sécurité sociale, les étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération helvétique et séjournant régulièrement en France bénéficient des prestations familiales, sous réserve qu'il soit justifié, pour les enfants qui sont à leur charge et au titre desquels les prestations familiales sont demandées, de la régularité de leur séjour, peu important que ce séjour soit ou non consécutif à une procédure de regroupement familial ; qu'en application de l'article D. 512-2, 2°, du même code, la régularité de l'entrée et du séjour des enfants étrangers que le bénéficiaire a à sa charge est justifiée notamment par la production du certificat de contrôle médical de l'enfant délivré par l'Office français de l'immigration et de l'intégration à l'issue de la procédure d'introduction ou d'admission au séjour au titre du regroupement familial ; qu'en affirmant qu'Omar X... pouvait bénéficier des droits aux prestations familiales à compter du mois de juin 2006 sans constater que le document requis par l'article D. 512-2 justifiant de la régularité de l'entrée et du séjour de cet enfant avait été produit, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
2°/ que les dispositions des articles L. 512-2 et D. 512-2 du code de la sécurité sociale, qui revêtent un caractère objectif justifié par la nécessité dans un Etat démocratique d'exercer un contrôle des conditions d'accueil des enfants, ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale garanti par les articles 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni ne méconnaissent les dispositions de l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant ; qu'en décidant le contraire, pour écarter l'exigence de la production du certificat de contrôle médical prévu par ce texte, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Mais attendu que, selon l'article L. 512-2, alinéa 3, deuxième tiret, du code de la sécurité sociale, les étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération helvétique, titulaires d'un titre exigé d'eux en vertu soit de dispositions législatives ou réglementaires, soit de traités ou accords internationaux pour résider régulièrement en France bénéficient des prestations familiales sous réserve qu'il soit justifié pour leurs enfants qui sont à leur charge et au titre desquels les prestations familiales sont demandées, de leur entrée régulière dans le cadre de la procédure du regroupement familial visée au livre IV du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, selon l'article D. 512-2 du même code, la régularité de l'entrée et du séjour de l'enfant est justifiée dans ce cas par la production du certificat de contrôle médical de l'enfant délivré par l'Office français de l'immigration et de l'intégration à l'issue de la procédure d'introduction ou d'admission au séjour au titre du regroupement familial ;
Et attendu qu'ayant constaté qu'il n'est pas contesté que l'enfant Omar X... est entré régulièrement en France avec ses parents le 16 mai 2006 comme en fait foi l'attestation délivrée par l'autorité préfectorale le 7 juillet 2008, et que ses deux parents bénéficient depuis d'une carte de séjour temporaire, la cour d'appel en a déduit exactement que l'enfant n'étant pas entré en France dans le cadre de la procédure du regroupement familial, M. X... pouvait prétendre au bénéfice des prestations familiales du chef de celui-ci sans avoir à produire le certificat de contrôle médical délivré par l'Office français de l'immigration et de l'intégration ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la caisse d'allocations familiales du Lot aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, condamne la caisse d'allocations familiales du Lot au paiement d'une somme de 3 000 euros à Me Copper-Royer ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du dix-neuf septembre deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Odent et Poulet, avocat aux Conseils pour la caisse d'allocations familiales du Lot
II est fait grief à l'arrêt attaqué D'AVOIR confirmé le jugement qui avait condamné la CAF du Lot à régulariser sans délai les droits aux prestations familiales à compter du mois de juin 2006 du fait et en faveur de l'enfant Omar X... ;
AUX MOTIFS PROPRES OU'il n'est pas contesté que l'enfant Omar X... est entré régulièrement en France avec ses parents le 16 mai 2006, comme en atteste l'attestation délivrée par l'autorité préfectorale le 7 juillet 2008 ; que ses deux parents bénéficient depuis d'une carte de séjour temporaire ;
Que si, selon l'article L. 512-2, les étrangers bénéficient des prestations familiales sous réserve qu'il soit justifié, pour les enfants qui sont à leur charge et au titre desquels les prestations familiales sont demandées, notamment de leur entrée régulière dans le cadre de la procédure de regroupement familial visé au livre IV du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il est constant que l'enfant Omar X..., entré en France en même temps que ses parents, n'a pu bénéficier de la procédure de regroupement familial ;
Que dès lors, alors qu'il est justifié que l'enfant est entré régulièrement en France avec sa mère sous le couvert d'un visa délivré en Italie par les autorités consulaires portant la mention « +X», le rejet de son droit à ouverture des prestations familiales constitue, comme l'a justement considéré le Premier juge, une discrimination fondée sur l'origine nationale contraire aux articles 8 et 14 de la Convention européenne des droits de l'homme ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES OU'au regard des éléments versés aux débats il résulte que l'enfant Omar X... est entré sur le territoire français avec ses deux parents et non dans le cadre d'une procédure de regroupement familial ;
Que ce point est parfaitement confirmé par les services préfectoraux comme cela résulte de l'attestation délivrée le 7 juillet 2008 par le préfet du Lot selon laquelle « le mineur, X... Omar, né le 30 avril 2005 à BOLLATE (Italie), est entré sur le territoire français le 16 mai 2006 en même temps que ses parents : M. X... Kamal et Mme Y... Hakima » ;
Que, dans un courrier daté du 17 septembre 2008, les services préfectoraux ont d'ailleurs confirmé que la législation sur le regroupement familial n'était pas applicable au cas d'espèce ;
Que c'est donc de façon parfaitement erronée que la CAF du Lot entend appliquer à la situation de l'enfant Omar X... la législation sur le regroupement familial ;
Qu'en persévérant dans cette voie, la CAF a laissé perdurer une discrimination, notamment entre les deux enfants de la même fratrie, qui doit être sanctionnée au visa des articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
1°/ ALORS QUE selon l'article L. 512-2 du code de la sécurité sociale, les étrangers non ressortissants d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un Etat partie à l'accord sur l'espace économique européen ou de la Confédération helvétique et séjournant régulièrement en France bénéficient des prestations familiales, sous réserve qu'il soit justifié, pour les enfants qui sont à leur charge et au titre desquels les prestations familiales sont demandées, de la régularité de leur séjour, peu important que ce séjour soit ou non consécutif à une procédure de regroupement familial ; qu'en application de l'article D. 512-2, 2° du même code, la régularité de l'entrée et du séjour des enfants étrangers que le bénéficiaire a à sa charge est justifiée notamment par la production du certificat de contrôle médical de l'enfant délivré par l'Office français d'immigration et d'intégration à l'issue de la procédure d'introduction ou d'admission au séjour au titre du regroupement familial ; qu'en affirmant que Omar X... pouvait bénéficier des droits aux prestations familiales à compter du mois de juin 2006 sans constater que le document requis par l'article D. 512-2 justifiant de la régularité de l'entrée et du séjour de cet enfant avait été produit, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
2°/ ALORS QUE les dispositions des articles L. 512-2 et D. 512-2 du code de la sécurité sociale, qui revêtent un caractère objectif justifié par la nécessité dans un Etat démocratique d'exercer un contrôle des conditions d'accueil des enfants, ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit à la vie familiale garanti par les articles 8 et 14 de la CEDH, ni ne méconnaissent les dispositions de l'article 3-1 de la Convention internationale des droits de l'enfant ; qu'en décidant le contraire, pour écarter l'exigence de la production du certificat de contrôle médical prévu par ce texte, la cour d'appel a violé les textes susvisés, ensemble les articles 8 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.